Cour de cassation, Chambre sociale, 15 mai 2013, 12-16.018, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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www.cabinet-vanneau.fr · 4 mars 2019

Vous êtes victime des manquements de votre employeur ? Ne restez pas passif, agissez et prenez l'initiative de la rupture de votre contrat de travail ! La prise d'acte vous permet ainsi de quitter votre emploi, de rompre votre contrat et d'en imputer la responsabilité à votre employeur ! Mais, comment faire une prise d'acte ? Quelle est la procédure à suivre ? Quelles indemnités peut-on obtenir ? Quels sont les risques ? Je vous explique tout ! Tout d'abord, la prise d'acte c'est quoi ? La prise d'acte constitue, comme la résiliation judiciaire, un mode de rupture du contrat de …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 15 mai 2013, n° 12-16.018
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 12-16.018
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Toulouse, 25 janvier 2012
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000027430987
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:SO00874
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 26 janvier 2012), que M. X…, engagé le 18 février 2002 par l’association Santé au travail de l’Ariège, en qualité de médecin du travail, a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 24 mai 2010 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande tendant à ce que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail produise les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ que l’atteinte à la dignité du salarié constitue un manquement grave de l’employeur à ses obligations ; que l’employeur qui, questionné par un salarié en des termes qui n’excèdent nullement la liberté d’expression, après l’apposition, sur les lieux du travail, d’une affiche à caractère non professionnel, lui répond en termes excessifs, injurieux et diffamatoires, porte atteinte à la dignité de ce salarié et commet un manquement grave justifiant qu’il prenne acte de la rupture de son contrat de travail ; qu’en l’espèce, il ressort des propres énonciations de la cour d’appel qu’en réponse à une « interpellation » du salarié, dont elle n’a pas retenu qu’elle aurait été formulée en termes excessifs, sur l’utilité d’une affiche apposée sur les lieux du travail et constituant selon elle, l’exécution d’une initiative personnelle de l’employeur, le directeur de l’ASTA lui avait répondu en termes particulièrement violents, déplacés et injurieux, le traitant « d’occidental grassement nourri … confit dans ses certitudes », l’accusant, en termes grossièrement ironiques, d’être indifférent à la souffrance d’autrui, voire à la mort d’une concitoyenne, faute pour celle-ci de « l’avoir consulté avant de se rendre en Haïti », ainsi que de manque absolu de générosité ; que la cour d’appel n’a pu que constater que « la tenue de tels propos, déplacés dans le cadre d’une relation de travail, et témoignant d’un manque de respect, constituait indéniablement un manquement fautif de la part de l’employeur » ; qu’en dépouillant, cependant, de son caractère gravement fautif l’atteinte ainsi portée à la dignité du salarié aux termes de motifs inopérants pris du caractère conflictuel de la relation de travail et du caractère non professionnel de l’initiative prise par l’employeur en apposant une affichette sur le lieu de travail la cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1222-1 du code du travail, 1134 et 1184 du code civil ;

2°/ que, subsidiairement, lorsque le salarié établit à l’appui de la prise d’acte de la rupture un ensemble de faits imputables à l’employeur, il appartient au juge prud’homal de les examiner dans leur ensemble afin de déterminer s’ils justifient ou non la rupture du contrat de travail aux torts de celui-ci ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le salarié avait été victime, de la part de son employeur, d’une sanction pécuniaire prohibée, de propos déplacés, témoignant d’un manque de respect, mais également d’une ingérence de l’employeur dans son activité médicale et plus particulièrement le libellé de ses fiches d’inaptitude ; qu’en examinant séparément chacun de ces griefs avant de considérer, soit qu’il était insuffisamment grave, soit qu’il s’expliquait par le contexte, soit encore, pour l’ingérence dans l’indépendance médicale de M. X…, que ce fait « remontait à plusieurs mois avant la prise d’acte » (arrêt p. 8 in fine), quand il lui appartenait de rechercher si, dans leur ensemble, les faits établis par le salarié successivement victime d’ingérence dans l’exercice de son art, de sanction pécuniaire prohibée, et de propos portant atteinte à sa dignité n’étaient pas, dans leur ensemble, de nature à rendre impossible la poursuite du contrat de travail, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

Mais attendu qu’ayant énoncé que la retenue injustifiée opérée par l’employeur ne portait que sur 26, 51 euros, qu’il convenait de replacer les propos irrespectueux tenus par l’employeur dans un courriel adressé au salarié dans le contexte conflictuel qui les opposait alors, que ces propos avaient dépassé sa pensée et traduisaient son exaspération face aux multiples lettres adressées par le salarié sur divers sujets et que ce n’était qu’à une seule reprise et plusieurs mois avant la prise d’acte que l’employeur avait informé le salarié de la plainte émise par un adhérent concernant la formule utilisée dans un cas d’inaptitude, la cour d’appel, examinant les agissements dénoncés dans leur ensemble, a pu décider que la décision du salarié de prendre acte de la rupture de son contrat de travail n’était pas justifiée par un manquement de l’employeur à ses obligations d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Guy X… de sa demande d’annulation de la sanction disciplinaire notifiée par lettres des 13 et 16 mars 2009 lui retirant le droit d’assister aux réunions du Comité départemental de prévention des risques professionnels et de sa demande tendant à voir juger que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail produirait les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE " Selon l’article L. 1331-1 du Code du Travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu’il en résulte (…) que la sanction disciplinaire se caractérise par une décision prise par l’employeur, à raison d’un agissement considéré comme fautif de la part du salarié, et affectant la relation de travail ;

QUE par lettre en date du 6 mars 2009, l’ASTA a informé l’Inspection du Travail de son souhait de ne plus désigner le Docteur X… comme son représentant au sein du Comité Départemental de Prévention des Risques Professionnels ; qu’une telle désignation relève du pouvoir de direction de l’employeur qui est libre de choisir ses représentants, sauf à ce qu’il soit établi qu’il a abusivement usé de ce pouvoir ;

QU’en l’occurrence, les très nombreux mails échangés entre Monsieur X… et sa hiérarchie attestent d’importantes divergences de vue concernant les missions incombant au Médecin du Travail et le choix des priorités ; que dans ces conditions, l’ASTA pouvait légitimement ne plus souhaiter être représentée par un salarié dont elle ne partageait pas le point de vue, sans que l’attitude de ce dernier soit considérée par elle comme fauti (ve) " (arrêt p. 5 in fine, p. 6 alinéa 1er) ;

ALORS QUE constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu’en l’espèce, la lettre adressée par l’ASTA le 6 mars 2009 à l’inspection du travail, et dont copie a été délivrée au Docteur X… en réponse à sa demande d’explication sur l’interdiction qui lui avait été faite de participer à la réunion du Comité départemental de prévention des risques professionnels énonçait " … que le Docteur Guy X… est en butte en permanence aux décisions de la direction de l’ASTA (sic), qu’il en conteste régulièrement les directives et qu’il cristallise les mécontentements de nombre d’adhérents, voire de l’ensemble de ses collègues … que ce même médecin qui fut volontaire pour présenter les travaux de l’ASTA sur la prévention du risque routier professionnel est ensuite le premier à refuser d’effectuer les visites périodiques des chauffeurs de cars scolaires ou de camions de transport de marchandises malgré leur caractère obligatoire « , ajoutait : » Nous avons eu à de nombreuses reprises l’occasion de nous entretenir du cas particulier du Docteur X… (plainte pour harcèlement moral de la part d’une de ses collègues, plainte identique formulée au téléphone de la part d’une salariée de l’ASTA) sans que ses frasques semblent préoccuper qui que ce soit « et concluait » Pour toutes ces raisons, nous ne souhaitons pas que le Docteur X… soit amené à parler au nom de l’ASTA mais sommes tout à fait disposés à déléguer un autre médecin volontaire … » ; qu’ainsi la mesure de retrait d’une habilitation à représenter l’ASTA auprès du Comité Départemental des Risques Professionnels, expressément justifiée par l’employeur auprès du salarié lui-même et des tiers par un comportement d’insubordination, de refus d’exécuter ses obligations professionnelles et de harcèlement moral, jugé fautif et dénoncé comme tel – l’ASTA employant le qualificatif de « frasques » en déplorant l’absence de réaction de l’administration – constituait une sanction disciplinaire dont il appartenait à la Cour d’appel de rechercher si elle était ou non justifiée ; qu’en retenant à l’appui de sa décision que « par courrier du 6 mars 2009 l’ASTA a informé l’Inspection du Travail de son souhait de ne plus désigner le Docteur X… comme son représentant au sein du Comité Départemental de Prévention des Risques Professionnels », choix relevant de l’exercice « de son pouvoir de direction », et qu’elle " … pouvait légitimement ne plus souhaiter être représentée par un salarié dont elle ne partageait pas le point de vue, sans que l’attitude de ce dernier soit considérée par elle comme fauti (ve) " la Cour d’appel, qui a dénaturé le courrier du 6 mars 2009, a violé l’article 1134 du Code civil ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Guy X… de sa demande tendant à voir juger que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail produirait les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE " le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi et avec loyauté ; que le contrat de travail sans limitation de durée peut être rompu à l’initiative de l’une ou de l’autre des parties ; que la démission du salarié doit être claire, libre et sans équivoque ; que si la décision du salarié de rompre le contrat est liée à l’inexécution par l’employeur de ses obligations, la démission peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, la preuve de l’inexécution incombant alors au salarié ;

QU’en l’espèce, le courrier adressé par Monsieur X… le 13 mars 2010, par lequel il informe son employeur de son intention de démissionner et sollicite une dispense de son préavis, ne peut s’analyser en une prise d’acte alors que salarié n’a pas répondu à la demande de son employeur l’invitant à préciser clairement sa position et a poursuivi l’exécution de son contrat de travail ; que seul le courrier du 24 mai 2010 peut s’analyser comme une prise d’acte, Monsieur X… y écrivant : « mon courrier est une prise d’acte de la rupture du contrat de travail qui nous lie. Je prends acte de la rupture de mon contrat qui sera donc rompu à la date du 1er juin 2010 » ;

QUE Monsieur X… invoque plusieurs manquements imputables à son employeur et qu’il convient d’examiner ci-après ; qu’il invoque ainsi trois sanctions disciplinaires injustifiées ; que toutefois, ainsi qu’il a été vu précédemment, seule la retenue de 26, 51 euros constituait bien une telle sanction ;

QUE s’agissant des faits de harcèlement moral, il ressort des pièces versées aux débats qu’au mois de mai 2008, le Docteur Y… s’est plainte auprès du Président de l’ASTA du comportement de son collègue, le Docteur X…, le qualifiant d’anormal et s’apparentant à du harcèlement ; qu’en portant à la connaissance de Monsieur X… ce courrier et en lui demandant ses explications, l’ASTA n’a fait que respecter ses obligations, informant loyalement le salarié de la plainte émise à son encontre et lui permettant de se défendre ; qu’on ne voit donc pas quel est le manquement que l’on pourrait reprocher à l’association ; que de la même manière, l’ASTA justifie avoir reçu le 11 février 2010, soit postérieurement au jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes, une plainte de Madame Z…, secrétaire du Docteur X…, exposant ses difficultés récurrentes à travailler avec ce dernier, son stress et les répercussions sur sa santé et sollicitant un changement de poste au sein de l’ASTA où elle travaille depuis près de 30 ans ; que conformément à ses obligations légales, et notamment à son obligation de prévention, l’ASTA a immédiatement déchargé cette salariée du secrétariat du Docteur X… et a informé ce dernier de la plainte, le convoquant à deux entretiens successifs auxquels il ne s’est pas rendu ; que contrairement à ce que soutient Monsieur X…, cette affaire a eu une suite puisque le 15 avril 2010, il a été convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement ; qu’il est par ailleurs établi que la procédure de licenciement pour faute grave n’a été interrompue qu’en raison de son courrier de prise d’acte de la rupture de son contrat en date du 24 mai 2010 ; que dans ces conditions, on recherche vainement quel manquement à ses obligations contractuelles l’employeur aurait commis envers Monsieur X… ;

QUE Monsieur X… invoque par ailleurs le comportement déloyal du Directeur de l’association qui a adressé le 22 février 2010 aux membres du Conseil d’Administration un courrier le discréditant ; que l’examen de ce courrier montre qu’en effet le Directeur les a informés de la plainte de Madame A…, de ce que le Docteur X… en avait été avisé, de ce qu’il avait refusé la nouvelle assistante qui lui avait été attribuée et enfin de la décision rendue par le Conseil de Prud’hommes quelques jours plus tôt ; que ce faisant, l’association n’a pas fait preuve de déloyauté à l’égard du salarié, ce dernier ayant connaissance de l’ensemble des informations contenues dans ce courrier, et le Directeur de l’institution étant en droit d’informer les administrateurs de l’ASTA de tous événements susceptibles d’avoir une incidence sur son fonctionnement ;

QUE Monsieur X… se plaint encore des termes employés à son encontre par le Directeur de l’association dans un courrier du 17 février 2010 ; que ce courrier constituait la réponse faite à Monsieur X…, lequel avait interpellé le Directeur de l’association sur la présence d’une affiche dans la salle d’attente mentionnant que l’ASTA s’associait au « Rotary District 1700 » pour soutenir les sinistrés d’Haïti et appelant aux dons ;

QU’il n’est pas contestable, ni au demeurant contesté, que certains passages de ce courrier comportent des appréciations à connotation péjorative pour le salarié puisqu’il y est ainsi écrit : " Mais vous avez raison ; mieux vaut rester confit dans ses certitudes d’occidental grassement nourri plutôt que de tenter, par tous les moyens de venir en aide à ces sinistrés que par ailleurs nous ne connaissons pas, même si une appaméenne, Chrystel B…, était sous les décombres de l’Hôtel Montana au moment où j’ai pris la décision d’apposer cette affiche ; mais peut être qu’elle ne vous avait pas consulté avant de se rendre à Haïti, ce qui justifie à vos yeux que son cas ne puisse être pris en considération » ; que le courrier s’achève en outre sur la phrase suivante : « Mais heureusement le pire a été évité : comme vous n’avez rien donné vous n’aurez pas encombré votre conscience en vous demandant si l’argent aurait été mieux utilisé ailleurs » ;

QUE la tenue de tels propos, déplacés dans le cadre d’une relation de travail, et témoignant d’un manque de respect, constitue indéniablement un manquement fautif de la part de l’employeur ;

QUE toutefois, la Cour observe que ces propos doivent être replacés dans leur contexte ; qu’en effet, le salarié, en interpellant son employeur sur la raison de cette initiative, sur l’absence de concertation avec le personnel et notamment les médecins, et sur le choix de cette association humanitaire, intervient dans un domaine qui ne le concerne pas mais relève de la seule décision de son employeur qui n’a pas à obtenir une quelconque autorisation de ses salariés sur ce point ; que néanmoins, le Directeur de l’association, après avoir rappelé que l’affiche était présente dans les locaux depuis quinze jours, a fourni dans ce courrier toutes les explications demandées avant de porter les appréciations péjoratives ci-dessus décrites ; qu’il en résulte que dans le contexte particulièrement conflictuel qui oppose alors les parties, les propos du Directeur de l’association ont manifestement dépassé sa pensée et traduisent son exaspération face aux multiples courriers adressés par Monsieur X… sur divers sujets ;

QU’enfin, Monsieur X… se plaint de ce que l’un de ses diagnostics médicaux a été remis en cause ; qu’à cet égard, il ressort des courriers versés aux débats qu’au mois de septembre 2009, l’association a informé le Docteur X… de la plainte émise par un adhérent concernant la formule utilisée par lui dans un cas d’inaptitude, considérant celle-ci comme préjudiciable à sa réputation, et que des discussions ont eu lieu à ce sujet entre les parties ; qu’il est exact que l’employeur lui écrivait le 26 octobre 2009 que la formule employée était perçue comme infâmante par nombre des adhérents et lui paraissait non conforme au code du travail ; que néanmoins ces faits remontent à plusieurs mois avant la prise d’acte et aucun élément ne permet de dire que postérieurement à cet incident l’employeur se soit ingéré d’une quelconque manière dans ce domaine qui relève de la seule responsabilité du médecin ; que dans ces conditions, cet événement ne saurait légitimer la prise d’acte ;

QU’en définitive, seule la retenue injustifiée d’une somme de 26, 51 euros ainsi que la teneur de propos déplacés dans un courrier électronique sont constitutifs d’un manquement de l’employeur et les circonstances particulières dans lesquelles ces manquements sont intervenus, ci-dessus explicitées, ne permettent pas de les considérer comme étant d’une gravité suffisante pour justifier l’imputabilité de la rupture à l’employeur ; qu’en conséquence, Monsieur X… doit être débouté de sa demande et la prise d’acte constitue une démission (…) " (arrêt p. 6 à 8, p. 9 alinéas 1 et 2) ;

1°) ALORS QUE l’atteinte à la dignité du salarié constitue un manquement grave de l’employeur à ses obligations ; que l’employeur qui, questionné par un salarié en des termes qui n’excèdent nullement la liberté d’expression, après l’apposition, sur les lieux du travail, d’une affiche à caractère non professionnel, lui répond en termes excessifs, injurieux et diffamatoires, porte atteinte à la dignité de ce salarié et commet un manquement grave justifiant qu’il prenne acte de la rupture de son contrat de travail ; qu’en l’espèce, il ressort des propres énonciations de la Cour d’appel qu’en réponse à une « interpellation » du salarié, dont elle n’a pas retenu qu’elle aurait été formulée en termes excessifs, sur l’utilité d’une affiche apposée sur les lieux du travail et constituant selon elle, l’exécution d’une initiative personnelle de l’employeur, le directeur de l’ASTA lui avait répondu en termes particulièrement violents, déplacés et injurieux, le traitant " d’occidental grassement nourri … confit dans ses certitudes « , l’accusant, en termes grossièrement ironiques, d’être indifférent à la souffrance d’autrui, voire à la mort d’une concitoyenne, faute pour celle-ci de » l’avoir consulté avant de se rendre en Haïti ", ainsi que de manque absolu de générosité ; que la Cour d’appel n’a pu que constater que « la tenue de tels propos, déplacés dans le cadre d’une relation de travail, et témoignant d’un manque de respect, constituait indéniablement un manquement fautif de la part de l’employeur » ; qu’en dépouillant cependant de son caractère gravement fautif l’atteinte ainsi portée à la dignité du salarié aux termes de motifs inopérants pris du caractère conflictuel de la relation de travail et du caractère non professionnel de l’initiative prise par l’employeur en apposant une affichette sur le lieu de travail la Cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1222-1 du Code du travail, 1134 et 1184 du Code civil ;

2°) ALORS subsidiairement QUE lorsque le salarié établit à l’appui de la prise d’acte de la rupture un ensemble de faits imputables à l’employeur, il appartient au juge prud’homal de les examiner dans leur ensemble afin de déterminer s’ils justifient ou non la rupture du contrat de travail aux torts de celui-ci ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel a constaté que le salarié avait été victime, de la part de son employeur, d’une sanction pécuniaire prohibée, de propos déplacés, témoignant d’un manque de respect, mais également d’une ingérence de l’employeur dans son activité médicale et plus particulièrement le libellé de ses fiches d’inaptitude ; qu’en examinant séparément chacun de ces griefs avant de considérer, soit qu’il était insuffisamment grave, soit qu’il s’expliquait par le contexte, soit encore – pour l’ingérence dans l’indépendance médicale du Docteur X… – que ce fait « remontait à plusieurs mois avant la prise d’acte » (arrêt p. 8 in fine), quand il lui appartenait de rechercher si, dans leur ensemble, les faits établis par le salarié successivement victime d’ingérence dans l’exercice de son art, de sanction pécuniaire prohibée, et de propos portant atteinte à sa dignité n’étaient pas, dans leur ensemble, de nature à rendre impossible la poursuite du contrat de travail, la Cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés.

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