Cour d'appel de Versailles, 19 janvier 2016, n° 14/04383

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 19 janv. 2016, n° 14/04383
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/04383
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt, 3 septembre 2014, N° 11/01885

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 JANVIER 2016

R.G. N° 14/04383

AFFAIRE :

C X

C/

Me K G J – Mandataire liquidateur de la SARL A B

UNEDIC AGS CGEA IDF OUEST

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Septembre 2014 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : Encadrement

N° RG : 11/01885

Copies exécutoires délivrées à :

Me Cécilia ARANDEL

Me Emmanuel ESCARD DE ROMANOVSKY

SCP HADENGUE ET ASSOCIES

Copies certifiées conformes délivrées à :

C X

Me K G J – Mandataire liquidateur de la SARL A B

UNEDIC AGS CGEA IDF OUEST

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur C X

XXX

XXX

Comparant

Assisté de Me Cyrille FRANCO, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Cécilia ARANDEL, avocat au même barreau

APPELANT

****************

Me G J K – Mandataire liquidateur de la SARL A B

XXX

XXX

Représenté par Me Murielle GANDIN, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Emmanuel ESCARD DE ROMANOVSKY, avocat au même barreau de PARIS

UNEDIC AGS CGEA IDF OUEST

XXX

XXX

Représentée par Me Séverine MAUSSION pour la SCP HADENGUE et Associés, avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 octobre 2015, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Catherine BÉZIO, président, et Madame Sylvie BORREL-ABENSUR, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BÉZIO, président,

Madame Sylvie FÉTIZON, conseiller,

Madame Sylvie BORREL-ABENSUR, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,

EXPOSE DU LITIGE

La société A B, créée en 2003 exerce l’activité de conseil auprès d’entreprises dans l’élaboration et la mise en oeuvre de leur stratégie de croissance par l’innovation technologique, et a également constitué un laboratoire de recherche.

Elle est elle même associée majoritaire de quatre sociétés : La SARL GEENOV (laboratoire de recherche), la SARL TIME DATA ZONE (start up), la SARL EXPLORALE (laboratoire de recherche) et la SCI LAIZER REAL ESTATE (propriétaire des locaux communs aux entreprises du E). En 2010 les sociétés ARTIMIA (gestion de grands comptes pour les jeunes entreprises innovantes) et SAS E A (holding chargée de gérer le volet administratif des sociétés du E) sont créées.

Monsieur X a été embauché par la société A B suivant un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chercheur-conseil, position 2.1 à compter du 10 septembre 2007. En dernier lieu, il percevait une rémunération mensuelle moyenne brute de 4 112,26 € comprenant une part fixe et une part variable en fonction de l’atteinte d’objectifs déterminés. Il était soumis à une convention de forfait annuel en jours.

La convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils, société de conseils dite «'SYNTEC'», ainsi que l’accord de branche du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, sont applicables.

En 2011, l’ensemble des sociétés du E se sont réorganisées, envisageant des suppressions de postes dans les sociétés A E et E A, seuls employeurs du E.

Dans ce contexte, les délégués du personnel de la société A B ont été consultés le 20 juillet 2011 sur un projet de licenciement collectif pour motif économique et ont rendu un avis défavorable.

Le 27 juillet 2011, Monsieur X a été convoqué à un entretien préalable fixé au 23 août 2011, au cours duquel il lui a été proposé d’adhérer à une CRP. Le même jour, il lui a été proposé par écrit deux postes de consultants au sein de la société ARTIMIA.

Il a refusé les postes mais a accepté d’adhérer à la CRP le 5 septembre 2011. La société A B a constaté la rupture du contrat de travail pour motifs économique par courrier remis en main propre contre décharge le 13 septembre 2011.

La société A B et l’ensemble des sociétés du E se sont déclarées en cessation des paiements auprès du tribunal de commerce de NANTERRE le 2 octobre 2012. Le 11 octobre 2012, suivant plusieurs jugements, le tribunal de commerce de NANTERRE a ouvert une procédure de liquidation à l’encontre de l’ensemble des sociétés du E, hormis la SCI REAL ESTATE. Maître G J a été nommé liquidateur judiciaire de l’ensemble des sociétés susvisées.

Le 17 novembre 2011, Monsieur X a saisi le Conseil de Prud’hommes de BOULOGNE-BILLANCOURT aux fins de voir juger à titre principal que son licenciement était dépourvu de motif économique. L’UNEDIC AGS CGEA est intervenante forcée dans la procédure.

Par jugement du 4 septembre 2014, dont Monsieur X a formé appel, le conseil l’a débouté de ses demandes liées au licenciement sans cause réelle et sérieuse, aux motifs que celui-ci reposait bien sur un motif économique, tout en fixant au passif de la liquidation judiciaire de la société A B, la créance de Monsieur X correspondant aux sommes suivantes :

—  647,26 € à titre de primes diverses

—  905,35 € à titre de rappel de salaire au titre du forfait annuel en jours

—  1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions remises et soutenues oralement par les parties à l’audience du 27 octobre 2015 ainsi qu’il suit :

Monsieur X demande la confirmation du jugement du Conseil qui a fixé au passif de la société A B la somme de 647,26 € au titre de primes diverses relatives à sa part de rémunération variable, celle de 905,35 € à titre de rappel de salaire sur le fondement du forfait annuel en jours et celle de 1 000 € au titre de l’article 700 code de procédure civile.

Il demande par ailleurs que soit infirmé le jugement pour le surplus et que soit fixé au passif de la société les sommes suivantes :

Concernant l’exécution du contrat de travail :

—  3 781, 68 € à titre de rappel de jours travaillés au-delà du forfait jours et de jours de repos ainsi que 20 524,51 € à titre de rappel de primes diverses.

Monsieur X estime d’une part, que le nombre de jours travaillés, au titre du forfait jours prévus par son contrat de travail (226 jours), excédait le nombre de jours travaillés maximum prévu par par l’accord «'SYNTEC'» (219 jours), et demande un rappel de salaire en conséquence. Par ailleurs, suite à un accord collectif d’entreprise signé en 2011, réduisant le temps de travail par l’attribution de jours de repos sur l’année, il affirme, après déduction de ses absences, ne pas avoir reçu son solde de tout compte concernant le nombre de jours de repos qu’il avait acquis, au moment de la rupture de son contrat de travail.

—  5 904,07 € à titre de rappel de salaires au titre de la classification conventionnelle. Monsieur X soutient avoir était maintenu par la société A B à la position conventionnelle 2.1, alors qu’il aurait du être rattaché à la catégorie 3.1 à compter du mois de novembre 2009 où il a commencé a exercer les fonctions de chef de projet, sur le projet de recherche «'KOp Times'».

Concernant la rupture du contrat de travail :

—  32 898,08 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l’absence de notification du motif économique du licenciement avant l’adhésion à la CRP ou, à titre subsidiaire pour défaut de motif économique, ou non respect de l’obligation de reclassement et des critères d’ordre des licenciements, sollicitant la somme de 9 982,50 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis.

Il soutient qu’il n’a pas été informé du motif de son licenciement avant son acceptation d’adhérer à la CRP, outre que la lettre de licenciement est insuffisamment motivée.

Il reproche à l’employeur l’absence d’offres précises et individualisées de reclassement.

En outre, il sollicite la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 CPC, ainsi que 35 € à titre de remboursement du timbre fiscal.

Il demande également la condamnation de l’AGS-CGEA IDF OUEST à garantir les montants de la décision de condamnation à intervenir, et à verser entre les mains du liquidateur es qualité les sommes que la société ne serait pas en mesure de verser à Monsieur X.

Enfin, il demande d’assortir chaque condamnation prononcée des intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil de Prud’hommes, et de faire remonter l’intérêt légal au jour de l’exigibilité des sommes pour les rattrapages de salaires.

Maître G J es qualité de liquidateur judiciaire de la société A B demande principalement de débouter Monsieur X de toutes ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 code de procédure civile.

A titre subsidiaire, il demande que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soit réduite à son minimum légal, soit la somme de 24 673,56 €, ou de réduire les dommages et intérêts pour non respect des critères de l’ordre des licenciements à de plus justes proportions, et de limiter le montant du rappel de salaire au titre de la classification conventionnelle à la somme de 66,49 € bruts.

Il fait valoir, au titre de l’exécution du contrat de travail, que la convention de forfait en jours de Monsieur X a été respectée, et que ce dernier a reçu l’ensemble des rémunérations auxquelles il avait droit, au titre de sa classification conventionnelle, et de la part variable de sa rémunération.

Au titre de la rupture du contrat de travail, Maître G J es qualité de liquidateur judiciaire soutient qu’elle repose sur une cause réelle et sérieuse, et, à titre subsidiaire, que la société A B a respecté son obligation de reclassement, et qu’elle a fait une juste application des crières de l’ordre des licenciements.

Le centre de Gestion et d’étude AGS d’Ile de France Ouest demande à titre principal de rejeter l’ensemble des demandes du salarié et de le mettre hors de cause s’agissant des frais irrépétibles de la procédure et du timbre fiscal, ou, subsidiairement de limiter à 6 mois de salaires la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et fixer cette éventuelle créance au passif de la société, et dire qu’il ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions des articles L3253-15, L 2353-19 à 21 et L.3253-17 du code du travail, et dire, en tout état de cause que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’exécution du contrat de travail

Sur le rappel de salaires au titre du forfait jours

Aux termes de l’article L.3121-39 du code du travail «'La conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l’année est prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement, ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions'».

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail, ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires, à défaut, toute clause instituant un forfait jours ne satisfaisant pas à ces exigences visant à préserver la santé et la sécurité des salariés est réputée non écrite. Dès lors, les conventions de forfait passées en fonction de cette clause sont nulles, et le salarié est soumis à la durée légale du travail, de 35 heures hebdomadiares.

En l’espèce, en vertu des dispositions de son contrat de travail, Monsieur X était soumis au forfait annuel en jours, en application directe de l’accord de branche «'SYNTEC'» du 22 juin 1999, dès son embauche le 10 septembre 2007. Par ailleurs, un accord collectif d’entreprise signé le 12 mai 2011, avec effet rétroactif au 1er janvier 2011 est venu mettre en place un système de réduction du temps de travail, par l’attribution de jours de repos sur l’année.

Monsieur X affirme avoir travaillé d’une part, pour la période allant de son embauche jusqu’au 31 décembre 2010 au-delà de la limite prévue par l’accord SYNTEC et demande un rappel de salaire en conséquence, et d’autre part, pour la période travaillée entre le 1er janvier 2011 jusqu’à son licenciement, ne pas avoir reçu son solde de tout compte concernant les jours de RTT acquis durant cette période, et non encore utilisés au moment de la rupture de son contrat de travail.

Les jours travaillés au-delà du forfait jusqu’au 31 décembre 2010

Le contrat de travail de Monsieur X stipulait que son temps de travail était organisé dans le cadre d’un forfait jours de 226 jours travaillés. Cependant, l’accord collectif «'SYNTEC'», et plus particulièrement l’accord de branche du 22 juin 1999 précisait que le temps de travail du salarié ne pouvait excéder 219 jours travaillés. Il estime donc avoir travaillé 2,18 jours au-delà de la limite énoncée en 2007, et 7 jours en 2008, 2009 et 2010. Il demande donc la rémunération de ces jours travaillés, majorés de 10 % conformément à l’accord collectif, pour un montant total de 2342,83 €.

Pour s’exonérer de son obligation de paiement des heures de travail convenues dans le cadre du contrat de travail, le liquidateur de la société A ne saurait invoquer, en application de la règle « nemo auditur », la jurisprudence de la Cour de Cassation ayant remis en cause, dans un arrêt du 24 avril 2013, la validité de l’accord «'SYNTEC'» car il n’est pas de nature à garantir une amplitude et une charge de travail raisonnables.

En cas de litige sur le nombre d’heures de travail réellement effectuées, l’employeur doit produire des éléments de preuve pouvant contredire les termes du contrat de travail sur lesquels s’appuient les demandes de Monsieur X ; en l’espèce, il fait état des bulletins de salaire faisant mention d’une durée mensuelle du travail de 151,67 heures, ainsi que d’un courriel rédigé par le supérieur hiérarchique de Monsieur X daté du 25 septembre 2008 rappellant les horaires collectifs de travail, laissant apparaître un temps de travail effectif journalier de 7 heures, soit 35 heures par semaine.

Or ces éléments sont insuffisants, faute d’un système de contrôle des heures de travail.

Dès lors il convient de faire droit aux demandes de Monsieur X d’un montant de 2342,83 €.

Les jours de repos RTT après le 1er janvier 2011

Un accord du 12 mai 2011 intitulé «Accord 'RTT ' Jours non travaillés'», d’application rétroactive au 1er janvier 2011, a mis en place un système de jours de repos au sein de la société A B. Il fixe la durée du travail des salariés soumis à un forfait jours de 218 jours travaillés. Il en résulte qu’au titre de l’année 2011, 229 jours ouvrés pouvaient être travaillés, le forfait étant de 218 jours travaillés, les salariés bénéficiaient de 11 jours de RTT.

L’accord prévoit en outre que chaque salarié devait acquérir 0,50 jours de RTT par mois de présence. Le contrat de travail de Monsieur X a été rompu le 13 septembre 2011. Il a donc travaillé 8 mois et 13 jours (8,43 mois) en 2011 et a ainsi acquis 4,22 jours de RTT (8,43 x 0,5), et non 7,71 comme il le soutient dans ses écritures.

Il a pris 2 jours de RTT en 2011. Il ressort de son bulletin de salaire de septembre 2011 qu’il a reçu, conformément à l’accord du 12 mai 2011 le paiement des jours de repos acquis et non utilisés, correspondant à 2,22 jours.

Monsieur X a donc bien reçu son solde de tout compte concernant ses jours de RTT et n’est pas fondé à soutenir que ces jours de repos non utilisés n’ont pas été entièrement soldés lors de la rupture de son contrat de travail.

En conséquence, la Cour, déboutant partiellement Monsieur X de ses demandes, infirmera le jugement du Conseil.

Sur le rappel des sommes relatives aux primes d’objectifs

L’employeur est tenu de déterminer de manière claire et précise le contenu de la rémunération du salarié et notamment les bases de calcul et les conditions éventuelles de la partie variable de cette rémunération.

Le contrat de travail de Monsieur X précisait que sa rémunération annuelle brute était composée d’une partie fixe s’élevant à la somme de 33 000 €, ainsi que d’une partie variable d’un maximum de 10 000 €, ventilée en quatre primes, pouvant atteindre 2 500 € chacune, et définies tel qu’il suit :

Une prime de «'chiffre d’affaires'» calculée sur les objectifs globaux de l’entreprise.

Une prime «'Alpha'» calculée sur les objectifs de Monsieur X dans le cadre des ses fonctions de conseil.

Une prime «'Beta'», calculée sur ses objectifs en recherche personnelle.

Une prime «'Gama'», calculée sur ses objectifs en recherche appliquée.

A compter du 1er janvier 2010, la partie variable de sa rémunération de Maël X a été porté à 11 500 € bruts, soit 2 875 € bruts pour chacune des quatre primes.

Monsieur X demande des rappels de salaires, tant au titre de la prime «'chiffre d’affaires'», que pour les primes d’Objectifs personnels «'Alpha'», «'Beta'» et «'Gama'».

Sur la prime «'chiffre d’affaires'»

Toute rémunération variable, pour être valable doit notamment être fondée sur des éléments objectifs, indépendants de la volonté de l’employeur. Quels que soient les paramètres de détermination de la rémunération variable, et à moins que le salarié n’est accepté le principe d’une prime discrétionnaire, l’employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base au calcul de son salaire.

En l’espèce, l’article 5.1.1 du contrat de travail de Monsieur X stipulait que «'Si l’entreprise réalise ses objectifs établis par la gérance, le salarié percevra jusqu’à 25 % du bonus (10 000 € puis 11 500 € à compter du 1er janvier 2010)».

Monsieur X soutient que ses objectifs n’ont jamais été fixés par la société, et que, dès lors, il aurait droit à la totalité de cette prime, soit 2 875 € pour 2010 et pour 2011. Conformément à ses bulletins de paie, il a reçu des primes inférieures à ces montants ( 2 132, 29 € en 2010, et 1 394,54 € en 2011). Il sollicite donc un rappel de salaire s’élevant à 742,71 € pour l’année 2010 et 620,13 € (au prorata de son temps de présence dans l’entreprise) pour l’année 2011.

Néanmoins, concernant l’année 2010, Il ressort d’un courriel envoyé à tous les salariés par le responsable administratif et financier E de la société A B le 30 avril 2010, que l’objectif de chiffre d’affaires fixé pour l’année s’élevait à 3 600 000 €. Or, il se trouve que ce résultat n’a pas été atteint, et que le chiffre d’affaires réalisé par la société A B au titre de l’année 2010 concernant ses prestations de consulting s’élevait à 2 670 000 €, soit 74 % de l’objectif initialement fixé. Au titre de la même année, Monsieur X a perçu la somme de 2 132, 29 € au titre de la prime «'chiffre d’affaires'», soit 74 % du montant maximum de la prime prévue dans le contrat de travail, pouvant s’élever à 2'875 €.

En conséquence, la prime perçue par Monsieur X est bien proportionnelle au chiffre d’affaires réalisé par la société A B, en fonction de l’objectif de chiffre d’affaires fixé pour l’année 2010. Monsieur X ne peut donc réclamer de rappel de salaires au titre de l’année 2010.

En revanche, au titre de l’année 2011, la société A B ne rapporte pas la preuve d’avoir fixé un objectif de chiffre d’affaires, devant servir de base au calcul de la prime «'chiffre d’affaires'». Par conséquent, il convient d’accorder à Monsieur X la totalité de la prime prévue dans son contrat de travail, soit 2 875 €, en tenant compte de son temps de présence dans l’année, soit 8,43 mois, selon les calculs suivants :

2 875 x 8,43/12 = 2 019,69 €

2 019,69 ' 1 394, 54 (somme déjà perçue) = 625,15 €

En conséquence la Cour, infirmant le jugement du conseil, allouera à Monsieur Y la somme de 620,13 € qu’il réclame, et non celle de 625,15 €, la Cour ne pouvant statuer au delà de la demande.

Sur les primes personnelles d’objectifs «'Alpha'» «'Beta'» et «'Gama'»

Le contrat de travail de Monsieur X précisait que ce dernier devait préalablement fixer ses propres objectifs pour les trois primes d’objectifs «'Alpha'», «'Beta'» et «'Gama'», devant ensuite faire l’objet d’un avenant au contrat de travail, en accord avec la direction de la société A B.

Monsieur X soutient qu’aucun avenant n’a été proposé ni signé par la direction concernant ces primes. Alors qu’il ressort de ses bulletins de paie qu’il a perçu les sommes de 4 375 € en 2008, 4 500 € en 2009, 5 750 € en 2010 et 338 € en 2011 au titre de ces primes (intitulées globalement prime société sur les bulletins de salaire), il soutient que la totalité des primes prévues par son contrat de travail lui sont dues, soit 7 500 € par an en 2007, 2008 et 2009, et 8 625 € (2 875 x 3) en 2010 et 2011 , ces sommes devant être proratisées à raison de son temps de présence dans l’entreprise pour les années 2007 et 2011.

En premier lieu, Monsieur X ne peut se voir attribuer de prime pour l’année 2007, vu son temps de présence limité à 4 mois et ne permettant pas la fixation d’objectifs.

Pour les années postérieures, il ressort des éléments du débat que Monsieur X n’a pas fixé ses propres objectifs, ce qui constituait, selon son contrat de travail, un préalable nécessaire à la conclusion d’un avenant avec la direction de la société A B, et aucun avenant n’a été conclu. Dans la réalité Monsieur X a perçu des primes au titre des années 2008 à 2011, sans en connaître précisément les critères et les modalités pour chaque année; en effet, c’est l’employeur qui a fixé unilatéralement, sans base de calcul claire et à posteriori lesdits objectifs, comme cela va être développé ci- après pour les années 2008 à 2010, c’est pourquoi il lui sera alloué, au titre des années 2008 à 2010 le montant maximum de la prime, déduction faite des sommes déjà perçues à ce titre pour chaque année.

Pour l’année 2011 les objectifs ont été partiellement fixés de manière claire, ce qui aboutira à une solution différente.

* En effet, concernant l’année 2008, l’employeur ne fournissant aucun élément permettant de déterminer le mode de calcul des «'primes sociétés'» versées à Monsieur X en 2008, il sera alloué à ce dernier la somme de 3125 €, soit 7500 (prime totale) moins 4375 (versement déjà effectué).

* Au titre de l’année 2009, dans un mail du 4 janvier 2010, la direction de la société A B a informé les salariés des éléments pris en compte, et de la méthode de calcul pour déterminer le montant des primes en 2009, en indiquant: «'compte tenu du fait que les protocoles d’évaluation des différentes primes n’étaient pas stabilisés, j’ai réalisé une notation sur l’ensemble des motivations, travaux, résultats et tentatives de chacun. 4 volets ont été traités':

CA 2009, Alpha, Beta et Gama.

CA 2009': Atteinte des objectifs globaux de CA pour GGP-koff. 100% de cette prime a été versé.

Ensuite, j’ai noté pour chacun l’engagement sur le respect des délais et des règles (alpha), la motivation, l’engagement et l’atteinte des règles (alpha,beta et gamma).

Enfin, j’ai pondéré ces notations par un coefficient représentant le respect de la remise des RA hebdomadaires. Ces coefficients vont de 20% à 100%'».

Les termes imprécis et non individualisés de ces critères d’évaluation ne sont objectivés par aucune pièce, de sorte qu’il sera alloué à Monsieur X la somme de 3000 €, soit 7500 (prime totale) moins 4500 (versement déjà effectué).

* En ce qui concerne l’année 2010, il ressort de la lettre en date du 3 janvier 2011 que le gérant indique: «'vos objectifs personnels éventuellemet (alpha, beta et gamma) ont été valorisés comme suit': PRIME x (25 %/3+25 %+0 %)'», alors que ces objectifs n’ont pas été préalablement fixés.

C’est pourquoi, il convient d’allouer à Monsieur X la totalité de la prime pour 2010, soit la somme de 2875 €, soit 8625 (prime totale) moins 5750 (versement déjà effectué).

* L’année 2011 Les objectifs alpha ont été fixés dans un mail du 7 février 2011. La direction indique à Monsieur X:'«'La performance moyenne d’une ressource en gOFS est de 100 Keuros en 70 jours. Dans ces conditions et compte tenu de ton contrat de chercheur-conseil et de tes responsabilités de Z, ton objectif 2011 en Alpha est de': 75 000 € à réaliser en 52,5 jours maximum. Ta performance annuelle sera, en partie, apprécier au regard de l’atteinte de cet objectif. Tu me confirmeras ton accord par retour de message'».

Monsieur X soutient avoir perçu la somme de 338 € au titre de la prime Alpha, ce qui correspond à 11,76 % de l’intégralité de la prime. Or il prétend avoir atteint 19 % des objectifs fixés par la direction, ce qui est corroboré par deux attestations de ses anciens collaborateurs. Alors que les objectifs Beta ont été fixés avec une précision suffisante, Monsieur X soutient en avoir réalisé 60%. En revanche, il peut prétendre à la totalité de la prime Gamma, vu le défaut de fixation des objectifs concernant cette prime, ce qui donne les éléments de calcul suivants :

Prime Alpha': Sur la base de 19% de l’objectif Alpha atteint, et de son temps de présence de 8,43 mois, Il est dû la somme de': (2875x19%) x8,43/12 = 383,74 €.

Ayant déjà perçu la somme de 338 € en 2011 au titre de l’objectif Alpha, il ne peut donc demander que la différence entre 383,74 et 338, soit la somme de 45,74 €.

En revanche, les objectifs beta 2011 de Monsieur X, alors chef du projet de KopTimes ont fait l’objet d’une fixation plus précise dans une note interne qui prévoit': «'En tant que chef de projet, tu animeras, organiseras le travail de chacune des ressources de manière cohérente avec les objectifs techniques et calendaires du projet.

Tu assureras l’intégration dans l’équipe des développeurs dont tu as demandé le recrutement. Pour chacun d’entre eux, et 2 mois après leur date d’embauche respective, tu élaboreras un rapport circonstancié sur leurs capacités techniques et d’intégration dans le projet. Tu te prononceras très clairement, dans des délais compatibles avec la période d’essai, sur l’adéquation entre chacun d’entre eux et un développement harmonieux du projet.

Tu élaboreras en fin d’année 2011 un rapport sur chacun de tes collaborateurs mettant en évidence leurs résultats et leurs performances ainsi que leurs capacités techniques et leur valeur ajoutée dans le projet.

En tant que chef de projet, tu organiseras ton équipe de telle manière que l’objectif de disposer d’une version Alpha des modules Knowledge, Project, Design soit atteint début janvier 2012.

Pour atteindre ces objectifs, tu respecteras les étapes suivantes':

Mai 2011': Avoir fini la modélisation

Fin juillet 2011': Avoir fini la conception des modèles et de l’architecture

Fin novembre 2011': Disposer de la version intermédiaire des modules Knowledge et Project.'».

Sur la base de 60 % de l’objectif Beta atteint, au vu des pièces (26,27, 30 à 32) produites par Monsieur X sur l’avancée du projet KOPtimes, et d’un temps de présence de 8,43 mois, il peut prétendre à la Prime Beta’suivante : (2875 x 60 %) x 8,43/12 =1'211,81 €.

Aucun élément n’est en revanche versé au débat concernant la fixation de l’objectif Gamma, d’où une Prime Gamma’calculée sur la totalité de cette prime, au prorata de son temps de présence dans l’entreprise en 2011 selon les calculs suivants': 2'875 x 8,43/12 = 2 019,69 €.

En conséquence la Cour, infirmant le jugement du Conseil, allouera à Monsieur X au titre de ses demandes de rappel de primes pour les années 2008 à 2011, les sommes respectives de 620,13 € au titre de la prime Chiffre d’Affaires et de 12 277,24 € au titre des primes Alpha- Beta- Gama, soit la somme totale de 12 897,37 €, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de sa convocation en conciliation, soit le 25 novembre 2011.

Sur le rappel de salaire au titre de la classification conventionnelle

Le niveau de classification dont bénéficie chaque salarié est fonction d’une grille établie par la convention collective de branche. Les fonctions réellement exercées par le salarié doivent correspondre à la définition donnée par la convention collective. Si le salarié rapporte la preuve de l’exercice réel de fonctions correspondant à une qualification supérieure, la qualification supérieure doit être retenue, à condition que le salarié justifie de la compétence nécessaire.

La convention collective SYNTEC, applicable à la société A B comporte en Annexe II le tableau des classifications des ingénieurs et cadres.

Ainsi, sont définis comme des salariés classés à la position 2.1 les «'ingénieurs ou cadres ayant au moins 2 ans de pratique dans la profession, des qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maitrise dessinateurs ou employés, travaillant aux même tâches qu’eux, dans les corps d’état étudiés par le bureau d’études'».

Les salariés relevant de la position 3.1 sont les «'ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en 'uvre, non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef'».

Chaque position correspond à un coefficient qui permet de déterminer les salaires minimum de chaque poste, évoluant régulièrement par avenant.

Monsieur X a été embauché par la société A B le 10 septembre 2007 en qualité de chercheur-conseil, à la position 2.1, alors que celui-ci ne remplissait pas toutes les conditions pour y prétendre, étant dépourvu de toute expérience professionnelle. La société A B, qui a souhaité valoriser ses années d’études en ne lui attribuant pas la position 1.2 correspondant au statut débutant, l’a maintenu dans cette position jusqu’à la fin de son contrat.

A compter du mois de novembre 2009, jusqu’à son licenciement le 13 septembre 2011, Monsieur X exerçait les fonctions de «chef de projet'» sur le projet de recherche Kop Times.' Il fait valoir qu’à partir de ce moment, les fonctions qu’il exerçait correspondaient à la classification 3.1 de l’accord SYNTEC, et qu’il devait être rémunéré sur la base d’un montant brut mensuel minimum de 3 236, 80 € jusqu’au 1er décembre 2010 et 3 301,40 € après cette date, et non 2 750 € en 2009, puis 3 025 € correspondant à la classification 2.1.

A partir de septembre 2010, Monsieur X soutient avoir bénéficié d’une grande autonomie et de responsabilités dans l’exercice de ses fonctions. Il fait valoir qu’il assurait la mise en place du projet innovant en collaboration avec quatre ressources, et était également appelé à gérer deux salariés de la startup Time Data Zone et un expert du E PSA. Il devait gérer personnellement la responsabilité des projets qui lui étaient confiés. Concernant le projet Kop Times, il avait la charge de définir le planning, le budget, la gestion des ressources et le recrutement, le suivi opérationnel et le reporting régulier auprès de la direction. Il devait également réaliser des dossiers technico-financiers.

Ces différents éléments sont confirmés par les attestations de cinq anciens salariés de la société A B, ayant collaboré avec Monsieur X.

Il en ressort donc que, conformément à la classification conventionnelle 3.1, Monsieur X mettait en 'uvre des connaissances théoriques mais aussi pratiques, telles que la gestion des ressources, du budget ou encore des recrutements. Par ailleurs, il était placé sous les ordres d’un chef de service envers qui il devait faire des «'reporting réguliers'».

La société A B soutient que Monsieur X n’établit pas les compétences nécessaires à l’attribution des niveaux de qualification dont il réclame le bénéfice, au vu, tant de sa formation que de son parcours profesionnel.

Néanmoins, elle ne fournit aucun élément de preuve permettant de remettre en cause la teneur des attestations des anciens salariés de la société A B.

Par ailleurs, elle fait valoir que Monsieur X pouvait prétendre à des positions conventionnelles intermédiaires entre la position 2.1 et 3.2. elle évoque notamment la position 2.2. Or celle-ci s’applique aux cadres n’exerçant pas de fonction de commandement, contrairement à Monsieur X, qui était amené à gérer deux salariés de la startup Time Data Zone et un expert du E PSA.

La société évoque également la position 2.3, qui ne s’applique pas non plus à Monsieur X puisque celle-ci exige au moins six ans de pratique.

En conséquence, la classification conventionnelle réelle correspondant aux fonctions de chef de projet, exercée par Monsieur X à compter du mois de novembre 2009, correspond à l’échelon 3.1 de la convention SYNTEC, en fonction duquel la rémunération doit être déterminée.

Selon la convention SYNTEC, il ne faut tenir compte que de la rémunération fixe des salariés afin de déterminer s’ils perçoivent le salaire minimum prévu pour la catégorie dont ils relèvent. En effet, l’article 32 de la convention stipule que «'les appointements minimaux découlent des coefficients et des valeurs du point correspondant à l’horaire légal de référence …'Les appointements des IC (ingénieurs et cadres) ont un caractère forfaitaire'».

De plus, si l’article précise que «'dans les barêmes des appointements minimaux garantis afférents aux positions définies, sont inclus les avantages en nature évalués d’un commun accord et mentionnés dans la lettre d’engagement, ainsi que les rémunérations accessoires en espèces, mensuelles ou non, fixées par la lettre d’engagement'», il n’y a pas lieu de tenir compte de la rémunération variable (primes variables) afin de déterminer si le salaire minimum est respecté, dans la mesure ou cette rémunération variable ne constitue pas une rémunération accessoire, notion impliquant une fixité dans ses modalités de calcul.

En l’espèce, en novembre et septembre 2009, Monsieur X a perçu une rémunération fixe correspondant à la classification conventionnelle 2.1, soit une rémunération mensuelle brute de 2 750 €, et de 3 025 € de janvier 2010 jusqu’à la rupture de son contrat de travail. Il aurait dû percevoir une rémunération fixe correspondant à la classification conventionnelle 3.2, soit la somme de 3 236,80 € mensuel jusqu’au 1er décembre 2010 €, et 3'301,40 € au delà.

Monsieur X est ainsi fondé à demander le paiement de la somme suivante':

Somme effectivement perçue': (2750 x 2 pour 2009) + (3025 x 21 pour 2010 et 2011) = 69'025 €.

Somme qu’il aurait dû percevoir': (3 236,80 x 13) + (3 301,40 x 10) = 75092,40 €.

Différence entre les deux': 75 092,40 ' 69 025 = 6 067,40 €.

En conséquence la Cour, infirmant le jugement du conseil, allouera à Monsieur X la somme de 5 904,07 €, et non celle de 6 067,40 €, la Cour ne pouvant statuer au delà de la demande.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur l’information en temps utile de Monsieur X sur le motif économique du licenciement

Lorsque l’employeur est tenu de proposer au salarié une convention de reclassement personnalisée, la jurisprudence a précisé que ' lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’une convention de reclassement personnalisé, l’employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail ; que, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans toute autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ' A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, dans le cadre de la procédure de licenciement économique, Monsieur X a été convoqué le 27 juillet 2011 à un entretien préalable qui s’est tenu le 23 août 2011, au cours duquel il lui a été proposé d’adhérer à la convention de reclassement personnalisée, ce qu’il a accepté le 5 septembre 2011.

Il soutient ne pas avoir été informé par écrit et en temps utile du motif économique invoqué par la société à l’appui de la rupture de son contrat de travail, c’est-à-dire au plus tard au moment de son acception d’adhérer à la convention de reclassement personnalisé (CRP), comme l’exige la jurisprudence. Il n’aurait eu connaissance de ce motif que dans la lettre lui notifiant la rupture de son contrat de travail le 13 septembre 2011, soit huit jours après son adhésion.

L’intimé, pour sa part, soutient que Monsieur X été parfaitement informé du motif économique de la rupture de son contrat de travail, la jurisprudence n’exigeant aucun formalisme particulier pour l’accomplissement, par l’employeur, de son obligation d’informer par écrit le salarié des motifs économiques de la rupture de son contrat de travail. Or, la direction de la société A B avait informé et consulté les délégués du personnel à l’occasion de la procédure de licenciement économique, et un procès-verbal de la réunion des délégués du personnel a été affiché dans l’entreprise et donc porté à la connaissance des salariés dès le 21 juillet 2011. Cette information a été complétée par une réunion de l’ensemble des salariés à l’issu des congés d’été.

S’il n’est pas contestable que les salariés ont été informés du projet de licenciements économiques envisagé par la société A B, ainsi que des motifs économiques sur lesquels ils reposaient, dès le 21 juillet 2011 par voie d’affichage, cette information collective est insuffisante, la jurisprudence exigeant que l’information sur les motifs du licenciement résulte d’un document écrit remis ou adressé au salarié individuellement, au plus tard au moment de son adhésion à la CRP (Cass. Soc 30 novembre 2011).

L’employeur ne rapportant pas cette preuve, la Cour, infirmera le jugement du Conseil, dit que le licenciement prononcé par la société A B à l’encontre de Monsieur X est dépourvu de cause réelle et sérieuse, et allouera, en vertu de l’article L. 1235-3 du code du travail, au vu de son ancienneté de 4 ans, la somme de 32 890 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dès lors, il n’y a pas lieu d’examiner le motif économique du licenciement, ni l’obligation de reclassement, ni le respect des critères d’ordre des licenciements.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis

Selon l’article L. 1233-67 du code du travail, en cas d’adhésion à une convention de reclassement personalisé, la rupture du contrat de travail ne comporte pas ni préavis, ni indemnité compensatrice de préavis.

Néanmoins, la jurisprudence est venue préciser que «'en l’absence de motif économique, la convention de reclassement personnalisé devient sans cause, de sorte que l’employeur est alors tenu à l’obligation de préavis et des congés payés y afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées à ce titre en vertu de ladite convention'» (Cass. Soc 5 mai 2010).

En l’espèce, comme il a été dit plus haut, la rupture du ontrat de travail de Monsieur X constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dès lors, la convention de reclassement personnalisé à laquelle il a adhéré est devenue sans cause, et l''employeur est alors tenu envers lui de l’obligation de préavis et des congés payés y afférents.

L’article 15 de la convention SYNTEC stipule que, pour les cadres «'sauf accord entre les parties prévoyant une durée supèrieure, la durée du préavis est de trois mois, quelle que soit la partie qui dénonce le contrat'».

Monsieur X, n’ayant pas effectué ces trois mois de préavis est en droit de demander une indemnité compensatrice correspondant à trois mois de salaires.

Le salaire mensuel fixe brut de Monsieur X s’élevait à 3 025 €. Il peut donc prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 9 075 €, dont il convient de déduire la somme de 3 140 € (indemnité de préavis) et 3990,58 € (congés payés sur indemnité de préavis), soit 7130,58 €, mentionnées sur son dernier bulletin de salaire de septembre 2011, ce qui donne la somme restant dûe de 1944,42 €.

En conséquence la Cour, infirmant le jugement, allouera à Monsieur X la somme de 1944,42 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 194,44 € au titre des congés payés afférents.

Demandes accessoires

Il y a lieu d’allouer – comme dit au dispositif – les intérêts au taux légal, suspendus du fait de la procédure collective, jusqu’au 11 octobre 2012.

L’ensemble des sommes allouées ci- dessus à Monsieur X étant fixées au passif de la liquidation de la société A B, l’AGS-CGEA IDF OUEST devra garantir le montant des sommes allouées à Monsieur X dans le présent arrêt, sur présentation d’un relevé du mandataire liquidateur de la société A B justifiant de l’absence de fonds disponibles.

Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile, la société A B étant en liquidation.

Les dépens de première instance et d’appel, y compris la somme de 35 € à titre de remboursement du timbre fiscal, seront mis à la charge de Monsieur G H, es qualité de mandataire liquidateur de la société A B.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition et en dernier ressort,

Infirme le jugement du Conseil des Prud’hommes de BOULOGNE-BILLANCOURT en date du 4 septembre 2014, et statuant à nouveau ;

Dit que le licenciement économique de Monsieur X est sans cause réelle et sérieuse, pour défaut d’information sur le motif économique avant l’acceptation de la CRP ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société A B les sommes suivantes allouées à Monsieur X :

—  2342,83 € à titre de rappel de salaire au titre de la convention forfait jour

—  12 897,37 € à titre de rappel de primes sur chiffre d’affaires et de primes sur objectifs personnels Apha-Beta-Gama, pour les années 2008 à 2011

—  5 904,07 € à titre de rappel de salaires liée à la revalorisation de la classification

—  1944,42 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 194,42 € au titre des congés payés y afférents

ces sommes portant intérêts au taux égal à compter du 25 novembre 2011 jusqu’au 11 octobre 2012

—  32 890 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Dit que l’AGS-CGEA IDF OUEST devra garantir les montants des sommes allouées à Monsieur X dans le présent arrêt, sur présentation d’un relevé du mandataire liquidateur de la société A B justifiant de l’absence de fonds disponibles ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne Maître G H, es qualité de mandataire liquidateur de la société A B, aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris la somme de 35 € à titre de remboursement du timbre fiscal.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Catherine BÉZIO, président, et par Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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Cour d'appel de Versailles, 19 janvier 2016, n° 14/04383