Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 14 février 2013, 10BX02611, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 12 octobre 2010 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 18 octobre 2010, présentée pour M. G… C…, demeurant…, par Me B… ;

M. C… demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0701695 du 2 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 21 novembre 2006 par laquelle la commission départementale d’aménagement foncier de l’Aveyron a statué à nouveau sur sa réclamation dans le cadre de l’opération de remembrement de la commune de Séverac-le-Château en lui allouant une indemnité de 23 989 euros en raison de l’impossibilité de rétablir l’équilibre du compte de son exploitation ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l’ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l’instruction au 2 novembre 2012 à 12h00 ;

Vu la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 17 janvier 2013 :

— le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, premier conseiller ;

 –  les conclusions de Nicolas Normand, rapporteur public ;

-les observations de Me B… représentant M. C… et de Me D… substituant Me E… pour le conseil général de l’Aveyron ;

1. Considérant que lors de la construction de l’autoroute A75, une opération de remembrement a été menée sur le territoire de la commune de Séverac-le-Château (Aveyron) ; que, par décision du 25 avril 1995, la commission départementale d’aménagement foncier de l’Aveyron a attribué à Mme F… C…, en compensation des parcelles ZP1 et ZK16, les parcelles VL5 et VH3 ; que, par donation partage du 30 juin 1999 M. G… C… est devenu propriétaire desdites parcelles ; que, par jugement du 24 janvier 2002, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision de la commission départementale d’aménagement foncier, au motif qu’elle méconnaissait la règle de l’équivalence entre les apports et les attributions posée par l’article L. 123-4 du code rural et de la pêche maritime ; que le 21 novembre 2006, statuant à nouveau sur la réclamation de M. C…, la commission départementale d’aménagement foncier lui a accordé une indemnité d’un montant de 23 939 euros ; que M. C… relève appel du jugement du 2 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision ;

2. Considérant que les contestations relatives aux indemnités dont les commissions départementales d’aménagement foncier peuvent décider de l’octroi aux propriétaires après remembrement rural ont le caractère de recours de plein contentieux ; qu’il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif a estimé que la demande formée par M. C… relevait du contentieux de l’excès de pouvoir et a ainsi méconnu l’étendue de ses pouvoirs ; que le jugement attaqué doit donc être annulé ;

3. Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C… devant le tribunal administratif de Toulouse ;

4. Considérant que lorsqu’il statue sur un recours dirigé contre une décision par laquelle l’administration détermine le montant d’une indemnité, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention qu’à sa qualité de juge de plein contentieux, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d’examiner le montant de l’indemnité à laquelle à droit l’intéressé, en tenant compte de l’ensemble des circonstances de fait qui résultent de l’instruction ; qu’au vu de ces éléments, il appartient au juge administratif d’annuler ou de réformer, s’il y a lieu, cette décision en fixant alors lui-même le montant de l’indemnité, pour la période en litige, à la date à laquelle il statue ou, s’il ne peut y procéder, de renvoyer l’intéressé devant l’administration afin qu’elle procède à cette fixation sur la base des motifs de son jugement ;

5. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, par une décision du 16 novembre 2005, la commission départementale d’aménagement foncier de l’Aveyron a constaté l’impossibilité de modifier la répartition des terres, décidé de l’attribution à M. C… d’une indemnité en application de l’article L. 121-11 du code rural et mandaté un agent des services fiscaux afin de négocier avec l’intéressé le montant de l’indemnité ; que la décision de la commission départementale d’aménagement foncier du 21 novembre 2006 se borne à fixer le montant de l’indemnité à laquelle l’intéressé a droit ; qu’ainsi, les moyens tirés des vices propres de ladite décision du 21 novembre 2006, de son insuffisante motivation et des vices de procédure dont elle serait entachée, sont inopérants et doivent par suite être écartés ;

6. Considérant qu’aux termes de l’article L. 121-11 du code rural dans sa rédaction applicable à l’espèce : « Lorsque la commission départementale, saisie à nouveau à la suite d’une annulation par le juge administratif, constate que la modification du parcellaire nécessaire pour assurer par des attributions en nature le rétablissement dans leurs droits des propriétaires intéressés aurait des conséquences excessives sur la situation d’autres exploitations, elle peut, par décision motivée, prévoir que ce rétablissement sera assuré par une indemnité à la charge du département, dont elle détermine le montant » ;

7. Considérant, d’une part, que ces dispositions sont issues du X de l’article 83 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux ; qu’aux termes de l’article 95 de la même loi : « 1° L’article 78 et le X de l’article 83 entrent en vigueur à la date de publication de la présente loi (…) 2° Les procédures d’aménagement foncier pour lesquelles l’arrêté préfectoral ordonnant les opérations et fixant le périmètre correspondant sera intervenu à la date d''entrée en vigueur du présent chapitre restent régies par les dispositions en vigueur à la date de l’adoption dudit arrêté, y compris les procédures résultant des arrêtés modificatifs de cet arrêté (…) » ; qu’en application de ces dispositions, les décisions prises par les commissions départementales sur les contestations relatives à des remembrements décidés avant l’entrée en vigueur de la loi du 23 février 2005 restent prises au nom de l’État mais les indemnités qu’elles peuvent décider de verser aux propriétaires intéressés pour les rétablir dans leurs droits sont, dès l’entrée en vigueur de la loi, à la charge du département ; que, par suite, le département de l’Aveyron n’est pas fondé à soutenir que l’opération de remembrement ayant été décidée et réalisée antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 23 février 2005, il ne doit pas supporter la charge de l’indemnité à laquelle a droit M. C… ;

8. Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’instruction que, pour octroyer à M. C… une indemnité de 23 939 euros, la commission départementale d’aménagement foncier de l’Aveyron a retenu une perte de surface de 3 hectares 46 ares, correspondant, à hauteur de 3 hectares 16 ares, à la sous-évaluation de la parcelle apportée composant le lot ZP 1, conformément à ce qu’a jugé cette cour le 10 juin 2004, et à hauteur de 30 ares, au reliquat nécessaire au rétablissement de l’équilibre du compte ; que, toutefois, il résulte du rapport dressé devant la commission et à sa demande par M. A… le 14 novembre 2006, que la parcelle d’attribution VL5, sans tenir compte des dégradations qu’elle a subies postérieurement à son évaluation, a été surévaluée, ce qui équivaut pour le compte de M. C… à une perte de 2 hectares 38 ares ; qu’ainsi, la perte de surface du compte de M. C… doit être regardée comme équivalente à 5 hectares 84 ares ; qu’en retenant une valeur de l’hectare de 6 200 euros sur laquelle s’accordent les parties, et en ajoutant une indemnité de réemploi de 5 000 euros, la somme à laquelle M. C… a droit en application des dispositions rappelées ci-dessus est de 41 208 euros ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de mettre à la charge du département de l’Aveyron la somme de 41 208 euros ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative:

10. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre la charge du département de l’Aveyron la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a, en revanche, pas lieu de faire droit aux conclusions de l’État présentées sur ce fondement ;


DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 2 juillet 2010 est annulé.

Article 2 : Le département de l’Aveyron versera à M. C… la somme de 41 208 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C… est rejeté.

Article 4 : Le département versera à M. C… une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l’État au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 10BX02611

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