Cour d'appel de Versailles, 4e chambre 2e section, 12 mars 2018, n° 16/03942
Chronologie de l’affaire
Sur la décision
Référence : | CA Versailles, 4e ch. 2e sect., 12 mars 2018, n° 16/03942 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Versailles |
Numéro(s) : | 16/03942 |
Décision précédente : | Tribunal de grande instance de Pontoise, 11 avril 2016, N° 12/03199 |
Dispositif : | Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
- Président : Laurence ABGRALL, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties : Syndicat des copropriétaires SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE DES P LANTS A (95000) CERGY
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 72C
4e chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 MARS 2018
N° RG 16/03942
AFFAIRE :
Epoux X
C/
SDC DE LA RESIDENCE DES PLANTS A CERGY
([…]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Avril 2016 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° Chambre : 1re
N° RG : 12/03199
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Bruno ADANI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur C D X
[…]
[…]
Madame B E Z épouse X
[…]
[…]
Représentant : Maître Patrick LAMARRE substitué par Maître Thierry ALLAIN, avocat postulant et plaidant du barreau du VAL D’OISE, N° du dossier 5412 vestiaire : 28
APPELANTS
****************
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE LA RESIDENCE DES PLANTS 1 RUE DES PLANTS A CERGY ([…] représenté par son syndic la société FONCIA VAUCELLES
N° de Siret : 445 323 058 R.C.S. PONTOISE
Ayant son siège […]
[…]
elle-même prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Bruno ADANI de la SELARL ADANI, avocat postulant et plaidant du barreau du VAL D’OISE, N° du dossier 206146
vestiaire : 183
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Janvier 2018 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laurence ABGRALL, président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Laurence ABGRALL, Président,
Madame Brigitte AZOGUI-CHOKRON, Président,
Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,
FAITS ET PROCÉDURE :
M. X et Mme Z, son épouse, sont propriétaires dans la […]
([…] et soumise au statut de la copropriété des immeubles bâtis, des lots n° 2227 et 290 constitués
d’un pavillon d’habitation de 6 pièces et d’un parking extérieur, qui sont donnés à bail.
Invoquant une violation de l’article 9 du règlement de copropriété relatif aux modalités d’occupation
des lots, le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic en exercice, la société SMP
Immobilier à laquelle a succédé la société Foncia Vaucelles, après avoir été autorisé par ordonnance
du 16 décembre 2010 à faire constater par huissier de justice les conditions d’occupation de leurs
lots, a, par acte du 17 avril 2012, assigné M. et Mme X pour qu’il leur soit ordonné de faire cesser
les occupations multiples de leurs lots.
Par jugement contradictoire du 12 avril 2016, le tribunal de grande instance de Pontoise a :
— dit que Monsieur F-D X et Madame B Z, son épouse, devraient mettre un terme à
la location multiple de leur appartement dans le mois suivant la signification du présent jugement,
— dit que passé ce délai ils y seraient contraints sous astreinte de 100 € par jour de retard pendant une
durée de trois mois,
— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement,
— condamné Monsieur F-D X et Madame B Z, à payer au syndicat des
copropriétaires une indemnité de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du
code de procédure civile,
— condamné Monsieur F-D X et Madame B Z, aux entiers dépens qui
comprendront le constat dressé par Maître J le 13 janvier 2011 et seront recouvrés
conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Par déclaration du 26 mai 2016, M. X et Mme Z ont interjeté appel de ce jugement.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 3 avril 2017, M. X et Mme Z, demandent à
la cour de :
A titre principal,
— Déclarer les concluants recevables et bien fondés en leur appel,
— Réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau, :
— Dire et juger non écrite la clause du règlement de copropriété contenue en son article 9 chapitre I
Titre I stipulant que « la transformation des locaux en pièces meublées destinées à être louées à des
personnes distinctes est interdite ».
En conséquence,
— Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence des Plants de l’ensemble de ses demandes,
fins, moyens et conclusions.
A titre subsidiaire,
— Déclarer mal fondé le syndicat des copropriétaires en l’ensemble de ses demandes, fins, moyens et
conclusions et l’en débouter.
En tout état de cause,
— Débouter le syndicat des copropriétaires de son appel incident et le condamner à payer aux
concluants la somme de :
* 2.000 € au titre de dommages et intérêts,
* 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— Condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de première instance et d’appel,
Par ses dernières conclusions signifiées le 2 octobre 2017, le syndicat des copropriétaires de la
résidence des Plants demande à la cour de :
Vu les Articles 8, 9 et 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965,
Vu l’article 9 du règlement de copropriété,
Vu le procès-verbal de constat de la SCP G H I J, Huissiers de
Justice Associés au PLESSIS BOUCHARD, en date du 13 janvier 2011,
— Constater que Monsieur C-D X et Madame B E Z ont loué leurs lots sous
forme de chambres meublées à des personnes distinctes,
— Dire et juger que Monsieur X et Madame Z ont, ce faisant, contrevenu à l’article 9 du
règlement de copropriété,
En conséquence,
— Confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
— Ordonner à Monsieur X et Madame Z de faire cesser toute occupation et/ou sous location des
biens immobiliers […], lots […] et 2227, dépendant de
l’ensemble immobilier Résidence des Plants sous une nouvelle astreinte de 300 euros par jour de
retard à compter de l’arrêt à intervenir.
— Condamner Monsieur X et Madame Z à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence
des Plants la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de
procédure civile,
— Condamner Monsieur X et Madame Z aux entiers dépens, lesquels comprendront notamment
les frais de constat et le coût de la contribution au titre de l’aide juridique, dont recouvrement au
profit de Maître Bruno Adani, SELARL Adani, Avocat, conformément aux dispositions de l’article
699 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 3 octobre 2017.
'''''
SUR CE, LA COUR :
Attendu qu’aux termes de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 :
'Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot; il use et jouit
librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni
aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ;'
Attendu que l’article 8 de la même loi dispose :
'Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en
dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux
actes, par ses caractères ou sa situation ;'
Attendu qu’il résulte de ces dispositions que l’usage de son lot par chaque copropriétaire ne peut être
limité par le règlement de copropriété, que sous réserve que cette limitation, soit elle même justifiée
par la destination de l’immeuble ;
Attendu qu’en l’espèce il n’est pas contesté que la destination de la Résidence des Plants est
l’habitation : Article 8 du règlement de copropriété : 'L’immeuble est destiné à usage d’habitation’ ;
Attendu que l’article 9 ) du même règlement de copropriété, situé dans le Titre I :
'Destination de l’immeuble ', Chapitre 1 :'Usage des parties privatives ', a) 'occupation', stipule
notamment :
' Les logements ne pourront être occupés que bourgeoisement ou utilisés que concurremment
à l’habitation et à l’exercice d’une profession autre que commerciale.
(…)
La transformation des locaux en pièces meublées destinées à être louées à des personnes distinctes
est interdite ';
Attendu qu’il n’est pas contesté non plus que la copropriété est constituée de 265 pavillons dont
certains sont contigus, ainsi que d’espaces verts et de voies de circulation ;
Attendu qu’il résulte de la description des lieux et de photographies versées aux débats que les biens
en cause sont certes, accolés les uns aux autres pour certains d’entre eux, mais qu’il s’agit de pavillons
qui disposent d’entrées séparées et n’ont donc pas d’escaliers, de paliers ou couloirs communs
comparables à ce qui est rencontré dans un immeuble constitué d’appartements ;
Qu’en conséquence, l’occupation du pavillon litigieux par cinq personnes distinctes ainsi qu’il résulte
du constat effectué par huissier de justice le 13 janvier 2011 à la demande du syndicat des
copropriétaires, dont il n’est pas soutenu ni allégué qu’elle soit supérieure à la capacité d’accueil de ce
pavillon, ne peut avoir, sur les logements voisins, un impact différent de celui qui résulterait de
l’occupation par une famille de six personnes ;
Que pour les mêmes raisons tenant à la configuration de la résidence, le fait que les occupants, dans
une colocation meublée, soient appelés à changer plus fréquemment que dans une location ordinaire,
ne peut davantage être source de nuisances supplémentaires substantielles incompatibles avec la vie
de la copropriété et l’occupation bourgeoise prévue au règlement, puisqu’il existe une autonomie de
chaque logement et qu’en outre la densité et la taille des pavillons dans cette copropriété induisent
par elles mêmes déjà des allées et venues, circulations et déménagements nombreux des occupants ;
Que l’argument invoqué par le syndicat des copropriétaires, tenant à la 'prolifération des véhicules
automobiles, à la démission totale des obligations des occupants incompatible avec la vie en
copropriété, ou à la perturbation de la tranquillité’ en cas de colocation, n’est nullement établie ;
Que l’on peut ajouter en toute hypothèse que, l’autorisation par le règlement de copropriété, de
l’exercice de professions libérales, comme celle de médecin, est de nature à générer, en journée, une
'prolifération de véhicules’ dans la résidence bien plus importante que celle qui pourrait résulter d’une
colocation meublée ;
Attendu enfin qu’en l’espèce, le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas la preuve de
quelconques nuisances générées par la présence de colocataires dans le pavillon de M. et Mme X
;
Que ces derniers produisent au contraire le témoignage de deux copropriétaires parfaitement
satisfaits de leur voisinage ;
Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que, compte tenu des caractéristiques de la
résidence des Plants, la colocation meublée des pavillons n’est pas incompatible avec la clause
d’occupation bourgeoise contenue dans le règlement de copropriété et que l’interdiction de l’article 9
a) du règlement de copropriété n’est donc justifiée ni par la destination de la résidence telle qu’elle
résulte de son règlement et de ses caractéristiques, ni par une atteinte aux droits des autres
copropriétaires ;
Qu’elle doit en conséquence être déclarée non écrite et le jugement infirmé sur ce point ;
Sur la demande de dommages-intérêts :
Attendu que les époux X n’établissent pas en quoi l’action du syndicat des copropriétaires, fondée
sur une disposition expresse du règlement de copropriété, aurait dégénéré en abus ;
Que le fait que cette disposition soit déclarée non écrite ne constitue pas un abus dès lors qu’un débat
juridique fourni a eu lieu entre les parties sur ce point ;
Que le fait que d’autres copropriétaires n’aient pas fait l’objet de poursuites pour des circonstances
analogues n’est pas de nature à apporter cette preuve ; Qu’il s’agit d’un argument qui n’est opérant
qu’au soutien d’une action en annulation d’une décision d’assemblée générale, ainsi que l’a retenu le
tribunal ;
Qu’ils seront déboutés de leur demande ;
Sur les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens :
Attendu que le sens de la présente décision conduit à infirmer le jugement dans ses dispositions
relatives aux dépens et aux frais irrépétibles, à condamner le syndicat des copropriétaires, partie
succombante, aux entiers dépens et à rejeter sa demande formée au titre de l’article 700 du code de
procédure civile ;
Attendu qu’il parait équitable de le condamner à payer aux époux X une somme de 1 500 euros
au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant contradictoirement,
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau,
Déclare non écrite la clause n° 9 a) du règlement de copropriété de la Résidence des Plants à Cergy
en ce qu’elle stipule que : 'La transformation des locaux en pièces meublées destinées à être louées à
des personnes distinctes est interdite',
Déboute le syndicat des copropriétaires de l’ensemble de ses demandes,
Déboute M. et Mme X de leur demande de dommages-intérêts,
Condamne le syndicat des copropriétaires à payer à M. et Mme X la somme de 1 500 euros au
titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne le syndicat des copropriétaires
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement
avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame Laurence ABGRALL, président, et par Madame Nathalie MULOT, greffier,
auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Textes cités dans la décision