CAA de NANTES, 1ère chambre, 26 novembre 2020, 18NT02422, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 1re ch., 26 nov. 2020, n° 18NT02422
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 18NT02422
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 26 avril 2018, N° 1603148
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042590550

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A… a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la réduction des cotisations d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1603148 du 27 avril 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 juin 2018, 19 février et 8 avril 2019, 3 et 13 janvier 2020, M. A…, représenté par Me B…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette réduction ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – le jugement du tribunal administratif de Nantes est irrégulier dès lors que le tribunal a commis une erreur de droit en se fondant sur le fait que le service n’a procédé à aucun rehaussement, c’est-à-dire sur le premier alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, alors que le deuxième alinéa de l’article L. 80 A ne fait pas référence à la nécessité d’un rehaussement d’imposition ;

 – en ne faisant aucune distinction entre le premier et le second alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales et en ignorant la doctrine administrative publiée au BOI-SJ-RES-10-10-10-20130718 et la jurisprudence du Conseil d’Etat, le jugement est entaché d’irrégularité ;

 – il lui est possible, sur le fondement du deuxième alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de se prévaloir de l’interprétation administrative de la loi fiscale au stade de la procédure de réclamation, quand bien même il n’aurait pas été fait application de cette interprétation lors de la déclaration de ses revenus ; il est donc fondé à revendiquer le bénéfice de l’exonération de 25 % pour la détermination de son revenu imposable prévu au paragraphe 140 de l’instruction BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-30 du 12 septembre 2012 dans les prévisions desquelles il rentre ; il n’est tenu de justifier ni de la nature ni de l’étendue ni même du montant des dépenses professionnelles ;

 – le fait de ne pas autoriser un contribuable à invoquer l’interprétation administrative de la loi fiscale au stade de la réclamation est contraire au principe d’égalité devant la loi qui découle de l’article premier de la Constitution ;

 – les paragraphes 450 et 460 de l’instruction n° BOI-SJ-RES-10-10-10 du 18 juillet 2013 prévoient qu’un contribuable peut se prévaloir de l’interprétation administrative de la loi fiscale au stade de la procédure de réclamation quand bien même il n’aurait pas été fait application de cette interprétation lors de la déclaration de ses revenus ; la jurisprudence du Conseil d’Etat fait obligation à l’administration fiscale de faire application de l’interprétation de la loi fiscale exprimée par ses instructions ;

 – le fait, pour l’administration de ne pas appliquer son instruction n° BOI-SJ-RES-10-10-10 du 18 juillet 2013 est contraire au principe de sécurité juridique qui découle de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ;

 – en refusant de tirer les conséquences de sa demande contentieuse, l’administration fiscale méconnaît le principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 20 décembre 2018, 25 mars et 16 avril 2019 et 9 janvier 2020, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A… ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. C…,

 – et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une réclamation contentieuse du 1er décembre 2015, M. A… a demandé à bénéficier, au titre des années 2012 et 2013, de l’exonération de 25 % des revenus de conservateur des hypothèques alors prévue par le paragraphe 140 de l’instruction n° BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-30 du 12 septembre 2012. Cette demande a été rejetée par une décision du 23 février 2016. M. A… a alors demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la réduction des cotisations d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013. Il relève appel du jugement du 27 avril 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. A l’appui de son argumentation ayant trait à la régularité du jugement attaqué, M. A… fait valoir que le tribunal administratif s’est fondé, à tort, sur le premier alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, s’est abstenu de procéder à une distinction entre le premier et le second alinéa de cet article et a ignoré l’instruction administrative publiée au BOI-SJ-RES-10-10-10-20130718. Ces critiques concernent le bien-fondé du jugement et non sa régularité. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l’application de la loi fiscale :

3. Il est constant que ni l’article 81 du code général des impôts, ni les dispositions alors en vigueur de ce code applicables aux salaires des conservateurs des hypothèques, ni aucun autre texte de portée législative ou réglementaire ne prévoient l’exonération sollicitée par M. A…. Par suite, sa demande de réduction d’imposition ne peut, sur le terrain de l’application de la loi fiscale, qu’être rejetée.

En ce qui concerne l’interprétation administrative de la loi fiscale :

4. Aux termes de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au présent litige : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l’administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l’impôt et aux pénalités fiscales. »

5. Le paragraphe 140 de l’instruction fiscale n° BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-30-20120912 prévoit que : « Les salaires restant acquis aux conservateurs des hypothèques après prélèvement de la part revenant au Trésor (salaires demi-nets) sont considérés, à concurrence de 25 % de leur montant, comme couvrant des dépenses professionnelles et exonérées à due concurrence ».

6. En premier lieu, il est constant que M. A… n’a pas, lors de ses déclarations portant sur les revenus perçus en 2012 et en 2013, appliqué l’exonération de 25 % mentionnée au paragraphe 140 de l’instruction fiscale BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-30-20120912 et que ce n’est que lors de sa réclamation contentieuse du 1er septembre 2015 qu’il a demandé à l’administration fiscale de réduire ses cotisations primitives d’impôt sur le revenu en tenant compte de cette exonération. Les impositions primitives de M. A… ont donc été établies conformément aux éléments qu’il avait déclarés, sans que celui-ci ait fait application d’une interprétation administrative de la loi fiscale. Par suite, il ne peut se prévaloir, sur le fondement du second alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l’instruction référencée BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-30-20120912.

7. En deuxième lieu, si M. A… soutient que l’administration fiscale a, par une instruction référencée BOI-SJ-RES-10-10-10 (§ 450 et 460), donné une interprétation du texte fiscal dont l’application conduirait en l’espèce à réduire ses cotisations primitives d’impôt sur le revenu au titre des années 2012 et 2013, cette instruction, qui concerne l’application de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales lui-même, ne constitue pas l’interprétation du texte fiscal qui sert de base aux droits en litige. Dès lors, le requérant n’est pas fondé à s’en prévaloir.

8. En troisième lieu, les contribuables qui ont déclaré leurs salaires de conservateur des hypothèques en appliquant une exonération de 25 % ne sont pas dans la même situation que ceux qui ont déclaré leurs salaires sans faire application du paragraphe 140 de l’instruction fiscale BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-30-20120912 et qui en réclament le bénéfice postérieurement par réclamation. Ces situations donnent lieu à un examen par l’administration fiscale dans un cadre juridique différent. Par suite, et eu égard également à ce qui a été dit aux points 3, 6 et 7, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique ne peut qu’être écarté.

9. Enfin, à l’exception des cas où, en application de l’article 61-1 de la Constitution, une question prioritaire de constitutionnalité est présentée par mémoire distinct, il n’appartient pas au juge administratif de connaître de la question de la conformité d’une loi à la Constitution. Par suite, le moyen tiré de l’atteinte portée aux principes d’égalité des citoyens devant la loi et les charges publiques doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.


Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. D… A… et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.


Délibéré après l’audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

— M. C…, président,

 – M. Brasnu, premier conseiller,

 – Mme Picquet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2020.

Le président-rapporteur,

J.-E. C…

L’assesseur le plus ancien

dans l’ordre du tableau

H. Brasnu


Le greffier,


R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 18NT02422

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