Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juillet 2010, 09-14.192, Publié au bulletin

  • Recours à l'assistance d'un expert-comptable·
  • Consultation des représentants du personnel·
  • Consultation du comité d'entreprise·
  • Existence d'un comité d'entreprise·
  • Recours à l'assistance d'un expert·
  • Plan de sauvegarde de l'emploi·
  • Contrat de travail, rupture·
  • Licenciement économique·
  • Licenciement collectif·
  • Projet de licenciement

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Dès lors qu’existe dans l’entreprise un comité d’entreprise, l’employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours doit réunir et consulter ce comité, qui peut recourir à l’assistance d’un expert-comptable, peu important que l’effectif de l’entreprise soit passé en dessous du seuil de cinquante salariés La mise en oeuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi est subordonnée à la condition d’effectif de cinquante salariés au moins, qui s’apprécie à la date de l’engagement de la procédure de licenciement, et non à l’existence d’un comité d’entreprise

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, statuant en référé, qu’à la fin de l’année 2008, les sociétés Ad Majoris et Ad Majoris holding ont mis en oeuvre une procédure de licenciement collectif concernant dix salariés au moins sur une période de 30 jours ; que l’effectif de l’entreprise étant passé en dessous du seuil de cinquante salariés depuis plusieurs mois, un litige est né sur les modalités de réunion et de consultation des représentants du personnel, sur la possibilité pour le comité d’entreprise de désigner un expert-comptable et sur l’obligation pour l’employeur d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi ; que les sociétés ont saisi la juridiction des référés ;

Sur les première et deuxième branches du moyen unique en ce qu’il est dirigé contre les dispositions de l’arrêt relatives à l’obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi :

Attendu que le comité d’entreprise fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande tendant à la mise en oeuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, alors, selon le moyen :

1°/ que la procédure de licenciement collectif prévue à l’article L. 1233-30 du code du travail, comme le droit pour le comité d’entreprise de recourir à un expert-comptable et l’obligation d’établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi ont vocation à s’appliquer à toutes les entreprises dotées d’un comité d’entreprise et ce, quel que soit leur effectif à la date à laquelle la procédure de licenciement est engagée ; qu’en affirmant l’inverse, la cour d’appel a violé les articles L. 1233-30, L. 1233-34 et L. 1233-61 du code du travail ;

2°/ qu’il résulte de l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969, tel que modifié par l’accord national interprofessionnel du 20 octobre 1986, que l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi s’applique dans les « entreprises assujetties à la législation sur les comités d’entreprise », ce qui renvoie nécessairement à toutes les entreprises qui sont dotées d’un comité d’entreprise et ce, quel que soit leur effectif au moment où la procédure de licenciement est engagée ; qu’en décidant l’inverse, la cour d’appel a violé l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969, tel que modifié par l’accord national interprofessionnel du 20 octobre 1986 ;

Mais attendu qu’ayant relevé que l’article L. 1233-61 du code du travail subordonnait la mise en oeuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi à la condition d’effectif de cinquante salariés au moins, qui s’apprécie à la date de l’engagement de la procédure de licenciement, et que l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969, modifié par accord du 20 octobre 1986, ne contenait aucune disposition plus favorable, la cour d’appel a statué à bon droit ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur la première branche du moyen unique, en ce qu’il est dirigé contre les dispositions de l’arrêt relatives à la procédure de consultation des représentants du personnel et à la désignation d’un expert-comptable :

Vu les articles L. 1233-28, L. 1233-29, L. 1233-30 et L. 1233-34 du code du travail ;

Attendu que pour juger que l’employeur était tenu de réunir et de consulter les délégués du personnel et non le comité d’entreprise et débouter ce dernier de sa demande tendant à la désignation d’un expert-comptable l’arrêt retient que l’obligation de consulter le comité d’entreprise et la possibilité pour ce dernier de recourir à l’assistance d’un expert-comptable ne s’imposent que dans les entreprises qui comptent plus de cinquante salariés ;

Attendu cependant, d’une part, que dès lors qu’existe dans l’entreprise un comité d’entreprise, l’employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours doit réunir et consulter ce comité, peu important que l’effectif de l’entreprise soit passé en dessous du seuil de cinquante salariés, d’autre part, que le comité d’entreprise peut recourir à l’assistance d’un expert-comptable dans les conditions prévues par l’article L. 1233-34 du code du travail ;

Qu’en statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il juge que l’employeur était tenu de réunir et consulter les délégués du personnel et non le comité d’entreprise et en ce qu’il déboute ce dernier de sa demande tendant à la désignation d’un expert-comptable, l’arrêt rendu le 20 février 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne les sociétés Ad Majoris, Ad Majoris holding et Meric et associés aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés Ad Majoris, Ad Majoris holding et Meric et associés à payer au comité d’entreprise de la société Ad Majoris la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour le comité d’entreprise de la société Ad Majoris.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR jugé que les sociétés AD MAJORIS SAS et AD MAJORIS HOLDING SAS avaient régulièrement engagé la procédure prévue à l’article L 1233-29 du Code du travail et d’AVOIR rejeté les demandes du comité d’entreprise tendant à la désignation d’un expert comptable et à la mise en oeuvre d’un plan de sauvetage de l’emploi ;

AUX MOTIFS QUE la possibilité légale pour le comité d’entreprise de recourir à l’assistance d’un expert-comptable n’est offerte que dans tes entreprises comptant plus de cinquante salariés dans lesquelles le licenciement pour motif économique de plus de neuf salariés est envisagé ; que de la même façon, l’obligation légale d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi ne concerne que les entreprises de plus de cinquante salariés où le licenciement pour motif économique de plus de neuf salariés est envisagé ; qu’aucun texte de loi n’impose la consultation du comité d’entreprise, n’offre au comité d’entreprise la latitude de recourir à l’assistance d’un expert-comptable et ne rend obligatoire l’établissement d’un plan de sauvegarde de remploi en cas de licenciement pour motif économique de plus de neuf salariés dans les entreprises qui comptent moins de cinquante salariés ; que la faculté de recourir à un expert-comptable est reconnue au comité d’entreprise sans qu’il y ait lieu de distinguer selon qu’il a été constitué en application des normes légales ou de dispositifs conventionnels. Mais cette faculté est subordonnée à la condition que le comité d’entreprise soit lui-même consulté et cette consultation n’est rendue obligatoire que dans les entreprises qui comptent un effectif supérieur à cinquante salariés ; que si la baisse des effectifs est telle que la condition de seuil requise pour la constitution d’un comité d’entreprise n’est plus remplie, le comité subsiste avec la même composition et les mêmes attributions, pour autant, l’employeur n’est tenu de le consulter que si l’effectif des salariés est supérieur à cinquante à la date du projet de licenciement ; est acquis aux débats et non contesté qu’à la date où la procédure de consultation du Comité d’entreprise de la SAS AD MAJORIS a été engagée sur le projet de licenciement de plus de neuf salariés, les sociétés comptaient moins de cinquante salariés ; que la loi n’offrait par conséquent pas au comité d’entreprise la possibilité de recourir à l’assistance d’un expert-comptable et ne contraignait pas l’employeur à établir un plan de sauvegarde de remploi ; que le fait pour la SAS AD MAJORIS d’avoir, le 4 décembre 2008, invité la « délégation du personnel au comité d’entreprise » à la réunion extraordinaire du 8 décembre 2008 et d’avoir repris cette terminologie dans la convocation à la réunion du 12 janvier 2009 n’est pas de nature à conférer au comité d’entreprise plus de droits qu’il n’en tient de la loi ou des conventions applicables ; qu’il est vain de soutenir que jusqu’à la recodification du code du travail, la loi ne fixait aucune condition d’effectif pour qu’un comité d’entreprise puisse se faire assister d’un expert-comptable rémunéré par l’employeur dès lors que les textes issus de la recodification sont entrés en vigueur le 1er mai 2008, soit antérieurement à l’engagement du projet de licenciement en cause ; que l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969 étendu par arrêté du 31 décembre 1986 stipule que dans les entreprises assujetties à la législation sur les comités d’entreprise, lorsque te projet de licenciement pour raisons économiques porte sur au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la direction doit soumettre au comité d’entreprise un plan social joint à la convocation à la réunion de consultation sur le projet ; que ce texte impose l’établissement d’un plan social aux entreprises astreintes à l’obligation de se doter d’un comité d’entreprise ; que l’article L. 2322-2 du code du travail ne rend la mise en place d’un comité d’entreprise obligatoire que si l’effectif dépasse cinquante salariés ; que n’étant pas assujetties à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise puisque leur effectif est inférieur à 50 salariés, les sociétés AD MAJORIS HOLDING SAS et AD MAJORIS SAS ne pas tenues de consulter le comité d’entreprise et d’établir un plan social ;

ALORS, D’UNE PART, QUE la procédure de licenciement collectif prévue à l’article L. 1233-30 du Code du travail, comme le droit pour le comité d’entreprise de recourir à un expert comptable et l’obligation d’établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi ont vocation à s’appliquer à toutes les entreprises dotées d’un comité d’entreprise et ce, quel que soit leur effectif à la date à laquelle la procédure de licenciement est engagée ; qu’en affirmant l’inverse, la Cour d’appel a violé les articles L. 1233-30, L. 1233-34 et L. 1233-61 du Code du travail ;

ALORS, D’AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QU’il résulte de l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969, tel que modifié par l’accord national interprofessionnel du 20 octobre 1986, que l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi s’applique dans les « entreprises assujetties à la législation sur les comités d’entreprise », ce qui renvoie nécessairement à toutes les entreprises qui sont dotées d’un comité d’entreprise et ce, quel que soit leur effectif au moment où la procédure de licenciement est engagée ; qu’en décidant l’inverse, la Cour d’appel a violé l’article 12 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969, tel que modifié par l’accord national interprofessionnel du 20 octobre 1986 ;

ALORS, ENFIN ET ENCORE SUBSIDIAIREMENT, QUE l’employeur est lié par la procédure qu’il décide d’engager ; qu’en l’espèce, il ressort des propres termes de l’arrêt attaqué que les sociétés AD MAJORIS HOLDING SAS et AD MAJORIS SAS qui disposaient d’une délégation unique de personnel et pouvaient donc convoquer les délégués du personnel ainsi que le prévoit l’article L. 1233-29 du Code du travail, avaient volontairement choisi de réunir le comité d’entreprise comme le prévoit l’article L. 1233-30 du Code du travail, ce dont il résultait qu’elles avaient fait une application volontaire de la procédure prévue à cet article et qu’étant ainsi liées par celle-ci, elles devaient la respecter jusqu’à son terme ; qu’en décidant l’inverse, la Cour d’appel a violé les articles 1233-30 du Code du travail et 1134 du Code civil.

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