COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 2ème chambre - formation à 3, 22 mars 2011, 09LY00066, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 2e ch. - formation à 3, 22 mars 2011, n° 09LY00066
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 09LY00066
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Fiscal
Décision précédente : Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, 17 novembre 2008
Identifiant Légifrance : CETATEXT000023945425

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2009, présentée pour la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE, dont le siège social est situé à La Croix de l’arbre à Saint-Maurice-de-Lignon (43200) ;

La SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement nos 0400747 – 0602479 du 18 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes tendant à la condamnation de l’Etat à l’indemniser des préjudices qu’elle a subis du fait des modalités de remboursement de sa créance de taxe sur la valeur ajoutée lors de la suppression de la règle dite du décalage d’un mois  ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 11 085,16 euros, assortie des intérêts moratoires courant à compter de sa réclamation ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que faute d’avoir vérifié, comme l’y invitait la Cour de justice des Communautés européennes par sa décision C-386/06 du 18 décembre 2007, que les modalités de suppression de la règle dite du décalage d’un mois conduisaient à une réduction des effets de la disposition dérogatoire dont bénéficiait la France avant la loi de finances rectificative du 22 juin 1993, le tribunal administratif a entaché son jugement d’une irrégularité de procédure et méconnu les dispositions de la sixième directive ; que le tribunal administratif a imparfaitement répondu au moyen tiré de ce que la limitation des droits à déduction portait une atteinte excessive au principe de proportionnalité et qu’il a fait une inexacte application des dispositions de l’article 5 de la directive 89/465/CEE du Conseil du 18 juillet 1989 ; que le tribunal administratif n’a pas répondu au moyen tiré de la violation de l’article 17§7 de la sixième directive et qu’il n’a pas correctement interprété l’article 271 A du code général des impôts ; que le tribunal administratif a méconnu les stipulations de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le dispositif mis en place entraînant des inégalités de traitement entre contribuables et entre créanciers de l’Etat, et qu’il a omis de répondre à son moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; que les arrêtés ministériels des 17 août 1995 et 15 mars 1996 ont méconnu les dispositions de l’article 271 A du code général des impôts et qu’elle est fondée à demander à titre subsidiaire la réparation du préjudice subi du fait de la faible rémunération de sa créance, le préjudice étant calculé par différence entre le taux de 4,5 % fixé par l’arrêté du 15 avril 1994 et le taux retenu par les arrêtés litigieux de 1995 et 1996, lesquels sont entachés de fraude à la loi et de détournement de pouvoir ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 28 janvier 2010, présenté pour la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE, qui maintient ses conclusions, par les moyens exposés dans sa requête ;

Elle soutient en outre, après lecture de deux décisions du Conseil d’Etat du 31 juillet 2009, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 1er du premier protocole additionnel à cette convention conservent leur pertinence et que le taux d’indemnisation admis par le Conseil d’Etat est insuffisant pour assurer une réparation intégrale du préjudice subi, l’application d’un taux de 9 % étant justifiée ; que la prescription quadriennale ne pouvait être opposée, dès lors qu’elle ne pouvait avoir connaissance de sa créance, sans méconnaître les stipulations de l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; que les actions fondées sur la méconnaissance de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales échappent nécessairement au champ d’application de la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 ; qu’au surplus elle ne bénéficiait d’aucun droit acquis au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’un recours pour excès de pouvoir présenté à l’encontre du dispositif litigieux le 22 avril 2002 a interrompu la prescription pour la période postérieure au 31 décembre 1997 ; que le recours présenté pour la SAS Ulysse et le recours qu’elle-même a déposé auprès du comptable du Trésor ont également interrompu la prescription ; que la différence de régime de prescription entre l’Etat et le contribuable est contraire au principe d’égalité des armes et à l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 10 février 2010 et régularisé par courrier le 15 février 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la prescription quadriennale est applicable pour les années 1993 à 1995 et qu’elle a été valablement opposée devant les premiers juges ; que cette prescription n’a pas été interrompue par le recours pour excès de pouvoir formé par un tiers et qu’elle ne porte pas atteinte au principe d’égalité des armes ou aux stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que la requérante n’est pas fondée à soutenir que le dispositif mis en place n’aurait pas réduit les effets de la dérogation nationale supprimée et que les premiers juges ont répondu à ce moyen sans commettre d’erreur de droit dans l’interprétation de l’article 271 A du code général des impôts ; que le tribunal administratif a écarté le moyen tiré d’une prétendue méconnaissance du principe de proportionnalité en jugeant à bon droit que les dispositions nationales ne sont pas contraires au droit communautaire ; que la suppression de la dérogation prévue à l’article 28 de la sixième directive n’était pas soumise à l’obligation de transmission prévue à l’article 5 de la dix-huitième directive, alors qu’en tout état de cause la commission a été informée et qu’un défaut de communication ne serait pas de nature à entacher d’illégalité les mesures prises ; que le tribunal administratif a écarté le moyen tiré d’une prétendue violation de l’article 17 de la sixième directive ; que la différence de traitement entre la requérante et les créanciers du Trésor est justifiée par le bénéfice retiré par les contribuables du fait de la suppression de la règle dite du décalage d’un mois et que le nouveau dispositif n’a créé aucune discrimination entre les contribuables, toutes les entreprises ayant obtenu un remboursement intégral de leur créance ; que les arrêtés fixant le taux de rémunération de la créance n’étaient pas entachés d’erreur manifeste d’appréciation, le législateur ayant prévu une rémunération comprise entre 0 et 4,5 % ; que la requérante n’est en outre pas fondée à réclamer une somme de 1 678,42 euros au titre d’une prétendue mauvaise foi de l’Etat, alors que l’Etat a fait des efforts importants pour rembourser de manière anticipée les créances résultant de la suppression de la dérogation qu’il avait obtenue ;

Vu l’ordonnance en date du 1er mars 2010 fixant la clôture d’instruction au 28 mai 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 17 mars 2010 et régularisé par courrier le 22 mars 2010, présenté pour la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE, qui maintient ses conclusions par les moyens exposés dans ses précédents mémoires ;

Elle soutient que jusqu’à la décision du Conseil d’Etat reconnaissant la non-conformité des arrêtés fixant le taux de rémunération aux dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, elle devait être regardée comme pouvant légitimement ignorer l’existence de sa créance ; qu’en tout état de cause, la créance litigieuse doit être regardée comme un dépôt ou une consignation au sens des dispositions de l’article 4 de la loi de 1968 susmentionnée ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 20 mai 2010 et régularisé par courrier le 25 mai 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat, qui maintient ses conclusions par les moyens exposés dans son précédent mémoire ;

Il soutient en outre que la jurisprudence relative à l’article R.* 196-1 du livre des procédures fiscales ne concerne pas l’application de la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d’harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires ;

Vu la dix-huitième directive 89/465/CEE du Conseil des Communautés européennes du 18 juillet 1989 en matière d’harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu la loi n° 93-859 du 22 juin 1993 ;

Vu le décret n° 93-1078 du 14 septembre 1998 ;

Vu le décret n° 2002-179 du 13 février 2002 ;

Vu l’arrêté du 15 avril 1994 fixant les modalités de paiement des intérêts des créances résultant de la suppression du décalage d’un mois en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu l’arrêté du 17 août 1995 fixant le taux d’intérêt applicable à compter du 1er janvier 1994 aux créances résultant de la suppression du décalage d’un mois en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu l’arrêt du 18 décembre 2007 de la Cour de justice des Communautés européennes rendu dans l’affaire C-368/06 SA Cedillac ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 1er mars 2011 :

 – le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

— et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE, qui a obtenu avant le 1er janvier 1995 le remboursement intégral de la créance sur le Trésor qu’elle détenait à la suite de la suppression par l’article 2 de la loi du 22 juin 1993 susvisée de la règle dite du décalage d’un mois en matière d’imputation de la taxe sur la valeur ajoutée, a sollicité, par un courrier du 18 février 2004, reçu par le ministre du budget le 3 mars 2004, le versement d’une somme de 8 392,14 euros au titre de l’indemnisation du préjudice financier qu’elle estimait avoir subi du fait de l’insuffisance des intérêts afférents à cette créance au titre des années 1993 et 1994 ; que, par un courrier reçu par le ministre du budget le 14 août 2006, elle a en outre sollicité le versement d’une somme de 1 678,42 euros en réparation du préjudice qu’elle aurait subi du fait de la mauvaise foi de l’administration et l’application des intérêts au taux légal à sa créance ; qu’elle demande l’annulation du jugement du 18 novembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes tendant à l’annulation des décisions implicites de rejet de ses réclamations, et la condamnation de l’Etat à lui verser une somme de 11 085,16 euros, assortie des intérêts moratoires ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que la requérante soutient que le tribunal administratif a insuffisamment répondu, ou omis de répondre, au moyen tiré de ce que les dispositions mises en oeuvre pour la suppression de la règle dite du décalage d’un mois auraient porté une atteinte excessive au principe de proportionnalité, ainsi qu’à celui tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’il résulte toutefois de l’instruction que le jugement attaqué écarte, avec une motivation suffisante, à ces deux moyens ;

Considérant, en deuxième lieu, que le système transitoire mis en place par la loi du 22 juin 1993 n’avait pas pour objet d’exclure, partiellement ou totalement, certains biens du régime des déductions ; que les dispositions du paragraphe 7 de l’article 17 de la sixième directive étant par suite inapplicables au litige qui lui était soumis, le Tribunal a pu, sans entacher son jugement d’irrégularité, ne pas répondre au moyen tiré de leur méconnaissance ;

Considérant, en troisième lieu, que si la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit, dans sa décision du 18 décembre 2007 susvisée, qu’il appartient au juge national de vérifier que le dispositif transitoire prévu par la loi du 22 juin 1993 réduisait les effets de la règle antérieure dite du décalage d’un mois , l’éventuelle méconnaissance d’une telle obligation, qui affecterait seulement le bien-fondé de la décision du Tribunal, serait, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les moyens afférents à la régularité du jugement attaqué doivent être écartés ;

Sur l’exception de prescription quadriennale des créances de l’Etat invoquée par le ministre :

Considérant que la requérante a réclamé par lettre du 18 février 2004 le versement d’une somme de 8 392,14 euros correspondant à la différence entre les intérêts qu’elle a effectivement perçus sur sa créance sur le Trésor, au titre des années 1993 et 1994, et ceux qu’elle aurait perçus si un taux de 9 % avait été appliqué à cette créance, aucun intérêt n’ayant été perçu ou réclamé au titre de l’année 1995, pour laquelle la requérante indique dans sa réclamation que le montant de sa créance était nul ; que l’administration a opposé devant les premiers juges, puis dans ses écritures d’appel, l’exception de prescription quadriennale aux conclusions de la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics : Sont prescrites, au profit de l’Etat, des départements et des communes, (…) toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. (…)  ; que selon l’article 2 de cette même loi : La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l’autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance (…) / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance (…) / Toute communication écrite d’une administration intéressée, même si cette communication n’a pas été faite directement au créancier qui s’en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance ; / Toute émission de moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu’une partie de la créance ou si le créancier n’a pas été exactement désigné. / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l’interruption. Toutefois, si l’interruption résulte d’un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée.  ; qu’aux termes de l’article 3 de cette loi : La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, (…) ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l’existence de sa créance ou de la créance de celui qu’il représente légalement.  ; qu’aux termes de l’article 4 : Les dispositions de la présente loi ne s’appliquent pas en matière de remboursement de dépôts et de consignations, non plus qu’aux intérêts des sommes déposées ou consignées.  ; qu’enfin, aux termes de l’article 7 de la même loi : L’administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d’une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l’invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond (…)  ;

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article R. 771-3 du code de justice administrative : Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est soulevé, conformément aux dispositions de l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, à peine d’irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé (…)  ; qu’aux termes de l’article R.771-4 du même code : L’irrecevabilité tirée du défaut de présentation, dans un mémoire distinct et motivé, du moyen visé à l’article précédent peut être opposée sans qu’il soit fait application des articles R. 611-7 et R. 612-1.  ; que le moyen présenté par la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE tiré d’une méconnaissance par les dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968 des dispositions de valeur constitutionnelle des articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen n’a pas été présenté par mémoire distinct et doit dès lors être déclaré irrecevable ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que l’action indemnitaire de la requérante trouve son fondement dans la non-conformité d’un arrêté aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne saurait, par elle-même, faire obstacle à l’application de la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 susvisée ; que le délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis, institué à peine de prescription par les dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968, ne présente pas un caractère exagérément court ; qu’il ne saurait, dès lors, être regardé comme ayant eu pour effet de priver la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE de la possibilité de saisir un tribunal du litige l’opposant à l’Etat ; que, par suite, ces dispositions ne méconnaissent ni le principe d’égalité des armes de procédure, ni le droit à un recours effectif, ni les exigences qui s’attachent à la protection d’un droit patrimonial ; que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 1er du premier protocole à cette convention par les dispositions législatives précitées doivent par suite être écartés ;

Considérant, en troisième lieu, que la requérante n’est pas fondée à soutenir qu’elle n’a eu connaissance de la possibilité d’agir contre l’Etat français à raison de la non-conformité alléguée au droit communautaire des dispositions de l’article 271 A du code général des impôts, issues du II de l’article 2 de la loi de finances rectificative du 22 juin 1993, qu’à compter de l’intervention de l’arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 25 octobre 2001 (affaire C-78/00, Commission c/ Italie) jugeant non conforme à la sixième directive un mécanisme de remboursement échelonné dans le temps par l’Etat italien d’un excédent de taxe sur la valeur ajoutée, dès lors qu’elle avait la possibilité de contester la conformité aux principes communautaires des dispositions mettant fin à la règle dite du décalage d’un mois dès leur publication en 1993 ; que la société requérante a en outre eu connaissance des taux d’intérêt appliqués à la créance qu’elle détenait sur le Trésor public au plus tard lors de la publication des arrêtés les fixant, en date, respectivement, des 15 avril 1994 et 17 août 1995 ; que, dès lors, la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE ne pouvait ignorer l’existence du préjudice dont elle se prévaut jusqu’à ce que la Cour de justice des Communautés européennes ait révélé par son arrêt du 25 octobre 2001 la non-conformité au droit communautaire du mécanisme italien susmentionné, au demeurant différent de celui prévu à l’article 271 A du code général des impôts français ;

Considérant, en quatrième lieu, que la requérante se prévaut d’une créance sur l’Etat du fait des préjudices que lui auraient causés les dispositions législatives et réglementaires adoptées pour la suppression de la règle dite du décalage d’un mois  ; qu’une telle créance ne saurait être regardée comme un dépôt ou une consignation ou comme afférente aux intérêts de sommes déposées ou consignées au sens des dispositions précitées de l’article 4 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée ; que la requérante ne saurait dès lors se prévaloir utilement des dispositions de cet article pour écarter l’application de l’article 1er de ladite loi ;

Considérant, en cinquième lieu, que le délai de prescription n’a pu être interrompu par des recours formés par d’autres contribuables s’étant trouvés dans des situations comparables, mais concernant des créances différentes ; que, par suite, la requérante ne saurait utilement se prévaloir d’une réclamation formée par un autre contribuable pour contester l’application des dispositions précitées à sa propre créance ;

Considérant, en dernier lieu, que la demande de la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE tendant à la réparation d’un préjudice financier au titre des années 1993 et 1994, en date du 18 février 2004, a été reçue par l’administration le 3 mars 2004 ; que la requérante ne justifie pas avoir adressé à l’administration une réclamation préalable avant le 1er janvier 1999 ; que la prescription était, dès lors, acquise au profit de l’Etat pour les sommes réclamées au titre des années 1993 à 1994 ; que c’est, par suite, à bon droit que l’administration a opposé, devant les premiers juges puis dans ses écritures d’appel, l’exception de prescription quadriennale aux conclusions de la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE ; que, par suite, cette dernière n’était pas davantage fondée à réclamer ultérieurement le versement d’intérêts moratoires et le versement d’une indemnité complémentaire en réparation du préjudice que lui aurait causé la mauvaise foi de l’administration ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes ; que les conclusions qu’elle présente au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;


DECIDE :


Article 1er : La requête de la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SOUCHON D’AUVERGNE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat.

Délibéré après l’audience du 1er mars 2011 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Lévy-Ben Cheton, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 22 mars 2011

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N° 09LY00066

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