CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 8 juin 2021, 19BX03344, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 4e ch., 8 juin 2021, n° 19BX03344
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 19BX03344
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulouse, 6 juin 2019, N° 1703794
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043639663

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G… E… a demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’arrêté du 22 février 2017 par lequel le maire de la commune de Montvalent a délivré à M. H… un permis de construire n° PC 046 208 16 S0007 régularisant une surface de plancher de 21,60 m² et le changement de destination d’un atelier/abri de jardin en maison d’habitation, ensemble la décision en date du 14 juin 2017 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1703794 du 7 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés A… 9 août et 7 octobre 2019 et le 2 avril 2020, M. E…, représenté par Me F…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 juin 2019 ;

2°) d’annuler l’arrêté de permis de construire en date du 22 février 2017 (PC n° 046 20816S007), ensemble la décision en date du 14 juin 2017 de rejet du recours gracieux ;

3°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de la commune de Montvalent au titre des frais exposés et non compris dans A… dépens.

Il soutient que :

 – le jugement qui se contente de retenir à partir de deux documents photographiques qu’il ne subira qu’une vue partielle de la construction en litige pour retenir son absence d’intérêt à agir est insuffisamment motivé dès lors qu’il ne prend pas en compte A… autres éléments mis en avant pour justifier de son intérêt à agir et notamment la faible distance entre la construction et sa maison, le tissu rural de la zone, l’architecture du bâtiment qui tranche avec son environnement et A… nuisances liés à l’habitation d’un local par au minima deux personnes ;

 – le jugement a examiné la recevabilité de sa demande en se fondant sur une version de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme qui n’était pas encore applicable ;

 – le jugement retient à tort l’irrecevabilité de sa demande ; il est voisin immédiat du projet et a acheté ce bien en milieu rural pour bénéficier de plus de tranquillité ; sa maison d’habitation se situe à environ 20 mètres du projet ; contrairement à ce que retient le jugement et à ce que soutiennent la commune et le pétitionnaire, il a une vue directe sur la construction ; son intérêt à agir doit s’apprécier à la date d’affichage du permis de construire et non au vu de photographie prises en 2019 ; malgré la densification de la végétation, il subit un préjudice de vue dès lors que le bâtiment est clairement visible de plusieurs pièces de vie de sa maison et que A… occupants de cette construction auront également vue sur sa propriété par la fenêtre sud du bâtiment ; contrairement à ce que soutient la commune il habitait sur place depuis fin 2016 même si A… travaux d’édification de sa maison n’étaient pas terminés ;

 – il maintient expressément l’ensemble des moyens présentés en première instance.

Par des mémoires en défense enregistrés le 12 novembre 2019, le 29 mai 2020, M. H…, représenté par Me B…, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. E… au titre des frais exposés et non compris dans A… dépens.

Il soutient que :

 – la requête est irrecevable, dès lors que la pièce adverse n° 31 n’est pas de nature à attester de ce que le recours contentieux a bien été notifié dans le respect des dispositions prévues à l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme ;

 – le jugement est suffisamment motivé et à la supposer fondée, l’erreur de droit alléguée quant à la version applicable de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme au litige, est demeurée sans incidence sur l’appréciation de l’intérêt à agir de M. E… ;

 – le jugement retient à bon droit l’absence d’intérêt à agir ; M. E… ne justifie pas qu’il habitait sur le terrain voisin de la construction à la date d’affichage du permis ; A… pièces produites justifient qu’en octobre 2016 et en mai 2017, la maison, pour laquelle il n’a pas procédé à la déclaration d’achèvement des travaux à la date du 11 octobre 2019, n’était pas achevée ; il a déclaré vivre à une adresse différente à l’occasion de son recours gracieux d’avril 2017 ; à la date d’enregistrement de la déclaration préalable critiquée, il ne résidait pas sur le terrain dont il était propriétaire ; il ne peut invoquer un intérêt à agir à contester le permis de construire de régularisation du 22 février 2017 alors que la construction existait lors de son installation ; il ne peut invoquer un préjudice de vue lié à l’installation d’une piscine démontable installée au cours de l’année 2018 pour A… besoins de la cause à proximité de la limite séparative ; le requérant est mal-fondé à invoquer un préjudice de vue alors que le bâtiment préexistait à la construction de sa maison et qu’il n’a pas non plus fait le choix d’occulter totalement cette construction préexistante par une densification de la végétation ; le caractère rural de la zone n’est pas un argument dès lors que personne ne bénéficie d’un droit acquis au maintien de son environnement proche ;

 – A… moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés ;

 – le recours de M. E… présente un caractère abusif au regard de la faible ampleur de son projet.

Par des mémoires en défense enregistrés le 2 décembre 2019, A… 18 et 20 mai 2020 et des pièces produites le 24 mars 2021, la commune de Montvalent, représentée par Me K…, conclut au rejet de la requête et demande, à titre subsidiaire, que la cour sursoie à statuer en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme afin qu’elle délivre un permis modificatif de régularisation et, en tout état de cause, que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge de M. E… au titre des frais exposés et non compris dans A… dépens.

Elle soutient que :

 – le jugement est suffisamment motivé et à la supposer fondée, l’erreur de droit quant à la version applicable de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme est demeurée sans incidence sur l’appréciation de l’intérêt à agir de M. E… ; le bien-fondé du jugement ne relève pas de la régularité ;

 – le jugement retient à bon droit l’absence d’intérêt à agir ; l’absence de clôture séparative n’est pas de nature à justifier d’un intérêt à agir ; la construction autorisée est de faible ampleur, dans des teintes naturelles se confondant avec l’environnement immédiat ; A… documents photographiques produits suffisent à établir qu’elle n’est que très partiellement visible ; M. H… a été titulaire d’une autorisation d’urbanisme bien avant la réalisation de la maison de M. E… mais cette construction doit être régularisée pour une erreur de métrage ; M. E… a acquis sa propriété en 2011 dans une zone ouverte à l’urbanisation, il ne pouvait ignorer que A… terrains entourant le sien étaient également constructibles ; il ne peut fonder son intérêt à agir sur une perte d’intimité liée à une visibilité ainsi qu’à la présence d’une fenêtre et une table de jardin dans un cadre de vie qu’il estime devoir rester vierge de toute urbanisation ; M. E… n’habitait pas sur la parcelle voisine à la date à laquelle son intérêt à agir doit être apprécié ; l’appréciation de son intérêt à agir est celle d’un propriétaire non-occupant (393801) ; il ne peut donc faire valoir une atteinte aux conditions d’occupation de sa maison comme des préjudices de vue depuis et vers sa maison ; de plus, il ne peut invoquer un préjudice de vue d’une terrasse qu’il n’a pas été autorisé à construire ; il ressort des pièces produites par le requérant qu’il n’a pas édifié sa maison conformément au permis de construire qui lui a été accordé ;

 – A… moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

En application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, A… parties ont été informées par un courrier du 26 avril 2021 que la cour était susceptible de surseoir à statuer pour permettre la régularisation des vices tirés du défaut de motivation et de la méconnaissance des règles d’implantation de l’article AUa7 du règlement du plan local d’urbanisme de la commune de.

Par un mémoire enregistré le 3 mai 2021, M. H… soutient que le permis contesté serait régularisable eu égard à la modification du PLU approuvée le 23 octobre 2017.

Par un mémoire enregistré le 4 mai 2021, la commune de Montvalent soutient que le permis contesté serait régularisable eu égard à la modification du PLU approuvée le 23 octobre 2017.

Vu :

 – A… autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de l’urbanisme ;

 – le code de justice administrative.

A… parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. J… I…,

 – A… conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

 – et A… observations de Me L…, représentant de M. E…, de Me C… substituant Me K…, représentant de la commune de Montvalent et de Me B…, représentant de M. H….

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 décembre 2014, le maire de la commune de Montvalent n’a pas fait opposition à la déclaration préalable de M. H… pour un projet d’édification d’un atelier-abri de jardin d’une surface de 20 m² sur la parcelle cadastrée section AL n° 203 située au lieudit Rouffignac. M. H… a déposé le 6 octobre 2015 une nouvelle déclaration préalable en vue d’un changement de destination de ce local en habitation mais a finalement retiré cette déclaration à la demande du maire. Il a de nouveau déposé une déclaration préalable le 22 avril 2016 en vue de la réalisation d’une habitation de 18 m² pour tenir compte de l’installation des commodités déjà installées dans le bâtiment d’une superficie de 21,60 m² dont la construction était achevée depuis le 1er octobre 2015. L’arrêté du 11 mai 2016 par lequel le maire de la commune ne s’est pas opposé à cette déclaration préalable a été retiré, à la suite du recours gracieux de propriétaires voisins du projet. Le 29 juillet 2016, M. H… a sollicité la délivrance d’un permis de construire pour la création d’une maison d’habitation d’une surface de 21,60 m² par changement de destination d’un atelier. Par un arrêté du 12 septembre 2016, le maire de Montvalent a délivré un permis de construire autorisant uniquement la régularisation de la surface de plancher à 21,60 m². Suite à un recours gracieux du pétitionnaire, un nouvel arrêté en date du 22 février 2017 a autorisé la régularisation de la construction d’une surface de plancher de 21,60 m² et le changement de destination de l’atelier / abri de jardin en maison d’habitation. Par une décision du 14 juin 2017, le maire de la commune a rejeté le recours gracieux exercé par M. E…, voisin du projet contesté. M. E… relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté du 22 février 2017 précité et de la décision du 14 juin 2017 rejetant son recours gracieux.

Sur la fin de non-recevoir :

2. Aux termes de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme : « En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un certificat d’urbanisme, ou d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans A… mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant un certificat d’urbanisme, ou une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code. L’auteur d’un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d’irrecevabilité du recours contentieux qu’il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l’auteur de la décision et, s’il y a lieu, au titulaire de l’autorisation est réputée accomplie à la date d’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. ».

3. Il résulte de ces dispositions que, conformément à l’objectif de sécurité juridique qu’elles poursuivent, l’obligation faite à l’auteur d’un recours contentieux dirigé contre un certificat d’urbanisme, ou contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol de notifier ce recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation, est prolongée par une obligation similaire lorsque, le recours ayant été en tout ou en partie rejeté, son auteur ou, le cas échéant, un intervenant en demande ayant qualité de partie à l’instance, décide d’interjeter appel du jugement de première instance. L’appel doit être notifié de la même façon que le recours introduit devant A… premiers juges, à l’auteur de la décision attaquée et, s’il y a lieu, au titulaire de l’autorisation.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. E… a justifié avoir procédé, par courriers recommandés en date du 12 août 2019 dont il a été accusé réception par A… défendeurs, à la notification au maire de Montvalent et au titulaire du permis de construire attaqué de son appel dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 juin 2019. Ainsi, M. H…, qui a accusé réception du courrier précité, ne peut utilement critiquer la régularité de cette notification par le renseignement automatisé de la date d’envoi au lieu et place d’un cachet postal. Par suite, la fin de non-recevoir opposée sur le fondement des dispositions précitées de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme doit être écartée.

Sur la régularité du jugement :

5. Aux termes de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme dans sa version applicable à la date d’introduction de la demande de première instance de M. E… : « Une personne autre que l’Etat, A… collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, (…) que si la construction, l’aménagement ou A… travaux sont de nature à affecter directement A… conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement (…) ». Aux termes de l’article L. 600-1-3 du même code : « Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l’intérêt pour agir contre un permis de construire, (…) s’apprécie à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ».

6. Il résulte de ces dispositions qu’il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement A… conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que A… atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par A… parties, en écartant le cas échéant A… allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction.

7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le 1er octobre 2015, M. H… a achevé la construction d’un bâtiment ne correspondant ni par sa surface ni par sa destination à l’abri de jardin / atelier autorisé par l’arrêté de non-opposition du 19 décembre 2014 et qui, compte tenu de ces caractéristiques aurait dû faire l’objet d’une demande de permis de construire. Après avoir tenté d’obtenir la régularisation de cette construction par le dépôt de plusieurs déclarations préalables, il a déposé une demande de permis de construire en date du 29 juillet 2016, affichée le jour même en mairie, permis qui lui a été accordé par l’arrêté du 22 février 2017 en litige. M. H… n’est par conséquent pas fondé à soutenir que l’intérêt à agir de M. E… doit être apprécié en tenant compte de l’existence d’un bâtiment irrégulièrement construit depuis le 1er octobre 2015.

8. En deuxième lieu, M. E…, dont la qualité de voisin immédiat n’est pas contestée, est propriétaire depuis 2011 de la parcelle cadastrée section AL n° 168 contigüe au terrain d’assiette de la construction de M. H… et a obtenu, par un arrêté du 8 avril 2015, un permis de construire l’habitation qu’il occupe actuellement. Ainsi, si, M. E… ne justifie pas qu’il résidait dans cette habitation dès le 29 juillet 2016, son intérêt à contester le permis de construire délivré à M. H… doit être apprécié en tenant également compte de l’atteinte que la construction autorisée est susceptible de porter aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de cette maison. M. H… et la commune de Montvalent ne sont donc pas fondés à soutenir que l’intérêt à agir de M. E… doit être restreint à celui d’un propriétaire non occupant d’un terrain non bâti.

9. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le permis de construire en litige autorise le changement de destination en maison d’habitation d’une construction implantée en limite séparative parcellaire, bordée par un muret en pierre d’une hauteur d’un mètre seulement, permettant une visibilité sur le fonds voisin en dehors des zones où la végétation fait écran. Compte tenu de cette implantation à une distance d’environ vingt mètres de la maison du requérant, de la vue directe de ce dernier sur la construction autorisée depuis certaines pièces de sa maison et depuis son jardin et de la vue qu’auront A… occupants de la maison litigieuse sur la terrasse et le jardin du requérant, ce changement de destination est de nature à affecter directement A… conditions d’occupation et de jouissance du bien de M. E…. Dès lors ce dernier est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a estimé qu’il ne justifiait pas d’un intérêt lui donnant qualité à agir à l’encontre de l’arrêté du 22 février 2017 et a rejeté sa demande comme irrecevable. Par suite, sans qu’il soit besoin d’examiner A… autres moyens dirigés contre la régularité du jugement attaqué, ce dernier doit être annulé.

10. Il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. E… devant le tribunal administratif de Toulouse.

Sur la fin de non-recevoir :

11. L’article L. 600-13 du code de l’urbanisme a été déclaré inconstitutionnel par une décision du Conseil constitutionnel n° 2019-777 QPC du 19 avril 2019 qui précise en outre dans son point 12 que la déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes A… affaires non jugées définitivement à la date de cette décision. Par suite, la commune de Montvalent et M. H… ne sont pas fondés à soutenir que la requête présentée par M. E… était caduque faute d’avoir été complétée dans le délai de trois mois en application de l’article L. 600-13 du code de l’urbanisme.

Sur la légalité de l’arrêté du 22 février 2017 :

12. En premier lieu, aux termes de l’article R. 431-8 du code de l’urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L’état initial du terrain et de ses abords indiquant, s’il y a lieu, A… constructions, la végétation et A… éléments paysagers existants ; 2° A… partis retenus pour assurer l’insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L’aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; (…) e) Le traitement des espaces libres, notamment A… plantations à conserver ou à créer (…) ".

13. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l’ensemble des documents exigés par A… dispositions du code de l’urbanisme, ou que A… documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n’est susceptible d’entacher d’illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où A… omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

14. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que la demande déposée le 29 juillet 2016 concernait la régularisation de la construction d’une maison préfabriquée à usage d’habitation de dimensions modestes, ayant déjà fait l’objet de plusieurs déclarations préalables. Compte tenu des informations figurant dans le dossier de demande de permis de construire, et notamment la notice de présentation du projet et A… documents graphiques produits, le maire de Montvalent a pu déterminer sans difficulté le cadre naturel et urbanistique du projet ainsi que le traitement des espaces libres. Le moyen tiré de l’incomplétude de la demande de permis de construire doit donc être écarté.

15. En deuxième lieu, d’une part, aux termes de l’article L. 152-3 du code de l’urbanisme : « A… règles et servitudes définies par un plan local d’urbanisme : 1° Peuvent faire l’objet d’adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes (…) ». Aux termes de l’article L. 424-3 de ce code : « Lorsque la décision rejette la demande ou s’oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l’intégralité des motifs justifiant la décision (…) / Il en est de même lorsqu’elle (…) comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d’urbanisme applicables ». Aux termes de l’article R.424-5 de ce code : « Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s’il s’agit d’un sursis à statuer, elle doit être motivée. / Il en est de même lorsqu’une dérogation ou une adaptation mineure est accordée. ».

16. D’autre part, aux termes de l’article 8 du règlement du plan local d’urbanisme applicable : « Adaptations mineures – A… dispositions des articles 3 à 13 des règlements de chacune des zones ne peuvent faire l’objet que d’adaptations mineures lorsqu’elles sont rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration de la parcelle ou le caractère des constructions avoisinante, la conservation d’éléments végétaux de qualités etc ». Aux termes de l’article AUa 7 du règlement de la zone AUa1 de ce plan : « A… constructions doivent s’implanter à une distance au moins égale à la moitié du bâtiment à édifier avec un minimum de 3 mètres (…) ».

17. Il n’est pas contesté que le permis de construire en litige autorise le changement de destination d’une construction implantée sur la limite séparant A… parcelles cadastrée section AL n° 203 et 168, contrairement aux dispositions précitées de l’article AUa 7 du règlement du plan local d’urbanisme imposant une distance minimale d’implantation de 3 mètres par rapport aux limites séparatives. A supposer que la configuration de la parcelle de M. H… aurait justifié des adaptations mineures aux règles fixées par l’article AUa7, l’implantation de la construction telle qu’elle est prévue par le projet ne saurait être assimilée à une adaptation mineure. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article AUa7 est donc fondé.

18. Au surplus, si la demande de permis de construire indique que la parcelle n° 203 est particulièrement étroite et longue et sollicite la mise en oeuvre de la faculté de bénéficier d’une adaptation mineure dans la mise en oeuvre des dispositions de l’article AUa7 du règlement du plan local d’urbanisme, l’arrêté ne contient aucune motivation justifiant l’octroi d’adaptations mineures au bénéfice du pétitionnaire et ne satisfait donc pas à l’obligation de motivation prévue par A… dispositions du code de l’urbanisme précitées au point 15. Le moyen tiré du défaut de motivation est donc fondé.

19. En dernier lieu, selon A… dispositions de l’article 6 des dispositions générales du plan local d’urbanisme auquel renvoie l’article AUa11 du règlement de la zone AUa1 : « A… constructions, A… travaux de rénovation et de restauration ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages. / A… constructions doivent s’intégrer par rapport aux immeubles voisins de manière à ne pas rompre l’harmonie de l’entourage immédiat que ce soit pour A… façades, A… toitures, A… cheminées, ou le parement des façades ».

20. Il ressort des pièces du dossier que la construction en litige est édifiée sur un terrain situé dans le sous-secteur AUa1 aux abords du hameau patrimonial de Rouffignac dans un environnement naturel présentant un intérêt paysager mais sans unité architecturale compte tenu de la disparité des constructions implantées sur de vastes parcelles. Ce projet de construction d’une habitation de petite dimension d’une surface de plancher de 21,60 m² et d’une hauteur de 3,45 mètres implantée en limite séparative, ne porte pas atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants dès lors que malgré son origine industrielle, le revêtement des murs extérieurs imite l’aspect du bois. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article 6 des dispositions générales du plan local d’urbanisme doit donc être écarté.

21. Il résulte de ce qui précède que M. E… est seulement fondé à soutenir que l’arrêté du 22 février 2017 méconnait A… dispositions de l’article AUa7 du règlement de la zone AUa du plan local d’urbanisme et n’est pas suffisamment motivé.

Sur l’application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme :

22. Aux termes de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme : « Sans préjudice de la mise en oeuvre de l’article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que A… autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité A… parties à présenter leurs observations, jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation, même après l’achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité A… parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ».

23. Ces dispositions permettent au juge, lorsqu’il constate qu’un vice entachant la légalité du permis de construire peut faire l’objet d’une mesure de régularisation, de rendre une décision avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, A… modalités de cette régularisation. Un vice de procédure, dont l’existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision litigieuse, doit en principe être réparé selon A… modalités prévues à cette même date. S’agissant des vices entachant le bien-fondé du permis de construire, le juge doit se prononcer sur leur caractère régularisable au regard des dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue et constater, le cas échéant, qu’au regard de ces dispositions le permis ne présente plus A… vices dont il était entaché à la date de son édiction.

24. Il résulte de l’instruction et notamment des pièces produites en défense le 24 mars 2021, que, postérieurement à l’arrêté attaqué, le plan local d’urbanisme de la commune de Montvalent a fait l’objet d’une modification approuvée le 23 octobre 2017. A la date du présent arrêt, le 2) de l’article AUa7 du règlement du plan local d’urbanisme prévoit désormais que « A… constructions pourront être implantées soit sur une limite séparative, soit en retrait. ».

25. Il résulte de ces nouvelles dispositions que le projet de construction en litige peut être implanté sur la limite séparative et que l’arrêté l’y autorisant n’a pas à être motivé en l’absence d’adaptation mineure à la règle d’urbanisme applicable. A… illégalités entachant le permis de construire du 22 février 2017 à la date de son édiction, telles que retenues aux points 17 et 18 du présent arrêt, ont donc disparu à la date à laquelle la cour statue.

26. Il résulte de tout ce qui précède que M. E… n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêté du 22 février 2017 par lequel le maire de Montvalent a délivré à M. H… un permis de construire régularisant la construction édifiée en octobre 2015.

Sur A… frais exposés et non compris dans A… dépens :

27. A… dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E…, qui n’est pas la partie perdante pour l’essentiel dans la présente instance, A… sommes réclamées par M. H…, d’une part, et la commune de Montvalent, d’autre part, au titre des frais exposés et non compris dans A… dépens. Dans A… circonstances de l’espèce, il y a lieu en revanche de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de la commune de Montvalent au titre des frais exposés par M. E… et non compris dans A… dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1703794 du 7 juin 2019 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E… devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 3 : La commune de Montvalent versera la somme de 1 500 euros à M. E… sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. G… E…, à la commune de Montvalent et à M. D… H….

Copie sera adressée pour information au préfet du Lot.

Délibéré après l’audience du 11 mai 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. J… I…, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2021.

Le rapporteur,

Stéphane I… La présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet du Lot en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne A… voies de droit commun contre A… parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

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N° 19BX03344

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CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 8 juin 2021, 19BX03344, Inédit au recueil Lebon