CAA de LYON, 6ème chambre - formation à 3, 5 juillet 2018, 16LY03057, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D… B… a demandé au tribunal administratif de Lyon d’annuler la décision du 2 février 2016 par laquelle le président du centre communal d’action sociale de Saint-Etienne a rejeté sa demande de domiciliation en application des dispositions de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles.

Par un jugement n° 1601930 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision.


Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 septembre 2016, le centre communal d’action sociale (CCAS) de Saint-Etienne, représentée par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 28 juin 2016 ;

2°) de déclarer irrecevable l’intervention de la Ligue des droits de l’homme ;

3°) de rejeter la demande présentée par M. B… devant le tribunal administratif ;

4°) de mettre à la charge de M. B… une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

 – que la Ligue des droits de l’homme n’a pas intérêt à intervenir ;

 – qu’à la date de la décision en litige et compte tenu des éléments à sa disposition, la pérennité du lien entre M. B… et la commune de Saint-Etienne n’était pas établie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de l’action sociale et des familles ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Beytout, premier conseiller,

 – les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,

 – et les observations de Me Vincens-Bouguereau, avocat du centre communal d’action social de Saint-Etienne.

1. Considérant que M. B…, ressortissant roumain, a sollicité une domiciliation administrative auprès du CCAS de Saint-Etienne ; que sa demande a été rejetée par une décision du 2 février 2016 ; que le CCAS de Saint-Etienne relève appel du jugement du 28 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision ;

Sur la recevabilité de l’intervention de la Ligue des droits de l’homme en première instance :

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le CCAS de Saint-Etienne, l’intérêt à intervenir s’apprécie plus largement que l’intérêt à agir contre une décision administrative, notamment lorsqu’il s’agit d’une décision individuelle ;

3. Considérant, d’une part, qu’aux termes de ses statuts, la Ligue des droits de l’homme « oeuvre à l’application des conventions et des pactes internationaux et régionaux en matière de droit d’asile, de droit civil, politique économique, social et culturel » et agit « auprès des juridictions compétentes lorsque des actes administratifs nationaux ou locaux portent atteinte aux principes visés ci-dessus » ;

4. Considérant, d’autre part, que l’élection de domicile prévue par l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles permet aux personnes sans domicile stable de prétendre « au service des prestations sociales légales, réglementaires et conventionnels » et « à l’exercice des droits de civils qui leur sont reconnus par la loi » ;

5. Considérant qu’eu égard à son objet social, la Ligue des droits de l’homme avait intérêt à l’annulation de la décision en litige et que son intervention devant le tribunal administratif était donc recevable ;

Sur la légalité du refus de domiciliation du 2 février 2016 :

6. Considérant qu’aux termes de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles : « Pour prétendre au service des prestations sociales légales, réglementaires et conventionnelles, à l’exercice des droits civils qui leur sont reconnus par la loi, ainsi qu’à la délivrance d’un titre national d’identité, à l’inscription sur les listes électorales ou à l’aide juridictionnelle, les personnes sans domicile stable doivent élire domicile soit auprès d’un centre communal ou intercommunal d’action sociale, soit auprès d’un organisme agréé à cet effet. / L’organisme compétent pour attribuer une prestation sociale légale, réglementaire ou conventionnelle est celui dans le ressort duquel la personne a élu domicile (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 264-4 de ce code : « Lorsque les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale refusent l’élection de domicile des personnes sans domicile stable qui en font la demande, parce qu’elles ne présentent aucun lien avec la commune ou le groupement de communes, ils doivent motiver leur décision (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 264-4 du même code : " Sont considérées comme ayant un lien avec la commune ou le groupement de communes au sens de l’article L. 264-4 les personnes dont le lieu de séjour est le territoire de la commune ou du groupement de communes à la date de demande d’élection de domicile, indépendamment du statut ou du mode de résidence. / Les personnes qui ne remplissent pas la condition énoncée à l’alinéa précédent sont également considérées comme ayant un lien avec la commune ou le groupement de communes, au sens de l’article L. 264-4, dès lors qu’elles satisfont à l’une des conditions suivantes : / -y exercer une activité professionnelle ; / -y bénéficier d’une action d’insertion ou d’un suivi social, médico-social ou professionnel ou avoir entrepris des démarches à cet effet ; / -présenter des liens familiaux avec une personne vivant dans la commune ; / -exercer l’autorité parentale sur un enfant mineur qui y est scolarisé » ;

7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que lors de l’entretien réalisé le 21 janvier 2016, M. B… a indiqué qu’il résidait sur le territoire de la commune de Saint-Etienne depuis quatre ans et qu’il était alors hébergé dans un gymnase de cette commune dans le cadre du plan hivernal ; qu’il n’est d’ailleurs pas contesté que M. B… était jusqu’alors domicilié… ; que s’il est vrai que l’intéressé a également indiqué être présent à Saint-Etienne avec un seul enfant, âgé de quatre ans, scolarisé dans une école de la commune, alors qu’il était en réalité accompagné de son épouse et de leurs cinq enfants, et que leur dernier fils âgé de quatre ans n’était pas scolarisé, il n’en demeure pas moins qu’il résultait de cet entretien que M. B… était installé sur le territoire de la commune ; qu’il s’ensuit qu’en vertu du premier alinéa de l’article R. 262-4 du code de l’action sociale et des familles, il devait être considéré comme ayant un lien avec la commune et remplissait ainsi la condition posée par ce texte pour se voir délivrer une attestation d’élection de domicile, et ce en dépit de ce que ses déclarations ne correspondaient pas à la réalité de la composition familiale et de ce que l’ensemble de la famille a ultérieurement été domicilié à Firminy, circonstance au demeurant postérieure à la décision en litige ; qu’ainsi le président du CCAS ne pouvait légalement se fonder sur le motif tiré de 1'absence de tout lien de M. B… avec la commune de Saint-Etienne ;

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le CCAS de Saint-Etienne n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de refus de domiciliation du 2 février 2016 ; que, par suite, ses conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du CCAS de Saint-Etienne est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au centre communal d’action sociale de Saint-Etienne, à M. D… B… et à la Ligue des droits de l’homme.

Délibéré après l’audience du 7 juin 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
Mme C… et Mme Beytout, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2018.

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N° 16LY03057

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