CAA de PARIS, 6ème chambre, 30 décembre 2016, 15PA04475, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 6e ch., 30 déc. 2016, n° 15PA04475
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 15PA04475
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 12 octobre 2015, N° 1412019/2-1
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033858688

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… A… a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris à lui verser la somme de 76 500,40 euros en réparation du préjudice que lui a causé la décision de non-renouvellement de son contrat de prolongation d’activité en qualité de praticien attaché consultant.

Par un jugement n° 1412019/2-1 du 13 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a condamné l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) à verser à M. A… la somme de 2 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2014.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2015 et un mémoire enregistré le 29 juin 2016, M. A…, représenté par Me D…, demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du 13 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris en tant qu’il n’a pas entièrement fait droit à sa demande ;

2°) de condamner l’AP-HP à lui verser la somme de 76 500,40 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2014, eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— il produit, afin que son contrat puisse être renouvelé, un certificat médical d’aptitude établi le 3 mai 2013 ;

 – il a été contraint de cesser concrètement son activité dès le 21 juin 2013 alors que son contrat n’expirait que le 25 juin 2013 ;

 – le non-respect du délai de prévenance a eu pour conséquence le renouvellement tacite du contrat ;

 – l’AP-HP n’établit pas qu’il aurait été informé oralement, le 17 mai 2013, par le chef du service de neurologie, que sa prolongation d’activité ne serait pas renouvelée ;

 – aucun motif tiré de l’intérêt du service ne permet de justifier la décision en litige ;

 – l’administration ne justifie pas avoir saisi pour avis la commission médicale d’établissement ;

 – la décision en litige correspond à une sanction déguisée ;

 – elle présente un caractère brutal et vexatoire ;

 – il ne lui a pas été possible de solder ses congés au titre de la période comprise entre le 1er janvier et le 25 juin 2013 ; une indemnité de 1 050,40 euros lui est due à ce titre, ainsi qu’une indemnité de 840,68 euros au titre du congé correspondant à la réduction du temps de travail ;

 – il a été privé d’une année de rémunération, soit un préjudice de 20 922 euros ;

 – une indemnité de 3 922,71 euros lui est due au titre des congés de la période comprise entre le 26 juin 2013 et le 25 juin 2014 ;

 – il a été privé de la possibilité de faire valoir ses droits à la retraite dans le délai requis ; l’AP-HP ne lui a, en outre, délivré une attestation conforme qu’avec 7 mois de retard ; il a subi un préjudice de 18 463,17 euros, ou à tout le moins de 11 749,29 euros ;

 – la décision contestée devant s’analyser comme un licenciement, il a droit en outre à l’indemnité de licenciement prévue à l’article R. 6152-257 du code de la santé publique, pour un montant de 10 460,76 euros ;

 – son préjudice moral s’élève à 20 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2016, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), représentée par Me C…, conclut au rejet de la requête, à ce que, par la voie de l’appel incident, le jugement soit annulé en tant qu’il l’a condamnée à verser à M. A… la somme de 2 000 euros, enfin à ce que la somme de 1 440 euros soit mise à la charge de M. A… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— M. A…, après avoir été interrogé par l’administration sur ses intentions en matière de renouvellement de son contrat, n’a pas transmis le certificat médical d’aptitude exigé par l’article 4 du décret n° 2005-207 du 1er mars 2005 ; il doit dès lors être regardé comme ayant lui-même renoncé à ce renouvellement ; le contrat de prolongation arrivait ainsi à son terme le 25 juin 2013 et l’AP-HP n’avait pas à respecter un délai de prévenance ; dans l’hypothèse où le certificat aurait été produit, cette communication aurait été faite moins de deux mois avant l’échéance du contrat ;

 – les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 26 mai 2016, la clôture de l’instruction a été fixée au 30 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la sécurité sociale ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

 – la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

 –  la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 ;

 – le décret n° 2005-207 du 1er mars 2005 relatif à la prolongation d’activité des personnels médicaux hospitaliers pris en application de l’article 135 de la loi du 9 août 2004 ;

 – le décret n° 2010-1141 du 29 septembre 2010 relatif aux personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques hospitaliers ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Petit,

 – les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

 – les observations de Me D… pour M. A…

1. Considérant M. A…, praticien attaché, a été autorisé par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, (AP-HP) en application de l’article 135 de la loi du 9 août 2004 susvisée, à prolonger son activité au-delà de la limite d’âge, à compter du 26 juin 2012, pour une durée d’un an, à raison de quatre demi-journées par semaine ; qu’un avenant à son contrat de praticien attaché a été signé en ce sens ; que cette prolongation d’activité était, conformément au décret du 1er mars 2005 susvisé, renouvelable par tacite reconduction pour une durée ne pouvant excéder trente-six mois au total ; qu’invité, le 12 avril 2013, à faire savoir s’il souhaitait rester en activité au-delà du 25 juin 2013 et à produire, dans ce cas, un certificat médical d’aptitude, M. A… a répondu, le 3 mai 2013, qu’il souhaitait poursuivre son activité et a joint à sa demande un certificat médical d’aptitude ; que l’AP-HP l’a informé, le 13 juin 2013, que la période de prolongation d’activité ne serait pas renouvelée ; que M. A… a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l’AP-HP à lui verser la somme de 76 500 euros en réparation des préjudices qu’il estime avoir subis du fait de cette décision de non-renouvellement de sa période de prolongation d’activité ; que par un jugement du 13 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a seulement condamné l’AP-HP à lui verser la somme de 2 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2014, au titre du préjudice moral, en estimant que l’administration avait méconnu les dispositions de l’article 5 du décret du 1er mars 2005 susvisé ; que M. A… fait appel de ce jugement en tant qu’il ne lui a pas donné entière satisfaction ; que l’AP-HP présente des conclusions d’appel incident tendant à l’annulation du jugement en tant qu’il l’a condamnée à verser à M. A… la somme de

2 000 euros ;

Sur les préjudices qui résulteraient de l’illégalité de la décision de

non-renouvellement de la prolongation d’activité et de la méconnaissance du délai prévu à l’article 5 du décret du 1er mars 2005 :

2. Considérant qu’en vertu de l’article 135 de la loi du 9 août 2004, les praticiens hospitaliers visés à l’article L. 6152-1 du code de la santé publique, parmi lesquels les praticiens attachés, peuvent être autorisés à prolonger leur activité dans un établissement de santé après la limite d’âge qui leur est applicable, dans la limite de trente-six mois au total, sous réserve d’aptitude médicale ; qu’aux termes de l’article 4 du décret du 1er mars 2005 susvisé: « La prolongation d’activité est renouvelée par tacite reconduction pour la même durée, sous réserve de la production par l’intéressé d’un certificat médical d’aptitude physique et mentale adressé à l’autorité investie du pouvoir de nomination ainsi que, pour les praticiens hospitaliers et les praticiens des hôpitaux à temps partiel, concomitamment au directeur de l’établissement d’affectation, au moins deux mois avant l’échéance de la période en cours » ; que selon l’article 5 du même décret : « En cas de non-renouvellement, l’autorité investie du pouvoir de nomination notifie sa décision au praticien par lettre recommandée avec avis de réception deux mois au moins avant l’échéance de la période en cours. La décision est prise après avis motivé du chef de pôle ou, à défaut, du responsable de la structure interne d’affectation du praticien et du président de la commission médicale d’établissement. Pour les praticiens hospitaliers et praticiens des hôpitaux à temps partiel, le directeur de l’établissement transmet ces avis à l’autorité investie du pouvoir de nomination, ainsi que son avis motivé, trois mois au moins avant l’échéance de la période en cours » ;

3. Considérant, en premier lieu, que l’AP-HP a notifié son intention de ne pas renouveler le contrat le 13 juin 2013, alors que le contrat de M. A… expirait le 25 juin 2013 ; que si l’APHP a méconnu le délai de prévenance institué par les dispositions de l’article 5 du décret du 1er mars 2005 susvisé, cette circonstance n’a pas pour effet de renouveler tacitement le contrat dont il bénéficiait  ; que, par suite, la décision en litige ne peut être regardée comme un licenciement ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que M. A… ne détenait aucun droit au renouvellement de sa prolongation d’activité ; que l’AP-HP soutient que le développement de l’activité d’imagerie en ORL impliquait le recrutement de personnels spécialisés dans ce domaine et qu’il était dès lors nécessaire de pouvoir disposer des demi-journées attribuées jusqu’alors au requérant ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que tel n’était pas objectif réellement recherché par l’établissement ; qu’il ne résulte pas davantage de l’instruction que l’AP-HP aurait entendu sanctionner M. A… en raison d’informations transmises par celui-ci au conseil de l’ordre des médecins, à propos des pratiques médicales d’un confrère ; que, dans ces conditions, la décision de non-renouvellement de la prolongation d’activité ne peut être regardée comme ayant été prise pour des motifs étrangers à l’intérêt du service ;

5. Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutient M. A…, il résulte de l’instruction que la commission médicale d’établissement a débattu, lors de sa séance du 6 juin 2013, du renouvellement de la prolongation d’activité d’un praticien attaché ; qu’aucun élément du dossier ne conduit à identifier dans ce praticien une personne autre que M. A… ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu’il résulte des dispositions précitées que si le renouvellement tacite de la prolongation d’activité est subordonné à la production, par le praticien, d’un certificat médical d’aptitude deux mois au moins avant l’expiration du terme de cette prolongation, l’autorité de nomination est tenue, même lorsque le praticien ne lui a pas adressé ce certificat, de notifier sa décision de ne pas renouveler la prolongation d’activité avant l’expiration de ce même délai ; qu’il résulte de l’instruction que l’administration n’a notifié son intention de ne pas renouveler cette prolongation d’activité que le 13 juin 2013, soit après l’expiration de ce délai ; qu’ainsi, comme l’a estimé à bon droit le tribunal administratif,

l’AP-HP a méconnu les dispositions précitées de l’article 5 du décret du 1er mars 2005, quand bien même une information aurait été donnée oralement par le chef de service le 17 mai 2013 ; que si cette méconnaissance n’entache pas d’illégalité la décision de non-renouvellement, elle est susceptible d’engager la responsabilité de l’administration dès lors qu’elle a causé à l’agent un préjudice certain et direct ; que compte tenu du caractère tardif du non renouvellement de son contrat, et alors même que le chef de service l’aurait informé de manière informelle dès le 13 mai 2013, M. A… justifie avoir subi un préjudice moral ; que les premiers juges ont fait une exacte appréciation de ce préjudice en l’évaluant à la somme de 2 000 euros ;

Sur les droits à congés payés au titre de l’année 2013 :

7. Considérant qu’aux termes de l’article R. 6152-613 du code de la santé publique : " Les praticiens attachés ont droit : / 1° A un congé annuel dont la durée est définie, sur la base de vingt-cinq jours ouvrés, au prorata des obligations de service hebdomadaires ; (…) » ; que ces dispositions ne reconnaissent pas aux praticiens attachés un droit à une indemnité compensatrice de congés annuels, dans les cas où ils cessent leur service avant d’avoir pu bénéficier de ces congés ; que, par ailleurs, la méconnaissance, par l’AP-HP, des dispositions de l’article 5 du décret du 1er mars 2005 ne peut être regardée, dans les circonstances de l’espèce, compte tenu de la date à laquelle M. A… a été informé que sa période de prolongation ne serait pas renouvelée, comme l’ayant privé d’une chance de pouvoir solder ses jours de congé annuel auxquels il avait droit au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2013 et le 25 juin 2013 ;

Sur la perte de rémunérations et de droits à congé pour la période postérieure au 25 juin 2013 :

8. Considérant que la faute commise par l’AP-HP en informant tardivement M. A… du non-renouvellement du contrat ne peut être regardée comme ayant privé le requérant de droits à rémunération pour la période postérieure au 25 juin 2013, ni de droits à congés payés, dès lors que, comme il a été dit au point 6 ci-dessus, cette faute est sans incidence sur la légalité de la décision de non-renouvellement de contrat ;

Sur la perte de droits à la retraite :

9. Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article R. 351-37 du code de la sécurité sociale ainsi que du courrier de la Caisse nationale d’assurance vieillesse du 18 juillet 2014, confirmé par décision de la commission de recours amiable du 8 octobre suivant que M. A… ayant déposé sa demande de liquidation de ses droits au régime général de retraite le 13 mai 2014, le 1er juin de la même année a été retenu comme date d’effet de ses droits à pension ; que si l’AP-HP ne conteste pas sérieusement n’avoir délivré à M. A… une attestation exacte relative à la durée totale de ses périodes de travail qu’en janvier 2014, ce retard ne peut expliquer à lui seul la date à laquelle le requérant a déposé sa demande de liquidation de ses droits à la retraite ; que, par suite, le préjudice de retraite invoqué ne peut être regardé comme résultant d’une faute commise par l’administration ;

10. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que ni M. A… ni l’AP-HP ne sont fondés à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif a fixé à la somme de 2 000 euros le montant du préjudice ; que c’est à bon droit que les premiers juges ont majoré cette somme des intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2014, date de réception par le directeur général de l’AP-HP de la demande indemnitaire préalable ; que la capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois, en appel, le 11 décembre 2015 ; qu’à cette date, il était dû au moins une année d’intérêts ; que, par suite, il y a lieu de faire droit à cette demande ; que les intérêts échus le 11 décembre 2015 puis à chaque échéance annuelle suivante seront ainsi capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts; qu’enfin, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


DÉCIDE :

Article 1er : Les intérêts échus à la date du 11 décembre 2015 sur la somme de 2 000 euros que l’APHP a été condamnée à verser à M. A… par le jugement du Tribunal administratif de Paris du 13 octobre 2015, seront capitalisés à cette date, puis à chaque échéance annuelle suivante pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2: Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le jugement n° 1412019/2-1 du Tribunal administratif de Paris du 13 octobre 2015 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B… A… et à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l’audience du 13 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs-Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.


Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLOLa République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 15PA04475

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