CAA de NANTES, 1ère chambre, 16 juin 2016, 14NT02456, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Armor Immo a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2007.

Par un jugement n° 1201498 du 29 juillet 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 septembre 2014 et les 4 mai et 25 juin 2015, la SCI Armor Immo, représentée par Me A…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 juillet 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – l’indemnité d’occupation, qui ne rémunère pas la mise à disposition des locaux dont elle est propriétaire au locataire refusant de quitter les lieux mais constitue des dommages et intérêts réparant le préjudice causé par l’occupation illégale de ces locaux, n’est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ;

 – le délai imparti par le juge judiciaire au locataire pour quitter les lieux ne permet pas de regarder ce dernier comme ayant disposé d’un titre juridique lui permettant de se maintenir dans les locaux jusqu’à l’expiration de ce délai ;

 – la nature indemnitaire des sommes perçues résulte du paragraphe 21 de l’instruction DB 3-B-1112, de l’instruction BOI 3-CA du 8 septembre 1994 et du paragraphe 290 de la documentation BOI-TVA-BASE-10-10-10.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 mars et 3 juin 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

 – les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

 – à titre subsidiaire, l’indemnité d’occupation versée au titre des mois pour lesquels le maintien dans les lieux a été autorisé par le juge judiciaire a pour contrepartie la jouissance des lieux loués et ne répare pas le préjudice né de l’inexécution d’une obligation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Aubert,

 – les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.

1. Considérant que la société civile immobilière (SCI) Armor Immo relève appel du jugement du 29 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de de la période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2007 en raison de l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des indemnités d’occupation que lui a versées la société Serpal du fait de l’utilisation d’un bâtiment industriel situé à Tavaux (Jura), depuis la résiliation, ayant pris effet le 28 avril 2006, du bail commercial qu’elle avait conclu avec cette société, jusqu’au 30 novembre 2007, date à laquelle les locaux ont été effectivement libérés ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

En ce qui concerne l’application de la loi :

2. Considérant qu’aux termes du I de l’article 256 du code général des impôts : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et de prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. » ; qu’il résulte de ces dispositions que le versement d’une somme, par un débiteur à son créancier, ne peut être regardé comme la contrepartie d’une prestation de services qu’à la condition qu’il existe un lien direct entre ce versement et une prestation individualisable ;

3. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la résiliation du contrat de bail conclu entre la SCI Armor Immo et la société Serpal a pris effet le 28 avril 2006 ; que par une ordonnance du 3 août 2006 confirmée le 10 janvier 2007 par la cour d’appel de Besançon, le juge des référés du tribunal de grande instance de Dôle a accordé au locataire un délai de huit mois pour quitter les lieux moyennant le versement d’une indemnité d’occupation dont le montant a été fixé à celui du loyer contractuellement prévu, soit 9 435,94 euros par mois ; que la société Serpal a versé une indemnité d’occupation de ce montant jusqu’au 30 novembre 2007, date à laquelle elle a quitté les lieux ; que le versement de cette indemnité a ainsi eu pour contrepartie l’utilisation du bâtiment industriel ayant fait l’objet du contrat de bail conclu entre cette société et la société requérante ; qu’il suit de là qu’il doit être regardé, non comme la réparation, par des dommages-intérêts, d’un préjudice subi par le bailleur du fait de l’occupation sans titre des locaux, mais comme rémunérant une prestation de services à titre onéreux au sens des dispositions du I de l’article 256 du code général des impôts ; que, de par leur nature, de tels versements sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée ;

En ce qui concerne l’interprétation administrative de la loi :

4. Considérant que la SCI Armor Immo se fonde sur la documentation 3-B-1112 du 18 septembre 2000, sur l’instruction BOI 3-CA du 8 septembre 1994 et sur la documentation BOI-TVA-BASE-10-10-10 pour soutenir que l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des indemnités d’occupation qu’elle a perçues doit être déterminé en faisant application des règles de droit civil résultant des articles 1146 et suivants du code civil et 1382 du même code ; que, toutefois, les commentaires administratifs ainsi invoqués indiquent que les indemnités qui constituent de véritables dommages-intérêts ne sont pas soumises, en tant que telles, à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu’ainsi, ils ne comportent pas une interprétation différente de la loi fiscale de celle dont il est fait application ;

5. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SCI Armor Immo n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SCI Armor Immo demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Armor Immo est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Armor Immo et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l’audience du 1er juin 2016, à laquelle siégeaient :

— M. Bataille, président de chambre,

 – Mme Aubert, président-assesseur,

 – M. Jouno, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 juin 2016.


Le rapporteur,

S. AubertLe président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 14NT02456 2

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