Cour administrative d'appel de Paris, 15 octobre 2012, n° 11PA03697

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 15 oct. 2012, n° 11PA03697
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 11PA03697
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 20 juin 2011, N° 1011079/6-2

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

N° 11PA03697


Préfet de Police c/ Mme A X

__________

M. Fournier de Laurière

Président

__________

Mme Larsonnier

Rapporteur

__________

Audience du 1er octobre 2012

Lecture du 15 octobre 2012

__________

md

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Cour administrative d’appel de Paris

(6e Chambre)

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2011, présentée par le Préfet de Police ; Le Préfet de Police demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1011079/6-2 en date du 21 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé l’arrêté du 4 mai 2010 refusant de délivrer un titre de séjour à Mme X, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, et lui a enjoint de délivrer à l’intéressée une carte de séjour temporaire mention « vie privée et familiale » ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Paris ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne, d’un autre Etat partie à l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience, en application de l’article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 1er octobre 2012 :

— le rapport de Mme Larsonnier, rapporteur ;

1. Considérant que, par arrêté du 4 mai 2010, le Préfet de Police a rejeté la demande d’admission exceptionnelle au séjour présentée par Mme X, de nationalité philippine, et a assorti sa décision d’une obligation de quitter le territoire français ; que le Tribunal administratif de Paris a, par jugement en date du 21 juin 2011 dont le Préfet de Police relève appel, annulé ledit arrêté et lui a enjoint de délivrer à l’intéressée une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant que pour annuler l’arrêté contesté, les premiers juges ont considéré que le Préfet de Police avait commis une erreur manifeste d’appréciation au regard des conséquences de l’arrêté contesté sur la situation personnelle de Mme X, dès lors que celle-ci réside en France de manière continue depuis 2001, qu’elle travaille en qualité d’employée de maison depuis 2007, rémunérée sous forme de chèque emploi service, qu’elle dispose d’une promesse d’embauche sous contrat à durée indéterminée, qu’elle a suivi une formation pour apprendre la langue française et qu’elle est titulaire d’un certificat de capacité de français remis par la mairie de Paris ; que, toutefois, les pièces versées au dossier sont insuffisantes pour établir le caractère habituel de la résidence en France de Mme X au titre des années 2001 à 2004 ; qu’il ressort également des pièces du dossier que la Direction départementale du travail de l’emploi et de la formation professionnelle a émis, le 3 mars 2009, un avis défavorable à la délivrance d’une autorisation de travail à l’intéressée ; qu’il est constant, en outre, que celle-ci est célibataire et sans charge de famille en France alors que ses parents et sa fratrie demeurent dans son pays d’origine ; que, dans ces conditions, le Préfet de Police n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en refusant de délivrer à Mme X un titre de séjour ; qu’ainsi, le Préfet de Police est fondé à soutenir que c’est à tort que le Tribunal administratif de Paris a annulé, pour ce motif, son arrêté ;

3. Considérant, toutefois, qu’il appartient à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée a été signée par

Mme Y Z, attaché d’administration, qui bénéficiait pour ce faire d’une délégation de signature du préfet de police en vertu d’un arrêté n° 2010-00225 en date du 12 avril 2010, régulièrement publié le 16 avril 2010 au bulletin municipal officiel de la ville de Paris, à l’effet de signer tous actes, arrêtés et décisions entrant dans le champ de ses attributions ; qu’ainsi, le moyen tiré du vice d’incompétence doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la décision litigieuse comporte l’énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu’en particulier, elle mentionne que Mme X, entrée en France en janvier 2001 selon ses déclarations, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en tant que salariée dans le cadre des dispositions de l’article L 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, que la Direction départementale du travail de l’emploi et de la formation professionnelle a émis, le 3 mars 2009, un avis défavorable à la délivrance d’une autorisation de travail conformément aux dispositions de l’article R 5221-20 du code du travail, et qu’après un examen approfondi de sa situation, la requête de l’intéressée ne répond ni à des considérations humanitaires ni à des motifs exceptionnels, qu’elle est célibataire et sans charge de famille en France et qu’elle ne justifie pas être démunie d’attaches familiales à l’étranger où résident ses parents et sa fratrie, que Mme X ne remplit, par suite, aucune des conditions prévues aux articles L 313-10 1° et L 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et qu’enfin, il n’est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l’intéressée à sa vie privée et familiale et qu’elle n’établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’ainsi, la motivation de la décision contestée, même si elle revêt un caractère général, comporte notamment l’énoncé de l’ensemble des critères énumérés à l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile au regard desquels l’autorité administrative doit apprécier si la situation de l’intéressée fait apparaître ou non un motif exceptionnel ou répond à des considérations humanitaires ; qu’une telle motivation qui atteste de la prise en compte par l’autorité compétente de l’ensemble des critères prévus par la loi pour la délivrance du titre de séjour sollicité dans le cadre de l’admission exceptionnelle au séjour, répond aux exigences de motivation posées par la loi du 11 juillet 1979 ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, tel qu’il résulte de la loi du 20 novembre 2007 : « (…) La carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l’article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, à l’étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l’admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu’il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 311-7 (…). L’autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l’article L. 312-1 la demande d’admission exceptionnelle au séjour formée par l’étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. » ; qu’aux termes de l’article L. 313-10 du même code : « La carte de séjour temporaire autorisant l’exercice d’une activité professionnelle est délivrée : 1° A l’étranger titulaire d’un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l’article L. 341-2 du code du travail. Pour l’exercice d’une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l’autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d’employeurs et de salariés représentatives, l’étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l’emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (…) » ;

7. Considérant qu’il appartient à l’autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l’admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d’une carte portant la mention

« vie privée et familiale » répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s’il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d’une carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » ; que dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d’une promesse d’embauche ou d’un contrat lui permettant d’exercer une activité figurant dans la liste annexée à l’arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des « motifs exceptionnels » exigés par la loi ; qu’il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu laisser à l’administration un large pouvoir pour apprécier si l’admission au séjour d’un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels que celui-ci fait valoir ; qu’il lui appartient d’examiner, notamment, si la qualification, l’expérience et les diplômes de l’étranger ainsi que les caractéristiques de l’emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans la liste annexée à l’arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l’étranger ferait état à l’appui de sa demande, tel que par exemple, l’ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l’espèce, des motifs exceptionnels d’admission au séjour ;

8. Considérant que Mme X a présenté, à l’appui de sa demande, une promesse d’embauche sous contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’employée de maison, emploi pour lequel elle bénéficie des compétences et de l’expérience requises, et soutient qu’elle travaille depuis 2007, qu’elle justifie de sa présence sur le territoire français depuis 2001 ainsi que d’une très bonne intégration ; que, toutefois, ces circonstances ne peuvent être regardées comme constituant un motif exceptionnel ou humanitaire d’admission au séjour au sens des dispositions précitées de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dès lors, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme X réside de manière continue et ininterrompue sur le territoire français depuis plus de dix ans et que le métier d’employée de maison n’est pas au nombre de ceux figurant sur la liste des professions en Ile-de-France, annexée à l’arrêté du 18 janvier 2008, pour lesquelles la situation de l’emploi ou l’absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n’est pas opposable ; que le préfet pouvait, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et alors que, comme il vient d’être dit, la situation de l’emploi ou l’absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail était opposable à la demande de Mme X, saisir la Direction départementale du travail de l’emploi et de la formation professionnelle afin qu’elle se prononce préalablement sur la demande de titre de séjour mention « salarié » de l’intéressée ; que, dès lors, le Préfet de Police n’a pas commis d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions précitées de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

9. Considérant que Mme X ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir de la circulaire du 7 janvier 2008 du ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, celle-ci ayant été annulée par le Conseil d’État dans sa décision du 23 octobre 2009 ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

10. Considérant que les moyens dirigés contre la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ayant été écartés, l’exception d’illégalité de cette décision, invoquée à l’appui des conclusions de Mme X dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu’être écartée par voie de conséquence ;

11. Considérant que le moyen tiré de l’incompétence du signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus concernant la décision de refus de séjour ;

12. Considérant, enfin, que si Mme X soutient qu’elle est bien intégrée en France et que sa famille demeurée dans son pays d’origine sera privée de son soutien matériel, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu’en obligeant Mme X à quitter le territoire français, le Préfet de Police aurait commis une erreur manifeste d’appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l’intéressée ;

13. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le Préfet de Police est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 4 mai 2010 refusant à Mme X la délivrance d’un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ; que la demande de Mme X devant le Tribunal administratif de Paris doit être rejetée ;

D E C I D E :

Article 1er: Le jugement n° 1011079/6-2 du 21 juin 2011 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

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