CAA de PARIS, 4ème chambre, 17 avril 2020, 18PA02345, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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SW Avocats · 2 mai 2021

En ces temps d'interruptions généralisées de chantiers pour cause de crise sanitaire, la Cour administrative d'appel de Paris a eu l'occasion de rappeler, dans un arrêt du 17 avril 2020, que le titulaire d'un marché de travaux était en droit de solliciter l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis à la suite de l'interruption du chantier s'il était en mesure de se prévaloir d'un préjudice indemnisable en lien avec l'interruption litigieuse, causée en l'espèce par l'annulation d'un permis de construire. L'université Pierre et Marie CURIE a conclu le 14 février 2010 avec la …

 

SW Avocats · 2 mai 2021

En ces temps d'interruptions généralisées de chantiers pour cause de crise sanitaire, la Cour administrative d'appel de Paris a eu l'occasion de rappeler, dans un arrêt du 17 avril 2020, que le titulaire d'un marché de travaux était en droit de solliciter l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis à la suite de l'interruption du chantier s'il était en mesure de se prévaloir d'un préjudice indemnisable en lien avec l'interruption litigieuse, causée en l'espèce par l'annulation d'un permis de construire. L'université Pierre et Marie CURIE a conclu le 14 février 2010 avec la …

 

blog.landot-avocats.net · 6 mai 2020

Un récent arrêt de la Cour Administrative d'Appel de Paris (17 avril 2020, Société Pimentel BTP, req. n° 18PA02345) permet de revenir sur l'indemnisation des préjudices des entreprises en cas d'interruption de chantier. Voilà un arrêt qui en temps de covid-19 et d'interruption des chantiers ne devrait pas passer inaperçu même si ce cas d'espèce ne concerne aucunement la crise sanitaire. Une Université, a conclu le 14 février 2010 avec la société Pimentel BTP un marché public de travaux. Néanmoins, les travaux ont fait l'objet d'une interruption du 8 février 2011 au 2 mai 2011 en raison de …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 4e ch., 17 avr. 2020, n° 18PA02345
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 18PA02345
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 11 juin 2018, N° 1602485/3-3
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000041816820

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Pimentel BTP a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l’université Pierre et Marie Curie à lui verser, au titre du marché correspondant au lot n° 01 des travaux de construction du centre d’hébergement de l’observatoire océanologique de

Banyuls-sur-Mer, les sommes suivantes, assorties de la TVA et des intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête :

 – 35 619,92 euros HT correspondant au solde du marché ;

 – 17 967,73 euros HT correspondant aux pénalités de retard ;

 – 7 859,74 euros HT correspondant aux intérêts moratoires ;

 – 182 903,71 euros HT correspondant aux préjudices liés à l’interruption des travaux entre le 8 février et le 2 mai 2011 ;

 – 708,36 euros HT correspondant au règlement du compte déchet.

Par un jugement n° 1602485/3-3 du 12 juin 2018, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société Pimentel BTP tendant au versement de la somme de 35 619,92 euros et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 juillet 2018 et 19 octobre 2018, la société Pimentel BTP, représentée par Me A…, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n°1602485/3-3 du 12 juin 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu’il a rejeté sa demande ;

2°) de condamner l’université Pierre et Marie Curie à lui verser les sommes suivantes, assorties de la TVA et des intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête :

 – 182 903,71 euros HT correspondant aux préjudices liés à l’interruption des travaux ;

 – 17 967,73 euros HT correspondant aux pénalités de retard ;

 – 7 859,74 euros HT correspondant aux intérêts moratoires ;

 – 708,36 euros HT correspondant au règlement du compte déchet ;

3°) de mettre à la charge de l’université Pierre et Marie Curie (UPMC) le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – le jugement est irrégulier dès lors qu’il n’est pas signé, en méconnaissance de l’article R. 741-7 du code de justice administrative ;

 – les dispositions du cahier des clauses administratives générales (CCAG) Travaux, approuvé par l’arrêté du 8 septembre 2009, sont applicables au marché en litige, et non celles résultant du décret du 21 janvier 1976 ;

 – la clause de renonciation prévue dans l’avenant de juin 2011 ne peut lui être opposée dès lors qu’elle ne porte pas sur l’indemnisation des préjudices subis à raison de la fermeture du chantier ;

 – les pénalités de retard infligées ne sont pas fondées dès lors que le retard résulte des intempéries ayant interrompu le chantier et qu’elle pouvait prétendre à une prolongation du délai d’exécution sur le fondement du deuxième alinéa de l’article 19.22 du cahier des clauses administratives générales ;

 – elle a droit à une somme de 7 859,74 euros correspondant aux intérêts moratoires sur les acomptes, eu égard au retard de paiement des acomptes mensuels par l’UMPC ;

 – elle a droit à une indemnisation de l’immobilisation de la main d’oeuvre qui doit être évaluée à 51 160,20 euros, de l’immobilisation du matériel qui doit être évaluée à 62 002,83 euros, des frais généraux, de la perte de marge qui doit être évaluée à 180 097,71 euros et aux frais de gestion administrative qui doivent être évalués à 2 806 euros ;

 – l’UPMC doit être condamnée, en sa qualité de pouvoir adjudicateur et garante de la bonne exécution des prestations par les autres entreprises, à lui verser une somme de 708,36 euros correspondant au montant de la participation de la SARL Ferrer au compte déchet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2018, Sorbonne Université, représentée par Me E…, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Pimentel BTP une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Pimentel BTP ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code des marchés publics ;

 – le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;

 – le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;

 – l’arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

 – le code de justice administrative ;

 – l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Mach, premier conseiller,

 – les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

 – les observations de Me B…, substituant Me A…, avocat de la société Pimentel BTP,

 – et les observations de Me E…, avocat de Sorbonne Université.

Une note en délibéré a été enregistrée le 6 mars 2020 pour la société Pimentel BTP.

Considérant ce qui suit :

1. L’université Pierre et Marie Curie, devenue l’université Sorbonne Université, a conclu le 14 février 2010 avec la société Pimentel BTP un marché public de travaux portant sur le lot n° 1 correspondant à la réalisation des prestations de voirie et réseau divers – Gros oeuvre, en vue de la construction du centre d’hébergement de l’observatoire océanographique de Banuyls-sur-Mer. Les travaux ont fait l’objet d’une interruption du 8 février 2011 au 2 mai 2011 en raison de l’annulation du permis de construire par le Tribunal administratif de Montpellier. Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 19 avril 2013. Le décompte général du marché a été notifié par courrier du 23 novembre 2016 à la société Pimentel BTP qui l’a contesté par courrier du 19 décembre 2016. Par jugement du 12 juin 2018, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société Pimentel BTP tendant au versement de la somme de 35 619,92 euros et a rejeté ses demandes tendant au versement de sommes correspondant aux pénalités de retard, aux intérêts moratoires, aux préjudices liés à l’interruption des travaux entre le 8 février et le 2 mai 2011 et au règlement du compte déchet. La société Pimentel BTP relève appel de ce jugement en tant qu’il a rejeté ses demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article R. 741-7 du code de justice administrative : « Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d’audience. »

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l’article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l’ampliation du jugement qui a été notifiée à la société Pimentel BTP ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l’article 2 de l’arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux : « Les dispositions du présent arrêté entrent en vigueur trois mois après sa publication au Journal officiel de la République française. / Les marchés publics pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel public à la concurrence envoyé à la publication avant cette date demeurent régis, pour leur exécution, par les dispositions du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux auquel ils se réfèrent, dans sa rédaction antérieure aux dispositions annexées au présent arrêté ». Il résulte de ces dispositions que le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, dans sa rédaction issue de l’arrêté du 8 septembre 2009 n’est pas applicable aux marchés publics pour lesquels la consultation a été engagée avant le 1er janvier 2010, lesdits marchés demeurant régis pour leur exécution par les dispositions du CCAG auxquels ils se réfèrent.

5. L’article 2.2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché stipule, s’agissant des pièces générales, au nombre desquelles figure le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, que les documents applicables sont ceux en vigueur au premier jour du mois d’établissement des prix, tel qu’il est défini à l’article 2 de l’acte d’engagement, à savoir le mois de février 2010 et entend ainsi renvoyer au cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par l’arrêté du 8 septembre 2009. Toutefois, compte tenu de la numérotation des articles du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics retenue par le cahier des clauses administratives particulières du marché, l’intention des parties, en dépit de la rédaction de l’article 2.2 du même cahier, était de se référer au cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par le décret du 21 janvier 1976. Par suite, et contrairement à ce que soutient la société Pimentel BTP, le décret du 21 janvier 1976 est seul applicable au marché à l’origine du litige.

En ce qui concerne les préjudices liés à l’interruption du chantier :

6. Il résulte de l’instruction que la société Pimentel BTP et le président de l’université Pierre et Marie Curie ont signé un avenant n° 1 du 21 juin 2011 dont le point F stipule que :

« Le titulaire renonce à toute action, réclamation ou recours pour tout fait relatif à l’objet de cet avenant, antérieur à la date de signature ». D’une part, il résulte des termes mêmes de cet avenant qu’il a pour objet de prendre en compte les coûts supplémentaires pour des travaux souhaités en cours de chantier, notamment les travaux de fermeture et mise en sécurité du chantier suite à l’annulation du permis de construire et de remise en état du chantier suite à l’obtention du nouveau permis de construire et ne concerne pas l’indemnisation des préjudices subis par la société Pimentel BTP du fait de l’interruption du chantier. D’autre part, il résulte de l’instruction que la société Pimentel BTP a adressé à l’université Pierre et Marie Curie un courrier en date du 16 mars 2011 relatif aux conséquences financières de l’interruption du chantier comprenant les travaux à effectuer ainsi que l’indemnisation de ses préjudices. Si l’établissement a accepté la facture afférente aux travaux par courrier du 4 avril 2011, il a sollicité des pièces et précisions complémentaires par courriers des 4 avril et 5 août 2011, postérieurement à la signature de l’avenant n° 1. Enfin, l’université n’a nullement invoqué cette clause de renonciation au cours de ses échanges avec la société Pimentel BTP et n’a opposé cette stipulation que devant le tribunal. Dans ces conditions, et contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, la société Pimentel BTP ne peut être regardée en signant l’avenant du 21 juin 2011 comme ayant renoncé à solliciter l’indemnisation des préjudices résultant pour elle de l’interruption du chantier, distincts des coûts des travaux. Par suite, la société appelante est fondée à soutenir qu’elle a droit à être indemnisée de l’ensemble des préjudices qu’elle a subis du fait de l’interruption du chantier, à condition toutefois d’établir la réalité de ses préjudices ainsi que leur lien avec l’interruption du chantier.

7. Aux termes de l’article 48-1 du CCAG Travaux 1976 : « Ajournement et interruption des travaux. / 48.1. L’ajournement des travaux peut être décidé. Il est alors procédé, suivant les modalités indiquées à l’article 12, à la constatation des ouvrages et parties d’ouvrages exécutés et des matériaux approvisionnés. / L’entrepreneur, qui conserve la garde du chantier, a droit à être indemnisé des frais que lui impose cette garde et du préjudice qu’il aura éventuellement subi du fait de l’ajournement. / Une indemnité d’attente de reprise des travaux peut être fixée dans les mêmes conditions que les prix nouveaux, suivant les modalités prévues à l’article 14. ». Aux termes de l’article 12 du CCAG Travaux 76 : " Constatations et constats contradictoires. / 12.1. Au sens du présent article, la constatation est une opération matérielle, le constat est le document qui en résulte. / 12.2. Des constatations contradictoires concernant les prestations exécutées ou les circonstances de leur exécution sont faites sur la demande, soit de l’entrepreneur, soit du maître d’oeuvre. / Les constatations concernant les prestations exécutées, quand il s’agit de travaux réglés sur prix unitaires, portent sur les éléments nécessaires au calcul des quantités à prendre en compte, tels que résultats de mesurages, jaugeages, pesages, comptages, et sur les éléments caractéristiques nécessaires à la détermination du prix unitaire à appliquer. / 12.3. Les constatations contradictoires faites pour la sauvegarde des droits éventuels de l’une ou l’autre des parties ne préjugent pas l’existence de ces droits ; elles ne peuvent porter sur l’appréciation de responsabilités. (…) "

8. La société Pimentel BTP soutient qu’elle est en droit d’obtenir une indemnité d’un montant respectivement de 62 002,83 euros et 51 160,20 euros au titre de l’immobilisation permanente de son matériel et de son personnel pendant la durée de l’interruption du chantier. Toutefois, il ne résulte pas de l’instruction que la société Pimentel BTP a demandé qu’il fût procédé, en vue de la sauvegarde de ses droits, en application de l’article 12 du CCAG, à des constatations contradictoires relatives notamment à l’immobilisation de son matériel et de son personnel. Dans ces conditions, la société Pimentel BTP ne justifie pas de la réalité et du montant du préjudice subi du fait de l’immobilisation de son matériel évalué à 62 002,83 euros et de son personnel, évalué à 51 160,20 euros.

9. La société Pimentel BTP invoque le bénéfice d’une indemnité au titre des frais généraux dépensés en raison de l’interruption du chantier. Toutefois, en se bornant à produire un tableau qu’elle a réalisé elle-même et qui ventile pour chaque mois les frais fixes entre les différents chantiers dont elle est titulaire et alors que le principe et les calculs sont contestés par Sorbonne Université, la société Pimentel BTP n’établit pas la réalité et le montant du préjudice allégué.

10. La société Pimentel BTP soutient qu’elle a droit à l’indemnisation de la perte de marge évaluée à 5,5% du montant du chiffre d’affaires, soit 180 097,71 euros, compte tenu de l’allongement de la durée du chantier. Toutefois, cette demande n’est appuyée par aucune pièce justificative à l’exception d’un tableau qu’elle a réalisé pour chaque mois dont le principe et les calculs sont contestés par Sorbonne Université. Dans ces conditions, elle n’établit ni la réalité ni le montant du préjudice qu’elle allègue avoir subi à ce titre.

11. La société Pimentel BTP fait valoir que l’interruption du chantier a généré d’importants frais de gestion administratifs eu égard aux nombreux échanges de courriers, qui doivent être évalués à la somme de 2 806 euros. Toutefois, en se bornant à renvoyer à sa demande indemnitaire qui mentionne du personnel et des frais administratifs pour 92 heures, la société Pimentel BTP ne justifie ni de la réalité du préjudice, ni du montant sollicité, ni du lien de causalité avec l’interruption du chantier.

En ce qui concerne les pénalités de retard :

12. Aux termes de l’article 19.22 du CCAG Travaux 1976 : « Dans le cas d’intempéries au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt de travail sur les chantiers, les délais d’exécution des travaux sont prolongés. Cette prolongation est notifiée à l’entrepreneur par un ordre de service qui en précise la durée, laquelle est égale au nombre de journées réellement constaté au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries conformément auxdites dispositions, en défalquant, s’il y a lieu, le nombre de journées d’intempéries prévisibles indiqué au C.C.A.P.. / Dans le cas d’intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire ainsi que dans le cas d’autres phénomènes naturels entravant l’exécution des travaux, si le C.C.A.P. prévoit la prolongation du délai d’exécution en fonction de critères qu’il définit, cette prolongation de délai est notifiée à l’entrepreneur par un ordre de service récapitulant les constatations faites. ». Aux termes de l’article 4.2 du CCAP relatif à la prolongation des délais d’exécution : « En vue de l’application éventuelle du dernier alinéa de l’article 19.22 du CCAG Travaux, le nombre de journées d’intempéries réputées prévisibles comprises dans le délai contractuel est fixé à 30 jours calendaires pour les travaux tous corps d’état. / Seront considérées comme » intempéries « les journées d’arrêt du chantier ayant fait l’objet de déclarations ou susceptibles de l’être et prises en compte de la Caisse des Congés dûment constatées par le maître d’oeuvre et l’OPC ou celles pendant lesquelles un au moins des phénomènes naturels ci-après, dépassera son intensité limite. / Par dérogation au second alinéa de l’article 19.22 du CCAG, si des intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire ou d’autres phénomènes naturels s’avèrent de nature à compromettre la bonne exécution des travaux, le maître d’oeuvre peut prescrire l’arrêt momentané des travaux ou l’autoriser sur proposition de l’entrepreneur, et le délai d’exécution est prolongé d’autant par décision du pouvoir adjudicateur. »

13. Il résulte des stipulations du deuxième alinéa de l’article 19.22 du CCAG, auxquelles l’article 4-2 du CCAP n’a pas entendu déroger, que la prolongation du délai d’exécution des travaux qu’il prévoit est subordonnée, non seulement à la satisfaction des critères prévus à cet effet par le cahier des clauses administratives particulières, mais aussi à la condition que les intempéries et autres phénomènes naturels qu’il vise aient effectivement entravé l’exécution des travaux. Il appartient ainsi à l’entrepreneur, lorsqu’il entend se prévaloir de ces stipulations, de solliciter auprès du maître de l’ouvrage, en vue de l’édiction par ce dernier des ordres de service prévus par les mêmes stipulations, la constatation contradictoire, à l’occasion notamment des réunions de chantier, des difficultés rencontrées dans l’exécution des travaux.

14. La société Pimentel BTP soutient que les pénalités de retard d’un montant de

17 967,73 euros HT qui lui ont été infligées à raison de 19 jours de retard dans l’exécution des travaux sont injustifiés compte tenu de la survenance d’intempéries entre janvier et avril 2012 ayant fait obstacle au respect des délais d’exécution. D’une part, si la société Pimentel BTP a adressé au maître d’oeuvre un courrier en date du 14 février 2012 l’informant du non-respect du calendrier initialement prévu compte tenu des conditions de températures et de vent, elle ne peut être regardée comme ayant, par ce seul courrier purement informatif, sollicité auprès du maître de l’ouvrage la constatation contradictoire des difficultés rencontrées dans l’exécution des travaux. D’autre part, il n’est pas contesté qu’aucun ordre de service tendant à la prolongation du délai d’exécution n’a été notifié à la société. Par ailleurs, Sorbonne Université fait valoir, sans être contredite, qu’aucune journée d’arrêt de chantiers n’a fait l’objet d’une prise en compte par la caisse des congés intempéries, conformément à l’article 4.2 du CCAP. Enfin, si la société Pimentel BTP justifie par des relevés météorologiques de la station Cap Bear de Météo France, en l’absence de station météorologique à Banyuls-sur-Mer, que des intempéries et phénomènes naturels visés au deuxième alinéa de l’article 4.2 du CCAP ont à plusieurs reprises dépassé les intensités limites définies pour ce marché entre janvier et avril 2012, elle n’établit pas que les travaux litigieux ont été effectivement entravés par les phénomènes en cause. Elle n’est, dès lors, pas fondée à soutenir que des journées d’intempéries auraient dû être décomptées. Par suite, la société Pimentel BTP ne pouvait prétendre à une prolongation du délai d’exécution sur le fondement des stipulations de l’article 19.22 du CCAG.

En ce qui concerne les intérêts moratoires sur les acomptes :

15. Aux termes de l’article 98 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable au marché en litige : " Le délai global de paiement d’un marché public ne peut excéder : / 1° 30 jours pour les services de l’Etat et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial, à l’exception de ceux mentionnés au 2°, pour les collectivités territoriales et les établissements publics locaux ; (…) / Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou le sous-traitant, le bénéfice d’intérêts moratoires, à compter du jour suivant l’expiration du délai. « . Aux termes de l’article 1er du décret du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics : » I.- Le point de départ du délai global de paiement prévu aux articles 54 et 55 de la loi du 15 mai 2001 susvisée et à l’article 98 du code des marchés publics est la date de réception de la demande de paiement par les services de la personne publique contractante ou, si le marché le prévoit, par le maître d’oeuvre ou tout autre prestataire habilité à cet effet. Le marché indique les conditions administratives et techniques auxquelles sont subordonnés les mandatements et le paiement. (…) / La date de réception de la demande de paiement et la date d’exécution des prestations sont constatées par les services de la personne publique contractante. A défaut, c’est la date de la demande de paiement augmentée de deux jours qui fait foi. En cas de litige, il appartient au titulaire de la commande d’administrer la preuve de cette date. « . Aux termes de l’article 13 du CCAG Travaux : » Modalités de règlement des comptes. / 13.1. Décomptes mensuels : / 13.11. Avant la fin de chaque mois, l’entrepreneur remet au maître d’oeuvre un projet de décompte établissant le montant total, arrêté à la fin du mois précédent, des sommes auxquelles il peut prétendre du fait de l’exécution du marché depuis le début de celle-ci. (…) « . Aux termes de l’article 3.3.6 du cahier des clauses administratives particulières du marché : » Modalités de paiement. Le délai global de paiement des avances, acompte, solde et indemnités est fixé à 30 jours. / Le point de départ du délai global de paiement des acomptes est la date de réception du projet de décompte par le maître d’oeuvre. (…) / Il est dérogé à la totalité des articles 11.7, 13.231, 13.431 et 13.54 du CCAG et fait application de l’article 98 du CMP et du décret 2002-232 du 21 février 2002 « . Aux termes de l’article 3.3.7 du cahier des clauses administratives particulières du marché : » Le défaut de paiement dans ce délai fait courir de plein droit et sans autre formalité, des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire et des sous-traitants, payés directement. « . Aux termes de l’article 12 du cahier des clauses administratives particulières du marché : » Les dates de présentation des situations par l’entreprise, de vérification et de validation par les représentants cités au chapitre 2 ci-dessus, telles qu’elles figurent sur les écrans et les éditions du service Ediflex, font foi. Ces dates valent accusé de réception pour l’abonné suivant, conformément au circuit de vérification imposé par le service ".

16. La société Pimentel BTP, qui sollicite le versement des intérêts moratoires sur les seuls acomptes mensuels, fait valoir que les délais de paiement des acomptes mensuels n’ont pas toujours été respectés par l’université Pierre et Marie Curie. Pour établir la réalité des défauts de paiement dans les délais prescrits, la société produit un tableau établi par ses soins mentionnant pour chaque facture, la date de la facture, la date de paiement et le délai de paiement ainsi qu’un extrait des relevés de comptes BPI mentionnant la date de la facture et le délai de paiement. D’une part, Sorbonne Université soutient que les pièces produites ne permettent pas de justifier de la date de réception des projets de décomptes mensuels et des retards de paiement. Contrairement à ce que soutient la société Pimentel BTP, la charge de la preuve de la date de la réception de projets de décompte mensuel lui incombe en cas de litige, conformément à l’article 1er précité du décret du 21 février 2002. D’autre part, Sorbonne Université fait valoir sans être utilement contredite que la société Pimentel ne démontre pas avoir transmis les projets de décompte mensuels sur la plateforme Ediflex avec l’ensemble des pièces justificatives dans les conditions prévues par l’article 12 du CCAP du marché. Enfin, les pièces produites par la société Pimentel BTP comportent, pour certaines factures, des montants différents et des délais de paiement contradictoires. La société Pimentel BTP n’établit pas la réalité des retards de paiement des acomptes mensuels et n’est, par suite, pas fondée à solliciter le versement d’une somme de 7 859,74 euros au titre des intérêts moratoires dus sur les acomptes.

En ce qui concerne le compte déchet :

17. Les difficultés rencontrées dans l’exécution d’un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l’entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat soit qu’elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l’exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l’estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

18. D’une part, en se bornant à produire des courriers de relance qu’elle a adressés à l’entreprise Ferrer et Fils, chargée des prestations de peinture au titre du lot n° 2, faisant état de l’absence de régularisation du compte déchets et de l’absence de paiement d’une facture du 15 juin 2012 d’un montant de 605,61 euros, ainsi que d’un courrier du 6 février 2013 demandant à l’université Pierre et Marie Curie de faire le nécessaire auprès de cette entreprise pour régulariser la situation, la société Pimentel BTP n’apporte aucune précision sur le fondement de sa demande et la nature de la somme demandée, ni ne justifie du montant sollicité de 708,36 euros. D’autre part, si l’appelante fait valoir que l’université Pierre et Marie Curie est garante de la bonne exécution des prestations des entreprises titulaires des différents lots, elle n’allègue ni n’établit que le non-paiement par l’autre prestataire de cette somme bouleverserait l’économie du contrat ou serait imputable à une faute de l’université Pierre et Marie Curie. Par suite, sa demande tendant à la condamnation de Sorbonne Université à lui verser la somme de 708,36 euros HT, qu’un autre prestataire lui doit au titre du compte déchet, ne peut qu’être rejetée.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la société Pimentel BTP n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris rejeté le surplus de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Sorbonne Université qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la société Pimentel BTP au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société Pimentel BTP le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Sorbonne Université et non compris dans les dépens.


DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Pimentel BTP est rejetée.

Article 2 : La société Pimentel BTP versera à Sorbonne Université une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Pimentel BTP et à Sorbonne Université.

Délibéré après l’audience du 14 février 2020, à laquelle siégeaient :


- Mme C…, présidente,

- Mme Portes, premier conseiller,

- Mme Mach, premier conseiller.


Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2020.


La présidente de la formation de jugement,
M. C…

La République mande et ordonne au ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

18PA02345 2



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CAA de PARIS, 4ème chambre, 17 avril 2020, 18PA02345, Inédit au recueil Lebon