CAA de VERSAILLES, 1ère chambre, 8 février 2022, 21VE01821, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 1re ch., 8 févr. 2022, n° 21VE01821
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 21VE01821
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Sur renvoi de : Conseil d'État, 17 juin 2021, N° 433319
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045160161

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sopra Steria Group a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction et la restitution des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2008 et 2009, procédant de la remise en cause, d’une part, de l’imputation de crédits d’impôt relatifs à des retenues à la source prélevées sur des prestations de service d’intégration facturées à des clients étrangers, d’autre part, de rappels de crédit d’impôt recherche sur des contrats de sous-traitance.

Par un jugement n° 1605259 du 13 avril 2017, le tribunal administratif de Montreuil a déchargé la société Sopra Steria Group des suppléments d’impôt sur les sociétés auxquels elle avait été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009 à raison de prestations de services techniques effectuées en Inde, ainsi que des majorations pour manquement délibéré, réduit son résultat imposable du montant correspondant aux retenues à la source prélevées sur des prestations de maintenance informatique réalisées en Grèce, au Maroc, en Tunisie, en Slovaquie, en Malaisie, au Cameroun, en Egypte, en Equateur, au Ghana, en Espagne, en Algérie et en Colombie, et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt nos 17VE01863, 17VE02491 du 4 juin 2019, la cour administrative d’appel de Versailles a, sur les appels croisés formés par la société Sopra Steria Group et par le ministre de l’action et des comptes publics, déchargé la société Sopra Steria Group des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre de ses exercices clos en 2008 et 2009 à raison, d’une part, de la remise en cause de l’imputation des retenues à la source afférentes à des prestations de services techniques effectuées au Cameroun et, d’autre part, de la déduction opérée par l’administration des sommes de 1 424 601 euros et 2 827 322 euros des bases de son crédit d’impôt recherche, et rejeté l’appel formé par le ministre de l’action et des comptes publics et le surplus des conclusions de la requête de la société Sopra Steria Group.

Par une décision n° 433319 du 18 juin 2021, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, saisi d’un pourvoi présenté par la société Sopra Steria Group, a annulé cet arrêt en tant qu’il rejette ses conclusions tendant, à titre principal, à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à raison des rectifications des crédits d’impôt recherche qu’elle avait déclarés au titre de ses exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, et renvoyé l’affaire, dans cette mesure, à la cour administrative d’appel de Versailles.

Seconde procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2017 et des mémoires complémentaires enregistrés les 1er août 2018, 14 janvier 2019, 1er septembre 2021 et 10 novembre 2021, la société Sopra Steria Group, représentée par Me Schmitt, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1° d’annuler le jugement attaqué en tant qu’il a rejeté le surplus de ses demandes ;

2° de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009 à raison des rectifications de crédits d’impôt recherche et des intérêts de retard correspondants, pour un montant total de 2 192 852 euros ;

3° de mettre à la charge de l’État la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – c’est à tort que l’administration fiscale a déduit des bases du crédit d’impôt recherche qu’elle a déclaré les sommes facturées à ses clients et non les sommes effectivement reçues ; l’erreur de droit ainsi commise prive de base légale l’ensemble des rectifications relatives au crédit d’impôt recherche des années 2008 et 2009 ;

 – la ligne 28 b de la déclaration 2069 A SD du crédit d’impôt recherche vise expressément les « sommes encaissées », ce qui constitue une prise de position formelle opposable à l’administration en vertu des dispositions de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; lui sont également opposables la réponse ministérielle publiée au Journal officiel du Sénat du 18 février 2016 p. 5356, et la notice d’accompagnement de l’entreprise dans sa demande de déclaration de dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche éditée par la direction générale des finances publiques en juillet 2014 ;

 –  les dépenses de recherche qu’elle a exposées pour la réalisation des contrats conclus avec les sociétés La Poste, Air France, SFR, DCNS et la SNECMA sont éligibles au crédit d’impôt recherche dès lors que ces contrats ne portaient pas sur la sous-traitance de travaux de recherche, que la réalisation des prestations était soumise à une obligation de résultat exclusive de la notion de recherche par nature aléatoire, qu’aucun transfert de propriété intellectuelle de résultats de travaux de recherche n’était stipulé, que les livrables devaient faire l’objet d’un contrôle de conformité à la réception et étaient assortis d’une clause de garantie des vices cachés, qu’étaient prévues des prestations complémentaires de maintenance des logiciels, de correction des anomalies et de maintien en condition opérationnelle du système, et que les activités de recherche et développement qu’elle a menées pour la réalisation des prestations l’ont été pour son propre compte et non dans le cadre d’une sous-traitance de travaux de recherche ;

 – le ministre n’est pas recevable à faire valoir pour la première fois, après plusieurs années de procédure, sans débat oral et contradictoire, que la réalité des travaux de recherche qu’elle a réalisés ne serait pas établie, alors que l’éligibilité de ses travaux n’a jamais été contestée par le service vérificateur.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique,

 – le rapport de Mme Dorion,

 – les conclusions de M. Met, rapporteur public,

 – et les observations de Me Schmitt et Me Paquet, pour la société Sopra Steria Group.

Considérant ce qui suit :

1. La société Sopra Group SA, devenue Sopra Steria Group SA, qui exerce une activité de conseil en systèmes et logiciels informatiques, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration a remis en cause, d’une part, l’imputation sur l’impôt sur les sociétés afférent à ces deux exercices, de crédits d’impôt correspondant aux montants de retenues à la source prélevées par la Grèce, le Maroc, la Tunisie, la Slovaquie, la Malaisie, le Cameroun, l’Egypte, l’Equateur, le Ghana, l’Espagne, l’Algérie et la Colombie sur des rémunérations perçues au titre d’une activité de fabrication et d’intégration de progiciels réalisée dans ces États et, d’autre part, le calcul des crédits d’impôt recherche qu’elle avait déclarés au titre des mêmes exercices. Sur le pourvoi formé par la société Sopra Steria Group contre l’arrêt du 4 juin 2019 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles l’a déchargée des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés mises à sa charge à raison, d’une part, de la remise en cause de l’imputation des retenues à la source afférentes aux seules prestations de services techniques effectuées au Cameroun et, d’autre part, de la déduction opérée par l’administration des sommes de 1 424 601 euros et 2 827 322 euros des bases de son crédit d’impôt recherche, en tant qu’il a rejeté le surplus des conclusions de sa requête, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt en tant seulement qu’il rejette les conclusions présentées à titre principal par la société Sopra Steria Group, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à raison des rectifications des crédits d’impôt recherche qu’elle avait déclarés au titre de ses exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, et renvoyé l’affaire, dans cette mesure, à la cour.

2. Aux termes de l’article L. 199 C du livre des procédures fiscales : « L’administration, ainsi que le contribuable dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités, peuvent faire valoir tout moyen nouveau, tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d’appel, jusqu’à la clôture de l’instruction. (…). » Il en résulte que l’administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l’imposition, à condition qu’une telle substitution n’ait pas pour effet de priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues par les textes. Par suite, la société Sopra Steria Group n’est pas fondée à soutenir que le motif soulevé pour la première fois en appel par l’administration fiscale, tiré de ce qu’il n’est pas établi que les dépenses qu’elle a déclarées au titre du crédit d’impôt recherche des exercices 2008 et 2009 se rapportent à des opérations de recherche et développement destinées à lever des verrous technologiques, qui ne la prive d’aucune garantie, ne serait pas recevable.

3. Aux termes de l’article 244 quater B du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : « I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d’après leur bénéfice réel (…) peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des dépenses de recherche qu’elles exposent au cours de l’année. (…). »

4. Pour justifier des dépenses qu’elle estime éligibles au crédit d’impôt recherche, la société Sopra Steria Group se borne à produire deux contrats-cadres conclus avec La Poste portant sur des « prestations d’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMOA), de conseil et de gouvernance de projet concernant le système d’information d’un projet d’offre de services sur Internet lancé par la Direction des activités Internet du courrier » et sur la « réalisation de prestations informatiques en mode » Centre de Service Externe « conclus avec la direction des achats du courrier, cinq bons de commande pour des prestations de maintenance, d’évolutions et d’astreinte pour les applications Unix d’Air France, un » contrat d’exécution de réalisation, d’intégration et de maintien en conditions opérationnelles du système « offres et facturation » conclu entre la société SFR et un groupement composé des sociétés Sopra Group et Cap Gemini, divers bons de commande et avenants émanant de la société DCNS pour des « briques LN-TDL-Services et LN Fusion Gemo » et des « évolutions OUA pour Monalisa » sans autre précision sur le contenu des prestations, trois ordres d’achat de la Snecma concernant divers projets et quelques factures, dont il ne ressort pas que, pour exécuter les prestations d’ingénierie ou de développement d’applications informatiques qui lui ont été commandées par les sociétés La Poste, Air France, SFR, DCNS et Snecma, elle ait réalisé des opérations de recherche et développement au sens des dispositions de l’article 244 quater B du code général des impôts. Les rappels de crédit d’impôt recherche opérés par l’administration fiscale au titre des années 2008 et 2009 sur les dépenses de recherche que la société Sopra Group a déclarées avoir exposées pour la réalisation des prestations commandées par ces donneurs d’ordre sont dès lors justifiés pour ce motif substitué, qui ne prive l’intéressée d’aucune garantie et qui est de nature à fonder les rectifications.

5. Il suit de là que le moyen tiré de ce que seules les sommes effectivement encaissées doivent être déduites de la base de calcul du crédit d’impôt recherche en application du III de l’article 244 quater B du code général des impôts est inopérant.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Sopra Steria Group n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et intérêts de retard auxquels elle a été assujetties au titre des exercices clos en 2008 et 2009, à raison de rappels de crédit d’impôt recherche. Il y a par suite lieu de rejeter le surplus restant en litige des conclusions de sa requête, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :


Article 1er : Les conclusions de la requête de la société Sopra Steria Group restant en litige sont rejetées.

N° 21VE01821 2

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