Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 mai 2014, 13-17.200, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Aurélie Ballot-léna · Revue Générale du Droit

1. Le droit civil est incontestablement, en droit français, une source du droit des affaires : si la pratique des affaires a pu être à l'origine d'instruments juridiques originaux1, les opérateurs, le législateur et la jurisprudence ont puisé dans le droit civil les ressources nécessaires à la conception et à l'encadrement des opérations commerciales. Les règles générales du droit des obligations – droit des contrats comme droit de la responsabilité civile – sont notamment utilisées pour encadrer, c'est-à-dire fixer un cadre, et contrôler les activités économiques. Cela était vrai hier ; …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 20 mai 2014, n° 13-17.200
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 13-17.200
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 20 mars 2013
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000028979850
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2014:CO00507
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué rendu en matière de référé, que la société Kaspersky Lab France (la société Kaspersky) développe et commercialise notamment sur internet des logiciels antivirus; que la société Eptimum a notamment pour activité la distribution dématérialisée de logiciels aux entreprises et aux particuliers ; que reprochant à cette dernière d’avoir suscité une confusion entre les sites des deux sociétés par l’enregistrement de la marque Kaspersky en mot-clé sur le service Adwords du moteur de recherche Google, et de distribuer ses nouveaux produits à bas prix en utilisant des clés d’activation de logiciels correspondant aux versions d’années antérieures, récupérées auprès de grossistes, la société Kaspersky l’a assignée en référé en concurrence déloyale ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu que la société Eptimum fait grief à l’arrêt d’avoir accueilli la demande de la société Kaspersky, alors, selon le moyen :

1°/ que le distributeur bénéficie d’un droit d’usage de la marque de son fournisseur sur internet, dès lors qu’il n’y a pas de risque de confusion ; que le risque de confusion ne peut en conséquence découler de la seule mention sur son site internet par le distributeur de la marque qu’il commercialise, ni même de son usage dans son nom de domaine ou dans son adresse url ; qu’un tel usage est en effet nécessaire pour que l’internaute puisse être dirigé, notamment, vers le site du distributeur ; qu’en se bornant à relever, pour retenir l’existence d’un risque de confusion et faire interdiction à la société Eptimum, d’utiliser, reproduire ou imiter la dénomination Kaspersky dans son nom de domaine et sur l’adresse url de ses sites internet, que le site de la société Eptimum apparaissait en réponse à la requête Kaspersky, que la dénomination Kaspersky était utilisée par la société Eptimum à titre de mot clé ainsi que dans le titre de son annonce commerciale et dans l’adresse url de son site internet, ce qui serait de nature à induire en erreur l’internaute moyennement attentif, sans relever l’existence de mentions tendant fautivement à induire l’internaute en erreur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil, ensemble l’article 809 du code de procédure civile ;

2°/ que la société Eptimum faisait valoir dans ses conclusions qu’elle commercialisait les produits de différents éditeurs, sous la marque «entelechargement.com», et que tout risque de confusion était en outre écarté en raison de la présence de son logo sur la page d’accueil de son site internet, tandis que le site de la société Kapersky présentait quant à lui la mention «officiel» et le logo TM (trade mark) signifiant que le site appartenait au propriétaire de la marque ; qu’elle en déduisait qu’elle se bornait à user de son droit d’utiliser la marque Kaspersky pour distribuer ses produits, sans qu’une telle utilisation puisse entraîner une confusion dans l’esprit du public ; qu’en faisant droit cependant à la demande d’interdiction de cette utilisation formée par la société Kaspersky, sans répondre à ce moyen de nature à établir le caractère parfaitement licite de l’utilisation par la société Eptimum de la dénomination Kaspersky, et l’absence de risque de confusion, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de motifs et méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’après avoir relevé que la société utilisait la dénomination Kaspersky comme mot-clé dans un moteur de recherche, dans le titre d’une annonce commerciale et dans l’adresse Url du site internet, l’arrêt constate que le moteur de recherche Google interrogé à l’aide du mot-clé Kaspersky permet d’accéder à une page de résultat affichant une annonce publicitaire renvoyant vers le site internet de la société Eptimum intitulé « Kaspersky.entelechargement.com » et que le moteur de recherche Bing interrogé avec ce même mot-clé affiche pour résultats, en première position, l’annonce publicitaire de la société Eptimum "Kaspersky Antivirus 2012. Teléchargement rapide et immédiat ! La protection optimale pour PC. Kaspersky.entelechargement.com« , suivi de celle de la société Kaspersky »Kaspersky TM Site officiel, Kaspersky l’antivirus de référence.téléchargez le dès maintenant! Boutique Kaspersky.FR" ; qu’il retient enfin que la société Eptimum a sciemment trompé ses clients en leur cachant que l’activation des logiciels 2012 puis 2013 se faisait au moyen d’une clé 2011 ou 2012, l’année d’édition des logiciels ayant été effacée sur l’emballage des produits, et en leur laissant croire à des ventes promotionnelles « des nouvelles gammes », les affirmations de la société selon lesquelles le service fourni serait le même, quelque soit le millésime, étant formellement démenties par les pièces au débat qui mettent au contraire en évidence les différences entre les fonctions disponibles sur les versions successives des logiciels en cause; qu’en l’état de ces constatations et appréciations souveraines faisant ressortir l’existence de pratiques déloyales dont résultait un risque de confusion sur l’origine des produits commercialisés par les deux sociétés, constitutif d’un trouble manifestement illicite, la cour d’appel qui n’était pas tenue de suivre la société Eptimum dans le détail de son argumentation, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et sur le moyen unique pris en sa troisième branche en ce qu’il fait grief à l’arrêt d’avoir interdit à la société Eptimum, sous astreinte, d’utiliser, reproduire, ou imiter sous toutes ses formes la dénomination Kaspersky dans son nom de domaine ainsi que l’adresse Url de ses sites internet, et d’en enlever toute reproduction altérée ou modifiée des visuels des boîtes de logiciels Kaspersky :

Attendu que les motifs critiqués ne fondent pas le chef du dispositif attaqué ; que le moyen est irrecevable ;

Mais sur le moyen pris en cette même branche en ce qu’il fait grief à l’arrêt d’avoir ordonné à la société Eptimum de modifier l’ergonomie et les codes couleurs des pages internet de tout site lui appartenant :

Vu l’article 809 du code de procédure civile ;

Attendu que pour accueillir la demande, l’arrêt retient que la société Eptimum a, depuis l’ordonnance entreprise, modifié les codes couleurs des coffrets offerts à la vente ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans caractériser en quoi les codes couleurs des sites de la société Eptimum étaient identiques ou similaires à ceux qui étaient utilisés par la société Kaspersky sur ses propres sites, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a ordonné à la société Eptimum sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de l’arrêt, de modifier pour l’avenir l’ergonomie et les codes couleurs des pages du site internet www.entelechargement.com tout site lui appartenant, consacrées à la vente de produits Kaspersky afin d’empêcher tout risque de confusion avec la boutique en ligne de la société Kaspersky, l’arrêt rendu le 21 mars 2013, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Kaspersky aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Eptimum

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir fait interdiction à la société Eptimum, sous astreinte, d’utiliser, reproduire, ou imiter sous toutes ses formes la dénomination Kaspersky dans son nom de domaine ainsi que l’adresse Url de ses sites internet, d’avoir ordonné à la société Eptimum de modifier l’ergonomie et les codes couleurs des pages internet de tout site lui appartenant, et d’en enlever toute reproduction altérée ou modifiée des visuels des boîtes de logiciels Kaspersky ;

AUX MOTIFS QUE la société Eptimum a fait l’acquisition du mot clé Kaspersky ce qui lui permet d’apparaître parmi les liens sponsorisés juste après le site officiel Kaspersky en réponse à la requête Kaspersky, ainsi qu’il ressort d’un procès-verbal de constat d’huissier ; que la société Eptimum reproduit en outre dans son lien url publié via le moteur de recherche Google la dénomination Kaspersky ; que les parties n’étant pas parvenues à un accord sur les conditions permettant à la société Eptimum de devenir un distributeur officiel de Kaspersky, celle-ci a fait le choix de s’approvisionner auprès d’un grossiste auquel elle achète à bas prix des logiciels vendus en boîte ; qu’elle utilise les clés d’activation 2011 pour télécharger des antivirus 2012 qu’elle revend avec une décote de l’ordre de 30 % et utilise désormais les clés d’activation 2012 pour télécharger des antivirus 2013 ; que cette revente d’accompagne d’un reconditionnement des antivirus censés être distribués dans leurs boîtes et non sur internet et d’une modification de l’emballage particulièrement en ce qu’il ne fait plus référence à l’année d’édition ; que c’est à bon droit que la société Kaspersky dénonce le caractère manifestement déloyal des ventes ainsi pratiquées par la société Eptimum grâce au détournement de clés d’activation pour télécharger des antivirus 2012 désormais 2013, ce sans son autorisation, alors qu’il s’agit de deux modes de distribution distincts reposant chacun sur un modèle économique et technique différent ; que le fait de pratiquer des prix anormalement bas en s’appuyant sur un acte illicite constitue un acte de concurrence déloyale ; que ce comportement est d’autant plus déloyal qu’il s’agit d’une pratique trompeuse au sens des articles L.120-1 et suivants du code de la consommation ; qu’en effet la société Eptimum prétend vendre la nouvelle gamme Kaspersky 2013 en faisant croire à une offre promotionnelle alors qu’elle commercialise à prix cassés des clés d’activation d’années antérieures acquises via des circuits détournés dont elle ne mentionne pas l’origine en prenant même soin d’effacer l’année d’édition et d’autre part en annonçant un prix réduit par rapport à un tarif de référence qu’elle n’a jamais pratiqué ; que le fait de ne pas faire figurer sur l’emballage des produits l’année de référence est contraire aux dispositions de l’article L. 121-1 du code de la consommation ; qu’en cachant sciemment à ses clients que l’activation des logiciels 2012 et 2013 se fait via une clé 2011 ou 2012, la société Eptimum trompe le consommateur alors que le recours à une clé d’une année antérieure est de nature à générer des difficultés ce qui découle clairement des déclarations d’un certain nombre d’internautes versées aux débats ; que la société Kaspersky produit un procès-verbal de constat d’huissier qui établit que les fonctions disponibles sur les versions 2011 / 2012 et 2013 des antivirus Kaspersky sont différentes ; qu’une pratique commerciale est trompeuse lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou un service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent ; que la société Kaspersky dénonce, dur fait de l’utilisation de sa marque, un risque de confusion entre le site de sa boutique officielle Kaspersky : boutique.kaspersky.fr et le site d’Eptimum : Kaspersky.Entelechargement.com, dès lors que les deux sociétés interviennent dans le même secteur d’activité, et ce même si depuis l’ordonnance entreprise la société Eptimum a modifié les codes couleur des coffrets offerts à la vente ; que le site de la société Eptimum apparaît non seulement en réponse à la requête Kaspersky mais aussi que la dénomination Kaspersky est utilisée par la société Eptimum à titre de mot clé ainsi que dans le titre de son annonce commerciale «antivirus en promotion» et dans l’adresse url de son site internet ; que ces éléments sont manifestement de nature à induire en erreur l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif, qui croyant légitimement qu’il se trouve sur le site officiel de la société Kaspersky achètera d’autant plus facilement l’antivirus de la société Eptimum d’un prix inférieur de 30 %, et constituent un détournement déloyal de clientèle ; qu’enfin la confusion créée et entretenue par la société Eptimum lui permet de bénéficier des investissements publicitaires et commerciaux réalisés par le titulaire de la marque ; qu’il ressort de l’ensemble de ces éléments avec l’évidence requise en référé que les agissements de la société Eptimum sont fautifs ; qu’ils s’analysent comme des actes concurrence déloyale et parasitaire préjudiciables à la société Kaspersky et constituent un trouble manifestement illicite qu’il appartient au juge des référés de faire cesser ;

1°/ ALORS QUE le distributeur bénéficie d’un droit d’usage de la marque de son fournisseur sur internet, dès lors qu’il n’y a pas de risque de confusion ; que le risque de confusion ne peut en conséquence découler de la seule mention sur son site internet par le distributeur de la marque qu’il commercialise, ni même de son usage dans son nom de domaine ou dans son adresse url ; qu’un tel usage est en effet nécessaire pour que l’internaute puisse être dirigé, notamment, vers le site du distributeur ; qu’en se bornant à relever, pour retenir l’existence d’un risque de confusion et faire interdiction à la société Eptimum, d’utiliser, reproduire ou imiter la dénomination Kaspersky dans son nom de domaine et sur l’adresse url de ses sites internet, que le site de la société Eptimum apparaissait en réponse à la requête Kaspersky, que la dénomination Kaspersky était utilisée par la société Eptimum à titre de mot clé ainsi que dans le titre de son annonce commerciale et dans l’adresse url de son site internet, ce qui serait de nature à induire en erreur l’internaute moyennement attentif, sans relever l’existence de mentions tendant fautivement à induire l’internaute en erreur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil, ensemble l’article 809 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS QUE la société Eptimum faisait valoir dans ses conclusions qu’elle commercialisait les produits de différents éditeurs, sous la marque «entelechargement.com», et que tout risque de confusion était en outre écarté en raison de la présence de son logo sur la page d’accueil de son site internet, tandis que le site de la société Kapersky présentait quant à lui la mention «officiel» et le logo TM (trade mark) signifiant que le site appartenait au propriétaire de la marque ; qu’elle en déduisait qu’elle se bornait à user de son droit d’utiliser la marque Kaspersky pour distribuer ses produits, sans qu’une telle utilisation puisse entraîner une confusion dans l’esprit du public ; qu’en faisant droit cependant à la demande d’interdiction de cette utilisation formée par la société Kaspersky, sans répondre à ce moyen de nature à établir le caractère parfaitement licite de l’utilisation par la société Eptimum de la dénomination Kaspersky, et l’absence de risque de confusion, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de motifs et méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

3°/ ALORS QUE la cour d’appel a constaté que la société Eptimum avait, depuis l’ordonnance entreprise, et même si celle-ci avait débouté la société Kaspersky de l’ensemble de ses demandes, modifié les codes couleur des coffrets offerts à la vente ; qu’en décidant cependant que les agissements de la société Eptimum étaient fautifs et entretenaient la confusion entre les sites des sociétés Eptimum et Kaspersky, et en ordonnant à la société Eptimum de modifier pour l’avenir l’ergonomie et les codes couleur des pages de tout site internet lui appartenant, sans énoncer aucun motif de nature à établir que les codes couleur des sites de la société Eptimum étaient identiques ou similaires à ceux qui étaient utilisés par la société Kaspersky sur ses propres sites, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 809 du code de procédure civile.

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