Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 30 juin 2016, 15BX01124, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’indivision D…/ A… C… et B… a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de mettre à la charge de l’Etat la somme de 71 434 euros en réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait des dommages causés aux bois par la tempête Klaus survenue le 24 janvier 2009.

Par un jugement n° 1302146 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 avril 2015, l’indivision D…/A…, C… et B… représentée par la SCP Didier Pinet, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 février 2015 ;

2°) de condamner l’Etat à lui payer la somme de 71 434 euros en réparation de son préjudice ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 400 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


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Vu :

 – les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code des assurances ;

 – le code rural et de la pêche maritime ;

 – le code forestier ;

 – la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d’orientation sur la forêt ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Marianne Pouget,

 – et les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Du 24 au 27 janvier 2009, une tempête, dite « Klaus », s’est abattue sur le sud-ouest de la France. Par arrêté interministériel du 28 janvier 2009, l’état de catastrophe naturelle a été constaté dans les départements mentionnés en annexe de l’arrêté « pour les dommages causés par les événements d’intensité anormale non assurables (inondations et coulées de boue, inondations et chocs mécaniques liés à l’action des vagues) qui ne relev(aient) pas de la garantie tempête, ouragans, cyclones prévue par l’article L. 122-7 (1er alinéa) du code des assurances ». L’état de catastrophe naturelle n’ayant pas été reconnu pour les dommages causés aux forêts, le syndicat des sylviculteurs du sud-ouest ainsi que des sylviculteurs des départements de la Gironde et des Landes ont saisi le 5 janvier 2012 le Premier ministre d’une demande d’indemnisation. A la suite du refus implicite du Premier ministre de donner une suite favorable à cette demande, l’indivision D…/ A… C… et B… a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de mettre à la charge de l’Etat la somme de 71 434 euros au titre des préjudices qu’elle estime avoir subis. Elle relève appel du jugement du 3 février 2015 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d’indemnité et sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

2. En premier lieu, aux termes de l’article L. 125-1 du code des assurances applicable aux faits du litige : « Les contrats d’assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l’Etat et garantissant les dommages d’incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l’assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l’objet de tels contrats. En outre, si l’assuré est couvert contre les pertes d’exploitation, cette garantie est étendue aux effets des catastrophes naturelles, dans les conditions prévues au contrat correspondant. / Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises. / L’état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s’est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article (…) ».

3. Il résulte de ces dispositions que seuls peuvent bénéficier du régime spécial d’indemnisation des catastrophes naturelles les dommages qui ne sont pas assurables, soit en raison de leur origine, soit en raison des biens qu’ils affectent.

4. Aux termes de l’article L. 122-7 du code des assurances, dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 applicable aux faits du litige : « Les contrats d’assurance garantissant les dommages d’incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l’assuré contre les effets du vent dû aux tempêtes, ouragans et cyclones, sur les biens faisant l’objet de tels contrats, sauf en ce qui concerne les effets du vent dû à un événement cyclonique pour lequel les vents maximaux de surface enregistrés ou estimés sur la zone sinistrée ont atteint ou dépassé 145 km/h en moyenne sur dix minutes ou 215 km/h en rafales, qui relèvent des dispositions des articles L. 125-1 et suivants du présent code ./ Sont exclus les contrats garantissant les dommages d’incendie causés aux récoltes non engrangées, aux cultures et au cheptel vif hors bâtiments. / Sont également exclus les contrats garantissant les dommages d’incendie causés aux bois sur pied. ».

5. Il résulte de ces dispositions que les dommages causés aux bois sur pied par les effets du vent sont exclus de toute garantie d’assurance même si ces biens sont assurables pour d’autres types de dommages comme ceux causés par l’incendie.

6. L’administration, pour justifier que les dommages causés aux bois sur pied par les effets du vent n’étaient pas exclus de toute garantie d’assurance, ne saurait utilement se prévaloir de l’article L. 351-1 du code forestier qui définit les surfaces forestières considérées comme assurables contre le risque de tempête, les dispositions de ce texte étant entrées en vigueur postérieurement à l’événement climatique à l’origine des préjudices des requérants. L’administration ne peut pas non plus utilement faire valoir que des assureurs, en dehors de toute obligation légale, auraient antérieurement proposé aux sylviculteurs des contrats d’assurances pour ce type de dommage.

7. Il résulte encore des dispositions de l’article D. 361-30 du code rural et de la pêche maritime que les dommages causés aux bois et aux forêts par les effets du vent ne peuvent pas bénéficier des indemnités versées par le fonds national de garantie des calamités agricoles institué par l’article L. 361-1 du même code, contrairement aux dommages de même nature causés aux récoltes non engrangées, aux cultures et au cheptel vif hors bâtiment.

8. Ainsi, l’indivision D…/ A… C… et B… est fondée à soutenir que les dommages causés aux bois sur pied par les effets du vent sont au nombre de ceux qui ne sont pas assurables au sens et pour l’application de l’article L. 125-1 du code des assurances.

9. Il résulte également des dispositions précitées de l’article L. 125-1 du code des assurances que seuls les propriétaires ayant souscrit, pour les biens susceptibles d’en bénéficier, un contrat d’assurance qui les garantit contre les dommages assurables tels que ceux causés notamment par l’incendie et dont les stipulations précisent les modalités d’application de la garantie contre les effets des catastrophes naturelles, peuvent prétendre à la garantie contre les effets des catastrophes naturelles. Or, il résulte de l’instruction que l’indivision D…/ A… C… et B… n’a pas souscrit un tel contrat.

10. En deuxième lieu, la requérante soutient que la responsabilité de l’Etat se trouve également engagée du fait d’une perte de chance de bénéficier de la garantie contre les effets des catastrophes naturelles en raison d’indications erronées fournies par les pouvoirs publics qui les auraient incités à ne pas souscrire pour leurs bois un contrat d’assurance garantissant leurs biens contre des dommages assurables. Toutefois, elle n’établit ni que les informations disponibles antérieurement à l’événement climatique en litige étaient de nature à l’induire en erreur sur le régime d’assurance des dommages causés aux bois ni, en tout état de cause, qu’elle aurait, pour ce motif même, renoncé à souscrire une assurance.

11. En troisième lieu, la requérante ne peut utilement invoquer la responsabilité sans faute de l’Etat du fait de l’article L. 122-7 du code des assurances dans sa rédaction issue de la loi du 9 juillet 2001, dès lors que les dommages causés aux bois sur pied par les effets du vent sont au nombre de ceux qui sont susceptibles de bénéficier de la garantie contre les effets des catastrophes naturelles, ainsi qu’il a été dit au point 8 du présent arrêt.

12. Il résulte de tout ce qui précède que l’indivision D…/ A… C… et B… n’est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d’indemnisation.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamné à verser à la requérante la somme qu’elle demande au titre des frais de procès.

DECIDE

Article 1er : La requête de l’indivision D…/ A… C… et B… est rejetée.

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N° 15BX01124

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