CAA de NANTES, 1ère chambre, 1 avril 2022, 20NT00990, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société privée à responsabilité limitée (SPRL) Spartner’s a demandé au tribunal administratif d’Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1800677 du 11 février 2020, le tribunal administratif d’Orléans a accordé à la société, pour les exercices clos en 2013 et 2014, la décharge des pénalités à concurrence de la substitution, à la majoration de 80 % prévue par le c. du 1 de l’article 1728 du code général des impôts, de la majoration de 10% prévue par le a. du 1 du même article et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2020 la SPRL Spartner’s, représentée par

Me Karleskind, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement en tant qu’il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités demeurant à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 7 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le jugement a été rendu en méconnaissance de l’article R. 611-1 du code de justice administrative ; en effet l’administration fiscale a produit devant les premiers juges une pièce illisible à laquelle la société requérante n’a pu accéder de manière utile;

— les dispositions de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues ; la non-communication de documents obtenus auprès de tiers constitue un vice substantiel de la procédure d’imposition ;

— le service n’a pas procédé à une véritable vérification de comptabilité de l’entreprise en France ; de fait la procédure d’imposition a été viciée ;

— c’est à tort que le service a estimé que les bénéfices de la société étaient imposables en France, tant au regard du droit interne que de la convention fiscale franco-belge ;

— la majoration de 80% prévue par le c. du 1 de l’article 1728 du code général des impôts n’est pas justifiée en ce qui concerne l’année 2012, le vérificateur ayant reconnu que la société avait déposé ses déclarations en Belgique au titre de cette année.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2020 le ministre de l’économie, des finances et de la relance conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l’appel incident, à ce que, s’agissant des exercices clos en 2013 et 2014, la majoration prévue au b. du 1 de l’article 1728 du code général des impôts soit substituée à celle prévue au c. du même article.

Il fait valoir que :

— les moyens soulevés par la SPRL Spartner’s ne sont pas fondés ;

— le caractère délibéré du manquement est caractérisé par l’implication personnelle de M. B dans la direction effective de la société et par l’existence d’importantes minorations de la part de l’entreprise unipersonnelle de M. B au titre des contrats d’apporteur d’affaires et de concession de marque conclus avec la société Spartner’s ; l’implantation fictive de la société Spartner’s a occulté toute possibilité de recoupements et a permis la dispersion des versements.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention entre la France et la Belgique du 10 mars 1964 tendant à éviter les doubles impositions et à établir les règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur les revenus ;

— le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Brasnu,

— et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SPRL Spartner’s, créée le 14 juillet 2011, a pour objet la recherche et la commercialisation de cadeaux à attribuer lors de la souscription d’un abonnement à des périodiques. Son siège social déclaré est situé à Schaerbeek en Belgique, dans les locaux d’une société tierce, la société Elicompta. Elle a pour gérante Mme A, et pour chargé d’affaire commercial son beau-père, M. B. Après avoir procédé, sur le fondement de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, à une visite au domicile de Mme A, l’administration fiscale a procédé le 2 octobre 2014, de même, à une visite au domicile de M. C B dans le Loir-et-Cher. L’administration a également sollicité l’assistance administrative internationale des services fiscaux belges, en application de la convention franco-belge du 10 mars 1964. Le service a estimé que la SPRL Spartner’s avait en France un établissement stable non déclaré, au domicile de M. B, et a assujetti la société Spartner’s à des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014. Après rejet de sa réclamation, la société a demandé au tribunal administratif d’Orléans de prononcer, en droits et pénalités, la décharge de ces impositions. Par un jugement du 11 février 2020, le tribunal administratif d’Orléans, après avoir prononcé, pour les exercices clos en 2013 et 2014, la décharge des pénalités à concurrence de la substitution, à la majoration de 80 % prévue au c. du 1 de l’article 1728 du code général des impôts, de la majoration de 10% prévue par le a. du 1 du même article, a rejeté le surplus de la demande de la société Spartner’s. Cette dernière relève appel de ce jugement. Le ministre de l’économie, des finances et de la relance demande quant à lui, par la voie de l’appel incident, l’annulation du jugement en tant qu’il a réduit les majorations appliquées aux impositions en litige.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article R. 611-1 du code de justice administrative : « La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s’ils contiennent des éléments nouveaux. ».

3. L’administration fiscale a produit, à l’appui de son mémoire en défense devant le tribunal administratif d’Orléans, le contenu d’un fichier informatique au format XML, sous sa forme brute, et correspondant à la réponse définitive des autorités belges à sa demande d’assitance. Si ce document était difficilement lisible, il était néanmoins exploitable tant pour les parties auxquelles il a été régulièrement communiqué que pour les juges de première instance. Dans ces conditions, la société Spartner’s n’est pas fondée à soutenir que les dispositions de l’article R. 611-1 du code de justice administrative et le principe du contradictoire qu’elles sous-tendent auraient été méconnus.

Sur l’appel principal :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d’imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales : « L’administration est tenue d’informer le contribuable de la teneur et de l’origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s’est fondée pour établir l’imposition faisant l’objet de la proposition prévue au premier alinéa de l’article L. 57 ou de la notification prévue à l’article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ». L’obligation ainsi faite à l’administration fiscale de tenir à la disposition du contribuable qui le demande, avant la mise en recouvrement d’impositions établies au terme d’une procédure de rectification contradictoire ou par voie d’imposition d’office, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu’elle a utilisés pour procéder aux redressements correspondants, sauf dans le cas où ces renseignements sont librement accessibles au public, permet au contribuable de vérifier l’authenticité de ces documents et d’en discuter la teneur ou la portée et constitue ainsi une garantie pour l’intéressé. Cette obligation ne peut toutefois porter que sur les documents originaux ou les copies de ces documents effectivement détenus par les services fiscaux. Par suite, dans le cas où l’administration, dans l’exercice de son droit de communication, a pris des copies des documents détenus par un autre service, elle est tenue, en principe, de mettre l’intégralité de ces copies à la disposition du contribuable.

5. Il résulte de l’instruction que l’administration fiscale a adressé, le 16 mars 2016 une demande d’assistance administrative internationale aux autorités fiscales belges concernant la société Spartner’s. Cette dernière a, par un courrier du 17 janvier 2017, demandé que lui soit communiqués les termes de la demande adressée aux autorités fiscales belges. Par un courrier du 6 février 2017, le service a adressé à la société une copie de la réponse des autorités belges, datée du 22 novembre 2016. Cette copie ne comportait que 10 pages sur 16, et certains passages étaient occultés. Par un courrier du 13 février 2017 en réponse à la proposition de rectification, la société a sollicité l’intégralité des réponses fournies par les autorités fiscales belges. Cette demande a été réitérée par un courrier du 24 avril 2017. La société a ensuite adressé le 29 mai 2017 un courriel aux autorités fiscales belges afin d’obtenir la communication intégrale de leur réponse. En réponse, la société a reçu deux documents : un document qualifié par les autorités belges de « réponse partielle », émis le 20 septembre 2016, et une réponse finale du 22 novembre 2016. Le 8 juin 2017, l’administration fiscale française a, en réponse à la demande de la société, communiqué en outre un certain nombre de documents qui étaient joints à la réponse des autorités belges.

6. La société Spartner’s se plaint d’abord du fait que le document daté du

22 novembre 2016 qui lui a été transmis par l’administration fiscale était incomplet, plusieurs pages étant manquantes. Toutefois, seules les cases C1, C3, C5, C6, C7 et C11 ont fait l’objet d’une demande par l’administration fiscale auprès des autorités fiscales belges, ainsi qu’en atteste d’ailleurs la copie de ce document obtenue par la SPRL Spartner’s directement auprès de l’administration fiscale belge. Dans ces conditions, l’administration fiscale était seulement tenue de communiquer le contenu des cases renseignées suite à sa demande. S’agissant enfin des cases A1 et B1, celles-ci concernent uniquement le formulaire de demande de l’administration fiscale française. Elles n’ont donc pas servi à fonder les redressements en litige et n’avaient pas non plus à être communiquées.

7. La société Spartner’s se plaint ensuite du fait que certains passages du document daté du 22 novembre 2016 ont été occultés. Toutefois, ces passages concernent soit les cases C1-0, C3-0, C6-0, C7-0, C7-13, C11-0 qui font partie du formulaire de demande, au demeurant non utilisées, et non des réponses apportées par l’administration fiscale belge, soit des cases non utilisées comme les cases C5-1 et C6-7. L’administration fiscale n’était donc pas davantage tenue de communiquer le contenu de ces cases.

8. S’agissant ensuite des cases C6 et C7 pour lesquels il est renvoyé à la réponse partielle du 20 septembre 2016, il s’agit des documents concernant des informations bancaires de la SPRL Spartner’s qui lui ont été communiqués. En tout état de cause, ce renseignement était nécessairement connu du contribuable et n’avait pas à être communiqué.

9. Enfin, si la SPRL Spartner’s soutient qu’il y a eu deux demandes d’assistance administrative et produit au soutien de cette allégation les deux documents distincts qu’elle a reçus directement des autorités fiscales belges dont elle s’était rapprochée par courriel du

29 mai 2017. Toutefois, l’administration fiscale fait valoir sans être contredite qu’elle n’avait en sa possession que le document complet daté du 22 novembre 2016. En outre, les demandes d’assistance administrative internationale répondent à un formalisme précis fixé notamment la directive 2011/16/EU du 15 février 2011. Le document qualifié par les autorités belges de « réponse partielle », émis le 20 septembre 2016, ne répond pas aux normes définies par cette directive et ne peut être interprété comme étant une autre réponse dans le cadre d’une seconde demande d’assistance administrative dont l’administration fiscale française n’aurait pas révélé l’existence.

10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance de l’article

L. 76 B du livre des procédures fiscales doit, en toutes ses branches, être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l’article L. 13 du livre des procédures fiscales : « Les agents de l’administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. ». L’article R. 13-1 du même livre prévoit que : " Les vérifications de comptabilité mentionnées à l’article L. 13 comportent notamment : a) La comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce ; b) L’examen de la régularité, de la sincérité et du caractère probant de la comptabilité à l’aide particulièrement des renseignements recueillis à l’occasion de l’exercice du droit de communication, et de contrôles matériels. ".

12. Il résulte de ces dispositions que la vérification de comptabilité consiste, en vue d’assurer l’établissement d’impôts ou de taxes dus par le contribuable, à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales qu’il a souscrites en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont l’administration prend alors connaissance.

13. La société SPRL Spartner’s se plaint de ce que l’administration fiscale a fondé l’ensemble de son redressement sur la demande d’assistance administrative internationale, sans avoir cherché à se procurer ses factures d’achat et de vente, ainsi que ses documents comptables. Toutefois, il est constant que les impositions en litige ont été établies d’office par l’administration fiscale. Il appartient ainsi au contribuable de démontrer que les données recueillies ont conduit à une imposition exagérée. En l’espèce, la seule circonstance que le service ne se soit pas fondé sur les documents comptables de la société ni sur des factures ne saurait révéler le caractère exagéré des impositions mises à la charge de la société. Par suite, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S’agissant du droit interne :

14. Aux termes de l’article 209 du code général des impôts : « I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l’impôt sur les sociétés sont déterminés () en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France, () ainsi que de ceux dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions. ».

15. L’administration fiscale a procédé le 2 octobre 2014, sur le fondement de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, à une visite au domicile de M. C B dans le Loir-et-Cher. Dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société Spartner’s, l’administration a également sollicité, ainsi qu’il a été précédemment exposé, l’assistance administrative internationale des services fiscaux belges, en application de la convention franco-belge du 10 mars 1964.

16. Lors de la vérification de comptabilité de la société Spartner’s, le vérificateur a constaté que la société Spartner’s a été créée à la suite de la faillite de la société de droit belge Barter dirigée par M. B. Il a également constaté que si la gérante de la société Spartner’s était la fille de l’épouse de M. B, celle-ci travaillait en tant qu’agent administratif en région parisienne et n’intervenait en réalité nullement dans la gestion de la société Spartner’s. Les éléments saisis au cours de la visite domiciliaire ont en outre révélé que M. B, depuis son domicile dans le Loir-et-Cher, assurait le suivi des règlements fournisseurs de la SPRL Spartner’s, le suivi des marchandises ainsi que le suivi des stocks. Les courriels adressés par M. B portaient d’ailleurs la mention, en pied-de page, « Direction France ». M. B n’a par ailleurs produit aucun élément permettant d’établir sa présence en Belgique. De plus, les fournisseurs et clients de la société Spartner’s ont tous indiqué que leur interlocuteur était M. B Les constatations opérées lors du contrôle ont ainsi permis de révéler, d’une part, que la gérance de la belle-fille de M. B présentait un caractère fictif, et que M. B était le gérant de fait de la société Spartner’s. Enfin, s’agissant de la comptabilité, la salariée du cabinet comptable Elicompta en Belgique transmettait l’ensemble des informations (historiques des tiers, comptes généraux et rapports d’analyses financières de la société) à M. B, comme l’atteste un courriel du 3 juillet 2013. L’administration relève d’ailleurs que les montants des factures de cette société pour ces prestations de tenue de comptabilité sont nettement inférieurs aux montants des factures de l’entreprise individuelle de Mme B, épouse de M. B, « Secrétariat Office Services » établie dans la même commune que celle du domicile de M. B, au titre des exercices en litige pour des prestations de « pré-comptabilité » et de « suivi administratif » rendues au profit de la société Spartner’s. La gestion administrative et le secrétariat de cette dernière était ainsi principalement effectuée par une entreprise établie en France et non au siège social en Belgique. Dès lors, le service a pu établir que la société Spartner’s ne disposait en Belgique que d’une domiciliation au sein d’un cabinet comptable, et que le domicile de M. B en France constituait un établissement disposant d’un degré de permanence et d’autonomie de gestion. L’administration fiscale justifie ainsi de ce que l’entreprise était exploitée en France et devait être, en principe, assujettie à l’impôt sur les sociétés au regard du droit interne.

S’agissant de l’application de la convention entre la France et la Belgique du 10 mars 1964 :

17. Aux termes de l’article 4 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 : « 1. Les bénéfices industriels et commerciaux ne sont imposables que dans l’Etat contractant où se trouve situé l’établissement stable dont ils proviennent. () 3. Le terme » établissement stable " désigne une installation fixe d’affaires où l’entreprise exerce tout ou partie de son activité. 4. Constituent notamment des établissements stables : a) Un siège de direction ; ( ) 5. On ne considère pas qu’il y a établissement stable si : a) Il est fait usage d’installations aux seuls fins de stockage, d’exposition ou de livraisons de marchandises appartenant à l’entreprise ; b) Des marchandises appartenant à l’entreprise sont entreposées aux seules fins de stockage, d’exposition ou de livraison ; ".

18. Au regard des éléments exposés au point 16, l’administration fiscale apporte la preuve que l’entreprise disposait en France d’un siège de direction, et que ses bénéfices devaient par conséquent être imposés en France.

En ce qui concerne la majoration appliquée sur les impositions de l’année 2012 :

19. Aux termes de l’art 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d’une déclaration ou d’un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt entraîne l’application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l’acte déposé tardivement, d’une majoration de : a. 10 % en l’absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l’acte dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai ; b. 40 % lorsque la déclaration ou l’acte n’a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai ; c. 80 % en cas de découverte d’une activité occulte. ".

20. Dans le cas où un contribuable n’a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu’il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l’administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l’exercice occulte de l’activité professionnelle si le contribuable n’est pas lui-même en mesure d’établir qu’il a commis une erreur justifiant qu’il ne se soit acquitté d’aucune de ces obligations déclaratives. S’agissant d’un contribuable qui fait valoir qu’il a satisfait à l’ensemble de ses obligations fiscales dans un État autre que la France, la justification de l’erreur commise doit être appréciée en tenant compte tant du niveau d’imposition dans cet autre État que des modalités d’échange d’informations entre les administrations fiscales des deux États.

21. En l’espèce, si la société SPRL Spartner’s fait valoir qu’elle avait rempli, pour l’année 2012, ses obligations déclaratives en Belgique, toutefois, pour l’établir, elle se borne à faire référence à un extrait de la proposition de rectification dans lequel le vérificateur mentionne une déclaration en Belgique. Cet élément ne saurait à lui-seul permettre d’attester que la société a rempli ses obligations fiscales en Belgique au titre de l’année 2012.

En outre, la société, qui exerçait son activité exclusivement en France, ne pouvait de bonne foi ignorer que ses bénéfices y étaient imposables. Dès lors, c’est à bon droit que le service a appliqué la majoration de 80% prévue au c de l’article 1728 du code général des impôts.

Sur l’appel incident :

22. Le ministre de l’économie, des finances et de la relance conteste, par la voie de l’appel incident, le jugement du 11 février 2020 en tant qu’il a substitué, pour les années 2013 et 2014, à la majoration de 80% prévue au c. de l’article 1728 du code général des impôts celle de 10% prévue au a. du même article, et demande que la majoration de 40% prévue au b. de ce même article soit substituée à celle de 10% retenue par les premiers juges. Toutefois, l’application de la majoration de 40% prévue au b. de l’article 1728 du code général des impôts suppose l’envoi préalable d’une mise en demeure. Une telle mise en demeure n’ayant pas été adressée à la société, il ne peut être fait droit aux conclusions du ministre.

23. Il résulte de tout ce qui précède que la SPRL Spartner’s n’est pas fondée à demander, par la voie de l’appel principal, la réformation du jugement attaqué et que le ministre de l’action et des comptes publics n’est fondé à demander, par la voie de l’appel incident, que, s’agissant des exercices clos en 2013 et 2014, la majoration prévue au b. du 1 de l’article 1728 du code général des impôts soit appliquée. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de rejeter les conclusions de la SPRL Spartner’s relatives aux frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SPRL Spartner’s est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l’économie, des finances et de la relance par la voie de l’appel incident sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SPRL Spartner’s et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l’audience du 17 mars 2022, à laquelle siégeaient :

— Mme Perrot, présidente de chambre,

— M. Geffray, président-assesseur,

— M. Brasnu, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2022.

Le rapporteur

H. BrasnuLa présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

No 20NT00990

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