Cour Administrative d'Appel de Versailles, 1ère Chambre, 21 janvier 2010, 09VE00859, Inédit au recueil Lebon

  • Valeur ajoutée·
  • Plan comptable·
  • Taxe professionnelle·
  • Impôt·
  • Imposition·
  • Entreprise d'assurances·
  • Société d'assurances·
  • Cotisations·
  • Plan·
  • Procédures fiscales

Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 13 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d’appel de Versailles, présentée pour la société ZURICH VIE, dont le siège social est 96 rue Edouard Vaillant à Levallois-Perret (92300), par Me Mermillon ; elle demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0600374 en date du 6 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie pour l’année 2003 à concurrence de la somme de 24 597 euros au titre du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ;

2°) de prononcer la réduction sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat les intérêts moratoires et une somme de 3 049 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le législateur a entendu exclure de la détermination de la valeur ajoutée servant au plafonnement de la taxe professionnelle les plus-values résultant de la cession des immobilisations financières des sociétés d’assurances qui sont des produits exceptionnels et non des produits financiers ; qu’en substituant au plan comptable des assurances de 1969 celui adopté en 1995 le tribunal viole les principes de légalité et de sécurité juridique des contribuables ; que les plus-values sur immobilisations financières ou immobilières réalisées par les sociétés d’assurances n’entrent pas dans la détermination de la valeur ajoutée au sens de l’article 1647 B sexies du code général des impôts ; que la réalisation d’actifs financiers destinés à couvrir les engagements pris auprès des assurés par les compagnies d’assurances a un caractère exceptionnel ; qu’il s’agit de produits exceptionnels par application de la doctrine administrative ; que leur non prise en compte constitue une rupture d’égalité au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme entre les sociétés d’assurances et les autres sociétés ;

………………………………………………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu les décrets n° 94-481 et n° 94-482 du 8 juin 1994 et n° 95-153 du 7 février 1995 modifiant le plan comptable particulier à l’assurance et à la capitalisation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 7 janvier 2010 :

— le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

 – et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la société ZURICH VIE, société régie par le code des assurances, a présenté à l’administration fiscale une demande tendant à l’obtention d’un dégrèvement partiel de la cotisation de taxe professionnelle mise à sa charge pour l’année 2003 à concurrence de la somme de 24 597 euros au titre du plafonnement de cette cotisation en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l’année d’imposition ; que l’administration a estimé qu’il y avait lieu d’inclure dans le calcul de la valeur ajoutée produite par cette société les plus et moins-values de cession de valeurs mobilières et immobilières de placement constatées au cours de l’exercice 2003 et a rejeté la demande de la société ; que la société ZURICH VIE relève régulièrement appel du jugement rendu par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande tendant à la réduction sollicitée ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition 2003 : I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l’année au titre de laquelle l’imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l’année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. / Pour les impositions établies au titre de 1999 et des années suivantes, le taux de plafonnement est fixé à 3,5 % pour les entreprises dont le chiffre d’affaires de l’année au titre de laquelle le plafonnement est demandé est inférieur à 21 350 000 euros, à 3,8 % pour celles dont le chiffre d’affaires est compris entre 21 350 000 euros et 76 225 000 euros et à 4 % pour celles dont le chiffre d’affaires excède cette dernière limite. (…) / II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l’excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. (…) / 4. En ce qui concerne les entreprises d’assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature, la production est égale à la différence entre : / D’une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ; les produits accessoires ; les subventions d’exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des réassureurs ; les travaux faits par l’entreprise pour elle-même ; les provisions techniques au début de l’exercice ; / Et, d’autre part, les prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais financiers ; les provisions techniques à la fin de l’exercice (…)  ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d’éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l’une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l’année d’imposition concernée, soit en l’espèce le plan comptable applicable depuis le 1er janvier 1995 aux entreprises d’assurances ;

Considérant, en premier lieu, qu’il ne ressort pas des travaux préparatoires de la loi n° 80-10 du 10 janvier 1980 dont les dispositions de l’article 1647 B sexies sont issues, que le législateur ait entendu exclure les profits et pertes provenant de la réalisation de placements financiers pour le calcul de la valeur ajoutée résultant de l’application du plan comptable alors en vigueur ; qu’il suit de là qu’en précisant que ces mêmes profits et pertes sont comptabilisés en produits ou frais financiers, et en réservant la comptabilisation en tant que produits ou charges exceptionnelles, aux seuls produits et pertes résultant d’opérations qui par leur nature ont un caractère non récurrent ou étranger à l’exploitation, le nouveau plan comptable applicable aux entreprises d’assurance, alors même qu’il a été mis en vigueur de manière réglementaire à compter du 1er janvier 1995 et postérieurement aux dispositions légales du 10 janvier 1980, n’a pas donné des produits et charges qu’il convient de retenir pour le calcul de la valeur ajoutée, une définition contraire aux dispositions susmentionnées de l’article 1647 B sexies du code général des impôts ; que, par suite, la société ZURICH VIE n’est pas fondée à soutenir que l’administration fiscale aurait commis, en se référant au nouveau plan comptable, une erreur de droit en lui appliquant des dispositions de valeur réglementaire contraires à la loi ou qu’elle aurait méconnu le principe de sécurité juridique en appliquant la loi différemment ; qu’en conséquence les plus ou moins-values de cessions de valeurs mobilières et immobilières de placement réalisées par la société d’assurances requérante, eu égard à leur importance et à leur récurrence dans l’activité et l’exploitation de ladite société, ne sauraient être rattachées à des produits et frais exceptionnels ; qu’elles constituent pour cette société des produits et frais financiers qui doivent être inclus dans la production, telle qu’elle est définie par les dispositions précitées de l’article 1647 B sexiès II 4° du code général des impôts ; que c’est ainsi à bon droit que l’administration fiscale a refusé de déduire du montant de la valeur ajoutée produite au titre de l’années 2003 les plus ou moins-values réalisées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes  ; que la modification de règles du plan comptable ne saurait être regardée comme portant, par elle-même, atteinte au respect des biens au sens de l’article 1er de ce protocole ; que les décrets susvisés des 8 juin 1994 et 7 février 1995 portant approbation du nouveau plan comptable du secteur des assurances et de la capitalisation, qui ne comportent aucune disposition de nature fiscale, ne peuvent être regardés, contrairement à ce que soutient la société requérante, comme instituant des règles d’assiette de l’impôt relevant de la compétence du législateur en vertu des dispositions de l’article 34 de la Constitution ; que par suite, les gains nets constatés à l’occasion des cessions réalisées au cours de la période de référence devaient être pris en compte pour la détermination de la production de l’exercice, en application des dispositions précitées du 4 du II de l’article 1647 B sexies sans que la société ZURICH VIE puisse se prévaloir de ce que le plan comptable des sociétés d’assurances en vigueur avant 1995 prescrivait la comptabilisation des plus-values et moins-values de cession de valeurs mobilières dans les produits et charges exceptionnels ; qu’une telle application de la loi n’a méconnu ni les objectifs à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme, ni l’exigence de prévisibilité de la norme découlant des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que la société n’a pas davantage été victime d’une discrimination dès lors que le code des assurances devait s’appliquer à sa situation et qu’elle se trouvait dès lors placée dans une situation différente qui justifiait cette différence de traitement au regard des entreprises dont le placement de valeurs mobilières ou immobilières n’est pas une activité d’exploitation courante et récurrente ;

Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration  ; que le rejet, par l’administration fiscale, des réclamations présentées par la société requérante tendant au plafonnement de ses cotisations de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ne constituait pas un rehaussement d’impositions antérieures au sens des dispositions précitées et n’entrait, par suite, pas dans le champ d’application de ces dispositions ; qu’il suit de là que la société ZURICH VIE ne pouvait se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des doctrines administratives référencées BOI 6 E-6-96, D.adm 6 E 4333 n°25 et Doc.adm 6 E 4334 qu’elle invoque ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société ZURICH VIE n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au versement des intérêts moratoires :

Considérant que les intérêts dus au contribuable en vertu de l’article 208 du livre des procédures fiscales quand l’Etat est condamné à un dégrèvement d’impôt doivent, en l’application des dispositions de l’article R. 208-1 du même livre, être payés d’office en même temps que les sommes mentionnées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ; qu’il n’existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la requérante concernant lesdits intérêts ; que, dès lors, les conclusions tendant au versement par l’administration d’intérêts moratoires sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la société ZURICH VIE au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de la société ZURICH VIE est rejetée.

''

''

''

''

N° 09VE00859 2

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour Administrative d'Appel de Versailles, 1ère Chambre, 21 janvier 2010, 09VE00859, Inédit au recueil Lebon