Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, du 25 février 1999, 96NT01612, inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 3e ch., 25 févr. 1999, n° 96NT01612
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 96NT01612
Importance : Inédit au recueil Lebon
Sur renvoi de : Conseil d'État, 16 juin 1996
Textes appliqués :
Code des pensions civiles et militaires de retraite L86

Décret 70-1097 1970-11-23 art. 8

Décret 77-199 1977-03-04

Décret 85-1056 1985-10-01

Loi 70-2 1970-01-02 art. 3

Identifiant Légifrance : CETATEXT000007528847

Sur les parties

Texte intégral


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 janvier 1992, présentée par M. Henri X…, demeurant au Village à Lasseube Propre (32550) ;
M. X… demande à la Cour :
1 ) d’annuler le jugement n 90-1777 du 24 octobre 1991 du Tribunal administratif de Nantes ayant, d’une part, rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du ministre de la défense en date du 21 juin 1990 en tant que cet arrêté a donné une date d’effet postérieure au 25 janvier 1990 à son intégration dans le corps des secrétaires administratifs des services extérieurs du ministère de la défense, d’autre part, limité à 5 000 F la somme que l’Etat a été condamné à lui payer ;
2 ) d’annuler l’arrêté du 21 juin 1990 dans la limite précisée ci-dessus ;
3 ) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 499 666 F en réparation des préjudices matériel et moral subis par lui ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 70-2 du 2 janvier 1970 ;
Vu la loi n 72-662 du 13 juillet 1972 ;
Vu le décret n 70-1097 du 23 novembre 1970 ;
Vu le décret n 74-338 du 22 avril 1974 ;
Vu le décret n 77-199 du 4 mars 1977 ;
Vu le décret n 85-1056 du 1er octobre 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience,
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 21 janvier 1999 :
 – le rapport de M. CHAMARD, premier conseiller,
 – et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par jugement du 24 octobre 1991, le Tribunal admi-nistratif de Nantes a condamné l’Etat (ministre de la défense) à verser à M. Henri X… une somme de 5 000 F en réparation du préjudice subi par lui en raison de la date tardive de son intégration dans le corps des secrétaires administratifs des services extérieurs du ministère de la défense et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de l’arrêté du 21 juin 1990 du ministre de la défense prononçant son intégration, en tant que cet arrêté donnait une date d’effet postérieure au 25 janvier 1990 à ladite intégration, d’autre part, au versement d’une indemnité plus importante ; que M. X… a relevé appel devant la Cour de ce jugement par une requête en date du 16 janvier 1992, transmise au Conseil d’Etat par ordonnance du 30 janvier 1992 ; que, par un arrêt en date du 17 juin 1996, le Conseil d’Etat a, notamment, d’une part, rejeté les conclusions de M. X… dirigées contre l’arrêté du 21 juin 1990 susmentionné, d’autre part, renvoyé à la Cour le jugement des conclusions de la requête de M. X… tendant à la condamnation de l’Etat à lui verser une indemnité de 499 666 F, et des conclusions du recours incident du ministre de la défense tendant à l’annulation de l’article 1er du jugement le condamnant à verser une somme de 5 000 F au requérant ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu’aux termes de l’article 3 de la loi du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l’accès des officiers à des emplois civils, dans sa rédaction alors applicable : « … les officiers … pourront … sur demande … être placés … en situation hors cadre … pour occuper des emplois vacants … dans les administrations de l’Etat … Après une année de service dans leur nouvel emploi ces personnels pourront, sur leur demande, être intégrés dans le corps de fonctionnaires titulaires dont relève l’emploi considéré … » ; que le bénéfice de ces dispositions a été étendu à certains sous-officiers supérieurs par le décret du 1er octobre 1985 ; qu’aux termes de l’article 8 du décret du 23 novembre 1970, relatif à l’application aux corps des fonctionnaires de l’Etat et de ses établissements publics, autres que les corps d’enseignants du ministère de l’éducation nationale, des dispositions de l’article 3 de la loi n 70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l’accès des officiers à des emplois civils, modifié par le décret du 4 mars 1977, les demandes d’intégration « sont transmises à la commission d’orientation qui, sur le vu des notes obtenues dans l’emploi occupé et, le cas échéant, compte tenu des cycles de formation ou d’inspection organisés par l’administration d’accueil, émet un avis : soit pour l’intégration immédiate qui prend effet à l’expiration de la période de service détaché … » ; que cette dernière disposition ne peut avoir pour conséquence de permettre à l’administration de donner un effet rétroactif à un arrêté d’intégration ;

Considérant que M. X…, major dans le corps des sous-officiers de l’armée de terre, a été placé en position de service détaché, sur un emploi de secrétaire administratif des services extérieurs du ministère de la défense, à compter du 1er novembre 1988, par un arrêté du ministre de la défense du 7 octobre 1988 ; que M. X… a demandé, le 25 mai 1989, son intégration dans le corps desdits secrétaires administratifs ; que cette intégration a été prononcée, à compter du 21 juin 1990, par arrêté du même jour ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction, que M. X… n’apporte pas la preuve, qui lui incombe, qu’antérieurement à sa demande de détachement ou au cours de celui-ci, les services du ministère de la défense lui auraient donné des assurances formelles selon lesquelles son intégration interviendrait antérieurement au 26 janvier 1990, date à partir de laquelle lui étaient opposables les dispositions de l’article L.86 du code des pensions civiles et militaires de retraite relatives au cumul de sa pension militaire de retraite et de son traitement dans son nouvel emploi ; qu’il ne saurait invoquer utilement, à cette fin, une note du 14 mai 1990 émanant du cabinet du ministre de la défense prenant position en ce sens, dès lors que cette note ne lui était pas destinée ; qu’il résulte de ce qui précède que c’est à tort que le tribunal administratif s’est fondé sur le motif tiré d’assurances non respectées pour déclarer l’Etat, responsable du préjudice dont M. X… demande réparation ;
Considérant, toutefois, qu’il appartient à la Cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par M. X… tant devant la Cour que devant le Tribunal administratif ;
Considérant que, compte tenu des dispositions législatives et réglementaires précitées, de la date de la demande d’intégration présentée par M. X… et de ses multiples démarches, le ministre de la défense aurait dû faire toutes diligences pour que son intégration puisse prendre effet à compter du 1er novembre 1989 ou, au plus tard, du 25 janvier 1990 ; que l’arrêté d’intégration n’a été signé que le 21 juin 1990 ; que l’administration n’établit pas qu’elle se serait trouvée dans l’impossibilité de satisfaire à la demande du requérant au plus tard le 25 janvier 1990 ; que, dès lors, celui-ci est fondé à soutenir que cette mesure, qui lui porte préjudice, est intervenue avec un retard anormal, constitutif d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat à son égard ;
Sur le préjudice :

Considérant, en premier lieu, qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, l’intégration tardive de M. X… l’a empêché de pouvoir cumuler, alors qu’il pouvait y prétendre, sa pension militaire de retraite et son traitement de fonctionnaire en activité ; qu’il n’est pas contesté que le montant de la pension non perçue est de 6 400 F par mois ; que si M. X… demande à ce qu’une indemnité de ce montant lui soit versée jusqu’au 30 janvier 1992, sauf ensuite à parfaire pour les années ultérieures jusqu’à sa retraite effective, la période de versement de ladite indemnité doit être limitée du 26 janvier 1990, date à laquelle il aurait dû au plus tard être intégré, au 30 octobre 1990, date de sa réintégration, sur sa demande, dans les cadres de l’armée, soit neuf mois et six jours ; qu’il en résulte que l’indemnité à allouer à ce titre s’élève à 58 880 F ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. X… demande une indemnité de 38 026 F, destinée à compenser la différence entre sa solde de major et son traitement de secrétaire administratif ; mais qu’ayant accepté cette différence de rémunération en toute connaissance de cause lors de son détachement en espérant pouvoir la compenser ultérieurement par les possibilités de cumul susmentionnées et le préjudice qu’il subit à ce titre, à le supposer établi, n’étant pas directement lié au retard mis à prononcer son intégration, aucune indemnité ne lui est due de ce chef ;
Considérant, en troisième lieu, que les préjudices réclamés par le requérant et constitués, d’une part, par la perte de primes d’habillement pour 2 400 F, d’autre part, par un surcoût momentané de loyer, pour 16 440 F et, enfin, par des frais de déménagement, pour 20 000 F, ne sont pas directement liés au retard d’intégration susmentionné, mais aux diverses demandes de l’intéressé lui-même, notamment à sa demande de réintégration dans les cadres de l’armée ; que, dès lors, lesdits frais ou préjudices ne sauraient être indemnisés ;
Considérant, enfin, qu’il sera fait une équitable appréciation des troubles dans les conditions d’existence de M. X… directement liés à la faute commise par l’administration, en lui allouant, à ce titre, une somme de 10 000 F ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. X… est seulement fondé à demander à ce que la somme que l’Etat a été condamné à lui verser par le jugement attaqué, soit portée à 68 880 F ; qu’en revanche, le recours incident du ministre de la défense doit être rejeté ;
Article 1er  : La somme de cinq mille francs (5 000 F) que l’Etat a été condamné à verser à M. Henri X… par le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 24 octobre 1991 est portée à soixante huit mille huit cent quatre vingt francs (68 880 F).
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 24 octobre 1991 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Henri X…, ensemble le recours incident du ministre de la défense sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Henri X… et au ministre de la défense.

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