Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 25 octobre 2017, n° 14/04198

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 25 oct. 2017, n° 14/04198
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/04198
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Rambouillet, 4 septembre 2014, N° 13/01166
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 OCTOBRE 2017

R.G. N° 14/04198

AFFAIRE :

Association APAPHPA

C/

L X

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 septembre 2014 par le conseil de prud’hommes – formation paritaire – de RAMBOUILLET

Section : Activités diverses

N° RG : 13/01166

Copies exécutoires délivrées à :

SELASU CORNILLIER AVOCATS

L X

Copies certifiées conformes délivrées à :

Association APAPHPA

N O P

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Association APAPHPA

[…]

[…]

représentée par Me Lise CORNILLIER de la SELASU CORNILLIER AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, substituée par Me Sandra ABOUKRAT, avocate au barreau de Paris, vestiaire : D0350

APPELANTE

****************

Madame L X

[…]

[…]

[…]

comparante en personne,

assistée de Mme N O P, délégué syndicale ouvrier, intervenant en vertu d’un mandat du 12 septembre 2017

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 septembre 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Clotilde MAUGENDRE, Présidente chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,

Madame Monique CHAULET, Conseiller,

Madame Elisabeth ALLANNIC, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,

Vu le jugement du conseil de prud=hommes de Rambouillet (section activités diverses) du 5 septembre 2014 qui a :

— dit que si la nullité du licenciement pour inaptitude au poste ne peut pas être reconnue en raison de la séparation des pouvoirs administratif et judiciaire, pour autant Mme X est en revanche bien fondée à demander réparation de ce que les agissements de son employeur ont conduit à la dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé qui ont conduit à son inaptitude,

— dit que l=association APAPHPA est bien à l=origine d=un harcèlement moral à l=encontre de Mme X,

— condamné en conséquence l=association APAPHPA à verser à Mme L X les sommes suivantes :

. 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du manquement de l’employeur à ses obligations de prévention en matière de harcèlement moral,

. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de l’association APAPHPA à ses obligations de sécurité et de résultat en violation des dispositions de l’article L. 4121-1 du code du travail,

. 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,

. 3 700 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect du droit à la formation,

. 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté Mme X du surplus de ses demandes,

— débouté l’association APAPHPA de sa demande reconventionnelle,

— ordonné l’exécution provisoire de jugement en application de l’article 515 du code de procédure civile,

— condamné l’association APAPHPA aux entiers dépens y compris les frais éventuels d’exécution,

Vu la déclaration d’appel adressée au greffe le 25 septembre 2014 et les conclusions déposées au greffe et soutenues oralement à l=audience par son conseil, pour l=association APAPHPA, prise en la personne de son représentant légal, qui demande à la cour de :

— dire que le licenciement de Mme X n’est pas nul,

— constater l’absence de harcèlement moral et de discrimination syndicale,

— constater que l=employeur a respecté son obligation de prévention du harcèlement moral, de sécurité résultat, liée au droit à la formation,

— constater que le licenciement ne saurait être annulé,

en conséquence,

— infirmer le jugement rendu en première instance par le conseil de prud=hommes de Rambouillet,

— débouter Mme X de l=ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l=audience par son conseil, pour Mme L X, qui demande à la cour de :

— condamner l’association APAPHPA à lui payer les sommes suivantes :

. 11 194,33 euros à titre d’indemnité due à un salarié protégé pour inaptitude au poste,

. 3 731,46 euros à titre d=indemnité compensatrice de préavis,

. 371,14 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 5 000 euros à titre de réparation du manquement de l=employeur à son obligation de sécurité de résultat,

. 10 000 euros à titre de manquement de l=employeur à ses dispositions nécessaires en matière de prévention des agissements de harcèlement moral,

. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,

. 5 810 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit à formation de la salariée,

. 1 500 euros sur le fondement de l=article 700 du code de procédure civile,

SUR CE LA COUR,

Considérant que l=association pour l=accueil des personnes handicapées et des personnes âgées (APAPHPA), est une association à but non lucratif de la loi de 1901 spécialisée dans l=accueil et l=hébergement d=adultes lourdement handicapés ;

Qu=elle emploie près de 250 salariés ;

Considérant que Mme L X a été engagée par l’association APAPHPA, en qualité de monitrice éducatrice, au sein d’un établissement situé à Sainte Mesme « Le foyer de vie fontaine bouillante », par contrat à durée indéterminée du 26 juin 2008 ;

Qu=en dernier lieu, elle percevait une rémunération moyenne brute d=un montant de 1 849,50 euros ;

Que les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 ;

Qu’à partir de 2009, Mme X a été membre du CHSCT puis élue au comité d’entreprise au sein duquel elle a été désignée secrétaire ;

Qu=à partir de 2010, elle a été placée régulièrement en arrêts de travail pour maladie, en raison d’un état dépressif et a été quasiment absente en permanence à partir du mois de septembre 2012 ;

Que, par courrier du 10 janvier 2013, elle a sollicité de son employeur le bénéfice d=une rupture conventionnelle ;

Que, par courrier du 21 janvier 2013, elle a démissionné de son mandat au CHSCT en précisant que, selon elle, ce comité était mis dans l=impossibilité d=assumer ses différentes missions ;

Que, par courrier du 28 février 2013, elle a alerté Mme Y, présidente de l’association, l’inspection du travail, le conseil général, la Halde, Yvelines Santé Travail sur la dégradation de ses conditions de travail et a sollicité une réponse à sa demande de rupture conventionnelle ;

Que, par courrier du 4 mars 2013, Mme Z, directrice générale, reprochant à la salariée de s’être adressée en premier lieu au conseil général, son autorité de tutelle, lui a notifié son refus d’accéder à sa demande de rupture conventionnelle ;

Qu’à l’issue des deux visites médicales de reprise des 25 mars et 9 avril 2013, le médecin du travail a conclu : « Inaptitude totale au poste de travail de monitrice éducatrice. En fonction de l’étude de poste de travail réalisé le 03/04/2013 et de l’état de santé de la salariée, pas d’aménagement technique ni organisationnel proposable, ni mutation de poste proposable. » ;

Que Mme X a été convoquée par lettre recommandée avec avis de réception du 24 avril 2013 à un entretien préalable fixé au 6 mai 2013 ;

Que, le 31 mai 2013, le comité d=entreprise a rendu un avis favorable au projet de licenciement ;

Que, par décision du 29 juillet 2013, l=inspecteur du travail a autorisé le licenciement de Mme X qui a été licenciée par lettre du 31 juillet 2013 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement ;

Que, par requête du 19 novembre 2013, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Rambouillet ;

Considérant, sur le harcèlement moral, qu=aux termes de l=article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d=altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » ;

Qu’en application de l’article L. 1154-1, dans sa version applicable à l’espèce, interprété à la lumière de la directive n 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lorsque survient un litige relatif à l’application de ce texte, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Que Mme X soutient qu’elle a été confrontée à des refus abusifs de formation professionnelle qualifiante, à des brimades, des reproches, des critiques injustifiées et des comportements hostiles qui l’ont empêchée de faire aboutir ses initiatives au sein du CHSCT et du comité d’entreprise ; qu’elle ajoute qu’en conséquence sa santé s’est dégradée et qu’elle a souffert d’un syndrome dépressif ;

Que, s’agissant de la formation Snoezelen, Mme X établit avoir demandé le 9 décembre 2011 à bénéficier d=une formation Snoezelen qui lui a été refusée, alors qu’au cours d’une réunion d’équipe le 29 novembre 2011 il avait été indiqué qu’une place était libre pour une formation à Richebourg pour un salarié de Sainte Mesme en 2012 ;

Que, s’agissant de la formation d’éducateur spécialisé, Mme X affirme que Mme A arrivée dans l’association en octobre 2009, occupant un poste d’éducatrice spécialisée aux ateliers, Mme B arrivée en septembre 2010, occupant un poste d’aide-médico psychologique en internat et Mme C arrivée au début de l’année 2008, occupant également un poste d’aide-médico psychologique en internat ont obtenu une formation d’éducateur spécialisé la première d’une durée d’un an et les autres d’une durée de trois ans ;

Que l’Association APAPHPA ne discute pas cette présentation ;

Que Mme X établit avoir demandé en juillet 2011 comme premier choix de formation celui d=éducatrice spécialisée pour le plan de formation 2012 et en 2e choix « Passeport pour le mieux-être + vivre serein et relaxé » ;

Qu=en juillet 2012, elle a renouvelé sa demande pour l=année 2013 ; que le centre de Formation Initiatives par courrier du 14 septembre 2012 a attesté de sa réussite aux épreuves d=entrée en formation d=éducateur spécialisé « cursus passerelle » pour une prochaine rentrée prévue en mai 2013 en précisant que son attestation d’admission était valable pour deux années consécutives ;

Que Mme Z, directrice générale, dans un mail adressé à la salariée le 9 janvier 2013 a admis que de son point de vue dans l’attribution des formations il y avait eu « inéquité, une forme d’arbitraire » ; que par courrier du 15 janvier 2013, elle a répondu à Mme X, comme aux autres salariés qui avaient fait une demande, que le plan de formation prévisionnel 2013 a été arrêté sans prendre en compte les demandes de formation qualifiante « En effet, les niveaux de qualification de l=ensemble des salariés sont désormais en quasi adéquation avec les budgets des établissements. Il a donc été décidé de reporter l=étude de ces formations en fonction des financements supplémentaires pouvant être alloués et en tenant compte de l=organisation quotidienne des différents établissements.

Je vous invite donc à nous reconfirmer votre souhait courant mars si vous êtes prête à vous engager dans une telle formation sur 2013. » ;

Que M. D, directeur adjoint, atteste qu’en 2011 lors de l’élaboration du plan de formation il avait été évoqué avec Mme Z, directrice générale, l’ordre des départs en formation et convenu que Mme X serait prioritaire pour la formation d’éducatrice spécialisée, formation passerelle, sur l’exercice 2012-2013 à l’issue de celle de Mme A, ce qu’il avait annoncé à Mme X ;

Que M. E, éducateur technique spécialisé, atteste que Mme X deux années de suite a fait une demande de formation d’éducatrice spécialisée qui lui a été refusée à chaque fois, alors qu’elle était acceptée pour deux salariés embauchées après elle ;

Que, s’agissant de la participation de Mme X au salon du CE, M. E atteste que Mme Z a demandé au chef de service de ne pas autoriser Mme X, alors secrétaire du comité d’entreprise, de se rendre au salon du CE le 7 février 2013 bien que cette réunion ait été actée par le chef de site lors d’une réunion du CE du 17 janvier 2013 ;

Que M. F, aide médico-psychologique, confirme le refus qui a été opposé à Mme X en ce qui concerne sa participation au salon CE, la directrice générale ayant considéré qu’au vu de ses absences sa place était auprès des résidents ;

Que M. G, chef de service, atteste que Mme Z lui a demandé d’intervenir la semaine du 28 janvier 2013 auprès de Mme X afin de la dissuader de rendre au salon du CE auquel ses collègues l’avait inscrite, au motif qu’elle revenait d’un arrêt de maladie et que sa place était auprès des résidents ;

Qu’il ajoute que Mme X s’y est malgré tout rendue ;

Que ces attestations sont suffisamment concordantes et circonstanciées pour établir que la direction générale a cherché à s’opposer à la participation de Mme X au salon du CE ;

Que, s’agissant des brimades et humiliations subies, Mme X produit un mail de Mme Z du 25 juin 2012, qui répond à une interrogation de sa part sur la prise en charge des problèmes de gale dans l’établissement, en lui donnant des informations et en lui faisant reproche « sous couvert de jouer pleinement votre rôle d’élu du CHSCT, ce que je ne saurais vous reprocher, vous dénigrez l’autorité de votre hiérarchie et même le travail de vos collègues notamment les infirmières car elles se démènent depuis plusieurs jours et sont loin de rester sans rien faire depuis que nous avons eu connaissance des premiers cas.

De plus, aller systématiquement chercher des ou je ne sais quoi d’autre à l’extérieur à la médecine du travail en l’occurrence, cette fois, est assez détestable : je vous rappelle que votre employeur est l’APAPHPA et que vous avez des interlocuteurs en interne (directeur, directeur adjoint, chefs de service).

Il serait bon de vous adresser d’abord à eux avant d’aller à l’extérieur. Si vous n’êtes pas capable de faire confiance un minimum à l’association, je me demande ce que vous y faites encore ! Pour finir, Mme H, à la médecine du travail, est secrétaire et pas médecin : je ne pense pas que tout cela la concerne.

Je pense que les cadres du site de Ste Mesme sont capables de travailler en bonne intelligence et dans la concertation avec toutes les instances, y compris le CHSCT, sans rentrer dans des relations procédurières, à la limite du procès d’intention, qui ne me semblent pas utiles … sauf si vous ne savez pas travailler autrement ! Mais alors c’est de votre responsabilité » ;

Que Mme Z par courrier du 4 mars 2013, puis Mme Y par courrier du 6 mars 2013 ont refusé à Mme X le bénéfice d’une rupture conventionnelle, la première lui reprochant d’avoir d’abord contacté le conseil général et expliquant que l’association ne souhaite pas accorder de rupture conventionnelle en raison de leurs coûts le financement public étant en priorité utilisé pour les usagers ;

Que Mme Y, présidente de l’association, dans son courrier du 6 mars 2013 déjà cité a répondu à Mme X que compte tenu du point 10 de votre lettre (dans lequel Mme X indiquait que n’ayant pas confiance en la direction le CHSCT n’avait pas informé la direction générale de l’association des idées suicidaires d’une salariée, mais avait averti ses collègues) elle transmettait l’ensemble du dossier à l’avocat en lui proposant de signaler au Procureur de la République une situation de non-assistance à personne en danger « puisque vous signalez une collègue qui aurait des tentations suicidaires sans qu’à aucun moment, vous ne nous en ayez portés information, nous empêchant ainsi toute action. » ;

Que Mme X produit un courrier de M. E du 19 mars 2013 adressé au médecin du travail lui faisant part de son inquiétude sur l’état de Mme X à réception du courrier de Mme Y, sa collègue lui ayant exprimé son envie de mettre fin à ses jours et le fait qu’avoir la charge de son fils l’empêchait de passer à l’acte ; que Mme I, psychologue clinicienne au sein de l’association, dans un courrier du 11 mars 2013 confirme que Mme X a réagi fortement à la réception de ce courrier se sentant harcelée, humiliée et bafouée dans son intégrité ;

Que Mme X établit la dégradation de son état de santé en produisant divers certificats médicaux ;

Qu’ainsi, le docteur N’ Daye, praticien hospitalier au CMP, atteste le 28 mars 2013 l’avoir suivie de façon régulière du 25 novembre 2010 à juin 2011 puis à partir d’octobre 2012 ; que le docteur J le 26 mars 2013, atteste avoir prescrit des arrêts de travail de plus en plus fréquents à Mme X et divers traitements anxiolytiques et d’anti dépresseurs ;

Que Mme K, psychologue du travail, dans le compte-rendu du 22 mars 2013 adressé au médecin du travail expose être intervenue en 2009 au sein de l’établissement de Sainte Mesme auprès de salariés qui avaient rapporté l’existence de dysfonctionnement institutionnels impactant leur santé physique et psychique et avoir fait la connaissance de Mme X à l’occasion de l’exercice de son mandat au CHSCT puis à la suite de l’orientation du médecin du travail car elle souffrait de stress chronique et de troubles anxiodépressifs ; qu’elle indique que Mme X s’était beaucoup investie en 2010 dans un projet de prévention des risques psychosociaux initié par le médecin du travail et la direction de l’association, qu’après la restitution des résultats de l’enquête en avril 2011 un CHSCT aurait dû être organisé mais n’a pas eu lieu et que le groupe de travail a été mis en place mais sans réelle efficacité ;

Qu’elle conclut qu’elle reçoit encore en consultation pour raison de stress au travail des salariés de l’établissement et que, d’après elle, les mauvaises conditions dans lesquelles Mme X a exercé ses missions et responsabilités l’ont conduite à un état d’épuisement professionnel, et qu’elle semble cristalliser un certain nombre de tensions ;

Que les refus réitérés de formation opposés à Mme X, la volonté manifestée par l’employeur de l’empêcher de participer au salon du CE, les termes hostiles du mail de Mme Z du 25 juin 2012 et du courrier de Mme Y du 6 mars 2013 et la dégradation de l’état de santé de la salariée laissent présumer l’existence d’un harcèlement moral ;

Qu’il incombe à l=employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d=un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Que, sur la formation Snoezelen, l’association APAPHPA explique que le site de Sainte Mesme n’avait pas d’espace spécialement aménagé nécessaire pour cette forme de prise en charge et que ce n’est qu’en raison d’absence de salarié du site de Richebourg qu’une place a été proposée au salarié de Sainte Mesme ; qu’elle n’explique cependant pas pourquoi Mme X, qui en avait fait la demande et prétend qu’un tel atelier existait au foyer de Sainte Mesme, n’a pas été choisie ;

Que, s’agissant de la formation d’éducateur spécialisé, l’association APAPHPA indique que, pour le plan de formation professionnelle pour 2013, 7 salariés, dont Mme X, avaient formulé une demande de formation d’éducateur spécialisé, et qu’aucun dossier n’a été retenu car tous les salariés étaient diplômés ou en cours de formation et qu’il n’existait pas de poste d’éducateur spécialisé disponible au sein de l’association ; qu’elle ajoute qu’elle s’était engagée à trouver des financements et que Mme X n’a pas confirmé sa candidature ;

Qu’il ne peut être reproché à Mme X, qui était en arrêt de maladie, de ne pas avoir confirmé sa demande de formation pour 2013 ;

Qu’en outre il ne peut qu’être constaté que l’association ne justifie pas des raisons objectives pour lesquelles elle a accordé en décembre 2011une formation qualifiante à 2 salariées comptant moins d’ancienneté que Mme X et pas à elle ;

Que, s’agissant du salon CE du 7 février 2013 et du ton hostile des échanges avec Mme Y et Mme Z l’employeur ne donne aucune explication ni justification ;

Que faute pour l’employeur de prouver que les agissements laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral ne sont pas constitutif d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit établi le harcèlement moral ;

Considérant, sur les dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation relative à la prévention du harcèlement moral des articles L. 1152-4, que l’employeur peut s’exonérer de sa responsabilité quand une situation de harcèlement s’est produite dans l’entreprise à deux conditions qu’il ait fait cesser immédiatement les agissements et qu’il ait préalablement mis en oeuvre des actions de formation et d’information propres à prévenir leur survenance ;

Qu’il ne peut qu’être constaté que l’association APAHPA n’a pas réagi aux alertes de Mme X lorsqu’elle s’est plainte au mois de janvier 2013 notamment d’être évincée des formations, a démissionné de ses mandats et a alerté la présidente de l’association, par courrier du 28 février 2013, sur ses mauvaises conditions de travail ;

Qu’en réparation du préjudice subi de ce chef il convient, infirmant le jugement, de lui allouer de ce chef la somme de 3 000 euros ;

Considérant, sur les dommages et intérêts résultant du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de l’état de santé des travailleurs, qu’il est établi que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat ;

Que si Mme X justifie de la dégradation de son état de santé au cours des années 2012 et 2013, elle ne communique aucun élément médical postérieur, qu’il convient, infirmant le jugement de ce chef, de dire que le préjudice subi sera réparé par l’allocation d’une somme de 3 000 euros ;

Considérant, sur l’indemnité due à un salarié protégé pour inaptitude au poste et l’indemnité compensatrice de préavis, que lorsque l’inspecteur du travail donne l’autorisation de licenciement pour inaptitude cette autorisation ne prive pas le salarié de faire valoir ses droits résultant de l’origine de l’inaptitude ; qu’il est donc admis à être indemnisé, outre du harcèlement moral, de la perte d’emploi ;

Que la demande formée par Mme X au titre de l’indemnité due à un salarié protégé pour inaptitude au poste et l’indemnité compensatrice de préavis doit donc être requalifiée en indemnité pour perte d’emploi ;

Que compte tenu de l’âge de la salariée au moment de la rupture, 40 ans, de son ancienneté dans l’entreprise, d’environ 5 ans, de son niveau de rémunération et de ce qu’elle indique qu’elle a changé d’orientation professionnelle mais ne produit aucun élément sur sa situation actuelle, il convient, infirmant le jugement, de lui allouer de ce chef la somme de 10 000 euros ;

Considérant, sur les dommages et intérêts pour non-respect du droit à la formation, qu’il a déjà été établi que Mme X a été abusivement privée d’une formation d’éducateur spécialisé ;

Qu’en revanche, l’association établit que Mme X a bénéficié en 2009 d’une formation d’une journée sur l’autisme et de cinq journées sur la sexualité et la prévention des infections sexuellement transmissibles dans le cadre du handicap mental, en 2011 de trois journées sur « les interdits ' sexualité, parentalité et vie affective », de deux journées « sauveteur secouriste » et d’une journée « prévention de la maltraitance »;

Qu’elle justifie également qu’elle avait accepté et favorisé l’inscription de Mme X à la formation « Passeport pour le mieux-être » pour 2012 mais que l’institut de formation en a refusé la prise en charge au motif que, étant une formation de développement personnel, elle n’entrait pas dans le champ de la formation professionnelle continue ;

Qu’il convient, infirmant le jugement, d’allouer à la salariée en réparation du préjudice subi de ce chef la somme de 1 000 euros ;

Considérant, sur la discrimination, qu’aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur à la date de la saisine du conseil de prud’hommes, « aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap. »;

Que l’article L. 2141-5 dispose : « Il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de disciplines et de rupture du contrat de travail. » ;

Qu’en application de l’article L. 1134-1, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Q’il a déjà été démontré que Mme X avait été privée sans raison objective de participation à la formation Snoezelen et du bénéfice d’une formation d’éducateur spécialisé ; qu’également, sans motif objectif, la direction a tenté de l’empêcher de se rendre au salon CE sur ses heures de délégation ;

Que dès lors que Mme X était secrétaire du CE et membre du CHSCT, et que Mme Z dans son mail du 25 juin 2012 lui reproche de profiter de ses fonctions de membre du CHSCT pour dénigrer la direction, dénigrement qui n’est d’ailleurs pas établi, le jugement sera également confirmé en ce qu’il a dit établie la discrimination syndicale ;

Que l’atteinte portée aux droits de Mme X dans l’exercice de son action syndicale lui a causé un préjudice distinct de celui résultant du harcèlement moral qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 2 000 euros ;

Que le jugement sera infirmé de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Infirme partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

Condamne l’association APAHPA à payer à Mme X les sommes suivantes :

. 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de prévention du harcèlement moral,

. 10 000 euros à titre d’indemnité pour perte d’emploi,

. 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité,

. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation de formation,

. 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,

Confirme pour le surplus le jugement,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Condamne l’association APAHPA à payer à Mme X la somme complémentaire de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute l’association APAHPA de sa demande sur le fondement de l=article 700 du code de procédure civile,

Condamne l’association APAHPA aux dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats en application de l’article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 25 octobre 2017, n° 14/04198