Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 21 mai 2013, 10PA06030, 11PA05297, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 4e ch., 21 mai 2013, n° 10PA06030, 11PA05297
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 10PA06030, 11PA05297
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 29 novembre 2011, N° 1011446/7-2
Identifiant Légifrance : CETATEXT000027620005

Sur les parties

Texte intégral

Vu I°, la requête, enregistrée le 22 décembre 2010 sous le n°10PA06030, présentée pour la société ES Energie Strasbourg, dont le siège est 37, rue du marais vert à Strasbourg (67953) cedex 9, représentée par son représentant légal en exercice, par Me D… ; la société ES Energie Strasbourg demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0913976/7-2 en date du 5 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, d’une part, à l’annulation de la décision par laquelle la caisse des dépôts et des consignations (CDC) a implicitement refusé de lui restituer une somme de 3 354 839 euros et, d’autre part, à la condamnation de la CDC à lui verser la somme de 3 354 839 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

2°) d’annuler la décision implicite susmentionnée ;

3°) de condamner la caisse des dépôts et des consignations à lui verser la somme de 3 354 839 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

4°) de mettre à la charge de la caisse des dépôts et des consignations le versement d’une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


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Vu II°, la requête, enregistrée le 20 décembre 2011 sous le n°11PA05297, présentée pour la société ES Energie Strasbourg, dont le siège est 37, rue du marais vert à Strasbourg (67953) cedex 9, représentée par son représentant légal en exercice, par Me D… ; la société ES Energie Strasbourg demande à la Cour :

1°) de procéder à la jonction de cette requête avec celle enregistrée sous le n° 10PA06030 ;

2°) d’annuler le jugement n° 1011446/7-2 en date du 30 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 2 mars 2010 en tant que le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer a omis de réintégrer, dans le montant prévisionnel des charges de service public de l’année 2010, une somme de 7 142 881 euros au titre des charges qu’elle a supportées pour les années 2005 et 2006 ;

3°) d’annuler l’arrêté 2 mars 2010 en tant qu’il n’a pas réintégré, dans le montant prévisionnel des charges de service public de l’année 2010, une somme de 7 142 881 euros au titre des charges qu’elle a supportées pour les années 2005 et 2006 ;

4°) d’enjoindre au ministre chargé de l’énergie, sous astreinte, de modifier en conséquence la régularisation des charges de service public supportées au titre des années 2005 et 2006 ;

5°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


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Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité ;

Vu la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l’électricité et au service public de l’énergie ;

Vu la loi de programme n° 2005-781 du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique ;

Vu la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie ;

Vu le décret n° 2004-90 du 28 janvier 2004 modifié relatif à la compensation des charges de service public de l’électricité ;

Vu le décret n° 2005-63 du 27 janvier 2005 relatif aux tarifs de cession de l’électricité aux distributeurs non nationalisés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 avril 2013 :

— le rapport de M. Boissy, rapporteur,

— les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

— et les observations de Me C… substituant Me D…, pour la société ES Energie Strasbourg, et celles de Me A… substituant Me B…, pour la caisse des dépôts et consignations ;

1. Considérant que les requêtes n° 10PA06030 et n° 11PA05297 ont été présentées par la même société, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que, par un courrier du 3 janvier 2007, la commission de régulation de l’énergie (CRE), après avoir évalué à 1 339 361 euros, au titre de l’année 2007, le montant prévisionnel des charges de service public supportées par la SA Electricité de Strasbourg, aux droits de laquelle vient la société ES Energie Strasbourg, et estimé que la compensation des charges de service public que cette société avait perçue pour l’année 2005 était supérieure de 3 365 661 euros au montant des charges réellement constatées au titre de cette année, lui a demandé de verser à la caisse des dépôts et consignations (CDC) la différence entre cet excédent et les charges prévisionnelles pour l’année 2007, d’un montant de 2 026 300 euros ; qu’après avoir versé à la CDC une somme totale de 6 672 598 euros, par des virements effectués les 23 avril et 23 mai 2007, la SA Electricité de Strasbourg a demandé à la CDC, le 24 août 2008, de lui restituer une somme de 3 354 839 euros ; que la CDC a implicitement rejeté cette demande ; que, par un arrêté du 2 mars 2010, le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer a fixé les montants prévisionnels des charges de service public de l’électricité pour l’année 2010 à 2 443 000 000 euros en précisant, notamment, que le montant prévisionnel des charges de service public de la société ES Energie Strasbourg pour l’année 2010 était de 22 222 546 euros ; que, par les présentes requêtes, la société ES Energie Strasbourg relève appel des jugements des 5 novembre 2010 et 30 novembre 2011 par lesquels le Tribunal administratif de Paris a respectivement rejeté ses demandes tendant, d’une part, à l’annulation de la décision implicite de rejet de la CDC et à la condamnation de celle-ci à lui verser la somme de 3 354 839 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts et, d’autre part, sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 2 mars 2010 en tant qu’il n’a pas réintégré, dans le montant prévisionnel de ses charges de service public de l’année 2010, une somme de 7 142 881 euros au titre des charges qu’elle a effectivement supportées pour les années 2005 et 2006 ;

Sur l’intervention de la CRE dans la requête n° 10PA06030 :

3. Considérant que l’arrêt à rendre sur la requête de la société ES Energie Strasbourg est susceptible de préjudicier aux droits de la CRE ; que, dès lors, l’intervention de la CRE est recevable ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation et de condamnation :

En ce qui concerne la légalité de l’arrêté du 2 mars 2010 :

4. Considérant qu’aux termes de l’article 4, alors en vigueur, de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 : " I. – Les dispositions du deuxième alinéa de l’article 1er de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence s’appliquent aux tarifs de vente de l’électricité aux clients non éligibles, aux tarifs de cession de l’électricité aux distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée et aux tarifs d’utilisation des réseaux publics de transport et de distribution. / Ces mêmes dispositions s’appliquent aux plafonds de prix qui peuvent être fixés pour la fourniture d’électricité aux clients éligibles dans les zones du territoire non interconnectées au réseau métropolitain continental. / Lorsqu’un client éligible n’exerce pas les droits accordés au III de l’article 22 de la présente loi, il conserve le contrat en vigueur à la date à laquelle il devient éligible. Sans préjudice des stipulations relatives au terme ou à la résiliation de ce contrat, ses clauses tarifaires se voient, le cas échéant, appliquer les mêmes évolutions que celles applicables aux tarifs de vente de l’électricité aux clients non éligibles (…) ; V. – Les tarifs de cession mentionnés au I se substituent, pour ce qui concerne la fourniture d’électricité, aux conditions tarifaires figurant dans les contrats en cours entre Electricité de France et les distributeurs non nationalisés qui n’ont pas exercé leur droit à l’éligibilité dans un délai de six mois à compter de la publication du décret fixant ces tarifs (…) » ; qu’aux termes de l’article 5 de cette même loi : " I. -Les charges imputables aux missions de service public assignées aux opérateurs électriques sont intégralement compensées. Elles comprennent : / a) En matière de production d’électricité : / 1° Les surcoûts qui résultent, le cas échéant, de la mise en oeuvre des dispositions des articles 8 et 10 par rapport aux coûts évités à Electricité de France ou, le cas échéant, à ceux évités aux distributeurs non nationalisés (…) qui seraient concernés. Les coûts évités sont calculés par référence aux prix de marché de l’électricité ou, pour les distributeurs non nationalisés, par référence aux tarifs de cession mentionnés à l’article 4 à proportion de la part de l’électricité acquise à ces tarifs dans leur approvisionnement total, déduction faite des quantités acquises au titre des articles 8 et 10 précités. Les mêmes valeurs de coûts évités servent de référence pour déterminer les surcoûts compensés lorsque les installations concernées sont exploitées par Electricité de France ou par un distributeur non nationalisé. Lorsque l’objet des contrats est l’achat de l’électricité produite par une installation de production implantée dans une zone non interconnectée au réseau métropolitain continental, les surcoûts sont calculés par rapport à la part relative à la production dans les tarifs réglementés de vente d’électricité ; / 2° Les surcoûts de production dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental qui, en raison des particularités du parc de production inhérentes à la nature de ces zones, ne sont pas couverts par la part relative à la production dans les tarifs réglementés de vente d’électricité ou par les éventuels plafonds de prix prévus par le I de l’article 4 de la présente loi ; / b) En matière de fourniture d’électricité (…). / Ces charges sont calculées sur la base d’une comptabilité appropriée tenue par les opérateurs qui les supportent. (…) Le ministre chargé de l’énergie arrête le montant des charges sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie effectuée annuellement. / La compensation de ces charges, au profit des opérateurs qui les supportent, est assurée par des contributions dues par les consommateurs finals d’électricité installés sur le territoire national (…) / Le montant de la contribution applicable à chaque kilowattheure est calculé de sorte que les contributions couvrent l’ensemble des charges visées aux a et b, ainsi que les frais de gestion exposés par la Caisse des dépôts et consignations, mentionnés ci-après, et le budget du médiateur national de l’énergie. Le ministre chargé de l’énergie arrête ce montant sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie, effectuée annuellement. Le montant de la contribution annuelle, fixé pour une année donnée, est applicable aux exercices suivants à défaut d’entrée en vigueur d’un nouvel arrêté pour l’année considérée. (…) La Caisse des dépôts et consignations reverse quatre fois par an aux opérateurs qui supportent les charges visées aux 1° et 2° des a et b les sommes collectées. Elle verse au médiateur national de l’énergie une somme égale au montant de son budget le 1er janvier de chaque année. / La Caisse des dépôts et consignations retrace ces différentes opérations dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés par la caisse sont arrêtés annuellement par les ministres chargés de l’économie et de l’énergie. (…) Lorsque le montant des contributions collectées ne correspond pas au montant constaté des charges de l’année, la régularisation intervient l’année suivante au titre des charges dues pour cette année. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées au cours de l’année, elles sont ajoutées au montant des charges de l’année suivante » ; qu’aux termes de l’article 22 de cette loi : « I. – Un consommateur final, autre qu’un ménage, dont la consommation annuelle d’électricité sur un site est supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d’Etat est reconnu client éligible pour ce site. (…) . / II. – Sont (…) reconnus clients éligibles (…) les distributeurs non nationalisés (…) en vue de l’approvisionnement effectif des clients éligibles et non éligibles situés dans leur zone de desserte ainsi que pour les pertes d’électricité des réseaux qu’ils exploitent. Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions dans lesquelles ces distributeurs peuvent bénéficier des tarifs de cession mentionnés à l’article 4 de la présente loi. Les distributeurs non nationalisés effectuent la déclaration prévue au IV du présent article lorsqu’ils exercent, en tout ou partie, leurs droits à l’éligibilité. L’activité d’achat pour revente du distributeur est limitée à l’approvisionnement des clients éligibles et non éligibles situés dans leurs zones de desserte (…) » ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article 4 du décret n°2004-90 du 28 janvier 2004 : " Les charges imputables aux missions de service public de l’électricité, qui donnent lieu à une compensation intégrale, sont constituées par les surcoûts de production et de fourniture déterminés dans les conditions fixées par le présent article. / I. – Les surcoûts qui peuvent résulter de contrats conclus à la suite d’un appel d’offres prévu à l’article 8 de la loi du 10 février 2000 ou en application de l’obligation d’achat prévue par l’article 10 de la même loi correspondent pour une année donnée : (…) 3° Lorsqu’ils sont supportés par un distributeur non nationalisé, à la différence entre le prix d’acquisition de l’électricité payé en exécution des contrats en cause et le coût moyen pondéré qui résulterait de l’achat de la même quantité d’électricité aux tarifs de cession et aux prix de marché, le coefficient de pondération est déterminé en fonction de la répartition, dans l’approvisionnement annuel du distributeur, des quantités de l’électricité acquises respectivement aux tarifs de cession et aux prix de marché ; il n’est pas tenu compte, dans l’approvisionnement annuel, des quantités d’électricité acquises en application des articles 8, 10 et 50 de la loi susvisée du 10 février 2000 (…) » ; qu’en vertu du I de l’article 5 du même décret, les opérateurs qui supportent des charges imputables aux missions de service public adressent à la Commission de régulation de l’énergie, avant le 31 mars de chaque année, une déclaration, établie sur la base d’une comptabilité appropriée, mentionnant notamment, par catégorie d’installations, le nombre de kilowattheures produits ou acquis au cours de l’année précédente, le prix total d’acquisition de l’électricité ; qu’aux termes de l’article 6 de ce même décret : " I. – La Commission de régulation de l’énergie évalue, chaque année, pour l’année suivante : / 1° Le montant des charges imputables aux missions de service public incombant aux opérateurs, à partir des informations fournies par les déclarations prévues au I de l’article 5. / Ce montant est : /a) Augmenté ou diminué de la différence entre le montant des charges effectivement constatées au titre des années antérieures et le montant des contributions recouvrées au titre des mêmes années ; / b) Augmenté du montant prévisionnel des frais de gestion de la Caisse des dépôts et consignations, au vu de la déclaration prévue au II de l’article 5, ce montant comprenant l’écart constaté entre les frais prévisionnels et les frais effectivement exposés au titre de l’année précédente ; / c) Réduit du montant des produits financiers réalisés dans la gestion des fonds perçus par la Caisse des dépôts et consignations (…) / 2° Le nombre de kilowattheures soumis à contribution, au vu notamment des états récapitulatifs et des déclarations prévus aux articles 10 et 11, en tenant compte du seuil d’exonération de 240 millions de kilowattheures par site de production et du plafond de 500000 euros prévu au onzième alinéa du I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 susvisée, ainsi que de l’application des articles 12 bis et 14 bis du présent décret / II. – La Commission de régulation de l’énergie détermine chaque année pour l’année suivante le montant de la contribution unitaire, défini comme le quotient du montant total des charges résultant des opérations définies au 1° du I par le nombre de kilowattheures mentionné au 2° du même I. / Elle précise la part que représentent, dans la contribution unitaire, les charges liées au soutien, d’une part, des énergies renouvelables et, d’autre part, de la cogénération dans les contrats d’achats conclus en application des articles 8 et 10 de la loi du 10 février 2000 susvisée. / III. – Avant le 15 octobre de chaque année, la Commission de régulation de l’énergie adresse au ministre chargé de l’énergie ses propositions établies dans les conditions prévues aux I et II, avec l’indication des règles employées et toutes les informations nécessaires notamment à l’évaluation du montant des charges et des frais de gestion. / IV. – Le ministre chargé de l’énergie arrête chaque année pour l’année suivante le montant prévisionnel des charges imputables aux missions de service public, le montant prévisionnel des frais de gestion de la Caisse des dépôts et consignations et (…) le montant de la contribution unitaire mentionnée au II ci-dessus. / L’arrêté du ministre chargé de l’énergie et les propositions de la Commission de régulation de l’énergie sont publiés au Journal officiel de la République française » ; qu’aux termes de l’article 7 de ce décret : « La Commission de régulation de l’énergie notifie à chaque opérateur ayant fait une déclaration au titre de l’article 5 le montant prévisionnel des charges imputables aux missions de service public retenu en ce qui le concerne pour l’année suivante » ;

6. Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret n° 2005-63 du 27 janvier 2005 : « I. – Un distributeur non nationalisé mentionné à l’article 23 de la loi du 8 avril 1946 susvisée peut exercer les droits à l’éligibilité qu’il tient du II de l’article 22 de la loi du 10 février 2000 susvisée pour tout ou partie de son approvisionnement en électricité. / II. – Les tarifs de cession hors taxes faisant l’objet du présent décret s’appliquent à la fourniture de l’électricité pour laquelle un distributeur non nationalisé n’a pas exercé ses droits à l’éligibilité, sous réserve qu’il justifie des quantités correspondantes. / Toutefois, jusqu’au 1er juillet 2007 au plus tard, un distributeur non nationalisé qui a exercé ses droits à l’éligibilité peut, pour la seule électricité destinée à l’alimentation de ses clients non éligibles et de ses clients éligibles n’ayant pas exercé leur éligibilité, prétendre bénéficier à nouveau des tarifs de cession mentionnés au présent II. Cette possibilité n’est offerte qu’à l’expiration d’un délai d’un an minimum à compter de l’exercice de l’éligibilité et sous réserve de justifier des consommations correspondantes » ;

7. Considérant qu’il résulte des dispositions précitées, et en particulier du 1° du a) du I de l’article 5 de la loi du n°2000-108 du 10 février 2000 et du 3° du I de l’article 4 du décret n°2004-90 du 28 janvier 2004 que, pour procéder à la détermination des charges de service public d’électricité, les coûts évités sont notamment calculés en fonction de la répartition, dans l’approvisionnement annuel du distributeur d’électricité, des quantités respectivement acquises aux tarifs de cession et aux prix du marché ;

8. Considérant que, le 15 mars 2005, la SA Electricité de Strasbourg, distributeur non nationalisé ayant exercé totalement ses droits à l’éligibilité en février 2003, a conclu avec Electricité de France (EDF), pour un prix de 100 000 euros, un « contrat pour différence dans le cadre des tarifs de cession », pour la période allant du 1er mars au 31 décembre 2005, qui a été renouvelé jusqu’au 31 décembre 2006 ; qu’en vertu de ce contrat, « EDF garantit financièrement le paiement à la SA Electricité de Strasbourg, si son montant est positif, ou par la SA Electricité de Strasbourg à EDF, si son montant est négatif, un montant égal à la différence entre la valeur sur le marché de gros et le prix au tarif de cession de l’énergie électrique active nécessaire », premièrement, « à l’approvisionnement des clients régulés situés sur la zone de desserte de la SA Electricité de Strasbourg minoré de l’énergie électrique active réservée dont sont bénéficiaires les clients régulés de la SA Electricité de Strasbourg », deuxièmement, « à l’approvisionnement des usines municipales d’Erstein et de la régie intercommunale de Niedderbronn-Reichshoffen minoré de l’énergie électrique active réservée dont sont bénéficiaires des usines municipales d’Erstein et de la régie intercommunale de Niedderbronn-Reichshoffen et de leurs clients régulés » et, troisièmement, aux « consommations destinées aux locaux et ouvrages d’exploitation la SA Electricité de Strasbourg » ;

9. Considérant, il est vrai, que compte tenu du montant de la prime et du mécanisme de compensation contractuellement retenu, ce « contrat pour différence » a pour objet et a eu pour effet de limiter le coût des achats d’électricité effectués par la SA Electricité de Strasbourg sur le marché de gros à un coût proche de celui qui serait résulté de l’application des tarifs de cession ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des écritures des parties ainsi que des termes du préambule et des clauses de ce « contrat pour différence », et n’est d’ailleurs pas contesté, que les quantités d’électricité acquises par la SA Electricité de Strasbourg, au titre des années 2005 et 2006, ont été intégralement achetées au prix du marché ; que, pour les années en litige, cette société n’a pas non plus demandé, sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa du II de l’article 1er du décret n° 2005-63 du 27 janvier 2005, à bénéficier des tarifs de cession pour l’électricité destinée à l’alimentation de ses clients non éligibles et de ses clients éligibles n’ayant pas exercé leur éligibilité ;

10. Considérant, dès lors, qu’en l’absence de toute disposition législative ou réglementaire le prévoyant, le « contrat pour différence » souscrit par la SA Electricité de Strasbourg n’a pu légalement avoir pour effet de lui permettre de bénéficier, pour la détermination des charges de service public d’électricité, de la méthodologie applicable aux opérateurs ayant acquis, en tout ou partie, leur électricité aux tarifs de cession ; que, par suite, la société ES Energie Strasbourg n’est pas fondée à soutenir que l’arrêté du 2 mars 2010 a été pris en méconnaissance des dispositions législatives et réglementaires précitées ; que c’est dès lors à bon droit que le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer n’a pas intégré, dans cet arrêté, une somme de 7 142 881 euros dans les charges que la société ES Energie Strasbourg a effectivement supportées pour les années 2005 et 2006 ;

En ce qui concerne la légalité de la décision implicite de rejet de la CDC :

11. Considérant que le montant prévisionnel des charges imputables aux missions de service public qui est arrêté par le ministre chargé de l’énergie en application de l’article 5 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 et du IV de l’article 6 du décret n°2004-90 du 28 janvier 2004 est obtenu en agrégeant, d’une part, le montant des charges imputables aux missions de service public incombant à l’ensemble des opérateurs calculé à partir des informations fournies par les déclarations prévues au I de l’article 5 et, d’autre part, les montants résultant des points a), b), c) et d) du 1° du I de l’article 6 ; que la CRE, en application de l’article 7 du même décret, notifie ensuite à chaque opérateur concerné le montant individualisé prévisionnel des charges imputables aux missions de service public ainsi arrêté ;

12. Considérant, dès lors, que le courrier du 3 janvier 2007 présenté au point 1. doit être analysé comme la décision par laquelle la CRE a notifié à la SA Electricité de Strasbourg, au titre de l’année 2007, des charges imputables aux missions de service public de cet opérateur pour un montant négatif de 2 026 300 euros ;

13. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et en particulier des écritures de la CDC, que celle-ci a implicitement refusé de procéder au remboursement de la somme de 3 354 839 euros au motif que la compensation des charges de service public que la SA Electricité de Strasbourg avait perçue pour l’année 2005 était supérieure de 3 365 661 euros au montant des charges réellement constatées au titre de cette année ;

14. Considérant que la détermination du montant de 3 365 661 euros ne constituait pas une décision distincte mais seulement l’un des éléments de calcul concourant à la détermination finale des charges imputables aux missions de service public de la SA Electricité de Strasbourg pour l’année 2007 fixée par la décision du 3 janvier 2007 analysée au point 12. ; que la CDC a ainsi nécessairement fondé son refus sur la décision de la CRE du 3 janvier 2007 ;

15. Considérant, toutefois, que, par une décision du 31 juillet 2009, le Conseil d’Etat a annulé cette décision du 3 janvier 2007 ; que, dès lors, la société ES Energie Strasbourg est fondée à soutenir qu’en se fondant sur cette décision, la CDC a entaché la décision implicite contestée d’un défaut de base légale ;

En ce qui concerne la demande indemnitaire :

16. Considérant que si la CDC a commis une faute en rejetant implicitement, le 26 octobre 2007, la demande de remboursement de la somme de 3 354 839 euros dès lors qu’aucun arrêté ministériel fixant les charges de service public pour l’année 2007 n’était encore intervenu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4. à 10. que c’est à bon droit que le ministre chargé de l’énergie, en adoptant l’arrêté du 2 mars 2010, n’a pas réintégré cette somme dans les charges de service public de la SA Electricité de Strasbourg ; que, dès lors, la somme de 3 354 839 euros était bien exigible le 17 avril 2010, date à laquelle l’arrêté du 2 mars 2010 est entré en vigueur à la suite de sa publication au journal officiel de la République française ; qu’il en résulte que la société ES Energie Strasbourg n’est pas fondée à demander au juge du plein contentieux indemnitaire la condamnation de la CDC à lui verser cette somme de 3 354 839 euros ; qu’elle n’établit pas davantage avoir subi un préjudice spécifique résultant du versement anticipé de cette somme ;

17. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la société ES Energie Strasbourg est seulement fondée à soutenir que c’est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision implicite contestée et à demander, dans cette mesure, l’annulation du jugement n° 0913976 et de cette décision implicite ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

18. Considérant que, compte tenu de ses motifs, le présent arrêt, n’appelle, par lui-même, aucune mesure d’exécution ; que les conclusions aux fins d’injonction présentées par la société requérante doivent par suite être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société ES Energie Strasbourg ou à la charge de la CDC les sommes demandées au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


D E C I D E :

Article 1er : L’intervention de la commission de régulation de l’énergie est admise.

Article 2 : Le jugement n° 0913976/7-2 en date du 5 novembre 2010 du Tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu’il a rejeté la demande de la société ES Energie Strasbourg tendant à l’annulation de la décision par laquelle la caisse des dépôts et consignations a implicitement refusé de lui rembourser la somme de 3 354 839 euros.

Article 3 : La décision par laquelle la caisse des dépôts et consignations a implicitement refusé de rembourser à la société ES Energie Strasbourg la somme de 3 354 839 euros est annulée.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.

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N°s 10PA06030, 11PA05297

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Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 21 mai 2013, 10PA06030, 11PA05297, Inédit au recueil Lebon