CAA de DOUAI, 3ème chambre - formation à 3, 24 mai 2017, 17DA00455, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Douai, 3e ch. - formation à 3, 24 mai 2017, n° 17DA00455
Juridiction : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro : 17DA00455
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Lille, 10 janvier 2017, N° 1607871, 1607872 et 1607873
Identifiant Légifrance : CETATEXT000034940614

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. W… S…, M. L… AF…, M. AM… G…, M. L… BG…, M. E… T…, M. BM… AG…, M. Y… AH…, M. AY… J…, M. BO… AT…, M. BC… V…, M. BO… AU…, M. AO… AX…, M. AM… X…, M. AW… BK…, M. BJ… C…, M. D… AJ…, M. AV… M…, M. H… Z…, M. F… AK…, M. AL… AA…, M. I… BD…, M. BJ… AB…, M. K… BL…, M. B… AQ…, M. BV…, M. R… BR…, M. AM… AR…, M. A… O…, M. AP… AD…, M. BI… BS…, M. BQ… P…, M. BH… BF… et M. Y… AZ… et le comité d’entreprise de la société TIM, ont demandé au tribunal administratif de Lille d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 août 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant plan de sauvegarde de l’emploi portant sur un projet de licenciement collectif pour motif économique établi par la société TIM.

Par un jugement nos 1607871, 1607872 et 1607873 du 11 janvier 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 mars 2017, le comité d’entreprise de la société TIM, M. BM… AG…, M. BO… AT…, M. AW… BK…, M. BJ… C…, M. Y… AZ…, M. H… Z…, M. F… AK…, M. AL… AA…, M. I… BD…, M. R… BR…, M. A… O…, et M. BQ… P…, représentés par Me BE… BN…, demandent à la cour :

1°) d’annuler le jugement du 11 janvier 2017 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 août 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant plan de sauvegarde de l’emploi portant sur un projet de licenciement collectif pour motif économique établi par la société TIM ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat et de la société TIM le versement à chaque appelant de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

 – la procédure d’information consultation du comité d’entreprise est entachée d’irrégularités ;

 – le délai préfix de consultation du comité d’entreprise a été méconnu ;

 – une réunion irrégulière du comité d’entreprise s’est tenue le 8 août 2016 ;

 – l’information du comité d’entreprise a été insuffisante ;

 – différents éléments ne figuraient pas dans le dossier présenté à l’homologation ;

 – le comité d’entreprise n’a pas disposé d’une information complète sur le motif économique ;

 – le délai de 7 jours prévus à l’article R. 2323-1-1 du code du travail entre la consultation du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et celle du comité d’entreprise n’a pas été respecté ;

 – le dossier soumis à l’homologation était incomplet ;

 – le plan de sauvegarde de l’emploi est insuffisant ;

 – le comité d’entreprise n’a pas été informé sur l’utilisation du crédit d’impôt compétitivité emploi comme prévu à l’article L. 2323-26-2 du code du travail ;

 – les mesures du plan de sauvegarde de l’emploi ne sont pas proportionnés aux moyens du groupe Fritzmeier ;

 – les deux offres valables d’emploi sont insuffisantes ;

 – il n’existe aucune dispositif spécifique pour les salariés les plus fragiles ;

 – le montant de l’allocation de congé reclassement est insuffisant ;

 – le montant du budget de formation est imprécis ;

 – plusieurs conditions d’attribution des indemnités prévues par le plan de sauvegarde de l’emploi sont imprécises ;

 – le plan de sauvegarde de l’emploi est insuffisant au regard de l’obligation de reclassement interne ;

 – ce plan méconnaît aussi l’obligation conventionnelle de reclassement ;

 – il est insuffisant au regard des critères d’ordre des licenciements ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2017, la société TIM, Me BU… AS… et Me U… BA…, en leur qualité d’administrateurs judiciaires de la société TIM, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge solidaire des appelants d’une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par le comité d’entreprise de la société TIM et autres ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2017, le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le comité d’entreprise de la société TIM et autres ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 21 avril 2017, le comité d’entreprise de la société TIM, M. BM… AG…, M. BO… AT…, M. AW… BK…, M. BJ… C…, M. Y… AZ…, M. H… Z…, M. F… AK…, M. AL… AA…, M. I… BD…, M. R… BR…, M. A… O…, M. BQ… P… concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2017, Me BU… AS… et Me U… BA…, en leur qualité d’administrateurs judiciaires de la société TIM, Me BH… Q… et Me AN… AC… en leur qualité de mandataires judiciaires de la société TIM, représentés par Me BB… BP…, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge solidaire des appelants d’une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 28 avril 2017, la clôture d’instruction a été fixée au 28 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code du travail ;

 – l’accord national du 12 juin 1987 sur les problèmes généraux de l’emploi ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

 – les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public,

 – et les observations de Me N… AE…, représentant la société TIM et ses co-administrateurs et mandataires judiciaires et M. AI… BT…, représentant le ministre chargé du travail.

1. Considérant que la société par actions simplifiée TIM qui fabrique de cabines pour engins de chantier emploie 621 salariés en contrat à durée indéterminée ; que son unique établissement est implanté à Quaëdypre (Nord) et qu’elle fait partie du groupe Fritzmeier ; que le comité d’entreprise de la société TIM et douze salariés de cette société relèvent appel du jugement du 11 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l’annulation de la décision du 19 août 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l’emploi portant sur un projet de licenciement collectif pour motif économique de 123 salariés de la société TIM ;

Sur l’irrégularité de la procédure d’information consultation du comité d’entreprise :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1233-61 du code du travail : « Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l’employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. (…) » ; que les articles L. 1233-24-1 et L. 1233-24-4 du même code prévoient que le contenu de ce plan de sauvegarde de l’emploi peut être déterminé par un accord collectif d’entreprise et qu’à défaut d’accord, il est fixé par un document élaboré unilatéralement par l’employeur ; qu’enfin, aux termes de l’article L. 1233-57-3 du même code : " En l’absence d’accord collectif (…) l’autorité administrative homologue le document élaboré par l’employeur mentionné à l’article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (…) la régularité de la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise (…) et le respect par le plan de sauvegarde de l’emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l’entreprise, l’unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d’accompagnement prévues au regard de l’importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d’adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 » ; que, lorsqu’elle est saisie par un employeur d’une demande d’homologation d’un document élaboré en application de l’article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d’un plan de sauvegarde de l’emploi, il appartient à l’administration de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, que la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise a été régulière ; qu’elle ne peut légalement accorder l’homologation demandée que si le comité a été mis à même d’émettre régulièrement un avis, d’une part sur l’opération projetée et ses modalités d’application et, d’autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l’emploi ;

3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1233-30 du code du travail : " I.-Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l’employeur réunit et consulte le comité d’entreprise sur : 1° L’opération projetée et ses modalités d’application, conformément à l’article L. 2323-31 ; 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d’emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d’ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d’accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l’emploi ./ Les éléments mentionnés au 2° du présent I qui font l’objet de l’accord mentionné à l’article L. 1233-24-1 ne sont pas soumis à la consultation du comité d’entreprise prévue au présent article. / Le comité d’entreprise tient au moins deux réunions espacées d’au moins quinze jours. II. – Le comité d’entreprise rend ses deux avis dans un délai qui ne peut être supérieur, à compter de la date de sa première réunion au cours de laquelle il est consulté sur les 1° et 2° du I, à : (…) 2° Trois mois lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ; Une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais différents. / En l’absence d’avis du comité d’entreprise dans ces délais, celui-ci est réputé avoir été consulté. / (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 1231-1 de ce code : « Lorsque les délais prévus par les dispositions légales du présent titre expirent un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, ils sont prorogés jusqu’au premier jour ouvrable suivant » ;

4. Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées en matière de délais s’appliquent en l’absence d’accord collectif prévoyant un délai différent ; qu’un accord collectif est constitué, à peine de nullité, par un acte écrit, en français, comprenant la signature des différentes parties, notifié à chacune d’entre elles, déposé auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi et accompagné des pièces précisées à l’article D. 2231-7 du code du travail ; que la production, par le comité d’entreprise de la société TIM, de deux documents intitulés « Accord de méthode », affirmant que « les parties signataires s’accordent pour reporter au 22 août 2016 l’issue de la procédure d’information et de consultation en cours sur le projet de restructuration des effectifs pour tenir compte de la période des congés estivaux », documents portant, pour l’un, daté du 8 août 2016, la signature du syndicat CGT sans la mention des nom et prénom du signataire et pour l’autre, non daté, reçu le 4 août 2016 par la société TIM, la signature du syndicat FO suivi d’un nom et d’un prénom, n’établit pas la réalité d’un accord collectif régulièrement déposé conformément aux dispositions de l’article D. 2231-2 du code du travail et prévoyant un délai différent de celui de trois mois fixé par les dispositions du II de l’article L. 1233-30 précité ;

5. Considérant, en second lieu, qu’il est constant que la première réunion du comité d’entreprise de la société TIM relative à la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) s’est déroulée le 4 mai 2016 ; que, si le délai de trois mois prévu par les dispositions précitées du II de l’article L. 1233-30 du code du travail expirait le 3 août 2016, jour chômé, il ressort des pièces du dossier que l’entreprise TIM était fermée pour congés annuels du samedi 23 juillet 2016 au dimanche 7 août 2016 ; que la seule circonstance qu’une équipe de cinq personnes était présente sur le site, durant ces deux semaines, pour veiller à l’entretien des machines et au gardiennage, n’établit pas que la société n’aurait pas cessé son activité durant cette période et que celle-ci n’aurait pas été chômée ; que, dès lors, en l’absence d’accord collectif, la direction de la société TIM a pu reporter la septième réunion du comité d’entreprise au premier jour ouvrable, soit le lundi 8 août 2016 ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que les délégués syndicaux de la société TIM ont été destinataires le 22 juillet 2016 d’un courrier la direction de l’entreprise, les informant qu’en l’absence de signature d’un accord de méthode avant le 8 août 2016, prorogeant le délai de la procédure d’information et de consultation jusqu’au 22 août 2016, la réunion du comité d’entreprise destinée à rendre un avis sur le plan de sauvegarde de l’emploi se tiendrait le 8 août 2016 ; qu’en l’absence des membres du comité d’entreprise, aucun n’avis n’a pu être rendu ; que, dès lors, en application des dispositions précitées de l’article L. 1233-30 du code du travail, cette instance est réputée avoir été consultée ; que dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du délai de trois mois de consultation du comité d’entreprise et de la tenue irrégulière de cette réunion du fait de manoeuvres frauduleuses de la direction de la société TIM doit, par suite, être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu’il est constant que les membres du comité d’entreprise de la société TIM ont eu connaissance, lors de leur réunion du 21 juillet 2016, d’une version du plan de sauvegarde de l’emploi différente de celle communiquée le 8 août 2016 à l’administration en vue de son homologation ; que cette dernière version, qui comportait un décalage de quinze jours dans le calendrier prévisionnel des opérations de mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l’emploi avec la version du 21 juillet 2016, correspondait en fait au projet initial envisagé en cas d’absence d’accord collectif ; que la version soumise à homologation comprenait, en revanche, un doublement du budget de formation, passant de 600 000 euros à 1 230 000 euros, des aides à la mobilité élargies au reclassement effectué en France au lieu d’être limité aux reclassements à l’étranger, la mise en place d’une allocation temporaire dégressive au taux unique de 310 euros sur une période de douze mois ; que ces modifications n’ont pas conduit à un bouleversement général de l’économie du projet ; qu’en tout état de cause, la seule modification du calendrier ne remet pas en cause les mesures d’amélioration de ce projet au bénéfice des salariés, introduites par la société TIM en réponse au courrier d’observations du 27 juillet 2016 de la Direccte du Nord-Pas-de-Calais et n’ont pas fait obstacle à ce que le comité d’entreprise exprime son avis en toute connaissance de cause ; que dès lors, et sans que les demandeurs puissent sérieusement soutenir que les documents produits seraient illisibles, l’information du comité d’entreprise a été assurée de façon complète ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que les membres du comité d’entreprise de la société TIM ont choisi à l’unanimité le cabinet Menway, lors de leur réunion du 16 juin 2016, comme antenne mobilité emploi, après sa présentation le 1er juin 2016, avec l’accord de la direction de l’entreprise ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la charte de ce cabinet ne figurait pas dans le dossier présenté à l’homologation doit être écarté ;

9. Considérant, en sixième lieu, que la circonstance que le point 9-2 du document unilatéral relatif aux modalités de rupture du contrat de travail au titre du plan de départ volontaire comporte une disposition sur laquelle il appartiendrait au juge judiciaire de se prononcer, relative à la renonciation à toute action en justice en cas de mise en oeuvre des modalités de rupture du contrat de travail, n’est pas de nature à établir que la version homologuée du plan de sauvegarde de l’emploi aurait été incomplète ou que l’information du comité d’entreprise aurait été tronquée ;

10. Considérant, en septième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi du Nord-Pas-de-Calais a demandé le 18 juillet 2016 à la direction de la société TIM de fournir au comité d’entreprise des informations complémentaires relatives au motif économique et au projet de restructuration ; que celles-ci lui ont été fournies dès le 20 juillet 2016 ; que le comité d’entreprise, qui au demeurant n’a jamais recouru à la procédure d’injonction prévue à l’article L. 1233-57-5 du code du travail, ne peut dès lors soutenir qu’il ne disposait pas d’une information complète à ce sujet ;

11. Considérant, en huitième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la société TIM a été consulté dans la matinée du 8 août 2016, date limite de la procédure d’information et de consultation, préalablement à la réunion du comité d’entreprise, prévue le même jour dans l’après-midi ; que les requérants ne peuvent, par suite, utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l’article R. 2323-1-1 de ce code relatives au délai d’au moins sept jours entre la consultation du CHSCT et celle du comité d’entreprise, dès lors que les dites dispositions ne s’appliquent pas à la procédure spécifique des plans de sauvegarde de l’emploi ;

12. Considérant, en dernier lieu, qu’aux termes de l’article D. 1233-14-1 du code du travail : « Le dossier est complet lorsqu’il comprend les informations permettant de vérifier le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi, les modalités d’information et de consultation du comité d’entreprise (…) » ; qu’il ressort des pièces du dossier que l’administration disposait des convocations des sept réunions du comité d’entreprise ; que les requérants ne peuvent, dès lors, utilement soutenir que l’absence des procès-verbaux de ces réunions établirait que le dossier soumis à l’homologation aurait été incomplet ;

13. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les moyens tiré de l’irrégularité de la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise doivent être écartés ;

Sur l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi :

14. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1233-61 du code du travail : « Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l’employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 1233-62 de ce code : " Le plan de sauvegarde de l’emploi prévoit des mesures telles que : 1° Des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d’emplois ou équivalents à ceux qu’ils occupent ou, sous réserve de l’accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; 1° bis Des actions favorisant la reprise de tout ou partie des activités en vue d’éviter la fermeture d’un ou de plusieurs établissements ; 2° Des créations d’activités nouvelles par l’entreprise ; 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l’entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d’emploi ; 4° Des actions de soutien à la création d’activités nouvelles ou à la reprise d’activités existantes par les salariés ; 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l’expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 1233-63 de ce code : « Le plan de sauvegarde de l’emploi détermine les modalités de suivi de la mise en oeuvre effective des mesures contenues dans le plan de reclassement prévu à l’article L. 1233-61./Ce suivi fait l’objet d’une consultation régulière et détaillée du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel dont les avis sont transmis à l’autorité administrative./ L’autorité administrative est associée au suivi de ces mesures et reçoit un bilan, établi par l’employeur, de la mise en oeuvre effective du plan de sauvegarde de l’emploi » ; qu’aux termes de l’article L. 1233-57-3 du même code : " En l’absence d’accord collectif (…) l’autorité administrative homologue le document élaboré par l’employeur mentionné à l’article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (…) la régularité de la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise (…) et le respect par le plan de sauvegarde de l’emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l’entreprise, l’unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d’accompagnement prévues au regard de l’importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d’adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 / Elle prend en compte le rapport le plus récent établi par le comité d’entreprise au titre de l’article L. 2323-56, concernant l’utilisation du crédit d’impôt compétitivité emploi (…) » ;

15. Considérant que, lorsqu’elle est saisie d’une demande d’homologation d’un document élaboré en application de l’article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l’emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s’assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l’emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code ; qu’à ce titre elle doit, au regard de l’importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l’emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d’une part, des efforts de formation et d’adaptation déjà réalisés par l’employeur et, d’autre part, des moyens dont disposent l’entreprise et, le cas échéant, l’unité économique et sociale et le groupe ;

16. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, d’une part, que les informations sur le crédit d’impôt compétitivité emploi ont été soumises au comité d’entreprise de la société TIM dans la base de données économiques et sociales, dispositif prévu par les dispositions de l’article L. 2323-8 du code du travail, lors de ses réunions du 25 septembre 2015 et 17 novembre 2015, d’autre part, que le comité d’entreprise n’a jamais établi de rapport relativement à l’utilisation non conforme de ce crédit d’impôt ; que les requérants ne peuvent, dès lors, soutenir que l’administration aurait méconnu les dispositions précitées ;

17. Considérant qu’il ya lieu d’écarter, par adoption des motifs des premiers juges, le moyen tiré du caractère insuffisant des deux offres valables d’emploi prévues par le plan de sauvegarde de l’emploi ;

18. Considérant que le plan de sauvegarde de l’emploi prévoit un dispositif de préretraite financé par l’employeur, un allongement de l’accompagnement par l’antenne mobilité emploi pour les salariés de plus de cinquante ans ou les travailleurs handicapés, une prime à l’embauche de 2 500 euros, dès lors majorée de 1 000 euros, pour les salariés de plus de quarante-cinq ans, un allongement du congé de reclassement de 12 à 14 mois pour les salariés de plus de cinquante ans ou les travailleurs handicapés ; qu’il s’ensuit que le moyen tiré de l’absence dans le document homologué de dispositif de mesures spécifiques de reclassement pour les salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, doit être écarté ;

19. Considérant que si les requérants soutiennent que le montant de l’allocation de reclassement serait insuffisant car inférieur au salaire habituel des salariés touchés par les mesures de licenciement, il ressort des pièces du dossier que le montant de cette allocation prévue au plan de sauvegarde de l’emploi est de 75 % de la moyenne mensuelle des douze derniers mois de salaire brut alors qu’en vertu des dispositions de l’article R. 1233-32 du code du travail, le montant mensuel de la rémunération à la charge de l’employeur pendant la période du congé de reclassement excédant la durée du préavis est au moins égal à 65 % de sa rémunération mensuelle brute moyenne ; qu’ainsi, ce moyen manque en fait ;

20. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et particulièrement du courrier électronique du 17 août 2016 de la direction de la société TIM faisant suite à une demande de précisions de l’administration, que le montant du budget de formation prévu au plan de sauvegarde de l’emploi constitue un chiffre hors taxe ; que le moyen tiré de l’imprécision du plan sur ce point, qui aurait mélangé chiffre hors taxe et toutes taxes comprises, doit être écarté ;

21. Considérant que le caractère « sérieux et construit du projet de formation » examiné par le comité de suivi ouvrant droit à une allocation supplémentaire constitue un critère précis d’attribution contrairement aux allégations des requérants ; que la notion de « continuité du service », permettant à l’entreprise de demander à un salarié, avec son accord préalable, d’exécuter tout ou partie de son préavis, cette situation lui ouvrant droit à une prime égale à 20 % de son salaire, ne constitue pas non plus un critère imprécis ; qu’enfin, si l’attribution d’une indemnité complémentaire de licenciement est conditionnée au constat que l’entreprise « ne subira pas de conséquences dommageables liées à un blocage du site ou des dégradations volontaires », cette notion, liée à une prime extra légale, hors plan de sauvegarde de l’emploi, se limite à rappeler la conciliation des exigences du droit de grève et de celles de la liberté du travail ; que le moyen tiré du caractère imprécis des conditions d’attribution des indemnité du plan de sauvegarde de l’emploi doit être écarté ;

22. Considérant que l’employeur, seul débiteur de l’obligation de reclassement, doit avoir procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement dans les autres entreprises du groupe ; que pour l’ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, l’employeur doit avoir indiqué dans le plan leur nombre, leur nature et leur localisation ; qu’il ressort des pièces du dossier, d’une part, que la société TIM ne dispose d’aucun autre établissement en France, d’autre part, qu’il n’existe aucune possibilité de reclassement en son sein ; que les soixante-cinq postes de reclassement proposés aux salariés sont tous situés en Allemagne, en Autriche, en Belgique, en Roumanie et en Slovaquie, dans les usines du groupe allemand Fritzmeier dont elle fait partie ; que l’annexe 1 du plan de sauvegarde de l’emploi comprend le nom des sociétés d’accueil, la localisation des emplois disponibles, la nature des postes, leur nombre, la rémunération, la quotité de travail et les conditions d’accueil ; que la condition de l’exigence d’un entretien de reclassement au sein de l’entité d’accueil du groupe a été supprimée, suite à la demande du 12 mai 2016 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi du Nord-Pas-de-Calais ; que son maintien au point 10.5.4 de la version soumise à homologation ne résulte ainsi, que d’une simple erreur matérielle sans incidence sur le contenu du plan ; que, dès lors, le moyen tiré de l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi en ce qui concerne l’obligation de reclassement doit être écarté ;

23. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et particulièrement d’un courrier de la direction de la société TIM du 25 mai 2016, qu’en application de l’article 28 de l’accord national interprofessionnel dans la métallurgie du 12 juin 1987, la commission paritaire régionale de l’emploi et de la formation professionnelle a été saisie du projet de licenciement collectif pour motif économique des salariés de la société TIM et que son aide a été demandée afin de rechercher des solutions de reclassement externe ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par le plan de sauvegarde de l’emploi de l’obligation conventionnelle de reclassement doit être écarté ;

24. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1233-5 du code du travail : " Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. / Ces critères prennent notamment en compte : 1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ; 2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ; 3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ; 4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie. L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus au présent article (…) » ;

25. Considérant que l’employeur a retenu l’ensemble de ces critères pour établir l’ordre des licenciements, en procédant à la pondération de certains d’entre eux ; qu’il s’est ainsi fondé notamment sur la valeur et les qualités professionnelles des salariés en application du 4° de l’article L. 1233-5 du code du travail visé au point précédent ; que, dans ce cadre, et en l’absence de tout système d’évaluation professionnelle des salariés au sein de la société TIM, l’appréciation du critère des qualités professionnelles au moyen, notamment, de la prime d’assiduité, recalculée de façon à ne pas pénaliser les salariés victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles et les salariées en congé maternité n’est pas de nature à établir que l’employeur aurait fait application d’un critère non prévu par la loi, ou aurait fait une inexacte application des dispositions citées au point 25 ;

26. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que l’ensemble des moyens dirigés contre l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi doit être écarté ;

27. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le comité d’entreprise de la société TIM et autres ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que par le jugement du 11 janvier 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ; que leurs conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions de la société TIM, de Me BU… AS…, de Me U… BA…, en leur qualité d’administrateurs judiciaires de la société TIM, de Me BH… Q… et Me AN… AC…, en leur qualité de mandataires judiciaires de la société TIM, présentées sur le fondement de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du comité d’entreprise de la société TIM et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société TIM, de Me BU… AS… et de Me U… BA…, présentées en leur qualité d’administrateurs judiciaires de la société TIM, sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de Me BH… Q… et Me AN… AC…, présentées en leur qualité de mandataires judiciaires de la société TIM, sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au comité d’entreprise de la société TIM qui a été désigné à cette fin dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société TIM, à Me BU… AS…, à Me U… BA…, en leur qualité d’administrateurs judiciaires de la société TIM, à Me BH… Q… et Me AN… AC…, en leur qualité de mandataires judiciaires de la société TIM et à la ministre du travail.

Copie sera adressée pour information, au directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi des Hauts-de-France.

Délibéré après l’audience publique du 11 mai 2017 à laquelle siégeaient :

— M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

 – M. Olivier Nizet, président-assesseur,

 – M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 mai 2017.

Le rapporteur,

Signé : J.-J. GAUTHÉ Le président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINI Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne à la ministre du travail, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot


N°17DA00455

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Textes cités dans la décision

  1. Code de justice administrative
  2. Code du travail
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CAA de DOUAI, 3ème chambre - formation à 3, 24 mai 2017, 17DA00455, Inédit au recueil Lebon