CAA de NANCY, 3ème chambre - formation à 3, 19 juillet 2018, 16NC00906, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 3e ch. - formation à 3, 19 juill. 2018, n° 16NC00906
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 16NC00906
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Strasbourg, 22 mars 2016, N° 1504816
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037292404

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Jerodis a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler la décision du 2 juillet 2015 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé d’abroger l’arrêté du 25 juin 1938 réglementant le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin.

Par un jugement n° 1504816 du 23 mars 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2016, et un mémoire complémentaire, enregistré le 16 novembre 2016, la société Jerodis, représentée par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 mars 2016 ;

2°) d’annuler la décision du 2 juillet 2015 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé d’abroger l’arrêté du 25 juin 1938 réglementant le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin ;

3°) d’enjoindre au préfet du Bas-Rhin d’abroger l’arrêté du 25 juin 1938 ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – contrairement à ce qu’a retenu le tribunal administratif de Strasbourg, le préfet a réglementé le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin par un arrêté du 25 juin 1938 ;

 – l’arrêté du 25 juin 1938 est illégal ; le préfet n’était pas compétent pour réglementer le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin ; le préfet n’a pas procédé à la concertation prévue à l’article 105 b du code local des professions, codifié à l’article L. 3134-4 du code du travail ; l’article 3 de l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 précise que les références contenues dans des dispositions de nature législative à des dispositions abrogées par l’ordonnance sont remplacées par les références aux dispositions correspondantes du code du travail ; l’arrêté du 25 juin 1938 n’est pas un texte de nature législative ; l’arrêté du 25 juin 1938 porte atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie et plus particulièrement à la liberté d’entreprendre ; les circonstances de fait qui ont motivé son édiction n’existent plus.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2016, la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

 – à titre principal, elle doit être mise hors de cause, alors que la décision attaquée doit être regardée comme émanant du président du conseil départemental ;

 – à titre subsidiaire, la requête de la société Jerodis est irrecevable dès lors que l’acte attaqué ne constitue pas une décision faisant grief ;

 – aucun des moyens invoqués par la société n’est fondé.

Par une intervention, enregistrée le 17 novembre 2016, la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD) et la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité (FECP), représentées par la Selarl Fayan-Roux, Bontoux et associés demandent à la cour d’annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 mars 2016 ainsi que la décision du préfet du Bas-Rhin du 2 juillet 2015, d’enjoindre au préfet du Bas-Rhin d’abroger l’arrêté du 25 juin 1938 dans un délai de 2 mois sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

 – l’arrêté du 25 juin 1938 est illégal dès lors qu’il n’est pas établi que la majorité des professionnels concernés ont été consultés ; les dispositions de l’article L. 3134-4 du code du travail ont été méconnues ;

 – la réglementation concernant le travail dominical prise en 1938 a été édictée par une autorité incompétente ;

 – la majorité des professionnels concernés sont en faveur de l’abrogation de l’arrêté du 25 juin 1938 ;

 – le préfet aurait ainsi dû abroger cet arrêté en raison de changements dans les circonstances de fait.

Par un mémoire, enregistré le 22 mars 2018, la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD) déclare se désister purement et simplement de son intervention.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la Constitution, notamment son Préambule ;

 – le code du travail ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Haudier,

 – les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

 – et les observations de Me A… pour la société Jerodis et de Me B… pour la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution et la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité.

1. Considérant que la société Jerodis, qui exploite un magasin d’alimentation générale sous l’enseigne « Carrefour Contact » à Entzheim, a demandé au préfet du Bas-Rhin de procéder à l’abrogation de l’arrêté du 25 juin 1938 réglementant le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin ; que, par un courrier du 2 juillet 2015, le préfet a indiqué à la société Jerodis qu’il n’était pas compétent pour abroger ou modifier le statut départemental de 1938 et qu’il transmettait sa demande au président du conseil départemental du Bas-Rhin ; que la société Jerodis relève appel du jugement du 23 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l’annulation de la décision par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé de procéder à l’abrogation de l’arrêté du 25 juin 1938 ;

Sur l’intervention de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution :

2. Considérant que la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution s’est désistée purement et simplement de son intervention par un mémoire, enregistré le 22 mars 2018 ; que, rien ne s’oppose à ce qu’il soit donné acte de ce désistement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant qu’aux termes de l’article 105 b du code local des professions, issu de la loi du 26 juillet 1900, applicable à la date de signature de l’arrêté du 25 juin 1938 : " (…) Dans les exploitations commerciales, les commis, apprentis et ouvriers ne pourront être occupés en aucune façon le premier jour des fêtes de Noël, Pâques ou de la Pentecôte ; les autres dimanches et hors fériés leur travail ne pourra pas durer plus de cinq heures. Les communes ou régions administratives (article 142) pourront par dispositions statutaires réduire davantage la durée du travail ou même interdire complètement le travail pour toutes les exploitations commerciales ou pour certaines branches seulement. Pendant les quatre dernières semaines précédant la Noël, ainsi que pendant certains dimanches et jours fériés, lorsque des circonstances locales rendent nécessaires une extension du trafic, la police peut permettre que le nombre d’heures pendant lesquelles il pourra être travaillé soit porté jusqu’à dix. Les heures pendant lesquelles le travail pourra avoir lieu seront déterminées, en tenant compte des heures fixées pour le service divin public, par les dispositions statutaires, si celle-ci ont réduit la durée des heures de travail ; dans les autres cas par la police. Elles pourront être fixées différemment pour les diverses branches d’exploitation commerciale." ; qu’aux termes de l’article 142 du même code : " Une commune ou un département peut régler par dispositions statutaires ayant force obligatoire les questions relatives aux entreprises qui leur ont été déléguées par la loi. / Ces dispositions sont adoptées après consultation des exploitants et des salariés ; elles doivent être approuvées par l’autorité administrative supérieure et sont à publier selon les formes prescrites ou usuelles pour la commune ou le département concernés (…) » ; qu’enfin, aux termes de l’article 105 e du même code : « Il peut être dérogé aux dispositions de l’article 105 b par décision de l’autorité administrative supérieure pour les catégories d’exploitations dont l’activité complète ou partielle est nécessaire les dimanches ou les jours fériés pour la satisfaction de besoins de la population présentant un caractère journalier ou se manifestant particulièrement ces jours-là (…) » ;

4. Considérant que la ministre chargée du travail fait valoir que le statut départemental réglementant le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin a été adopté, non par l’arrêté préfectoral du 25 juin 1938, mais par une délibération du conseil général du 5 mai 1938 et que l’arrêté litigieux du 25 juin 1938 n’a été pris par le préfet du Bas-Rhin qu’en sa qualité d’exécutif du conseil général ;

5. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’arrêté du 25 juin 1938 vise expressément la délibération du conseil général du 5 mai 1938 « fixant le statut départemental sur le repos dominical dans le commerce du Bas-Rhin et autorisant le préfet à publier ce statut sous forme d’arrêté de police départementale » ; qu’il ressort, en outre, des documents produits par le préfet en première instance et notamment du compte rendu de la délibération du 5 mai 1938 et des rapports de la commission départementale sur la réglementation du repos dominical dans le commerce par statut départemental des 28 janvier et 4 mai 1938 que le conseil général a entendu réglementer lui-même le repos dominical dans les commerces du département du Bas-Rhin sur le fondement de l’article 105 b du code local des professions ; que, par ailleurs, l’arrêté du 25 juin 1938 a été publié au recueil des actes de la préfecture du 31 juillet 1938 dans lequel ont également été publiés un arrêté du 26 juin 1938 par lequel le préfet a, en application des dispositions précitées de l’article 105 e du code local des professions, prévu des dérogations au statut tel qu’il a été fixé par la délibération du département, ainsi qu’une instruction aux sous-préfets et maires datée du 1er juillet 1938 ; que, dans cette instruction, le préfet a indiqué que « le conseil général du Bas-Rhin, répondant aux voeux exprimés et renouvelés à différentes reprises par les groupements professionnels et économiques, a établi par délibération en date du 5 mai 1938, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par les dispositions des articles 105 b al 2 et 142 du code professionnel local, un statut départemental réglementant d’une façon uniforme le repos dominical dans le commerce du département. Cette réglementation uniforme et obligatoire pour toutes les communes du département ( …) fait l’objet de l’arrêté préfectoral du 25 juin 1938 et entre en vigueur le 1er octobre 1938 » ; que, par suite, il ressort des pièces du dossier, d’une part, que le statut départemental sur le repos dominical dans le commerce du Bas-Rhin a été adopté par le conseil général lors de sa séance du 5 mai 1938 et, d’autre part, que l’arrêté du 25 juin 1938 n’a été pris par le préfet du Bas-Rhin qu’en sa qualité d’exécutif du conseil général afin de mettre en oeuvre ledit statut ;

6. Considérant qu’en principe, l’autorité administrative compétente pour modifier, abroger ou retirer un acte administratif est celle qui, à la date de la modification, de l’abrogation ou du retrait, est compétente pour prendre cet acte ; que, par suite, le préfet, qui n’est au demeurant plus l’organe exécutif du département depuis la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, n’était pas compétent pour abroger le statut départemental réglementant le repos dominical dans le commerce du département du Bas-Rhin ;

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société Jerodis n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a considéré que le courrier du 2 juillet 2015 par lequel le préfet du Bas-Rhin a indiqué à la société qu’il n’était pas compétent pour abroger l’arrêté du 25 juin 1938 ne constituait pas une décision faisant grief et a rejeté sa demande comme étant irrecevable ;

Sur l’intervention de la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité :

8. Considérant que ladite intervention est présentée à l’appui de la requête de la société Jerodis ; que cette requête étant, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, irrecevable, l’intervention de la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité n’est, en conséquence, pas recevable ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d’annulation présentées par la société Jerodis n’implique aucune mesure d’exécution ; que les conclusions à fin d’injonction présentées par la société Jerodis et la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité ne peuvent, par suite, qu’être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative par la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité, qui n’a pas la qualité de partie à l’instance, ne peuvent, en tout état de cause, qu’être rejetées ; que ces dispositions font, par ailleurs, obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la société Jerodis au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de l’intervention de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution.

Article 2 : L’intervention de la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité n’est pas admise.

Article 3 : La requête de la société Jerodis est rejetée.

Article 4 : Les conclusions à fin d’injonction et celles tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Jerodis, à la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, à la Fédération de l’épicerie et du commerce de proximité et à la ministre du travail.

6

N° 16NC00906

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