CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 08P03236

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Décision précédente : Tribunal administratif de Melun, 2 avril 2008, N° 071595
Précédents jurisprudentiels : 10 janvier 2006, fait appel du jugement n° 071595
C.E. 13 novembre 1987, Delle GONDRE, n° 68964
C.E. 22 février 1999 époux Z, n° 197243
C.E. 7 octobre 1991, DIOP, n° 100639
C.E. avis, 10 mai 1996, Mme E F, n° 177117
Douai, 25 juin 2008, préfet de la Seine-Maritime c/ Mme C D, n° 07DA01608

Texte intégral

08PA03236 Mme A Y
Audience du 12 octobre 2009
Lecture du 2 novembre 2009
CONCLUSIONS de Mme Anne SEULIN, Rapporteur public Mme A Y, de nationalité algérienne, âgée de 31 ans à la date de la décision du 31 août 2006 confirmant le précédent refus de titre de séjour qui lui a été opposé le 10 janvier 2006, fait appel du jugement n°071595 du 3 avril 2008 du tribunal administratif de Melun rejetant pour tardiveté sa requête dirigée contre la décision du 31 août 2006 au motif que cette décision étant purement confirmative de la précédente, elle n’a pas eu pour effet de rouvrir les délais de recours contentieux, qui étaient expirés à la date d’enregistrement de sa requête.
Nous vous proposerons de faire droit à la requête de Mme X.
Par une circulaire n°NOR/INT/K/06/00058/C du 13 juin 2006, le ministre de l’intérieur a invité les préfets à réexaminer, dans le cadre de leur pouvoir d’appréciation, la situation des ressortissants étrangers en situation irrégulière dont un enfant au moins est scolarisé, dont l’éloignement avait été suspendu jusqu’à la fin de l’année scolaire 2005/2006, en vue d’une admission au séjour à titre exceptionnel ou humanitaire.
Cette circulaire fixait un certain nombre de critères susceptibles d’être pris en compte, dont la résidence habituelle en France depuis au moins deux ans de l’un des parents, la scolarisation effective de l’un de leurs enfants y compris en classe de maternelle au moins depuis le mois de septembre 2005, l’absence de lien de cet enfant avec le pays dont il a la nationalité, la contribution effective des parents à son entretien et à son éducation et la réelle volonté d’intégration de ces familles, caractérisée par leur maîtrise du français, le suivi éducatif des enfants, le sérieux de leurs études et l’absence de trouble à l’ordre public.
Cette circulaire insistait sur le caractère ponctuel de ces dispositions d’admission exceptionnelle au séjour, l’obligation pour les familles de déposer leur demande dans les deux mois suivant la publication de cette circulaire et, pour l’administration, l’obligation de statuer dans un délai d’un mois suivant la réception de la demande, et, en tout état de cause, avant la rentrée scolaire de septembre 2006.
Ce texte ajoutait qu’à l’avenir, il appartiendrait aux préfets de statuer sur les demandes qui leur seraient présentées par des familles placées dans des situations comparables, dans le cadre du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), tel qu’il aurait été modifié par la loi relative à l’immigration et à l’intégration qui aurait été promulguée à cette date et dans le cadre de leur pouvoir discrétionnaire d’appréciation.
Et de fait, la loi promulguée le 24 juillet 2006 a instauré l’article L. 313-14 du CESEDA relatif à l’admission exceptionnelle au séjour des ressortissants étrangers, pour des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires.
C’est sur le fondement de cette circulaire que Mme Y a formé le 21 juillet 2006 une nouvelle demande de titre de séjour, dans le délai de deux mois qui lui était ainsi imparti. Elle avait auparavant formé une première demande de titre de séjour le 5 décembre 2005 sur le fondement de l’article 6 alinéa 5 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 et s’était vue opposer une décision de rejet le 10 janvier 2006. Mme Y estimait en effet remplir toutes les conditions de la circulaire, puisqu’elle vit en France depuis 2001, elle a donné naissance sur le territoire français à un enfant le 16 novembre 2002, son enfant est scolarisé en maternelle depuis le mois de septembre 2005 et elle exerce auprès de lui son rôle éducatif de parent.
Selon la jurisprudence, en l’absence de toute modification dans les circonstances de fait ou de droit depuis la précédente décision de refus opposé à un administré, la décision prise par l’administration est purement confirmative de la précédente et ne peut rouvrir les voies et délais de recours contentieux : C.E. 13 novembre 1987, Delle GONDRE, n°68964, publié au recueil. C’est cette jurisprudence qu’a appliqué le tribunal administratif de Melun dans le jugement attaqué.
Toutefois, alors même qu’il est de jurisprudence constante qu’une circulaire relative à la régularisation des étrangers est dépourvue de caractère réglementaire (voir par ex : C.E. 22 février 1999 époux Z, n°197243, publié aux tables), la circulaire du 13 juin 2006 n’en a pas moins appelé les étrangers à présenter une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement juridique spécifique tiré du pouvoir d’admission exceptionnelle au séjour à titre humanitaire ou exceptionnel détenu par le préfet, dans l’attente de la promulgation des nouvelles dispositions issues de la loi du 24 juillet 2006.
La demande de titre de séjour Mme X présentée à titre humanitaire ou exceptionnel le 21 juillet 2006, soit trois jours avant la promulgation de la loi, sur le fondement de la circulaire du 13 juin 2006, n’avait donc pas le même fondement juridique que sa précédente demande du 5 décembre 2005 par laquelle elle sollicitait l’application de l’article 6 alinéa 5 de la convention franco-algérienne, la circulaire ayant précisément pour objectif de permettre un nouvel examen de la situation de certains étrangers ne remplissant pas les conditions prévues par les textes.
Du fait de cette différence de fondement juridique, la demande du 21 juillet 2006 était donc nouvelle par rapport à la demande du 5 décembre 2005 (voir par ex : B Douai, 25 juin 2008, préfet de la Seine-Maritime c/ Mme C D, n°07DA01608).
Par ailleurs, la jurisprudence a consacré depuis longtemps le pouvoir de régularisation exceptionnelle du préfet, grâce auquel l’autorité administrative peut toujours décider de régulariser la situation d’un étranger au regard du droit au séjour, même lorsqu’il ne remplit pas les conditions posées par les textes. La Haute Assemblée a ainsi jugé que le préfet commettait une erreur de droit en excluant la possibilité, qui lui appartient, de régulariser la situation d’un étranger en se croyant tenu par les conditions posées par les textes : C.E. 7 octobre 1991, DIOP, n°100639, publié aux tables.
Ce pouvoir de régularisation est aussi applicable aux étrangers régis par une convention particulière, tels que les ressortissants algériens : C.E. avis, 10 mai 1996, Mme E F, n° 177117, publié aux tables. Dans cet avis, le Conseil d’Etat rappelle que l’autorité administrative, en l’absence de dispositions expresses s’y opposant, peut prendre à titre exceptionnel et sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, une mesure gracieuse favorable à l’intéressé justifiée par la situation particulière dans laquelle le demandeur établirait se trouver.
Dès lors, nous vous proposerons de considérer qu’en se bornant, par sa décision du 31 août 2006, à se référer à sa précédente décision du 10 janvier 2006, le préfet a commis une erreur de droit en estimant que la demande de Mme X n’était pas nouvelle par rapport à sa précédente demande du 5 décembre 2005 et en refusant d’exercer son pouvoir d’appréciation au regard des dispositions de la circulaire du 13 juin 2006.
C’est donc également à tort que les premiers juges ont considéré que la décision du 31 août 2006 était purement confirmative de la précédente et nous vous proposerons d’annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 3 avril 2008 et la décision du préfet du Val de Marne du 31 août 2006.
PCMNC à l’annulation du jugement du tribunal administratif de Melun du 3 avril 2008 et de la décision du préfet du Val-de-Marne du 31 août 2006, à ce que vous fassiez injonction au préfet du Val-de- Marne de réexaminer la situation de Mme X en tenant compte des possibilités d’admission exceptionnelle au séjour résultant désormais des dispositions de l’article L. 313-14 du CESEDA et à la condamnation de l’Etat à verser à Mme X la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.
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Textes cités dans la décision

  1. Loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006
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CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 08P03236