Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 31 décembre 2013, 12DA01856, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Douai, 3e ch. - formation à 3 (bis), 31 déc. 2013, n° 12DA01856
Juridiction : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro : 12DA01856
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Lille, 6 novembre 2012, N° 1007162
Identifiant Légifrance : CETATEXT000028466290

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2012 présentée pour M. C… A…, demeurant…, par Me B… D… ; M. A… demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1007162 du 7 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 12 octobre 2010 du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique ayant autorisé son licenciement ;

2°) d’annuler la décision du 26 février 2010 de l’inspecteur du travail autorisant son licenciement et celle du 12 octobre 2010 du ministre du travail ayant annulé la décision de l’inspecteur du travail et ayant autorisé son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 décembre 2013, présentée pour la SAS Rexam Beverage Can ;

Vu le code du travail ;

Vu l’accord national de la métallurgie sur les problèmes généraux de l’emploi du 12 juin 1987 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,

- les observations de Me Anne Blamart, avocat de la société Rexam Beverage Can ;

1. Considérant que M. A…, mécanicien atelier et membre suppléant de la délégation unique du personnel de la société Rexam Beverage Can, relève appel du jugement du 7 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 12 octobre 2010 du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique ayant autorisé son licenciement pour motif économique ;

Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 26 février 2010 de l’inspecteur du travail :

2. Considérant que la décision du 26 février 2010 de l’inspecteur du travail de Dunkerque autorisant la société Rexam Beverage Can à procéder au licenciement de M. A… a été annulée par la décision du 12 octobre 2010 du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique ; que les conclusions du requérant sont dès lors irrecevables ;

Sur la légalité de la décision du 12 octobre 2010 du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique :

En ce qui concerne le motif économique du licenciement :

3. Considérant qu’en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis des fonctions de délégué du personnel ou du mandat de membre du comité d’entreprise bénéficient, dans l’intérêt de l’ensemble des travailleurs qu’ils représentent, d’une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l’un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l’appartenance syndicale de l’intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif à caractère économique, il appartient à l’inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si la situation de l’entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la possibilité d’assurer le reclassement de celui-ci en France sur des emplois correspondant à son niveau de qualification et de rémunération au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu’à ce titre, lorsque la demande est fondée sur la cessation d’activité de l’entreprise, celle-ci n’a pas à être justifiée par l’existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l’entreprise ; qu’il appartient alors à l’autorité administrative de contrôler, outre le respect des exigences procédurales légales et des garanties conventionnelles, que la cessation d’activité de l’entreprise est totale et définitive, que l’employeur a satisfait, le cas échéant, à l’obligation de reclassement prévue par le code du travail et que la demande ne présente pas de caractère discriminatoire ;

4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la société Rexam Beverage Can, filiale du groupe britannique Rexam, qui fabriquait des boîtes en acier pour boisson sur le site de Gravelines, a totalement cessé son activité en janvier 2010 ; que dès lors, le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que la réalité du motif économique invoqué par l’employeur était établie ; que les moyens tirés de l’absence de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l’entreprise sont inopérants ;

En ce qui concerne le respect de la procédure de licenciement :

5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2323-15 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : « Le comité d’entreprise est saisi en temps utile des projets de restructuration et de compression des effectifs. (…). » ; qu’aux termes de l’article L. 1233-30 de ce code dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l’employeur réunit et consulte le comité d’entreprise. / Il peut procéder à ces opérations concomitamment à la mise en oeuvre de la procédure de consultation prévue par l’article L. 2323-15. / Le comité d’entreprise tient deux réunions séparées par un délai qui ne peut être supérieur à : (…) 2° Vingt et un jours lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ; / (…) Une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais plus favorables aux salariés. / (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 1233-35 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu’il recourt à l’assistance d’un expert-comptable, le comité d’entreprise tient une deuxième réunion au plus tôt le vingtième et au plus tard le vingt-deuxième jour après la première. / Il tient une troisième réunion dans un délai courant à compter de sa deuxième réunion. Ce délai ne peut être supérieur à : / (…) / 2° Vingt et un jours lorsque le nombre de licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ; / (…) / Une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais plus favorables aux salariés » ;

6. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le comité d’entreprise de la société Rexam Beverage Can a été informé lors de sa réunion extraordinaire du 29 septembre 2009 du projet de fermeture du site de Gravelines devant entraîner la suppression de 137 emplois ; que la circonstance que le conseil d’administration du groupe Rexam avait décidé dès juillet 2009 de soutenir les initiatives proposées de réduction des capacités de production des boîtes boisson en Europe est sans incidence sur la régularité de la procédure de consultation préalable du comité d’entreprise ;

7. Considérant qu’après la désignation d’un expert-comptable à l’issue de la première réunion du comité d’entreprise de la société Rexam Beverage Can, ce comité a été à nouveau réuni le 21 octobre 2009 dans le délai prévu à l’article L. 1233-35 précité du code du travail ; qu’il est constant que cette réunion a été suspendue dans l’attente du rapport de l’expert ; qu’elle s’est poursuivie au cours de trois autres réunions tenues les 4, 9 et 17 novembre 2009 pour se clôturer le 21 décembre 2009 par la signature d’un accord d’entreprise approuvé par l’ensemble des organisations syndicales ; que dans les circonstances de l’espèce, le dépassement des délais n’a pas été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision prise, ni privé M. A… d’une garantie substantielle ; que le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure de licenciement doit être écarté ;

En ce qui concerne les obligations de reclassement :

8. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : « Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient. / Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. » ;

9. Considérant que pour apprécier les possibilités de reclassement, l’autorité administrative, saisie d’une demande d’autorisation de licenciement pour motif économique par une société appartenant à un groupe, ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de la société où se trouve l’emploi du salarié protégé concerné par le licenciement ; qu’elle est tenue, dans le cas où cette dernière relève d’un groupe, et pour ceux des salariés qui ont manifesté à sa demande leur intérêt de principe pour un reclassement à l’étranger, de faire porter son examen sur les possibilités de reclassement pouvant exister dans les sociétés du groupe, y compris celles ayant leur siège à l’étranger, dont les activités ou l’organisation offrent à l’intéressé, compte tenu de ses compétences et de la législation du pays d’accueil, la possibilité d’exercer des fonctions comparables ;

10. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que onze propositions de reclassement écrites et fermes correspondant à un emploi de même catégorie comme technicien de maintenance pour deux postes au Brésil, un en Chine et un en Indonésie, comme responsable de maintenance en Allemagne, comme responsable de maintenance mécanique, mécanicien de maintenance corrective ou mécanicien prévention sur deux sites différents aux Etats-Unis, comme technicien de conversion au Brésil ou comme technicien en Chine ont été faites à M. A… qui n’y a pas donné suite ; qu’il ne peut dès lors utilement se prévaloir du fait que son employeur ne lui aurait pas adressé de propositions de reclassement dans un emploi de niveau inférieur ; que la circonstance qu’il ne parle aucune langue étrangère n’est pas de nature à établir l’absence de loyauté de la société Rexam Beverage Can dans l’obligation de reclassement lui incombant alors qu’il est constant qu’elle ne disposait d’aucun emploi disponible en France, que le plan de sauvegarde de l’emploi prévoyait une formation d’adaptation comprenant une formation linguistique et les dispositions susvisées du code du travail lui faisaient obligation de proposer un emploi dans l’ensemble des entreprise du groupe ;

11. Considérant qu’aux termes de l’article 28 de l’accord national de la métallurgie sur les problèmes généraux de l’emploi du 12 juin 1987, si l’entreprise « est amenée à envisager un licenciement collectif d’ordre économique, elle doit : (…) / – rechercher les possibilités de reclassement à l’extérieur de l’entreprise en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l’emploi (…) / – informer la commission territoriale de l’emploi (…) » ; qu’il ressort des pièces du dossier que la société Rexam Beverage Can a informé le 30 novembre 2009 la commission paritaire territoriale de l’emploi de son projet de licenciement collectif pour motif économique et lui a communiqué la liste des postes supprimés ; que cette liste a été mise à jour le 12 janvier 2010 ; qu’ainsi, cette commission était saisie depuis près de trois mois quand la demande d’autorisation administrative de licenciement de M. A… a été introduite auprès de l’inspecteur du travail ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la société Rexam Beverage Can, dont au demeurant quelques salariés ont pu retrouver un emploi au sein d’une société concurrente, aurait manqué à son obligation conventionnelle de reclassement doit être écarté ;

12. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C… A…, à la société Rexam Beverage Can et au ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N°12DA01856

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