CAA de NANCY, 4ème chambre, 7 avril 2022, 21NC02449

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  • Méconnaissance du champ d'application de la loi·
  • Police des débits de boissons·
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  • Existence·
  • Boisson·
  • Licence·
  • Restaurant·
  • Profession·
  • Santé publique

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte des termes mêmes de l’article 33 du code local des professions que la licence qu’il institue ne concerne que les établissements exploitant une hôtellerie, un débit de boissons ou un commerce au détail d’eau de vie ou de spiritueux, sans inclure les commerces de restauration, qui sont des établissements dans lesquels les boissons ne sont servies qu’à l’occasion des principaux repas et comme accessoires de la nourriture, et qui sont régis y compris en Alsace-Moselle, par l’article L. 3331-2 du code de la santé publique. …… La préfète du Bas-Rhin ne peut ainsi, sans méconnaitre le champ d’application de la loi, refuser une demande de « grande licence restaurant » prévue à l’article L. 3331-2 du code de la santé publique sur le fondement de l’article 33 du code local des professions.

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 4e ch. - formation à 3, 7 avr. 2022, n° 21NC02449
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 21NC02449
Importance : Intérêt jurisprudentiel signalé
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Strasbourg, 12 juillet 2021, N° 1909074
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 28 juin 2022
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045535906

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B A a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler la décision du 30 juillet 2019 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande tendant à obtenir une « grande licence restaurant ».

Par un jugement n° 1909074 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du préfet du Bas-Rhin du 30 juillet 2019 portant rejet de la demande de Mme A tendant à l’obtention d’une « grande licence restaurant » et a enjoint à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer la demande de Mme A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2021, la préfète du Bas-Rhin demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1909074 du tribunal administratif de Strasbourg du 13 juillet 2021 ;

2°) de rejeter la demande de Mme A.

Elle soutient que :

— c’est à tort que le tribunal administratif a considéré que l’article 33 du code local des professions n’était pas applicable aux commerces de restauration situés en Alsace-Moselle qui servent des boissons uniquement pendant les repas ;

— en application de l’article L. 3331-2 du code de la santé publique, sur tout le territoire, les restaurants qui détiennent une licence de débit de boissons, une petite licence ou une licence restaurant sont qualifiés de « débits de boisson », il doit en être de même en Alsace-Moselle ;

— le régime déclaratoire de l’article L. 3332-4-1 du code précité ne s’appliquant pas en Alsace-Moselle, les commerces de restauration situés en Alsace-Moselle doivent donc être soumis à l’autorisation de l’article 33 du code local des professions dès lors que :

* le guide des débits de boisson élaboré par les services des ministères de la santé et de l’intérieur qualifie les restaurants de sous-catégorie de débits de boisson soumis au droit local en application de l’article L. 3332-5 du code précité, conformément à l’esprit de la loi de 1909 ;

* les articles L. 3331-2 et L. 3332-5 figurent dans une partie du code de la santé publique relative aux débits de boisson.

Mme A, à qui la procédure a été communiquée, n’a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques ;

— le code de la santé publique ;

— le code local des professions applicable dans les départements du Bas-Rhin, Haut-Rhin et de la Moselle ;

— les avis du tribunal administratifs de Strasbourg du 10 janvier 1978 et du 19 février 2001 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

— et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A, responsable d’exploitation de l’établissement Akdeniz a sollicité du préfet du Bas-Rhin la délivrance d’une « grande licence restaurant ». Par une décision du 30 juillet 2019, le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d’une telle autorisation sur le fondement de l’article 33 du code local des professions. Elle a formé un recours gracieux le 2 août 2019 qui a donné lieu à une décision de rejet implicite. Elle a alors saisi le tribunal administratif de Strasbourg d’une demande tendant à l’annulation de la décision du 30 juillet 2019. Par un jugement du 13 juillet 2021, le tribunal, après avoir considéré que la demande tendait également à l’annulation du rejet implicite du recours gracieux, a annulé les décisions en litige, en se fondant sur un moyen soulevé d’office tiré de la méconnaissance du champ d’application de la loi, et a enjoint à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer la demande de Mme A. La préfète du Bas-Rhin relève appel de ce jugement.

2. Aux termes, d’une part, de l’article L. 3331-2 du code de la santé publique : « Les restaurants qui ne sont pas titulaires d’une licence de débit de boissons à consommer sur place doivent, pour vendre des boissons alcooliques, être pourvus de l’une des deux catégories de licence ci-après : 1° La » petite licence restaurant " qui permet de vendre les boissons du troisième groupe pour les consommer sur place, mais seulement à l’occasion des principaux repas et comme accessoires de la nourriture ; 2° La « licence restaurant » proprement dite qui permet de vendre pour consommer sur place toutes les boissons dont la consommation est autorisée, mais seulement à l’occasion des principaux repas et comme accessoires de la nourriture. Les établissements dont il s’agit ne sont soumis ni aux interdictions mentionnées aux articles L. 3332-1 et L. 3332-2, ni à la réglementation établie en application des articles L. 3335-1, L. 3335-2 et L. 3335-8 « . Il résulte de ces dispositions, applicables en Alsace et en Moselle, que les restaurants non titulaires d’une licence de débit de boissons peuvent obtenir pour vendre des boissons soumises à autorisation soit une petite » licence restaurant « , soit une » licence restaurant ".

3. Aux termes, d’autre part, de l’article L. 3332-4-1 du même code, créé par la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 : « Une personne qui veut ouvrir un débit de boissons mentionné aux articles L. 3331-2 ou L. 3331-3 est tenue de faire, dans les conditions prévues aux premier à septième alinéas de l’article L. 3332-3, une déclaration qui est transmise au représentant de l’Etat dans le département conformément au dernier alinéa du même article. Les services de la préfecture de police ou de la mairie lui en délivrent immédiatement un récépissé qui justifie de la possession de la licence de la catégorie sollicitée. () ». Ces dispositions instituent un régime déclaratif, dont les dispositions de l’article L. 3332-5, prévoient qu’il n’est pas applicable " () dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, dans lesquels l’article 33 du code local des professions du 26 juillet 1900 reste en vigueur : a) Pour les débits de boissons dont l’ouverture n’est pas interdite par les articles L. 3332-1 et L. 3332-2, pour les hôtelleries et pour le commerce de détail des eaux-de-vie et spiritueux ; b) Pour le transfert ou le retrait d’autorisation des débits de boissons dont l’ouverture est interdite. Les autorisations délivrées en vertu de l’article 33 ne peuvent l’être qu’à des personnes justifiant qu’elles sont françaises ou ressortissantes d’un Etat de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen. « . L’article 33 du code local des professions du 26 juillet 1900 en vigueur notamment dans le département du Bas-Rhin et auquel renvoie l’article L. 3332-5 du code de la santé publique prévoit que : » Quiconque veut exploiter une hôtellerie, un débit de boisson ou un commerce au détail d’eau de vie ou de spiritueux doit obtenir une licence (Erlaubnis) à cet effet. Cette licence ne peut être refusée que dans les cas suivants : 1 – Lorsqu’il existe contre le requérant des faits qui permettent de supposer qu’il fera un mauvais usage de sa profession en favorisant l’ivrognerie, les jeux prohibés, le recel ou la débauche ; 2 – Lorsque le local destiné à l’exploitation ne satisfait pas, par sa disposition ou sa situation, aux exigences de la police ".

4. En premier lieu, il résulte des termes mêmes de l’article 33 du code local des professions que la licence qu’il institue ne concerne que les établissements exploitant une hôtellerie, un débit de boissons ou un commerce au détail d’eau de vie ou de spiritueux, sans inclure les commerces de restauration, qui sont des établissements dans lesquels les boissons ne sont servies qu’à l’occasion des principaux repas et comme accessoires de la nourriture, et qui sont régis, ainsi que cela est mentionné au point 2, y compris en Alsace-Moselle, par l’article L. 3331-2 du code de la santé publique.

5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des travaux parlementaires préalables à l’adoption de la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 que le législateur, en excluant les départements d’Alsace-Moselle de la procédure déclarative de l’article L. 3332-4-1 du code de la santé publique, tout en les maintenant dans le champ d’application de l’article L. 3331-2, ait entendu étendre celui de l’article 33 du code local des professions tel que défini au point 4 ci-dessus.

6. En troisième lieu, la circonstance que les articles L. 3331-2 et L. 3332-5 du code de la santé publique cités ci-dessus figurent dans une partie du code relative aux débits de boissons ne permet pas de déduire que les restaurants situés en Alsace-Moselle constituent des débits de boissons soumis à l’article 33 du code local des professions. La qualification de débit de boissons ne saurait pas davantage résulter de l’article L. 3331-2 du même code, applicable en Alsace-Moselle, qui ouvre la possibilité à ces établissements de vendre des boissons alcooliques à condition d’être pourvus d’une licence spécifique « petite licence restaurant » ou « licence restaurant ».

7. Enfin, compte tenu de l’absence de valeur règlementaire du guide des débits de boissons élaboré par les services des ministères de la santé et de l’intérieur, la préfète du Bas-Rhin ne peut utilement s’en prévaloir pour soutenir que les restaurants situés en Alsace-Moselle relèveraient du seul code local des professions.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la préfète du Bas-Rhin n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé, au motif de la méconnaissance du champ d’application de la loi, la décision du 30 juillet 2019 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a rejeté la demande de « licence de restaurant » à Mme A sur le fondement de l’article 33 du code local des professions, ensemble le rejet de son recours gracieux au motif de la méconnaissance du champ d’application de la loi.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de la préfète du Bas-Rhin est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’intérieur et à Mme B A.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l’audience du 1er mars 2022, à laquelle siégeaient :

— Mme Ghisu-Deparis, présidente,

— Mme Roussaux, première conseillère,

— Mme Picque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 avril 2022.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

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CAA de NANCY, 4ème chambre, 7 avril 2022, 21NC02449