Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 26 janvier 2018, n° 16/00669

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Sur la décision

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 14A

1re chambre

1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 JANVIER 2018

R.G. N° 16/00669

AFFAIRE :

F B-C

C/

D G E X Y

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Janvier 2016 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 1

N° RG : 14/07696

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS

Me Mélodie CHENAILLER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant après prorogation les 15 décembre 2017 et 19

janvier 2108 les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

Maître F B-C, avocat au barreau de Paris inscrit sur la liste des avocats mandataires sportifs de l’ordre des avocats du barreau de Paris depuis 2011

né le […] à […]

de nationalité Française

Domicile professionnel

[…]

[…]

Représentant : Me Bertrand ROL de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20160065 – Représentant : Me Joëlle MONLOUIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

Monsieur D G E X Y, sportif professionnel

né le […] à […]

Quinto dos remedios, Arco S-Paio

4870-620

Z A (PORTUGAL)

Représentant : Me Mélodie CHENAILLER, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 125 – Représentant : Me Alexandre-M. BRAUN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 02 Novembre 2017 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne LELIEVRE, conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, président,

Madame Anne LELIEVRE, conseiller,

Madame Nathalie LAUER, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,

Vu le jugement rendu le 26 janvier 2016 par le tribunal de grande instance de Versailles qui a :

— condamné Me B-C à payer au demandeur :

* la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte au droit l’image,

* la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte au droit au nom,

* la somme de 5000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté les autres demandes,

— débouté Me B-C de ses demandes reconventionnelles,

— condamné Me B-C aux dépens ;

Vu l’appel relevé le 28 janvier 2016 par M. B-C qui, dans ses dernières conclusions notifiées le 18 octobre 2017, demande à la cour de :

— le recevoir en son appel et l’y déclarer bien-fondé,

— infirmer le jugement en date du 26 janvier 2016 rendu par le tribunal de grande instance de Versailles en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau :

A titre principal,

— dire qu’il n’y a pas d’atteinte au droit à l’image,

— dire qu’il n’y a pas d’atteinte au droit au nom,

— constater l’absence de préjudice moral au titre du droit à l’image ainsi qu’au titre du droit au nom,

— condamner M. D X Y à payer à M. F B-C la somme de 20 000 euros à titre de procédure abusive,

A titre subsidiaire,

— dire que si une atteinte au droit à l’image et au nom était retenue, il appartiendrait à M. D X Y de se diriger vers les directeurs de publication desdits articles,

— débouter M. D X Y de toutes ses demandes et prétentions,

— condamner M. D X Y à payer la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. D X Y aux entiers dépens dont distraction ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 12 octobre 2017 par lesquelles M. X Y demande à la cour de :

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que Maître F B-C a porté atteinte à son droit à l’image ainsi qu’à son droit au nom,

Statuant à nouveau sur son préjudice,

— condamner M. F B-C à lui payer la somme de 15 000,00 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte portée à son image,

— condamner M. F B-C à lui payer la somme de 15 000,00 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice patrimonial du fait de l’atteinte portée à son image,

— condamner M. F B-C à lui payer la somme de 15 000,00 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et patrimonial subi du fait de l’atteinte portée à son nom,

— confirmer la condamnation de M. F B-C à lui payer la somme de « 8 100,00 euros » en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,

— condamner M. F B-C à lui payer la somme de 5 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel,

— dire que l’appel interjeté par M. F B-C est abusif et le condamner à lui payer 10 000 euros à ce titre,

— condamner M. F-B-C aux entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR

FAITS ET PROCÉDURE

Le 17 novembre 2011 M. E X Y (M. X Y), joueur professionnel de football sous contrat avec le sporting club du Portugal, a signé une convention de mandat sportif avec M. B-C, avocat inscrit au barreau de Paris, aux termes de laquelle ce dernier recevait notamment mandat de le conseiller, le représenter et l’assister dans le cadre de l’étude, la rédaction et la négociation de tous ses contrats en qualité de sportif professionnel, dans le monde entier ; les honoraires de M. B-C étaient fixés conformément à l’article L 222-7 du code du sport.

Cette convention est entrée en vigueur à la date de sa signature et s’est achevée au terme prévu, soit le 31 août 2012, sans être renouvelée.

M. X Y a reçu le 1er février 2013 une note d’honoraires pour 213 890 euros, qu’il a contestée. Une ordonnance du bâtonnier de Paris en date du 12 décembre 2013 a fixé, à la demande de M. B-C, le montant des honoraires à la somme de 821 788 euros. Par ordonnance du 28 octobre 2014, le délégataire du premier président de la cour d’appel de Paris après avoir énoncé qu’il appartenait aux parties de saisir la juridiction compétente pour statuer sur la validité du mandat, a infirmé la décision du bâtonnier et dit en substance que si le mandat est déclaré nul, il n’y a pas lieu à fixation d’honoraires et que s’il est reconnu valable, le montant des honoraires dus est fixé à 350 000 euros soit à 299 588 euros après déduction des acomptes.

Par arrêt du 14 janvier 2016, la 2e chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé l’ordonnance susmentionnée, sauf en ce qu’elle a dit qu’il appartient aux parties de saisir la juridiction

compétente de la demande tendant à voir déclarer nulle la convention de mandat sportif et renvoyé l’affaire devant le premier président de cette cour.

Cette affaire a été retirée du rôle dans l’attente de l’issue de l’instance relative à la validité du mandat.

Le tribunal de grande instance de Paris a été saisi le 1er octobre 2015 par M. B-C d’une demande en condamnation au paiement des honoraires dus en exécution de la décision du 28 octobre 2014 ; M. X Y ayant invoqué l’incompétence du tribunal saisi au profit des juridictions portugaises, par ordonnance du 3 août 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a fait droit à l’exception d’incompétence soulevée par M. X Y au profit des juridictions portugaises et renvoyé M. B-C à mieux se pourvoir.

M. B-C a relevé appel de cette ordonnance, lequel est actuellement pendant devant la cour d’appel de Paris.

Parallèlement aux litiges portant sur la validité de la convention de mandat sportif et sur les honoraires qui y sont afférents, M. X Y, relevant courant 2013 que M. B-C se présentait toujours comme son avocat sur un site internet à son nom, a fait constater ces faits par un procès-verbal d’huissier le 6 septembre 2013 et a délivré le même jour à Me B-C une sommation de supprimer toute image et référence à sa personne.

Un procès-verbal de constat du 11 octobre 2013 indique que le contenu litigieux a été mis en ligne le 31 mai 2013, soit 9 mois après l’échéance du contrat.

Une ordonnance de référé du 26 novembre 2013, non frappée d’appel, a condamné Me B-C d’une part à supprimer du site toutes les références concernant M. X Y sous astreinte et d’autre part au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

M. X Y a fait assigner Me B-C le 24 février 2014 devant le tribunal de grande instance de Nanterre en réparation de ses préjudices moral et patrimonial du fait des atteintes portées à son droit à l’image et à son nom par le site internet édité par M. B-C mentionnant son nom à plusieurs reprises, diffusant plusieurs images de lui et reprenant des articles de presse le concernant. Le

site comporte de plus des liens hypertextes supposés renvoyer le lecteur vers les articles concernés, dans leur version intégrale. L’un des liens oriente vers le site d’un journal à sensations anglais « dailystar » et sur une page sur laquelle se trouve affichée une femme nue.

C’est sur le fondement de cette assignation qu’a été rendue la décision entreprise, qui a accueilli les demandes de M. X Y dans leur principe, en retenant toutefois qu’il ne rapportait pas la preuve du préjudice patrimonial allégué, et en réparant ses préjudices moraux dans une mesure moindre que ses demandes.

Sur les atteintes à l’image et au nom de M. X Y

Considérant que M. B-C fait valoir, sur le fondement de l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et de l’application du principe de proportionnalité nécessitant de prendre en considération d’autres libertés fondamentales telles que la liberté d’information et la liberté d’entreprendre, qu’il ne saurait y avoir d’atteinte à l’image de M. X Y dans la mesure où ce dernier a lui-même participé à la divulgation antérieure des faits invoqués qui constituent par ailleurs des faits d’actualité anodins et notoires ; qu’il soutient que M. X Y l’a laissé intervenir à de nombreuses reprises en son nom et pour son compte afin de promouvoir sa carrière professionnelle sur la période allant de novembre 2011 à août 2012 ; que d’un commun

accord, une stratégie bien précise avait été mise au point, consistant à solliciter les médias afin de faire grimper la cote du joueur et créer « le buzz » autour de son éventuel départ du sporting club du Portugal ; que les faits ont été divulgués courant 2012, soit antérieurement à la mise en ligne critiquée, et que M. X Y n’avait pas manifesté son désaccord, d’où se déduit une autorisation tacite ; que la parution des articles de presse entrait dans le champ de sa mission de mandataire sportif en charge de l’image du joueur ; que les publications litigieuses, qui ne font que reprendre des faits anodins, antérieurement divulgués, se bornent à relater un événement d’actualité ; que le fait qu’elles soient restées sur le site créé à son nom, après l’expiration de son mandat d’agent sportif est inopérant dans l’appréciation de l’atteinte au droit à l’image ; qu’il ajoute que les liens hypertextes portent sur des faits anodins ; que le caractère anodin de l’information exclut la violation de la vie privée en raison de la personnalité du protagoniste et du lieu public de la captation de la photographie ; qu’il existe un lien direct entre les photographies et l’article qu’elles illustrent ; que les photographies auxquelles renvoyait son site sont relatives à l’article de presse publié par le journal « Record » pour le premier article et du journal « Renascenca » représentant le joueur sur un terrain de football lors d’un match public ; qu’eu égard au principe de proportionnalité il n’y a pas d’atteinte au droit à l’image de M. X Y ;

Qu’il conteste par ailleurs avoir porté atteinte au droit au nom de M. X Y et d’avoir utilisé celui-ci à des fins promotionnelles ; qu’il fait valoir qu’il n’a pas commis de faute déontologique en révélant le nom de l’un de ses clients ; que d’une part, la prétendue faute qui lui est imputée, consistant dans la violation de l’article 2.2 du règlement intérieur national de la profession d’avocat, relève de la compétence exclusive du bâtonnier de l’ordre auquel il est rattaché ; qu’il fait d’autre part référence à une jurisprudence de la juridiction ordinale ;

Qu’il ajoute que l’atteinte au nom de M. X Y ne pourrait être constituée que s’il s’était livré à des agissements constitutifs de l’usage du nom d’un tiers, comme de déposer ce nom à titre de marque ou à titre de nom de domaine et en faire un usage commercial, ce qui n’a pas été le cas ; qu’il respecte scrupuleusement l’interdiction de combiner diverses activités entre elles ;

Qu’il n’a créé aucun risque de confusion dans l’esprit du public en associant son nom à celui de M. X Y, chacun étant clairement identifié l’un comme mandataire sportif et l’autre comme footballeur professionnel ; qu’il n’a par ailleurs pas eu de comportement laissant penser qu’il était encore le mandataire sportif de M. X Y ; que l’atteinte au nom ne peut être caractérisée dès lors qu’il est démontré l’existence d’un lien direct entre la mise en ligne des deux liens hypertextes et un fait d’actualité ;

Qu’à titre subsidiaire, il fait valoir que M. X Y aurait dû engager la responsabilité des directeurs de publications des journaux The Sun et Record, en application de la loi du 29 juillet 1881 ;

Que l’intimé réplique qu’il dispose sur son image d’un droit exclusif et absolu et peut s’opposer à sa fixation, sa reproduction ou à son utilisation sans autorisation préalable ; que toute personne peut s’opposer à la reproduction ou à la diffusion de son image, même si les photographies la représentant ont été prises dans l’exercice de son activité professionnelle ; que la publication de l’image dans une perspective différente de celle pour laquelle elle avait été réalisée exige le consentement spécial de l’intéressé et qu’il appartient à l’auteur de la publication d’établir l’existence de cette autorisation ;

Que toute personne a sur son nom et l’usage qui en est fait, un droit absolu et imprescriptible ; que le nom constitue un élément de la personnalité qui ne peut être exploité à une fin lucrative sans l’autorisation de son titulaire ;

Qu’en l’espèce, M. B-C utilise sur son site internet destiné à promouvoir son activité d’avocat et celle de mandataire sportif, son nom et son image à des fins promotionnelles sans son consentement ; qu’il a au contraire reçu une interdiction formelle de le faire par sommation d’huissier du 6 septembre 2013 qui s’est avérée vaine ; qu’il viole délibérément la loi et qu’il importe peu que

l’image exploitée abusivement ait été prise ou non dans le cadre de la sphère professionnelle publique ;

Qu’il est faux de prétendre que son nom figurait seulement au sein d’articles de presse accessibles par deux liens hypertexte, mis en ligne sur le site de M. B-C, alors que les photographies le représentant et son nom sont systématiquement également présents sur ledit site, ainsi que cela résulte du procès-verbal de constat d’huissier en pages 12 et 15 ; que M. B-C n’a jamais été autorisé à faire usage de son nom et de son image dans de telles conditions alors que la lecture de la convention qu’ils avaient signée ne mentionne pas une telle autorisation ; qu’à supposer que l’on considère que M. B-C ait bénéficié d’une autorisation tacite durant le temps de son mandat, celle-ci n’existe plus depuis la fin de celui-ci et a fortiori après la sommation délivrée le 6 septembre 2013 de supprimer toute image et référence à sa personne ; que la mise en ligne querellée était destinée à faire l’autopromotion de M. B-C en exploitant son image et son nom ; qu’elle a eu lieu neuf mois après la fin de son mandat ;

Que le vademecum cité par M. B-C permettant l’interprétation du Règlement intérieur national des avocats, et ledit règlement, n’ont jamais pour objet de réduire les droits des clients des avocats mais au contraire de les protéger ; que leurs dispositions interdisent de faire référence à d’anciens clients et a fortiori de les utiliser à des fins promotionnelles ; que le vademecum indique en outre que l’avocat est responsable des liens hypertexte présents sur son site ;

Que l’invocation par M. B-C des dispositions de la loi de 1881 est inopérante, les atteintes au droit à l’image et au nom ne relevant pas de cette loi mais de l’article 9 du code civil ;

Qu’il n’existe aucun fait justificatif lié à un événement d’actualité, antinomique d’un événement anodin, arguments tous deux invoqués, de manière paradoxale par M. B-C ;

***

Considérant que les articles 9 du code civil et 8-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, garantissent à toute personne, quelle que soit sa notoriété, sa fortune ou ses fonctions, le droit au respect de sa vie privée et de son image ;

Que l’article 10 de la convention précitée garantit l’exercice du droit à l’information ;

Que la nécessité de concilier ces deux principes conduit à limiter le droit à l’information du public, d’une part aux éléments relevant pour les personnes publiques de la vie officielle et d’autre part aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifient un événement d’ actualité ou un débat d’intérêt général ;

Que chacun peut ainsi s’opposer à la divulgation d’informations et à la fixation, la reproduction et à l’utilisation d’images captées sans autorisation expresse, préalable et spéciale ne relevant pas de sa vie professionnelle ou de ses activités officielles et fixer les limites de ce qui peut ou non être publié sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir ;

Considérant en outre que le caractère public ou la notoriété d’une personne influe sur la protection dont sa vie privée peut ou doit bénéficier ;

Considérant qu’il résulte de deux constats d’huissier établis les 6 septembre et 11 octobre 2013, que le site internet de Maître F B-C, à l’adresse « www.jimmichel-gabrielavocat.com » comporte une page intitulée « un accompagnement et une sécurité juridique au profit des acteurs du monde sportif » ; qu’en cliquant sur un lien « média » on arrive à une page où l’on accède à des images de sportifs, dont trois renvoient à des articles se rapportant à M. D E X Y :

— le premier en langue anglaise, mentionnant le nom de Maître F B-C, en qualité d’agent du milieu de terrain, M. D E X Y,

— le deuxième, en langue portugaise comportant une photographie de D E X Y et un article présentant Maître F B-C, comme son avocat,

— le troisième en langue portugaise, comportant également une photographie de D E X Y et un article présentant Maître F B-C, comme étant son avocat ;

Que M. X Y a, dès le 30 mai 2013, par lettre recommandée avec accusé réception, mis en demeure M. B-C notamment de cesser de se présenter comme son avocat et de mettre un terme immédiat à « toute démarche menée en faisant frauduleusement usage de cette qualité » ;

Que par acte d’huissier du 6 septembre 2013 il l’a sommé d’avoir à supprimer immédiatement et définitivement, de son site internet toute image le représentant et toute référence directe ou indirecte à sa personne ;

Considérant que si pendant la durée d’exécution du mandat d’agent sportif de M. B-C, M. X Y n’a pas poursuivi son agent lorsqu’il a utilisé son image et son nom dans la presse, aux fins d’assurer sa promotion médiatique pour accroître sa notoriété et le placer dans une position favorable pour négocier de meilleurs contrats dont il était le sujet, ce dont il peut se déduire qu’il avait donné son autorisation à cette forme de promotion, en l’espèce, l’utilisation du nom et de l’image de M. X Y sur le site de M. B-C, n’a pour seule finalité que d’assurer la promotion de ce dernier, en tant qu’avocat et afin d’illustrer ses propres compétences en matière de mandataire de sportif professionnel ; qu’en effet, une page du site mentionne « un accompagnement et une sécurisation juridique au profit des acteurs du monde sportif » ;

Que force est de constater que cette utilisation à des fins personnelles de l’image et du nom de M. X Y n’ont pas été autorisées expressément par ce dernier ; que de plus cette exploitation a été constatée par M. X Y alors que le mandat donné à M. B-C avait pris fin et qu’un litige sérieux les opposait en ce qui concerne les honoraires facturés par ce dernier ;

Que c’est à juste titre que les premiers juges ont relevé que M. B-C ne pouvait invoquer l’illustration d’un débat général ou d’un fait d’actualité, s’agissant de faits anciens concernant des événements sportifs contemporains de la période d’exécution de la convention ;

Que le caractère anodin de la diffusion critiquée est vainement invoqué ; qu’il ne pourrait avoir un intérêt que dans le cadre de l’évaluation du préjudice de M. X Y ; qu’en outre, compte tenu du litige né entre les deux protagonistes, M. X Y a manifestement intérêt à ne pas servir la promotion de son ancien agent ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu de se prononcer sur l’existence d’une faute déontologique de M. B-C dont celui-ci se défend, qui n’est pas l’objet du litige et qui relève de la compétence de la juridiction ordinale dont il dépend ;

Considérant que M. B-C est responsable des liens hypertexte donnant accès aux articles litigieux dès lors qu’ils sont accessibles à partir du site internet qu’il a créé à son nom ;

Que la référence à la loi du 29 juillet 1881 et le moyen tiré de ce que M. X Y devrait mettre en cause les directeurs de publication des journaux concernés sont dépourvus de toute pertinence ;

Que l’insertion sur le site internet de M. B-C des liens hypertexte permettant la reproduction, la diffusion et l’exploitation de l’image et du nom de M. X Y, sans son autorisation, a porté atteinte, tant au droit dont ce dernier dispose sur son image qu’à son droit au

nom ;

Que M. X Y est fondé à demander réparation de ses préjudices ;

Sur les préjudices de M. X Y

Considérant que l’appelant fait valoir que les faits relatés sont anodins et que M. X Y ne caractérise pas en quoi il aurait subi un préjudice moral du fait de la publication de ces liens hypertextes ; qu’il n’avait aucune notoriété avant 2014, soit à l’époque des faits litigieux ; que les premiers juges ont octroyé des sommes déraisonnables et disproportionnées au titre du préjudice moral de M. X Y qui ne peut être évalué qu’en prenant en considération l’utilisation réelle de son site ; que celui-ci était peu visité en 2013 et qu’à titre d’information, du fait de l’existence d’affaires médiatiques en 2016, celui-ci avait une moyenne de 126 utilisateurs par mois de février à avril ;

Que M. X Y réplique qu’il a subi un préjudice moral né de l’exploitation commerciale de son image et de son nom ; qu’il ajoute qu’en dépit des multiples relances adressées à M. B-C afin de faire cesser toute association entre son nom et le sien, M. B-C n’a apporté de modification au site litigieux qu’à compter de l’ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de Paris le 26 novembre 2013 lui faisant interdiction sous astreinte d’utiliser son nom et son image ;

Qu’il sollicite en réparation la somme de 45 000 euros se décomposant comme suit :

—  15 000 euros pour le préjudice moral résultant de l’atteinte au droit à l’image,

—  15 000 euros en réparation du préjudice patrimonial résultant de l’atteinte portée à l’image,

—  15 000 euros pour le préjudice moral et patrimonial résultant de l’atteinte portée au nom ;

***

Considérant que la seule constatation de la violation du droit à l’image ou du droit au nom, ouvre droit à réparation ;

Considérant que le préjudice doit être apprécié à la date de la décision ;

Que M. X Y fait à juste titre valoir qu’il joue actuellement en équipe nationale du Portugal et qu’il est l’un des coéquipiers du joueur Ronaldo aux côtés duquel il a gagné le championnat d’Europe des nations en 2016 ; qu’en outre M. B-C fait lui-même valoir qu’il a largement amélioré la notoriété de son ancien client ;

Que M. X Y invoque légitimement le désagrément né de l’utilisation non autorisée de son nom et de son image associés au nom de son ancien mandataire avec lequel il se trouve en conflit d’intérêts dès lors que le site laisse croire au public que le footballeur participe ou approuve l’opération promotionnelle de l’avocat et, de façon plus générale, opère un rapprochement entre sa personne et l’activité de Maître B-C ; qu’il doit être rappelé que l’un des liens hypertexte donne accès au journal anglais dailystar et à la photographie d’une jeune femme assise dont la nudité est partiellement masquée par un exemplaire du journal en question qu’elle tient à hauteur de sa poitrine ; que l’association de ce cliché au nom de M. X Y lui est d’autant plus préjudiciable ; qu’elle est la conséquence du lien hypertexte inséré par M. B-C , même s’il est constant que ce dernier n’est pas délibérément à l’origine du « spam » ;

Considérant qu’il est établi par M. B-C que le lien avec le journal Dailystar a été supprimé le 13 novembre 2013 ;

Considérant que la réparation des préjudices moraux de M. X Y nés des atteintes à son droit à l’image et à son droit au nom, a été exactement évaluée par le tribunal à deux sommes de 10 000 euros ;

Que M. X Y qui ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un préjudice patrimonial du fait de l’atteinte portée à son image, est débouté de sa demande de ce chef ;

Sur la demande de dommages et intérêts de M. X Y pour appel abusif

Considérant que M. X Y sollicite la condamnation de M. B-C à lui payer la somme de 10 000 euros compte tenu du caractère abusif et dilatoire de l’appel de M. B-C qui a seulement pour finalité de reporter l’exécution de la décision entreprise et qui révèle une véritable animosité de sa part à l’encontre de son ancien client ;

Mais considérant que l’exercice d’une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, d’erreur blâmable, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol ; qu’à défaut pour M. X Y de faire la démonstration de l’existence de l’une de ces conditions, sa demande de dommages et intérêts doit être rejetée ;

Sur la demande de dommages et intérêts de M. B-C pour procédure abusive

Considérant que M. B-C soutient que M. X Y n’a de cesse de mettre à mal sa réputation et que la procédure initiée à son encontre en février 2014 est abusive et avait pour seul but de l’intimider au regard de sa demande de taxation d’honoraires pendante devant la cour d’appel de Paris, suite à la décision du bâtonnier de l’ordre rendue le 12 décembre 2013 ; qu’il demande 20 000 euros en réparation de ses préjudices moraux, professionnels et financiers, du fait de la procédure abusive, diffamatoire et dilatoire introduite contre lui ;

Mais considérant que M. X Y voit sa demande partiellement accueillie, de sorte que l’action qu’il a diligentée ne saurait être qualifiée d’abusive ;

Que M. B-C sera débouté de sa demande ; que le jugement est confirmé de ce chef ;

Considérant que le tribunal a exactement statué sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile ; qu’en conséquence le jugement entrepris sera également confirmé sur ces points ;

Considérant que M. B-C, qui succombe en son recours, sera condamné aux dépens d’appel ;

Qu’en cause d’appel, l’équité commande d’allouer à M. X Y la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. X Y de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif,

Condamne M. B-C à payer à M. X Y la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne M. B-C aux dépens d’appel.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 26 janvier 2018, n° 16/00669