CAA de PARIS, 10ème chambre, 24 janvier 2017, 16PA01605, Inédit au recueil Lebon

  • Fonctionnaires et agents publics·
  • Détachement et mise hors cadre·
  • Détachement·
  • Positions·
  • Commission·
  • Renouvellement·
  • Fonctionnaire·
  • Refus·
  • Administration·
  • Fonction publique hospitalière

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 10e ch., 24 janv. 2017, n° 16PA01605
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 16PA01605
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 14 avril 2016, N° 1516169/2-3
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033936151

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A… B… a demandé au Tribunal administratif de Paris d’annuler l’arrêté du 4 septembre 2015 par lequel la présidente du conseil départemental de Paris a prononcé sa réintégration dans les cadres du personnel de son administration d’origine à compter du 15 octobre 2015, ensemble la décision du 31 juillet 2015 par laquelle le directeur de l’Etablissement départemental de l’aide sociale à l’enfance de l’ouest parisien a refusé son intégration dans le corps des éducateurs de jeunes enfants de la fonction publique hospitalière et l’a informée que son détachement arrivant à son terme le 15 octobre 2015 ne serait pas renouvelé, d’enjoindre au département de Paris de procéder au réexamen de sa demande, et de mettre à la charge du département de Paris une somme de 2 000 euros au titre de l’article

L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1516169/2-3 du 15 avril 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 mai 2016, Mme B…, représentée par Me Fages, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1516169/2-3 du 15 avril 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d’annuler l’arrêté du 4 septembre 2015 par lequel l’administration a refusé de renouveler son détachement et a prononcé sa réintégration dans son administration d’origine à compter du 15 octobre 2015, et la décision du 31 juillet 2015 par laquelle le directeur de l’Etablissement départemental de l’aide sociale à l’enfance de l’ouest parisien (EDASEOP) a refusé de l’intégrer et refusé de renouveler son détachement ;

3°) d’enjoindre à l’administration de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du département de Paris la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – les premiers juges ont insuffisamment motivé leur décision en méconnaissance des dispositions de l’article L. 9 du code de justice administrative ; ils n’ont manifestement pas répondu au moyen tiré de ce que l’éviction de la requérante était entachée de discrimination syndicale et se sont abstenus de prendre en considération l’argumentation circonstanciée développée par l’exposante, ainsi au demeurant que les nombreuses attestations versées au dossier qui démontrent la discrimination syndicale ;

 – les premiers juges ont entaché leur décision d’erreur de droit et d’erreur d’appréciation :

S’agissant de la légalité externe des décisions :

 – en vertu de l’article 3 de la loi du 11 juillet 1979, doivent être motivées les décisions qui restreignent l’exercice des libertés publiques ; il résulte notamment du sixième alinéa du préambule de la constitution de 1946 que la liberté syndicale constitue une liberté fondamentale à valeur constitutionnelle ; les décisions en litige porte atteinte au libre exercice du droit syndical de la requérante dès lors qu’elles rendent impossible l’exercice de ses mandats de représentante syndicale ; Mme B… a été élue au CTE par les travailleurs de la DASES ; les décisions en litige portent atteinte aux résultats des élections en privant les agents du droit d’être représentés par un représentant de leur choix ; que, par suite, ni l’arrêté du 4 septembre 2015, ni la décision du 31 juillet 2015 du directeur n’est motivé et la décision de refus d’intégration et de non renouvellement du détachement de la requérante encourent la censure pour défaut de motivation ; c’est donc à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ce moyen au motif impropre que selon la loi du 11 juillet 1979 doivent être motivées les décisions qui refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit ;

 – le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que la procédure n’était pas irrégulière alors que la requérante n’a pas été préalablement mise en demeure de demander communication de son dossier, et a contrevenu au principe général du droit de la défense qui ne saurait être écarté au motif que la mesure concerne un fonctionnaire ; que selon l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration les décisions individuelles qui sont prises en considération de la personne sont soumises au respect d’une procédure contradictoire préalable ; en l’espèce, le refus de renouvellement du détachement de la requérante a été pris en considération de ses mandats syndicaux ce qui devait conduire l’administration au respect de l’article 65 de la loi du 22 avril 1905, l’intéressé devant avoir préalablement été à même de prendre connaissance de son dossier ; qu’au surplus ce jugement contrevient à la protection dont doivent bénéficier les représentants des travailleurs contre toute mesure pouvant leur porter préjudice, conformément à l’article 1er de la convention OIT n° 135 du 23 juin 1971 ;

 – en vertu de l’article 14 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 la mobilité des fonctionnaires constitue une garantie fondamentale de leur carrière ; selon l’article 66 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 les fonctionnaires territoriaux détachés peuvent être intégrés dans le corps de détachement sur leur demande ; il résulte de l’article 38 du décret n° 89-229 du 17 avril 1989 que « les demandes de détachement auprès d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public territorial de fonctionnaires territoriaux, hospitaliers ou de l’Etat ainsi que les intégrations dans un cadre d’emplois à la suite d’un détachement sont soumises à l’avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d’emplois ou l’emploi d’accueil. Les détachements de plein droit ne donnent pas lieu à consultation de la commission. » ; en l’espèce, ni la demande de détachement, ni la demande d’intégration n’ont été soumises à l’avis de la commission administrative paritaire (CAP) et, dès lors, la procédure est irrégulière ;

 – le Tribunal n’a pas répondu aux moyens selon lesquels elle a elle-même demandé la saisine de la CAP et selon lequel les membres de la CAP ont sollicité la saisine de droit de la CAP pour étudier sa situation en application des articles 50 et 51 du décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003, alors que la requérante a été ainsi privée d’une garantie procédurale.

S’agissant de la légalité interne des décisions :

 – l’administration a méconnu les dispositions de l’article 14 bis de loi n° 83-634 ; il appartient à l’administration de tenir compte, lorsqu’elle met fin au détachement d’un fonctionnaire, de l’intérêt du service et de la situation particulière de l’intéressé ; le juge administratif annule le refus de renouvellement de l’agent pour erreur manifeste d’appréciation dès lors que n’était pas démontré l’intérêt du service ; le juge administratif s’attache à vérifier si la décision de non renouvellement d’un détachement, et le refus d’intégration constitue un détournement de pouvoir et si elle a été prise dans l’intérêt du service ;

 – sur l’existence de postes vacants : le Tribunal a estimé à tort qu’un poste occupé par un agent contractuel ne serait pas un poste vacant ; dès lors qu’un emploi n’est pas occupé par un agent titulaire, cet emploi, quand bien même il serait occupé par un agent bénéficiant d’un CDI, doit être regardé comme vacant et l’agent doit libérer la place pour permettre la réintégration du fonctionnaire mis en disponibilité ; les emplois vacants sont en effet destinés à être pourvus par des agents fonctionnaires et non pas des agents contractuels, lesquels ne peuvent être recrutés que dans les conditions prévues aux articles 9 et 9 bis de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, et ainsi que confirmé par l’article 3 de la loi du 13 juillet 1983 et de l’article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ;

 – le Tribunal a donc dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur d’appréciation ; le tableau des effectifs soumis au CHSCT du 9 juin 2015 faisait ressortir que 28 postes étaient vacants, dont plusieurs sont relatifs à l’emploi d’éducateur qu’occupe la requérante, 26 de ces emplois étant occupés par des agents contractuels ; sur les 21 éducateurs du foyer Rosan, 25 % des emplois d’éducateurs sont des emplois contractuels recrutés en CDD, la situation étant identique dans l’autre foyer qui compose l’EDASEOP ; par suite l’administration ne saurait prétendre qu’il n’existe aucun poste vacant pouvant être confié à la requérante ; que la requérante a produit une offre d’emploi de deux postes d’éducateurs d’internat publiée par le directeur de l’EDASEOP postérieurement à son départ et devant occuper les mêmes fonctions que celles qu’elle exerçait ; ainsi l’administration préfère recruter des agents contractuels plutôt que de pérenniser l’emploi d’un fonctionnaire ; dés lors le tribunal a commis une erreur d’appréciation en retenant l’argument du département consistant à dire que le refus de renouvellement du détachement demandé par Mme B… serait fondé sur la situation des effectifs ;


- c’est à tort que le tribunal a jugé que la requérante n’établissait pas que les agents non titulaires avaient bénéficié du renouvellement de leur contrat postérieurement à la fin de son détachement alors même que l’argument n’était pas contredit en défense ; il appartenait au contraire à l’administration d’apporter la preuve inverse ;

 – la requérante a subi une discrimination syndicale : les mesures litigieuses anéantissent le mandat électif de la requérante ce qui contrevient au droit des salariés de pouvoir librement élire leurs représentants de leurs choix mais aussi au droit de l’intéressée de pouvoir librement exercer son mandant en méconnaissance des dispositions des articles 8 et 9 de la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 et de l’article 8 du préambule de la constitution de 1946 ; dés lors que les décisions litigieuses reviennent à annuler le résultat des élections l’administration méconnaît l’article 1er de la convention OIT n° 135 du 23 juin 1971 et de la convention n° 15 du 27 juin 1978 sur les relations de travail dans la fonction publique ; force est de constater que le tribunal n’a pas répondu au moyen tiré de la discrimination syndicale et que pour ce seul motif le jugement attaqué encourt l’annulation ; la discrimination syndicale ressort également du contexte tendu au sein de l’EDASEOP et de la réalité de l’action syndicale menée par la requérante, deux grèves ayant ainsi été conduites en 2015, seule représentante syndicale sur site, elle a alerté contre la douleur au travail, d’ailleurs non remplacée, son action étant regrettée par ses collègues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2016, le département de Paris, représenté par la SCP Hélène Didier et François Pinet, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation, conclut au rejet de la requête et demande à ce qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme B… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B… ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 décembre 2016, la clôture de l’instruction a été fixée au 28 décembre 2016 à 12 heures.

Un mémoire, présenté pour Mme B… par Me Fages, a été enregistré le 27 décembre 2016.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

— la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

 – la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

 – le décret n° 89-229 du 17 avril 1989 ;

 – le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;

 – le décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Legeai,

 – les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

 – et les observations de Me Fages, avocat de Mme B….

1. Considérant que Mme B…, éducateur de jeunes enfants titulaire de la ville de Paris, a sollicité le 18 septembre 2012 son détachement auprès de la direction de l’action sociale de l’enfance et de la santé du département de Paris (DASES) ; qu’elle a été placée en position de détachement auprès du département de Paris, du 15 octobre 2012 au 14 octobre 2013, au sein de l’Etablissement départemental de l’aide sociale à l’enfance de l’ouest parisien (EDASEOP) pour y exercer ses fonctions au sein du foyer Parent de Rosan ; que le détachement de Mme B… a été renouvelé du 15 octobre 2013 au 14 octobre 2014, et du 15 octobre 2014 au 15 octobre 2015 ; que, par un courrier en date du 15 juillet 2015, l’intéressée a demandé son intégration dans le corps des éducateurs de jeunes enfants de la fonction publique hospitalière ; que par un courrier daté du 31 juillet 2015, le directeur de l’établissement a informé Mme B… du rejet de sa demande d’intégration et du non-renouvellement de son détachement ; que, par un arrêté en date du 4 septembre 2015, le département de Paris a prononcé la réintégration de Mme B… dans son administration d’origine, mettant fin à son détachement à compter du 15 octobre 2015 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que Mme B… soutient que les premiers juges ont insuffisamment motivé en droit et en fait leur décision en méconnaissance des dispositions de l’article L. 9 du code de justice administrative, dés lors qu’ils n’ont pas répondu au moyen tiré de ce que son éviction restreindrait l’exercice des libertés publiques et, par ailleurs, était entachée de discrimination syndicale, malgré son argumentation circonstanciée, étayée par de nombreuses attestations de collègues ; que le premier moyen doit être regardé comme manquant en fait, le tribunal ayant répondu sur le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée ; que, l’autre moyen de Mme B…, portant sur la régularité du jugement, reprochant aux premiers juges de n’avoir pas exposé les raisons pour lesquelles le non-renouvellement d’un détachement ne peut qu’être écarté, ce moyen relevant du bien-fondé du jugement ; que le Tribunal a, par ailleurs, également suffisamment motivé en fait sa décision sur la discrimination syndicale, dont l’examen relevant également du bien fondé du jugement ; que, par suite, le jugement étant suffisamment motivé, le moyen de Mme B… tiré de son irrégularité du fait d’un défaut de motivation doit être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe des décisions :

3. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public : " (…) Doivent être motivées les décisions qui : – restreignent l’exercice des libertés publiques (…) ; – refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir (…) » ; qu’en l’absence de texte contraire, un agent dont le détachement arrive à échéance n’a droit ni au renouvellement de celui-ci, ni à réintégration dans le corps d’accueil, de telles sorte que " le non-renouvellement d’un détachement à son expiration ne refuse pas un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions pour l’obtenir, et ne restreint pas l’exercice de libertés publiques, alors même que l’agent exerce au cours de son détachement un mandat syndical ; qu’en conséquence les décisions de refus attaquées ne peuvent être regardées comme restreignant l’exercice de libertés publiques comme le droit syndical, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoyant que l’appartenance à un syndicat aurait pour effet de faire du renouvellement du détachement ou de l’intégration dans le corps de détachement, un droit ; qu’il en résulte que le non-renouvellement d’un détachement à son expiration ne refuse pas un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions pour l’obtenir et ne restreint pas l’exercice des libertés publiques, alors même que l’agent exerce au cours de son détachement un mandat syndical ; que, dans ces conditions, les décisions litigieuses mettant fin au détachement de la requérante à compter du 15 octobre 2015, à l’issue de la période de détachement n’avaient pas à être motivées ; qu’il suit de là que le moyen tiré du défaut d’une telle motivation ne peut qu’être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la requérante fait valoir que le tribunal aurait commis une erreur de droit en écartant le moyen tiré de ce que le refus de renouvellement de son détachement, pris en considération de sa personne et de ses mandats syndicaux, ne pouvait intervenir sans qu’elle ait été mise à même de prendre connaissance de son dossier ; que, toutefois, en l’absence de texte contraire, un agent dont le détachement arrive à échéance n’a aucun droit au renouvellement de celui-ci ; qu’il en résulte qu’alors même que la décision de ne pas renouveler ce détachement serait fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur la manière de servir de l’agent et se trouverait prise en considération de sa personne, elle n’est, sauf à revêtir le caractère d’une mesure disciplinaire, pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l’intéressé ait été mis à même de prendre connaissance de son dossier, sauf dans le cas d’une décision mettant fin au détachement de manière anticipée ; qu’en l’espèce il ne résulte pas des pièces du dossier que le refus de renouvellement du détachement ait été prononcé pour des motifs disciplinaires ; que, par suite, ce moyen de Mme B… tiré du défaut de communication du dossier ne peut qu’être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la requérante prétend que les décisions litigieuses auraient préalablement dû donner lieu à consultation de la commission administrative paritaire de l’administration d’accueil ; qu’il résulte des dispositions de l’article 21 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 que la commission administrative paritaire doit être consultée sur les questions d’ordre individuel résultant de l’application « notamment » des dispositions qui y sont listées ; qu’aux termes des dispositions de l’article 38 du décret n° 89-229 du 17 avril 1989 relatif aux commissions administratives paritaires des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, aux termes duquel : « Les demandes de détachement auprès d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public territorial de fonctionnaires territoriaux, hospitaliers ou de l’État ainsi que les intégrations dans un cadre d’emplois à la suite d’un détachement sont soumises à l’avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d’emplois ou l’emploi d’accueil » ; qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose la consultation de la commission administrative paritaire de l’administration d’accueil préalablement à une décision de non-renouvellement d’un détachement ou à une décision de refus d’intégration ; qu’ainsi, Mme B… ne saurait utilement soutenir que les décisions attaquées seraient entachées d’irrégularité en raison du défaut de saisine de la commission administrative paritaire compétente sur la question du renouvellement de son détachement et sur sa demande d’intégration ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante fait valoir que, la liste des cas de consultation de la commission administrative n’étant, selon elle, pas exhaustive, et ladite commission disposant d’une compétence générale pour connaître des décisions affectant la situation des agents, sa consultation se serait imposée en l’espèce, et ce d’autant plus que, d’une part, les membres de la commission compétente avaient eux-mêmes sollicité la saisine de cette commission en application des articles 50 et 51 du décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 relatif aux commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière, afin d’évoquer sa situation, et que, d’autre part, elle soutient qu’elle avait

elle-même saisi la commission d’une demande tendant à l’inscription de sa situation à l’ordre du jour d’une séance ; que, toutefois, aux termes de l’article 52 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, comme de l’article 66 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 « le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu’il exerce par l’effet de son détachement » ; que, dans le cadre de son détachement, l’intéressée est donc soumise aux dispositions issues de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; que l’article 21 de cette loi dispose que : « Les commissions administratives paritaires sont consultées sur les projets de titularisation et de refus de titularisation. Elles sont consultées sur les questions d’ordre individuel résultant de l’application notamment, des articles (…) 51 à 59 (…) du présent titre (…), » ; qu’il résulte des dispositions dudit article 57 que : « Les fonctionnaires peuvent, sur leur demande ou avec leur accord, être intégrés dans le corps ou emploi de détachement dans les conditions prévues par le statut particulier de ce corps ou emploi. Il est tenu compte, lors de leur intégration, du grade et de l’échelon qu’ils ont atteints ou auxquels ils peuvent prétendre à la suite de la réussite à un concours ou à un examen professionnel ou de l’inscription sur un tableau d’avancement au titre de la promotion au choix dans le corps ou cadre d’emplois d’origine sous réserve qu’ils leur soient plus favorables. Le renouvellement du détachement est prononcé selon les modalités de classement mentionnées à l’alinéa précédent » ; qu’il résulte de ces dispositions combinées que si la commission administrative paritaire doit être consultée sur les décisions d’intégration dans le corps ou emploi de détachement et sur les renouvellements du détachement, cette consultation n’est en revanche pas requise pour les décisions refusant une telle intégration ou refusant le renouvellement du détachement ; que, par suite, le moyen de Mme B… tiré d’une consultation irrégulière volontaire de ladite commission ne peut qu’être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que la requérante invoque le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article 38 du décret n° 89-229 du 17 avril 1989 ; que, toutefois, ces dispositions n’imposent la consultation de la commission administrative paritaire que s’agissant des « demandes de détachement » et des « intégrations dans un cadre d’emplois à la suite d’un détachement » ; qu’elles n’imposent aucune consultation en cas de refus de renouvellement du détachement et de refus d’intégration dans un cadre d’emplois à la suite d’un détachement ; qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose la consultation de la commission administrative paritaire de l’administration d’accueil préalablement à toute décision sur le renouvellement d’un détachement ; qu’en tout état de cause, ce texte ne s’applique qu’aux commissions administratives paritaires des collectivités territoriales et de leurs établissements publics ; qu’elles ne sont donc pas applicables aux procédures intéressant les fonctionnaires qui, comme l’intéressée dans le cadre de son détachement, relèvent du statut de la fonction publique hospitalière ; que les dispositions pertinentes sont celles issues du décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 relatif aux commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière, texte qui ne reprend pas les obligations de l’article 38 du décret n° 89-229 du 17 avril 1989 précité ; que, par suite, ce moyen de Mme B… ne peut qu’être écarté comme étant inopérant ;

8. Considérant, en sixième lieu, qu’aux termes des dispositions de l’article 50 du décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 : " Les commissions administratives paritaires se réunissent sur convocation de leur président : a) Soit à son initiative ; b) Soit à la demande du directeur de l’établissement ; c) Soit à la demande écrite du tiers de leurs membres titulaires (…) » ; que son article 51 prévoit quant à lui que : « L’ordre du jour est fixé par le président au vu des propositions du directeur de l’établissement pour la commission locale et de chaque directeur d’établissement concerné pour la commission départementale » ; que la requérante ne peut davantage se prévaloir de la méconnaissance des articles 50 et 51, en ce qu’il aurait été illégalement opposé tant à certains membres de la commission qu’à l’appelante elle-même, un refus d’inscrire l’examen de la situation de cette dernière à l’ordre du jour d’une séance de la commission administrative paritaire compétente ; qu’il résulte de ces dispositions que les questions posées par les membres d’une commission ne doivent être inscrites à l’ordre du jour de cette commission que lorsqu’elles procèdent de la demande écrite par laquelle le tiers des membres titulaires de cette commission ont demandé la tenue d’une réunion ; que, d’une part, il n’est pas établi que le tiers des membres titulaires de la commission aurait adressé à son président une demande tendant à ce qu’une réunion se tienne, afin notamment d’examiner la question du renouvellement du détachement de l’appelante et de son intégration ; que, d’autre part, et en tout état de cause, les questions qui peuvent ainsi être inscrites à l’ordre du jour par les membres de la commission doivent relever de la compétence de cette commission, et que, par suite, ne peuvent être inscrites que les questions sur lesquelles la commission devrait être obligatoirement consultée alors, qu’ainsi qu’il a été dit, la commission administrative paritaire compétente pour le corps d’accueil n’a pas à être saisie d’un refus de renouvellement du détachement ni d’un refus d’intégration dans le corps de détachement ; qu’il résulte également de ces dispositions que l’inscription à l’ordre du jour de questions dont l’examen a été demandé directement par l’agent intéressé ne peut intervenir que « dans les cas prévus par un texte prévoyant une saisine directe de la commission », c’est-à-dire pour les cas dans lesquels la saisine de ladite commission est imposée par les textes alors que la commission administrative paritaire compétente n’avait pas à être saisie du refus de renouvellement du détachement ni du refus d’intégration dans le corps de détachement ; que, par suite, ce moyen de Mme B… tiré d’une consultation irrégulière de la commission administrative paritaire doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne du jugement :

9. Considérant que, de manière générale, il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d’appréciation de nature à établir sa conviction ; que cette responsabilité doit, dès lors qu’il est soutenu qu’une mesure a pu être empreinte de discrimination, s’exercer en tenant compte des difficultés propres à l’administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s’attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l’égalité de traitement des personnes ; que, s’il appartient au requérant qui s’estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d’établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu’en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d’instruction utile ;

10. Considérant, en premier lieu, que Mme B… soutient que le refus d’intégration dans le corps d’éducateur de jeunes enfants de la fonction publique hospitalière et le non-renouvellement de son détachement ont été décidés pour des considérations étrangères à l’intérêt du service, liées aux mandats syndicaux qu’elle exerce, et sont entachés d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir et alors que les mesures litigieuses anéantissent son mandat électif ce qui contrevient au droit des salariés de pouvoir librement élire leurs représentants de leurs choix mais aussi au droit de l’intéressée de pouvoir librement exercer son mandant en méconnaissance des dispositions des articles 8 et 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et de l’article 8 du préambule de la constitution de 1946, de l’article 1er de la convention OIT n° 135 du 23 juin 1971 et de la convention n° 15 du 27 juin 1978 sur les relations de travail dans la fonction publique ;

11. Considérant, d’une part, qu’il a été rappelé ci-dessus au point 4 que le fonctionnaire détaché n’a pas de droit au maintien de son détachement, auquel il peut être mis fin à tout moment, le juge n’exerçant sur la décision de refus de détachement qu’un contrôle restreint ; qu’il en va de même s’agissant de la décision de non-renouvellement du détachement, qui ne doit pas être entachée d’erreur manifeste dans l’appréciation de la situation du fonctionnaire ; qu’a fortiori, un refus de renouvellement du détachement ne saurait être illégal en raison de ce qu’un poste sur lequel le détachement pourrait être prolongé est occupé par un agent contractuel ; qu’en revanche, la circonstance que le poste dans l’administration d’origine soit occupé par un agent contractuel ne doit pas faire obstacle à la réintégration sur cet emploi du fonctionnaire en fin de détachement, à charge pour l’administration d’origine de chercher à reclasser l’agent non titulaire ; que lorsque n’est pas en cause une réintégration à laquelle le fonctionnaire a droit, mais le renouvellement de son détachement, auquel il n’a pas droit, ce fonctionnaire ne peut utilement soutenir, à l’appui du recours dirigé contre la décision de refus de renouvellement, que son détachement aurait pu se prolonger sur un emploi occupé par un agent contractuel ; qu’en tout état de cause, la circonstance qu’il existerait des postes vacants n’est pas de nature à entacher d’illégalité un refus de renouvellement justifié par des considérations liées à l’intérêt du service ; qu’il n’existe pas de droit à intégration dans le corps ou dans le cadre d’emploi de détachement, hormis l’hypothèse, qui n’est pas en cause ici, envisagée à l’article 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires selon lequel : « Le fonctionnaire détaché dans un corps ou cadre d’emplois qui est admis à poursuivre son détachement au-delà d’une période de cinq ans se voit proposer une intégration dans ce corps ou cadre d’emplois » ; que, d’autre part, en ce qui concerne les faits, il ne résulte pas des pièces du dossier que les décisions attaquées n’aient pas été prises dans l’intérêt du service mais au regard des responsabilités syndicales de l’intéressée, et alors que la direction pouvait décider de maintenir des agents contractuels donnant satisfaction et qui étaient plus exposés à certaines formes de précarité en termes d’emploi que ne pouvait l’être un fonctionnaire détaché qui pouvait en tout état de cause réintégrer son administration d’origine ; que, par suite, le moyen de Mme B… tirés de l’erreur manifeste d’appréciation ou du détournement de pouvoir doit être écarté ;

12. Considérant, en second lieu, que la requérante allègue que le refus de renouvellement de son détachement a été prononcé pour des considérations étrangères à l’intérêt du service et aurait, en réalité, été décidé pour des motifs entachés de discrimination, liés selon elle à ses activités syndicales ; qu’elle invoque notamment au soutien de ses allégations la circonstance que sa fiche de notation pour 2014 comportait initialement, dans la rubrique « appréciation générale », la mention, supprimée dans une nouvelle version de cette fiche établie deux semaines plus tard, selon laquelle « elle est très investie au niveau du droit syndical et a été désignée suppléante déléguée » ; que selon le département de Paris, le refus de renouvellement du détachement demandé par Mme B… a été fondé sur la situation des effectifs de l’Etablissement départemental de l’aide sociale à l’enfance de l’ouest parisien et, notamment, au sein du foyer Parent de Rosan ; que selon les éléments produits en défense par le département, seuls deux postes ou emplois de contractuels étaient réellement vacants, l’un d’auxiliaire de puériculture et l’autre d’assistant socio-éducatif, ne correspondant pas à la qualification de Mme B… ; qu’en outre, les deux offres d’emploi d’éducateur diffusées en septembre 2015, dont l’une pour le foyer Parent de Rosan, ne concernaient que des remplacements momentanés d’une durée de trois mois ; que si Mme B… soutient que des agents non titulaires occupant des emplois d’éducateur auraient bénéficié d’un renouvellement de leur contrat postérieurement à la fin de son détachement, elle ne l’établit pas ; qu’ainsi, en l’absence notamment de tout emploi de titulaire, et donc de possibilité d’un détachement renouvelé ou d’une possibilité de titularisation pour elle dans ce type d’emploi, il ne ressort pas des différentes pièces produites au dossier, et notamment des pièces déjà analysées ci-dessus, que le refus de renouveler le détachement de Mme B… aurait été prononcé pour des motifs étrangers à l’intérêt du service ; que si les témoignages de collègues fournis par la requérante traduisent l’attachement de ceux-ci à son action syndicale, ils ne suffisent pas à établir la discrimination alléguée : que, par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir et de la discrimination syndicale doit être écarté ;

13. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme B… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l’annulation du jugement et des décisions attaquées doivent, dès lors, être rejetées ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d’injonction, et celles présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B… une somme à verser au département de Paris au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :


Article 1er : La requête de Mme B… est rejetée.


Article 2 : Les conclusions du département de Paris visant à mettre à la charge de Mme B… une somme à verser au département de Paris sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A… B… et au département de Paris. Copie en sera adressée au syndicat CGT des personnels des établissements et agences de l’aide sociale à l’enfance de Paris.

Délibéré après l’audience du 10 janvier 2017 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
M. Legeai, premier conseiller,

Lu en audience publique le 24 janvier 2017.

Le rapporteur,

A. LEGEAI

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01605

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de PARIS, 10ème chambre, 24 janvier 2017, 16PA01605, Inédit au recueil Lebon