CAA de PARIS, 7ème chambre, 6 mai 2022, 21PA05111

  • Sanction prononcée à l'encontre d'un agent public·
  • Domaine de la répression administrative·
  • Régime de la sanction administrative·
  • Obligation de motivation spécifique·
  • Fonctionnaires et agents publics·
  • Discipline·
  • Régularité·
  • Répression·
  • Sanctions·
  • Sanction

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Si la décision par laquelle l’autorité investie du pouvoir hiérarchique rend publique la sanction disciplinaire qu’elle prononce a le caractère d’une sanction complémentaire, cette dernière n’a pas à faire l’objet d’une motivation spécifique, distincte de la motivation d’ensemble de la sanction principale. [RJ1].

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 7e ch., 6 mai 2022, n° 21PA05111
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 21PA05111
Importance : Intérêt jurisprudentiel signalé
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 12 juillet 2021, N° 2002740/53
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Rappr, en matière sanctions prononcées par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers : CE, Section, 6 juin 2008, Société Tradition Securities and Futures, n° 299203, p. 189, en matière de sanctions prononcées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes : CE, 15 avril 2016, Société Guadeloupe Téléphone Mobile et autres n°390759, 390761, 390762 aux T. sur un autre point, et en matière de sanctions prononcées par la commission des sanctions de l'Autorité de contrôle prudentiel : CE, 15 octobre 2020, Banque d'Escompte, n° 432873, aux tables du recueil.
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 28 août 2023
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045766817

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C B a demandé au Tribunal administratif de Paris d’annuler la décision du 27 décembre 2019 par laquelle le ministre de l’Europe et des affaires étrangères a prononcé à son encontre la sanction d’exclusion définitive du service, avec publication, et d’enjoindre au ministre de l’Europe et des affaires étrangères de le réintégrer sur son poste et de reconstituer sa carrière.

Par un jugement n° 2002740/5-3 du 13 juillet 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 septembre 2021 et le 10 janvier 2022, M. B, représenté par Me Laveissière, demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 2002740/5-3 du 13 juillet 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d’annuler la décision du 27 décembre 2019 du ministre de l’Europe et des affaires étrangères ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— le jugement est irrégulier pour avoir omis de statuer sur les moyens tirés de ce que son dossier administratif était incomplet, de ce que le ministre a délivré une information inexacte au conseil de discipline et à la juridiction sur l’existence d’une enquête au sein de son service d’affectation et enfin de ce qu’il contestait la matérialité de l’ensemble des faits lui étant reprochés ;

— la décision attaquée a été prise à l’issue d’une procédure irrégulière compte tenu du caractère incomplet de son dossier ;

— elle est également entachée d’irrégularité faute de communication de l’intégralité des témoignages recueillis pendant l’enquête ;

— elle a été prise à l’issue d’une procédure irrégulière faute de réalisation d’une enquête au sein de son service ;

— elle est également entachée d’irrégularité compte tenu de la partialité de l’enquête administrative ;

— la décision est insuffisamment motivée en ce qui concerne la publication de la sanction avec mention de son identité ;

— les faits qui lui sont reprochés ne sont pas matériellement établis ;

— ces faits ne sont en tout état de cause pas constitutifs de fautes disciplinaires ;

— à titre infiniment subsidiaire, la sanction prononcée est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2021, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

— le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme A,

— les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

— et les observations de Me Roncin, avocat de M. B.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de son admission au concours d’adjoint administratif de chancellerie de l’année 2018, M. C B a été nommé adjoint administratif de chancellerie de 2ème classe stagiaire le 18 juin 2018 et affecté au poste d’assistant ressources à la direction de la Russie et de l’Europe centrale du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Par une décision du 27 décembre 2019, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères lui a infligé la sanction disciplinaire d’exclusion définitive de service, avec publication. M. B fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que, compte tenu des arguments développés à son soutien, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen tiré de ce que le dossier administratif de M. B était incomplet.

3. En deuxième lieu, il ressort des points 5, 6 et 7 du jugement attaqué que les premiers juges n’ont pas plus omis de répondre au moyen tiré de ce que la procédure disciplinaire aurait été viciée par le fait que le ministre de l’Europe et des affaires étrangères a mentionné à tort que des témoignages avaient été recueillis au sein du service d’affectation de M. B.

4. Enfin, M. B n’est pas plus fondé à soutenir que les premiers juges auraient omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu’il contestait l’intégralité des faits lui étant reprochés en ayant relevé, par une exacte analyse de l’ensemble de ses écritures, qu’il contestait la matérialité de seulement certains des faits qui lui étaient reprochés.

Sur le bien fondé du jugement :

5. Aux termes de l’article 2 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l’Etat et de ses établissements publics : « Les fonctionnaires stagiaires sont soumis aux dispositions des lois du 13 juillet 1983 et du 11 janvier 1984 susvisées et à celles des décrets pris pour leur application dans la mesure où elles sont compatibles avec leur situation particulière et dans les conditions prévues par le présent décret. ». L’article 10 du même décret dispose que : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d’être infligées au fonctionnaire stagiaire sont : 1° L’avertissement ; 2° Le blâme ; 3° L’exclusion temporaire, avec retenue de rémunération à l’exclusion du supplément familial de traitement, pour une durée maximale de deux mois ; 4° Le déplacement d’office ; 5° L’exclusion définitive de service « . Selon son article 13 : » L’administration doit, lorsqu’elle engage une procédure disciplinaire, informer l’intéressé qu’il a le droit d’obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et qu’il peut se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. / Les sanctions autres que l’avertissement et le blâme sont prononcées après avis de la commission administrative paritaire prévue à l’article 29 du présent décret, siégeant en conseil de discipline. / L’avis de la commission et la décision qui prononce la sanction doivent être motivés. ".

6. Enfin l’article 67 de la loi du 11 janvier 1984, relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires de l’Etat et qui n’est pas incompatible avec la situation de stagiaire, dispose dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée que : « Le pouvoir disciplinaire appartient à l’autorité investie du pouvoir de nomination qui l’exerce après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline et dans les conditions prévues à l’article 19 du titre Ier du statut général./ Cette autorité peut décider, après avis du conseil de discipline, de rendre publics la décision portant sanction et ses motifs. »

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

7. Lorsqu’une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d’un agent public, le rapport établi à l’issue de cette enquête, ainsi que, lorsqu’ils existent, les procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l’agent faisant l’objet de l’enquête font partie des pièces dont ce dernier doit recevoir communication sauf si celle-ci serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné.

8. Il ressort des pièces du dossier que les 85 agents lauréats de la même promotion que M. B ont été destinataires d’un courrier électronique du 14 août 2019 émanant du service juridique et les invitant, dans le cadre d’une enquête administrative concernant les faits reprochés à M. B, à faire part de leurs propres observations quant au comportement de M. B, à charge comme à décharge, dont ils pourraient avoir été témoins, tout en rappelant les garanties d’anonymat et de protection entourant ces témoignages. S’il est constant que M. B ne s’est vu communiquer qu’une partie des 52 contributions d’agents recueillies par le ministre, annexée au rapport disciplinaire, les contributions qui ne lui ont pas été communiquées avant le conseil de discipline et qui ont été produites en première instance ne sauraient être regardées comme des procès-verbaux d’audition, soumis en tant que tels à l’obligation de communication à l’agent avant que ne soit prise une sanction disciplinaire, dès lors que ces contributions émanaient de personnes mentionnant ne pouvoir relater aucun comportement de l’intéressé, à charge comme à décharge, dont elles auraient été témoins. Dans ces circonstances particulières, M. B n’est pas fondé à soutenir que la procédure disciplinaire aurait été viciée du fait de la non communication de ces contributions avec le rapport disciplinaire.

9. Si M. B soutient également que les pièces de son dossier n’étaient pas numérotées ni classées sans discontinuité comme l’imposent les dispositions de l’article 18 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il ne l’établit pas par ses seules affirmations.

10. M. B reprend en appel le surplus de son argumentation de première instance relative à la communication incomplète de son dossier et le moyen tiré de ce qu’aucun témoignage recueilli pendant cette enquête n’émane d’agents affectés dans son service, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l’appréciation portée sur ces moyens par le tribunal. Par suite, il y a lieu d’adopter les motifs retenus à bon droit par les premiers juges pour les écarter.

11. Pas plus en appel qu’en première instance M. B n’établit que l’enquête administrative menée par l’administration à la suite du signalement de ses agissements aurait été partiale et insuffisante, dès lors qu’ainsi que l’ont relevé les premiers juges cette enquête a sollicité, de manière impartiale, l’ensemble des collègues de promotion de M. B pour les inviter à témoigner, à charge comme à décharge et le cas échéant avec la garantie de l’anonymat. La circonstance que l’intégralité des témoignages recueillis, dont il est constant qu’un certain nombre indiquait ne pas pouvoir se prononcer sur le comportement de M. B, n’a pas été produit devant le conseil de discipline est sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors qu’il est constant que tous les témoignages soumis à ce conseil se rapportaient aux faits faisant l’objet de sa saisine.

12. Enfin, si la décision par laquelle l’autorité investie du pouvoir hiérarchique rend publique la sanction qu’elle prononce a le caractère d’une sanction complémentaire, cette dernière n’a pas à faire l’objet d’une motivation spécifique, distincte de la motivation d’ensemble de la sanction principale. Cette motivation d’ensemble ne saurait être regardée, en l’espèce, comme insuffisante. Le moyen tiré de l’insuffisante motivation de la décision attaquée, en tant qu’elle prononce une sanction complémentaire de publication, doit dès lors être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :

13. Il appartient au juge de l’excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire sont matériellement établis, constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

14. M. B reprend en appel les moyens qu’il avait soulevés en première instance, tirés de ce que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis dans leur matérialité et qu’ils ne sont constitutifs ni de harcèlement sexuel, ni d’agissements sexistes au sens des articles 6 bis et 6 ter de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l’appréciation portée sur ces moyens par le Tribunal. Par suite, il y a lieu d’écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

15. Enfin, compte tenu de la gravité des faits commis par M. B ainsi que de leur caractère répété sur un court laps de temps alors qu’il était encore en situation de stage, la sanction de l’exclusion de service, assortie d’une publication, n’est pas disproportionnée.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d’injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C B et au ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Délibéré après l’audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :

— M. Jardin, président de chambre,

— Mme Hamon, présidente assesseure,

— Mme Jurin première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2022.

La rapporteure,

P. ALe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l’Europe et des affaires étrangères en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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