COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 2ème chambre - formation à 3, 16 décembre 2014, 13LY02119, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Bornhauser Avocats · 19 février 2017

On sait que l'administration fiscale conteste le fait qu'une donation avec réserve de quasi-usufruit de valeurs mobilières suivie de la revente des titres donnés purge la plus-value de cession de la nue-propriété transmise. Elle considère en effet qu'eu égard aux prérogatives importantes conservées par le quasi-usufruitier, en particulier le droit de disposer librement – y compris en les consommant – des liquidités dégagées lors de la vente des titres donnés, la donation n'entraînerait pas une dépossession effective du donateur. Les donations-cessions avec réserve de quasi-usufruit font …

 

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CAA de Lyon – 2 ème chambre - n° 13LY02119 – M. et Mme F. - 16 décembre 2014 - C CAA de Lyon – 2 ème chambre - n° 13LY02119 – M. et Mme F. - 16 décembre 2014 - C Opérations de donation-partage avec clauses de quasi-usufruit, de remploi et d'inaliénabilité : absence d'abus de droit La Cour administrative d'appel de Lyon a considéré que l'abus de droit n'était pas caractérisé : elle a relevé que ni le délai très bref qui s'est écoulé entre l'acte de donation-partage et la cession des parts détenues par M. F. et ses enfants dans le capital de la société Tellif, ni les restrictions apportées à …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 2e ch. - formation à 3, 16 déc. 2014, n° 13LY02119
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 13LY02119
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Fiscal
Décision précédente : Tribunal administratif de Grenoble, 5 juin 2013, N° 0902724
Identifiant Légifrance : CETATEXT000029958039

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er août 2013, présentée pour M. et Mme A…, domiciliés 52 Les bois de Maisonné à Chevrières (38160) ;

M. et Mme A… demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0902724 du 6 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 8 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A… soutiennent que :

 – l’acte de donation-partage passé par M. A… le 15 janvier 2003 au profit de ses trois enfants n’est pas constitutif d’un abus de droit au sens des dispositions de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

 – le Comité consultatif pour la répression des abus de droit ayant rendu un avis favorable aux requérants, la preuve de l’abus de droit pèse sur l’administration ;

 – cette preuve n’est pas apportée au motif qu’une clause de quasi-usufruit aurait été insérée en faveur de M. A… dans l’acte de donation-partage, alors qu’une telle clause, expressément prévue à l’article 587 du code civil, prévoit que l’usufruit de la chose se reportera sur le prix de cession de cette chose, à charge pour l’usufruitier de restituer cette somme d’argent à l’extinction de l’usufruit ;

 – cette preuve n’est pas non plus apportée au motif que les donataires ont renoncé à garantir le remboursement de la créance, dès lors qu’aucune disposition légale n’impose cette garantie ;

 – que le simple fait qu’une partie du prix de cession ait été réemployée dans l’acquisition de parts, elles-mêmes démembrées, d’une société civile de gestion patrimoniale dans laquelle le donateur usufruitier dispose de pouvoirs restreignant ceux des nus-propriétaires, ne suffit pas à remettre en cause le caractère irrévocable de la donation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2013, présenté par le ministre de l’économie et des finances qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l’économie et des finances soutient que :

 – l’acte de donation-partage passé le 15 janvier 2003 par M. A… est dépourvu d’intention libérale, les donateurs n’ayant été inspirés que par des préoccupations exclusivement fiscales ;

 – la preuve de l’abus de droit est apportée par l’existence d’un laps de temps très court entre la donation-partage intervenue le 15 janvier 2003 et la cession des titres intervenue le 17 janvier 2003 ainsi que par l’existence d’une clause de quasi-usufruit dans l’acte de donation-partage passé par M. A… par laquelle les donataires ont dispensé le donateur de fournir une sûreté pour garantir la créance de restitution ;

 – l’abus de droit est constaté dès lors que la clause de remploi prévue dans l’acte de donation-partage confère au donateur usufruitier les pouvoirs les plus étendus au sein de la société civile ;

 – M. A… a entendu conserver la disposition de l’intégralité des fonds issus de la vente des titres et l’acte de donation-partage passé par M. A… devait être regardé comme un acte de donation fictif ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 14 février 2014, présenté pour M. et Mme A… qui maintiennent leurs conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 25 novembre 2014 :

— le rapport de Mme Bouissac, président-assesseur,

— et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A…, qui détenait 4 600 parts de la société Tellif a, par acte notarié du 15 janvier 2003, enregistré le 28 janvier 2003, fait donation à ses trois enfants de la nue-propriété de 4 599 de ces actions ; que Mme A…, qui détenait les 400 parts restantes de la société Tellif a fait donation à ses trois enfants, par acte notarié du 15 janvier 2003, enregistré le 28 janvier 2003, de la pleine propriété de 399 actions ; que le 17 janvier 2003, l’ensemble des titres initialement détenus par M. et Mme A… ont fait l’objet, selon les termes d’un protocole d’accord négocié et arrêté le 25 octobre 2002, d’une cession en pleine propriété à la société SICAE VS ; qu’à l’issue de l’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle dont M. et Mme A… ont fait l’objet au titre de l’année 2003, l’administration fiscale a écarté les actes de donation-partage du 15 janvier 2003 et imposé la plus-value de cession des titres de la société Tellif sur le fondement de la procédure de répression des abus de droit prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu’en cours de procédure, l’administration a abandonné les rappels portant sur la donation par Mme A… de ses actions en pleine propriété et maintenu les redressements portant sur l’acte de donation par M. A… de ses actions en nue-propriété ; que M. et Mme A… relèvent appel du jugement du 6 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales en résultant ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable : « Ne peuvent être opposés à l’administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d’un contrat ou d’une convention à l’aide de clauses : / (…) b) Ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (…) / L’administration est en droit de restituer son véritable caractère à l’opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L’administration peut également soumettre le litige à l’avis du comité dont les avis rendus feront l’objet d’un rapport annuel. / Si l’administration ne s’est pas conformée à l’avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. » ;

3. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que l’administration est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable lorsque ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ; qu’en l’espèce, dans la mesure où le comité consultatif pour la répression des abus de droit, saisi par l’administration fiscale, a émis, le 8 mars 2007, un avis défavorable à la mise en oeuvre des dispositions de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, il incombe à l’administration, qui ne s’est pas conformée à cet avis, d’apporter devant le juge de l’impôt la preuve du bien-fondé de la rectification ;

4. Considérant qu’aux termes du 1. du I. de l’article 150-0 A du code général des impôts, dans sa version alors applicable : « (…) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux (…) sont soumis à l’impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 15 000 euros par an (…) » ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article 894 du code civil : « La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte » ; que dès lors qu’un acte revêt le caractère d’une donation au sens de ces dispositions, l’administration ne peut le regarder comme n’ayant pu être inspiré par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que son auteur, s’il ne l’avait pas passé, aurait normalement supportées ; qu’elle n’est, par suite, pas fondée à l’écarter comme ne lui étant pas opposable sur le fondement de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu’en revanche, l’administration peut écarter sur ce fondement un acte qui, présenté comme une donation, ne se traduit pas par un dépouillement immédiat et irrévocable de son auteur ; qu’aux termes de l’article 900-1 du même code : « Les clauses d’inaliénabilité affectant un bien donné ou légué ne sont valables que si elles sont temporaires et justifiées par un intérêt sérieux et légitime » ; que l’article 578 dudit code énonce : « L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance » ; qu’en vertu de l’article 581 du même code, l’usufruit « peut être établi sur toute espèce de biens meubles ou immeubles » ; qu’aux termes de l’article 587 du même code : « Si l’usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, comme l’argent, les grains, les liqueurs, l’usufruitier a le droit de s’en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution » ;

6. Considérant que, pour l’application des dispositions précitées de l’article 150-0 A du code général des impôts, l’imposition de la plus-value constatée à la suite des opérations par lesquelles l’usufruitier et le nu-propriétaire de parts sociales dont la propriété est démembrée procèdent ensemble à la cession, ou à tout acte fiscalement assimilé à une cession, de ces parts sociales, se répartit entre l’usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits ; que, toutefois, lorsque les parties ont décidé, par l’acte qui est à l’origine du démembrement de propriété, que le droit d’usufruit serait, à la suite de la cession, reporté sur le prix issu de celle-ci, la plus-value est intégralement imposée entre les mains de l’usufruitier ;

7. Considérant que pour écarter l’acte de donation du 15 janvier 2003 par lequel M. A… a fait donation à ses trois enfants de la nue-propriété de 4 599 actions de la société Tellif, l’administration a relevé le délai très bref entre la donation-partage du 15 janvier 2003 et la cession des titres intervenue le 17 janvier suivant, puis la constitution, neuf jours plus tard, de la société civile Guisanga ; qu’elle a également relevé que l’acte de donation-partage interdit aux donataires, sous peine de révocation de la donation, de céder, échanger, aliéner ou nantir les biens transmis durant la vie des donateurs, hormis à la société SICAE VS, qu’il comporte une clause intitulée « condition particulière » précisant qu’il était convenu entre le donateur et les donataires copartageants « qu’en cas de vente concomitante des droits démembrés sur les titres donnés, le démembrement se reportera sur le prix de vente. Ledit prix de vente devra en outre être réemployé en l’acquisition de titres eux-mêmes démembrés à concurrence d’un montant de 2 517 960 euros. Sur le surplus, soit la somme de 2 265 000 euros, l’usufruit du donateur s’exercera sous forme de quasi-usufruit dans les conditions stipulées au paragraphe intitulé convention de quasi-usufruit », que la convention de quasi-usufruit insérée à l’acte de donation-partage prévoit que « le donateur n’est pas tenu de conserver en nature les valeurs mobilières présentement données, ci-dessus désignées et estimées, mais seulement à concurrence de 2 265 000 euros. Il pourra au contraire en disposer dans les conditions prévues par l’article 587 du code civil, c’est-à-dire comme un propriétaire sans avoir à en demander l’autorisation aux donataires, mais à charge de restitution en fin d’usufruit selon les modalités ci-après définies » ; qu’enfin, le service a relevé que les donataires avaient expressément dispensé le donateur de fournir une sûreté pour garantir la créance de restitution découlant de ce quasi-usufruit et qu’en sa qualité de gérant de la société civile Guisanga, M. A… disposait des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société et que les résultats bénéficiaires de la société ont été affectés intégralement au compte-courant de ce dernier ;

8. Considérant, toutefois, que ni le délai très bref qui s’est écoulé entre l’acte de donation-partage et la cession des parts détenues par M. A… et ses enfants dans le capital de la société Tellif, ni les restrictions apportées à l’exercice du droit de propriété des donataires, résultant notamment de l’interdiction d’aliéner ou de nantir les titres donnés pendant la vie des donateurs, sous peine de révocation de la donation, ni l’obligation de réemployer le prix de vente desdits titres à hauteur de 2 517 960 euros en l’acquisition de titres aux fins de créer entre M. A… et ses enfants une société civile de gestion patrimoniale et dont les statuts octroyaient à M. A…, donateur gérant, des pouvoirs étendus de décision, notamment pour la distribution des bénéfices, ne sauraient, à eux seuls, suffire à faire regarder la donation intervenue comme purement fictive dès lors, d’une part, que la circonstance qu’un acte de disposition soit assorti d’une clause d’inaliénabilité durant la vie du donateur ne lui ôte pas son caractère de donation au sens des dispositions de l’article 894 du code civil, d’autre part, que l’octroi au donateur usufruitier de pouvoirs étendus de gestion et de décision au sein de la société civile Guisanga n’altére pas l’obligation de restitution en fin d’usufruit en vertu de l’article 578 du code civil et n’est pas de nature, par lui-même, à remettre en cause le constat de son dépouillement immédiat et irrévocable dès la signature des actes de donation ;

9. Considérant que le caractère fictif de la donation-partage effectuée le 15 janvier 2003 n’étant pas établi, l’administration fiscale n’était pas fondée à mettre en oeuvre la procédure prévue par les dispositions précitées de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales pour écarter l’acte de donation-partage du 15 janvier 2003 afin d’imposer la plus-value qu’aurait réalisée M. A… lors de la cession de ses actions de la société Tellif s’il n’en avait pas donné la nue-propriété à ses enfants ;

10. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme A… sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme A… au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 6 juin 2013 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : M. et Mme A… sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2003.

Article 3 : L’Etat versera la somme de 3 000 euros à M. et Mme A… en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A… et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l’audience du 25 novembre 2014 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Bouissac, président-assesseur
M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 décembre 2014.

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N° 13LY02119

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