Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 10 septembre 2020, n° 19/07640
Chronologie de l’affaire
Sur la décision
Référence : | CA Versailles, 16e ch., 10 sept. 2020, n° 19/07640 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Versailles |
Numéro(s) : | 19/07640 |
Décision précédente : | Tribunal de grande instance de Versailles, JEX, 30 septembre 2019, N° 19/03175 |
Dispositif : | Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée |
Sur les parties
- Président : Sylvie NEROT, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties : Société ALLOVTC c/ SA MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES, SAS SINEQUAE
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
16e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 10 SEPTEMBRE 2020
N° RG 19/07640 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TRHP
AFFAIRE :
Y X
C/
SA MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Octobre 2019 par le Juge de l’exécution de VERSAILLES
N° RG : 19/03175
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur Y X
né le […] à […]
de nationalité Française
[…]
[…]
Société à responsabilité limitée à associé unique agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité,
N° Siret : 804 533 867 (RCS Bobigny)
[…]
[…]
Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 – N° du dossier 24728
Représentant : Me Jonathan BELLAICHE de la SELARL GOLDWIN SOCIÉTÉ D’AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 103
APPELANTS
****************
SA MERCEDES BENZ FINANCIAL SERVICES
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
N° Siret : 304 974 249 (RCS Versailles)
[…]
[…]
Représentant : Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637
Représentant : Me Marion HAAS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 1539
Prise en son établissement secondaire sis […], […] à […], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
N° Siret : 489 329 805 (RCS Boulogne-sur-Mer)
[…]
[…]
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20191124
INTIMÉES
****************
Composition de la cour :
L’affaire était fixée à l’audience publique du 19 juin 2020 pour être débattue devant la Cour composée de :
Madame Patricia GRASSO, Président,
Madame Sylvie NEROT, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
En application de l’article 8 de l’ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 portant, notamment, adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, il a été décidé par le président que la procédure susvisée se déroulerait sans audience.
Les parties en ont été avisées par le greffe le 02 juin 2020.
Ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi.
Greffier : Madame Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Agissant en vertu d’une ordonnance aux fins de saisie-appréhension rendue le 07 août 2018 par le
juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Bobigny, rendue exécutoire le 26 décembre
2018, la société Mercedes Benz Financial Services France (ci-après : Mercedes) a fait dresser par la
Sas Sinequae, huissiers de justice à Calais, le 25 janvier 2019 un procès-verbal d’immobilisation avec
enlèvement du véhicule Mercedes-Benz immatriculé EP 568 YF faisant l’objet d’un contrat avec
option d’achat signé en août 2017 avec la société Allovtc Sarl à associé unique (dont Monsieur
X est le gérant) et résilié le 28 juin 2018, lequel procès-verbal a été dénoncé le 04 février 2019 à
la débitrice.
Par jugement contradictoire rendu le 1er octobre 2019 le juge de l’exécution du tribunal de
grande instance de Versailles, saisi par assignation des 02 et 07 mai 2019 de la société Allovtc et
par Monsieur X d’une contestation de la mesure délivrée à l’encontre de la société Mercedes et
de la société d’huissiers, a :
• dit la société Allovtc et Monsieur Y X recevables en leurs demandes,
• débouté la société Allovtc et Monsieur Y X de l’ensemble de leurs contestations et demandes, y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
• débouté la société Mercedes Benz Financial Services France de sa demande reconventionnelle,
• condamné in solidum la société Allovtc et Monsieur Y X aux dépens,
• condamné in solidum la société Allovtc et Monsieur Y X à verser à la société Mercedes Benz Financial France la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
• rappelé que la présente décision bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Par dernières conclusions notifiées (n° 3) le 20 mai 2020 la société à responsabilité limitée à
associé unique Allovtc et Monsieur Y X, appelants de ce jugement selon déclaration
reçue au greffe le 30 octobre 2019, demandent à la cour, au visa des articles R 123-138 du code de
commerce, 1240, 1241 du code civil, 31, 112, 114, 654, 659, 693 et 700 du code de procédure civile,
R 222-11, R 223-13 du code des procédures civiles d’exécution :
• de déclarer la société Allovtc et Monsieur Y X recevables et bien fondés en leur appel et en leurs prétentions, d’infirmer partiellement le jugement rendu le 1er octobre 2019 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Versailles et, par conséquent,
in limine litis : de prononcer la nullité de l’acte d’immobilisation du véhicule de marque Mercedes
immatriculé EP 568 YF en date du 25 janvier 2019,
• d’ordonner la mainlevée de la saisie immobilisation pour remise au propriétaire du véhicule de marque Mercedes immatriculé EP 568 YF exploité par Monsieur Y A et la société Allovtc,
• d’ordonner la restitution du véhicule de marque Mercedes immatriculé EP 568 YF à Monsieur Y X et à la société Allovtc,
sur le fond :
• de déclarer que la saisie du véhicule de marque Mercedes immatriculé EP 568 YF exploité par Monsieur Y X et la société Allovtc était irrégulière et abusive en ce qu’elle n’était pas conforme aux dispositions de l’ordonnance du 7 août 2018 rendue par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Bobigny,
• de condamner in solidum la société Sinequae et la société Mercedes au versement de dommages et intérêts d’un montant de 32.208 euros en réparation du préjudice matériel subi par la société Allovtc,
• de condamner in solidum la société Sinequae et la société Mercedes au versement de dommages et intérêts d’un montant de 5.000 euros en réparation du préjudice moral subi par la société Allovtc,
• de condamner in solidum la société Sinequae et la société Mercedes au versement de dommages et intérêts d’un montant de 5.000 euros en réparation du préjudice moral subi par Monsieur X,
• de condamner in solidum la société Mercedes Benz Financial Services et la société Sinequae au paiement de toutes les sommes irrégulièrement mises à la charge de la société Allovtc en raison des frais d’enlèvement, de garde et d’accès au véhicule de marque Mercedes immatriculé EP 568 YF,
• de débouter la société Mercedes Benz Financial Services France de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
• de condamner in solidum la société Mercedes Benz Financial Services et la société Sinequae à verser la somme de 2.000 euros pour chacun des appelants, à savoir Monsieur X et la société Allovtc, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
• de condamner la société Mercedes Benz Financial Services et la société Sinequae aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par maître Pedroletti, avocat au Barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions (n° 2) notifiées le 03 juin 2020, la société anonyme Mercedes Benz
Financial Services France prie la cour, visant les articles 31, 122, 659 du code de procédure civile,
R 223-12 du code des procédures civiles d’exécution, 1240 et 1241 du code civil :
• de déclarer la société Mercedes Benz Financial Services France recevable et bien fondée en son appel incident,
• d’infirmer le jugement des chefs de l’intérêt à agir de Monsieur Y X et de la demande de la société Mercedes Benz Financial Services France de réparation de son préjudice pour procédure abusive et, statuant à nouveau :
• de déclarer Monsieur Y X irrecevable en ses demandes pour défaut d’intérêt à agir,
• de condamner « solidairement » la société Allovtc et Monsieur Y X au paiement d’une somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
• de confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
en tout état de cause :
• de débouter la société Allovtc et Monsieur Y X de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
• de condamner « solidairement » la société Allovtc et Monsieur Y X à payer à la société Mercedes Benz Financial Services France la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
• de les condamner sous la même solidarité aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de maître Arena, avocat, conformément à l’article 699 Cpc.
Par dernières conclusions notifiées le 05 juin 2020, la société par actions simplifiée Sinequae,
huissiers de justice à Calais, demande à la cour, au visa des articles L.112-2, L.111-1, L.111-3,
R.121-15, R.222-11, R.222-13, R.222-15, R.222-16, R.223-8, R.223-12 du code des procédures
civiles d’exécution, 1240 du code civil, 659 du code de procédure civile et du Règlement Général sur
la Protection des Données n°2016/679 :
• de déclarer Monsieur Y X et la Société Allovtc irrecevables et mal fondés en leur appel et en leurs prétentions,
• de confirmer partiellement le jugement rendu le 1er octobre 2019 par le Juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Versailles et, par conséquent,
• de dire que le véhicule Mercedes Classe C, immatriculé EP-568-YF, est un véhicule saisissable,
• de constater l’absence de préjudice subi par la société Allovtc et Monsieur Y X,
• de dire, par conséquent, que la responsabilité civile délictuelle de la SAS Sinequae n’est pas engagée,
• de constater que la signification de l’ordonnance rendue par le juge de l’exécution est
• régulière, que le procès-verbal d’immobilisation avec enlèvement du 25/01/2019 est régulier, que la dénonciation du procès-verbal d’immobilisation avec enlèvement du 25/01/2019 est régulière et, en conséquence, de rejeter la demande de mainlevée,
• de rejeter les demandes de dommages intérêts, formulées à l’encontre de la SAS Sinequae, par la Société Allovtc et Monsieur Y X,
• de rejeter la demande de condamnation in solidum de la SAS Sinequae et de la société Mercedes Benz Financial Service France au paiement des sommes mises à la charge de la société Allovtc suite à la saisie du véhicule Mercedes Classe C, immatriculé EP-568-YF,
en tout état de cause :
• de confirmer le jugement en ce qu’il déboute la société Allovtc et Monsieur Y X de l’ensemble de leurs contestations et demandes, y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
• de confirmer le jugement en ce qu’il condamne in solidum la société Allovtc et Monsieur Y X aux dépens,
• de confirmer le jugement en ce qu’il rappelle que ledit jugement bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit,
• de condamner solidairement la société Allovtc et Monsieur Y X à verser à la SAS Sinequae la somme de 3 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
• de condamner la société Allovtc et Monsieur Y X aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Oriane Dontot, Aarpi-JRF Avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 09 juin 2020. A l’audience du 19 juin 2020, l’affaire a été
retenue dans les conditions prévues par l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020
portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non
pénale, les parties n’ayant pas manifesté leur opposition, au vu de l’avis du greffe en date du 02 juin
2020. La mise à disposition de l’arrêt par application de l’article 10 de la même ordonnance a ensuite
été annoncée pour le 10 septembre 2020.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’intérêt à agir de Monsieur X
Attendu qu’alors que le premier juge a rejeté cette fin de non-recevoir opposée par la société
Mercedes à l’action de Monsieur X au motif qu’en sa qualité de représentant légal de la société
Allovtc il avait intérêt à agir, la société Mercedes reprend cette fin de non-recevoir en faisant valoir
qu’il est étranger au contrat de location avec option d’achat qui la lie à la seule Sarl unipersonnelle
Allovtc, ajoutant que s’il fait état de sa qualité de caution, il n’en justifie pas ;
Attendu qu’il y a lieu de considérer que contrairement à l’entreprise individuelle qui ne dispose pas
d’une personnalité morale, la Sarl unipersonnelle, comme l’est en l’espèce la société Allovtc, dispose
d’une personnalité morale distincte de celle de son gérant ou de son associé unique ;
Que Monsieur X n’est donc pas recevable à agir à titre personnel en contestation de la mesure
d’exécution initiée à l’encontre de la société Allovtc, seule cocontractante de la société Mercedes;
Qu’il ressort néanmoins des termes du dispositif des dernières conclusions des appelants que
Monsieur X se prévaut d’un préjudice moral et poursuit, à l’encontre de la société Sinequae, la
réparation d’un préjudice personnel distinct de celui causé à la personne morale ; qu’à ce dernier titre,
il doit être déclaré recevable à agir en la présente procédure ;
Qu’il sera ajouté dans ce sens à la décision du premier juge ;
Sur la régularité de la procédure de saisie-appréhension
Attendu que les appelants poursuivent à nouveau la nullité de la saisie du fait de l’absence préalable
de notification de l’ordonnance afin d’appréhension sur injonction rendue le 07 août 2018 et, pour ce
faire, tirent argument d’une signification à la société Allovtc de cet acte par la société d’huissiers
Sinequae mandatée par la société Mercedes, à la date du 11 octobre 2018, selon les modalités de
l’article 659 du code de procédure civile, à l’adresse portée sur son extrait Kbis (soit : […]
Michel 93200 ' Saint-Denis) alors que celle-ci aurait dû être signifiée à l’adresse personnelle de son
gérant ;
Que, pour ce faire, ils font état d’une mention portée sur son extrait Kbis, au demeurant relevée par
l’huissier instrumentaire (à savoir : « mention portée d’office : cessation d’activité à l’adresse déclarée
' article R 123-125 du code de commerce »), ainsi que de trois courriers tendant à démontrer que tant
la société Mercedes que la société Sinequae avaient connaissance de son adresse personnelle (à
Aubervilliers) et reprochent au premier juge de n’avoir pas tiré les conséquences de ce qu’il énonçait,
à savoir : « Il est admis que la signification sur le fondement de l’article 659 précité est nulle dès lors
que le créancier connaissait l’adresse à laquelle le débiteur pouvait être joint et que l’huissier de
justice n’a effectué aucune diligence pour délivrer l’acte à cette adresse » ; qu’ils se prévalent du grief
causé par cette nullité dès lors que cette signification n’a pas permis à la société de connaître le
montant de la dette, d’obtenir des délais ou de pouvoir rétablir le contradictoire à la suite d’une
ordonnance rendue sur requête ;
Qu’en tout état de cause, ajoutent-ils, l’huissier ne rapporte pas la preuve de l’envoi de la copie de ces
actes par pli recommandé, conformément à l’article 659 alinéa 2 précité ;
Attendu, ceci rappelé, que la mention portée d’office par le greffier du tribunal de commerce sur
l’extrait Kbis de la société Allovtc résulte de la réception, par celui-ci, d’une information sur la
cessation de l’activité de cette société à l’adresse déclarée ; qu’elle a été inscrite par ce greffier à la
suite du rappel fait à cette société de ses obligations déclaratives ;
que l’ensemble de ces vaines diligences et la radiation administrative consécutivement opérée en
vertu de l’article R 123-168 du code de commerce conduisent à considérer que la société Allovtc
ainsi sanctionnée, a méconnu, en connaissance de cause, les prescriptions réglementaires relatives à
la modification de son siège social et qu’elle ne saurait valablement opposer aux sociétés intimées ses
propres manquements ;
Qu’il y a d’ailleurs lieu de relever que la société Allovtc se montre quelque peu fluctuante sur son
siège social, lieu où l’huissier était tenu de délivrer l’acte, comme le fait valoir la société Sinequae ;
que la société Allotvtc précise, en effet, dans sa déclaration d’appel reçue le 30 octobre 2019 qu’elle
est domiciliée « 57 rue Charles Michel ' 93200 Saint-Denis », que dans ses conclusions d’appel,
comme dans son inscription au RCS elle indique que son siège se situe au n° 52 de la même rue alors
qu’en première instance il est mentionné comme étant situé en son n° 51 ;
Qu’en toute hypothèse, elle n’est pas fondée à prétendre qu’au jour de la signification de
l’ordonnance, soit le 11 octobre 2018, la société Mercedes et l’huissier disposaient d’une adresse où
pouvait lui être valablement remis l’acte de signification alors qu’il l’a régulièrement signifié au siège
social mentionné au RCS, ainsi que cela résulte de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ
2e, 19 mai 2005, pourvoi n° 03-15608 // 19 février 2015, pourvoi n° 13-28140, publiés au
bulletin) ;
Qu’au surplus et comme retenu par le tribunal, les trois correspondances dont font état les appelants
pour affirmer que l’huissier aurait dû signifier l’acte à l’adresse personnelle de Monsieur X
Y (36 rue de La Courneuve ' 93300 ' Aubervilliers) concernent un autre contrat
(n° 0001212303) portant sur un autre véhicule immatriculé DT 677 TT et que l’huissier peut se
prévaloir de l’obligation à laquelle il est tenu de se soumettre au Règlement général sur la protection
des données proscrivant l’utilisation d’informations sur un débiteur qui auraient pu être collectées
dans un autre dossier ;
Qu’enfin, l’acte d’huissier signifiant l’acte selon les dispositions de l’article 659 du code de procédure
civile mentionne qu’il a satisfait aux exigences du deuxième alinéa de cet article et que les actes
d’huissiers, officier publics, bénéficient d’une présomption de validité et font foi jusqu’à inscription
de faux ;
Que la contestation de la société Allovtc sur ce point n’est pas fondée et que le jugement qui en
décide ainsi doit être confirmé ;
Sur l’engagement de la responsabilité délictuelle de l’huissier instrumentaire et de la société
mandante
Sur la demande indemnitaire présentée par la société Allovtc
Attendu que la société appelante incrimine le comportement de la société Sinequae, dont elle
recherche la responsabilité sur le fondement de l’article 1240 du code civile, ayant agi par son
mandataire territorialement compétent, en évoquant un enlèvement irrégulier du véhicule en cause
puisqu’elle ne s’est pas préalablement assurée de la délivrance effective, à elle-même ou à son gérant,
du titre en vertu duquel elle agissait, estimant même que l’huissier a commis une faute intentionnelle
; qu’en outre, le magistrat qui a rendu l’ordonnance autorisant la mesure a biffé la mention suivante:
« disons que l’huissier instrumentaire pourra y procéder en tous lieux et en quelques mains que le
bien se trouve et même sur la voie publique » et que l’huissier a saisi le véhicule alors que Monsieur
X se trouvait à quelques mètres de ce lieu sans prendre le temps de l’en informer ;
Que, s’agissant de la société Mercédès, elle soutient qu’elle était en possession de l’adresse de
monsieur X et se devait de la transmettre à l’huissier :
Qu’il est résulté, précise-t-elle, de la perte de cet outil de travail un préjudice matériel pour l’année
2019 au montant de 32.208 euros correspondant à une période de 330 jours à raison d’un chiffre
d’affaire quotidien moyen de 97,60 euros ; que s’y ajoutent des frais d’enlèvement, de gardiennage et
d’accès au véhicule saisi dont elle n’a pu connaître le montant ainsi qu’un préjudice moral, évalué à
5.000 euros, caractérisé par les difficultés financières et administratives qu’elle a dû affronter comme
les risques quant à sa survie ; qu’elle évoque un sentiment d’injustice et le « discrédit notoire » jeté
sur sa personne entraînant une dégradation de ses relations avec ses cocontractants ;
Attendu, ceci rappelé, que la société Allovtc n’est pas fondée à se prévaloir d’une faute de l’huissier
dans les diligences accomplies pour signifier l’ordonnance autorisant la mesure, comme il a été dit
ci-avant, pas plus que de leur irrégularité pour dresser le procès-verbal d’immobilisation, la société
Sinequae mandatée pour ce faire ayant agi en vertu d’une ordonnance aux fins d’appréhension rendue
le 07 août 2018, revêtue, en l’absence d’opposition, de la formule exécutoire le 25 août 2018 et dans
le respect de l’article R 222-16 du code des procédures civiles d’exécution qui renvoie aux modalités
codifiées aux articles R 222-2 et suivants ;
Que la société Sinequae fait en outre valoir, sans que l’appelante n’y apporte la contradiction, que la
mention biffée dont tire argument l’appelante se révélait redondante en regard des dispositions de
l’artcle R 223-8 du code des procédure civiles d’exécution et ne se justifiait donc pas ;
Qu’il ne saurait, par ailleurs, être imputé à faute à la société Mercedes de n’avoir pas communiqué
l’adresse de monsieur X pour les motifs précédemment développés ;
Que la société Allovtc doit, par conséquent, être déboutée de l’ensemble de ses demandes
indemnitaires à l’encontre de la société d’huissiers, comme en a jugé le juge de l’exécution ;
Sur la demande indemnitaire présentée par Monsieur X
Attendu que cet appelant réclame réparation d’un préjudice moral distinct de celui subi par la société
Allovtc et reproche à l’huissier d’avoir saisi son outil de travail sans la moindre information préalable
sur la procédure encourue alors même qu’il connaît des difficultés financières importantes et de pas
l’avoir informé, non plus, sur le lieu de sa détention avant le 05 février 2019 alors qu’il était chargé
de son entretien ; que son angoisse est d’autant plus importante, ajoute-t-il, que la société Mercedes
exploite ce véhicule selon un contrat de location de longue durée ; qu’il s’estime d’autant plus
concerné par le sort de ce véhicule qu’il s’est porté caution personnelle ;
Qu’il se prévaut de l’irrégularité de la procédure de saisie à l’égard de la société Sinequae pour
affirmer qu’il existe un lien de causalité entre la faute de l’huissier et son préjudice ;
Mais attendu que Monsieur X qui est tiers au contrat et ne fait que prétendre qu’il s’est porté
caution de la société débitrice, comme le souligne la société Sinequae, ne peut se prévaloir d’aucune
des fautes qu’il reproche à la société Sinequae, ainsi que jugé précédemment ; que, surabondamment,
la société Mercedes justifie de la cession du véhicule en cause à la date du 03 avril 2019 (pièce 5) ;
Que Monsieur X sera donc débouté de sa demande et le jugement confirmé de ce chef ;
Sur les autres demandes
Attendu qu’il n’est pas démontré que les appelants, qui ont pu se méprendre sur la portée de leurs
droits, aient agi à d’autres fins que celle d’obtenir la nullité de la mesure mise en oeuvre et d’obtenir
réparation des préjudices qu’ils ont cru pouvoir invoquer, de sorte que la société Mercedes doit être
déboutée de sa demande indemnitaire fondée sur l’abus de procédure ;
Attendu que l’équité conduit à condamner in solidum la société Allovtc et Monsieur X à verser
la somme complémentaire de 1.500 euros à chacune des deux sociétés intimées ;
Que, déboutés de ce dernier chef de demande, les appelants qui succombent supporteront les dépens
d’appel ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement entrepris, sauf à préciser que Monsieur X n’est recevable à agir qu’en
réparation de son préjudice personnel ;
REJETTE les entières demandes des appelants ;
CONDAMNE in solidum la société à responsabilité limitée à associé unique Allovtc et Monsieur
Y X à verser la somme complémentaire de 1.500 euros à la société anonyme Mercedes
Benz Financial France, d’une part, et à la société par actions simplifiée Sinequae, d’autre part, et à
supporter les dépens d’appel avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l’article
699 du code de procédure civile.
— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement
avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
— signé par Madame Sylvie NEROT , Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel
la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
Textes cités dans la décision