Cour administrative d'appel de Paris, 14 avril 2009, n° 08P01671

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 14 avr. 2009, n° 08P01671
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 08P01671
Décision précédente : Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, 25 décembre 2007, N° 0700051-0700052

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE PARIS

N° 08PA01671


FEDERATION

DES CADRES ET COLLABORATEURS DE

NOUVELLE CALEDONIE

__________

M. Merloz

Président

__________

Mme Monchambert

Rapporteur

__________

Mme Descours-Gatin

Rapporteur public

__________

Audience du 31 mars 2009

Lecture du 14 avril 2009

__________

46-01-02-01

C

C G

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Paris

(4e Chambre )

Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2008, présentée pour la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE représentée par son président dont le siège est fixé BP 3776 à XXX, par Me X ; la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement nos 0700051-0700052 du 26 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a rejeté ses demandes tendant à la saisine pour avis du Conseil d’Etat en application de l’article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 aux fins de confirmer le caractère réglementaire des dispositions de la loi du pays n° 2006-4 du 14 avril 2004 relative à la représentativité des organisations syndicales de salariés, précisant le seuil à partir duquel un syndicat est jugé représentatif, à l’annualisation de la délibération n° 229 du 13 décembre 2006 par laquelle le congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté les règles relatives à la représentativité des organisations syndicales de salariés de l’arrêté du 27 décembre 2006 par lequel la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a établi la liste des organisations syndicales de salariés reconnues représentatives au sens des articles 58 et 58-1 de l’ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 modifiée et de l’arrêté du 19 avril 2007 par lequel la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a établi la liste des organisations syndicales de salariés reconnues représentatives au sens des articles 58 et 58-1 de l’ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 modifiée ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE soutient que le tribunal a entaché son jugement d’irrégularité en n’invitant pas le Conseil d’Etat à se prononcer sur le caractère réglementaire de la loi de pays du 14 avril 2004, contrairement à ce qui est prévu par l’article 107 alinéa 2 de la loi organique ; que le tribunal n’a pas statué sur le moyen tiré de ce que le seuil puisse être conforme aux dispositions conventionnelles ou constitutionnelles ; que le jugement est entaché de contradiction de motifs et n’est pas suffisamment motivé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 28 août 2008 le mémoire en défense présenté pour le gouvernement de la Nouvelle Calédonie, par Me Chassard tendant au rejet de la requête et à la condamnation de la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; le gouvernement de la Nouvelle Calédonie soutient que le juge administratif ne peut connaître de la conformité de la délibération du 13 décembre 2006 au regard de la Constitution ; qu’à compter de l’entrée en vigueur du code du travail de Nouvelle Calédonie, le 1er mai 2008, les dispositions de la délibération contestée ont été abrogées, ce qui rend le moyen tiré de son illégalité, inopérant ; que l’arrêté du 27 décembre 2006 a lui-même été abrogé par l’arrêté du 15 juillets 2008 relatif à la représentativité des organisations syndicales de salariés en Nouvelle Calédonie ; que les dispositions contenues dans la loi de pays sur la représentativité des syndicats relèvent des principes fondamentaux du droit du travail mentionnés au 3° de l’article 99 de la loi du 19 mars 1999 ; que les dispositions sur le pourcentage minimal de voix nécessaire pour conférer la représentativité, n’ont pas un caractère réglementaire ; que le code du travail métropolitain continue de conserver en partie législative de nombreux taux et pourcentages tels que la représentativité ;

Vu la mise en demeure adressée le 3 novembre 2008 au congrès de la Nouvelle-Calédonie, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, et l’avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée ;

Vu la loi de pays n° 2006-4 du 14 avril 2006 ;

Vu l’ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 modifiée ;

Vu la délibération n° 366 du 11 février 2008 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la lettre en date du 13 mars 2009 du président de la chambre informant les parties en application des dispositions de l’article R.611-7 du code de justice administrative de ce la décision était susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office ;

Vu la décision du président de la cour du 5 janvier 2009, désignant Mme Descours-Gatin rapporteur public remplaçant, en application des dispositions de l’article R. 222-24 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu, au cours de l’audience publique du 31 mars 2009 :

— le rapport de Mme Monchambert, rapporteur,

— les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

— et les observations de Me X pour la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE ;

Considérant qu’aux termes de l’article 58 de l’ordonnance susvisée du 13 novembre 1985 modifiée dans sa rédaction issue de la loi de pays susvisée du 14 avril 2006 : « Au niveau de la Nouvelle-Calédonie, la représentativité des organisations syndicales est déterminée en prenant en compte les critères suivants : / les effectifs ; / l’indépendance ; / les cotisations ; / l’expérience ; / une ancienneté minimale de deux ans de l’organisation syndicale concernée. /La représentativité des organisations syndicales de salariés est, outre les critères énoncés à l’alinéa précédent, subordonnée à l’obtention, lors des élections des représentants du personnel des secteurs public et privé, d’une moyenne générale de voix au moins égale à cinq pour cent du total des suffrages valablement exprimés tous collèges confondus. » ; qu’aux termes de l’article 58-1 : « Dans le secteur privé, au niveau interprofessionnel, la représentativité des organisations syndicales est déterminée en prenant en compte les critères suivants : / les effectifs ; / l’indépendance ; / les cotisations ; / l’expérience ; / une ancienneté minimale de deux ans de l’organisation syndicale concernée. / La représentativité des organisations syndicales de salariés est, outre les critères énoncés à l’alinéa précédent, subordonnée à l’obtention, lors des élections des délégués du personnel, d’une moyenne générale de voix au moins égale à cinq pour cent du total des suffrages valablement exprimés tous collèges confondus » ; que par une délibération n° 229 du 13 décembre 2006, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté les règles relatives à la représentativité des organisations syndicales de salariés et que par deux arrêtés du 27 décembre 2006 et du 19 avril 2007 la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a établi la liste des organisations syndicales de salariés reconnues représentatives au sens des articles 58 et 58-1 précités de l’ordonnance du 13 novembre 1985 ; que par la présente requête, la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE fait appel du jugement en date du 26 décembre 2007 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes tendant d’une part, à la saisine pour avis du Conseil d’Etat aux fins de confirmer le caractère réglementaire des dispositions de la loi du pays du 14 avril 2006 relative à la représentativité des organisations syndicales de salariés, précisant le seuil à partir duquel un syndicat est jugé représentatif et d’autre part, à l’annulation de la délibération du 13 décembre 2006, de l’arrêté du 27 décembre 2006 et de l’arrêté du 19 avril 2007 ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu opposées par le gouvernement de Nouvelle-Calédonie :

Considérant que tant l’intervention de la délibération n° 366 du 14 février 2008 relative au code du travail de Nouvelle-Calédonie qui a, dans son article 4 34°, abrogé la délibération du 13 décembre 2006 que la circonstance que les arrêtés du 27 décembre 2006 et du 19 avril 2007 aient été abrogés et remplacés par l’arrêté du 15 juillet 2008, ne rendent pas sans objet les conclusions d’annulation présentées par la fédération requérante et dirigées contre la délibération du 13 décembre 2006 et les arrêtés du 27 décembre 2006 et du 19 avril 2007, dès lors qu’il n’est pas établi, ni même allégué que ces décisions n’auraient reçu aucune application avant leur abrogation ; que par suite, les conclusions à fin de non lieu ci-dessus mentionnées doivent être rejetées ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu’aux termes de l’article 76 de la Constitution :" Les populations de la Nouvelle Calédonie sont appelées à se prononcer avant le 31 décembre 1998 sur les dispositions de l’accord signé à Nouméa le 5 mai 1998 et publié le 27 mai 1998 au Journal officiel de la République française […] ; qu’aux termes de l’article 77.- "Après approbation de l’accord lors de la consultation prévue à l’article 76, la loi organique, prise après avis de l’assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie, détermine, pour assurer l’évolution de la Nouvelle-Calédonie dans le respect des orientations définies par cet accord et selon les modalités nécessaires à sa mise en œuvre » ; qu’il résulte de ces dispositions que le contrôle d’une disposition au regard des orientations définies par l’accord de Nouméa participe du contrôle de constitutionnalité ; que par suite, le moyen tiré de ce que le seuil défini tant par la loi de pays que par la délibération du 13 décembre 2006 puisse être conforme aux orientations définies par l’accord de Nouméa qui tend à mettre en cause la conformité de la loi à la Constitution, échappe à la compétence du juge administratif ; que le Tribunal administratif de la Nouvelle Calédonie ne pouvait donc, sans méconnaître sa compétence, statuer sur ledit moyen ; qu’ainsi le jugement du 27 décembre 2006 doit être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE devant le Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie ;

Sur les conclusions tendant à la saisine du Conseil d’Etat :

Considérant qu’aux termes de l’article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 : « Les lois du pays ont force de loi dans le domaine défini à l’article 99. Elles ne sont susceptibles d’aucun recours après leur promulgation./Les dispositions d’une loi du pays intervenues en dehors du domaine défini à l’article 99 ont un caractère réglementaire. Lorsqu’au cours d’une procédure devant une juridiction de l’ordre administratif ou de l’ordre judiciaire, la nature juridique d’une disposition d’une loi du pays fait l’objet d’une contestation sérieuse, la juridiction saisit, par un jugement qui n’est susceptible d’aucun recours, le Conseil d’Etat qui statue dans les trois mois. Il est sursis à toute décision sur le fond jusqu’à ce que le Conseil d’Etat se soit prononcé sur la nature de la disposition en cause » ; que la saisine prévue par ces dispositions constitue un pouvoir propre du juge eu égard à l’appréciation qu’il porte sur le caractère sérieux de la contestation ; que par suite, les conclusions présentées par la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE tendant à ce que sur le fondement de l’article 107 précité, il saisisse pour avis le Conseil d’Etat sur la nature juridique de l’article 1er de la loi du pays du 4 avril 2006, ne sont pas recevables et ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’annulation de la délibération du 13 décembre 2006 et des arrêtés des 26 décembre 2006 et du 19 avril 2007 :

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la délibération du 13 décembre 2006 : « I – Par moyenne générale de voix au moins égale à cinq pour cent. au sens du deuxième alinéa de l’article 58 de l’ordonnance modifiée n° 85-1181 du 13 novembre 1985 susvisée, il faut entendre l’obtention cumulative par les organisations syndicales de salariés :/ dans le secteur privé, lors des élections des délégués du personnel titulaires,/ dans le secteur public, lors des élections des délégués du personnel titulaires des agents non fonctionnaires,/ dans le secteur public, lors des élections des représentants des fonctionnaires aux commissions administratives paritaires,/d’une moyenne générale de voix au moins égale à cinq pour cent du total des suffrages valablement exprimés, tous collèges confondus, au cours de la période de référence prévue à l’article 4 de la présente délibération./II – Par moyenne générale de voix au moins égale à cinq pour cent au sens du deuxième alinéa de l’article 58-1 de l’ordonnance modifiée n° 85-1181 du 13 novembre 1985 susvisée, il faut entendre l’obtention par les organisations syndicales de salariés, lors des élections des délégués du personnel titulaires, d’une moyenne générale de voix au moins égale à cinq pour cent du total des suffrages valablement exprimés, tous collèges confondus, au cours de la période de référence prévue à l’article 4 de la présente délibération. » ; qu’en adoptant ces dispositions, le Congrès de Nouvelle Calédonie s’est borné à préciser les dispositions précitées des articles 58 et 58-1 de l’ordonnance du 13 novembre 1985 en ce qui concerne les élections prises en compte pour l’appréciation de la représentativité des organisations syndicales sans remettre en cause ni les seuils de suffrage, ni leur mode d’appréciation tous collèges confondus ; que par suite, il ne peut être utilement soutenu qu’ainsi interprétées, ces dispositions auraient pour effet de méconnaître les 6e et 8e alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ainsi que les orientations définies par l’accord de Nouméa, car ces moyens qui tendent à mettre en cause la conformité de la loi de pays à la Constitution ne relèvent pas de la compétence du juge administratif ;

Considérant que la délibération attaquée ne méconnaît aucun droit relatif à la liberté syndicale en se bornant à subordonner son exercice à une condition légale de reconnaissance de la représentativité des organisations syndicales ; que, dès lors, la fédération requérante n’est, en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir, à supposer qu’elle puisse d’ailleurs utilement les invoquer, des stipulations de l’article 3 alinéa 2 de la convention de l’organisation internationale du travail n° 87 ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE n’est pas fondée à demander l’annulation de la délibération susvisée ni à solliciter par voie de conséquence des arrêtés des 26 décembre 2006 et 19 avril 2007 ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas partie au litige, supporte le versement des sommes réclamées par la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE ; que dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE les sommes réclamées par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 26 décembre 2007 du Tribunal de Nouvelle Calédonie est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE CALEDONIE devant Tribunal de Nouvelle Calédonie et le surplus de ses conclusions d’appel sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la FEDERATION DES CADRES ET COLLABORATEURS DE NOUVELLE-CALEDONIE, au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et au congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

Délibéré après l’audience du 31 mars 2009, où siégeaient :

— M. Merloz, président,

— Mme Monchambert, président-rapporteur,

— M. Lelièvre, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 14 avril 2009.

Le rapporteur, Le président,

S. MONCHAMBERT G. MERLOZ

Le greffier,

F. GOUTENOIR

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

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