Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 mai 2017, 16-11.147, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Lorsque l’erreur qui affecte le taux effectif global mentionné dans le contrat de prêt est inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation, la clause d’intérêts conventionnels du contrat de prêt n’est pas nulle

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

COMM.

LG

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 18 mai 2017

Rejet

Mme X…, président

Arrêt n° 811 F-P+B+I

Pourvoi n° X 16-11.147

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Jesylac, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 29 octobre 2015 par la cour d’appel d’Angers (chambre A commerciale), dans le litige l’opposant à la société Banque populaire de l’Ouest (BPO), dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 19 avril 2017, où étaient présents : Mme X…, président, M. Y…, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Y…, conseiller, les observations de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de la société Jesylac, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire de l’Ouest, l’avis de Mme Z…, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le second moyen :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Angers, 29 octobre 2015), que la société Banque populaire de l’Ouest (la banque) a, les 23 mai et 24 septembre 2007, consenti à la société Jesylac deux prêts professionnels ; que, par acte du 18 septembre 2012, la société Jesylac a assigné la banque en nullité de la clause d’intérêt conventionnel pour erreur du taux effectif global mentionnée dans les contrats de prêts ainsi conclus ;

Attendu que la société Jesylac fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes tendant à voir constater le caractère erroné du taux effectif global annoncé dans le second prêt et substituer, à compter de la date de ce prêt, le taux de l’intérêt légal au taux conventionnel alors, selon le moyen, que l’article R. 313-1 du code de la consommation qui, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-928 du 10 juin 2002, applicable en la cause, dispose que le rapport, entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire, utilisé pour le calcul du taux effectif global, est calculé, le cas échéant, avec une précision d’au moins une décimale, a pour objet, non pas d’édicter une marge d’erreur admissible, mais de déterminer le degré de précision dans l’expression du dit taux et les modalités d’application d’un chiffre arrondi ; que la cour d’appel en énonçant, pour débouter la société Jesylac de sa demande en substitution du taux de l’intérêt légal au taux d’intérêt conventionnel, que l’organisme bancaire bénéficiait, aux termes de cet article, d’un seuil de tolérance d’une décimale et que l’erreur de taux était inférieure à celui-ci et en opposant ainsi à la société Jesylac l’absence d’effet de l’erreur, a violé le texte précité ;

Mais attendu qu’ayant relevé que l’écart entre le taux effectif global de 5,672 % l’an mentionné dans le contrat de prêt et le produit du taux de période, non contesté, par le nombre d’échéances de remboursement dans l’année, 5,743 %, était inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation, c’est à bon droit que la cour d’appel a rejeté la demande d’annulation de la clause d’intérêts conventionnels du contrat de prêt ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Jesylac aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Banque populaire de l’Ouest la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour la société Jesylac

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société Jesylac fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir déclarée irrecevable en ses demandes relatives au prêt de 100.000 euros ;

AUX MOTIFS QUE la demande formée par la société Jesylac tend, au visa des articles 1304 et 1907 du code civil, et L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 1er et 4ème alinéas du code de la consommation, à voir substituer le taux légal au taux contractuel mentionné dans l’acte de prêt, motif pris, pour les deux actes, du caractère erroné du taux effectif global ; qu’une telle demande est assujettie au délai prescription de l’article 1304 du code civil en application duquel l’action en annulation de la stipulation de l’intérêt conventionnel se prescrit par cinq ans ; que dans le cas où le prêt a été contracté par l’emprunteur pour les besoins de son activité professionnelle, la prescription court à compter de la date de la convention de prêt qui constitue la date à laquelle l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître le vice affectant le taux effectif global (cf pour des exemples, les arrêts de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 10 juin 2008 n° de pourvoi 06-19.452 et du 3 décembre 2013 n° de pourvoi 12-23.976) ; qu’en l’espèce il est constant que la société Jesylac a contracté l’emprunt litigieux pour les besoins de son activité professionnelle ; que le point de départ du délai de prescription a donc commencé à courir à la date du prêt, soit à compter du 23 mai 2007 pour venir expirer le 23 mai 2012, aucun acte interruptif de prescription n’étant invoqué ; que le délai de prescription était donc expiré lorsque la société Jesylac a saisi le tribunal de commerce de Laval par l’assignation du 18 septembre 2012 ;

1°) ALORS QUE la prescription de l’action en nullité de la stipulation de l’intérêt conventionnel engagée par un emprunteur, qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle, court à compter du jour où il a eu connaissance de l’erreur affectant le taux effectif global ; que la cour d’appel, en énonçant, pour déclarer la société Jesylac irrecevable en ses demandes, que le point de départ de la prescription était la date de signature du prêt, a violé les articles 1304 et 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation ;

2°) ALORS QU’en tout état de cause, en se bornant, pour déclarer la société Jesylac irrecevable en ses demandes, à énoncer que le point de départ de la prescription était la date de signature du prêt, sans vérifier, ainsi qu’elle y était invitée, si l’emprunteur était en mesure de déceler par lui-même, à la lecture de l’acte de prêt, l’erreur affectant le taux effectif global, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1304 et 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation.

SECOND MOYEN DE CASSATION

La société Jesylac fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir déboutée de ses demandes tendant à voir constater le caractère erroné du taux effectif global annoncé dans le prêt de 40.000 euros, et substituer, à compter de la date de ce prêt, le taux de l’intérêt légal au taux conventionnel ;

AUX MOTIFS QU’au soutien de sa demande de substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel, l’intimée fait valoir que le taux effectif global de 5,672 % l’an mentionné dans le contrat de prêt professionnel qu’elle verse aux débats (sa pièce 4), est erroné ; qu’il lui appartient d’en rapporter la preuve ; que le crédit litigieux a été consenti en septembre 2007 ; que c’est donc au regard des dispositions légales et réglementaires applicables en septembre 2007 que doit s’apprécier l’éventuel caractère erroné du taux effectif global visé dans le contrat ; que l’article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction alors applicable telle qu’issue du décret du 10 juin 2002 disposait : « Sauf pour les opérations de crédit mentionnées au 3º de l’article L. 311-3 et à l’article L. 312-2 du présent code pour lesquelles le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, le taux effectif global d’un prêt est un taux annuel, à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires et calculé selon la méthode d’équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent code. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l’emprunteur. Le taux de période est calculé actuariellement, à partir d’une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l’emprunteur. Il assure, selon la méthode des intérêts composés, l’égalité entre, d’une part, les sommes prêtées et, d’autre part, tous les versements dus par l’emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers, ces éléments étant, le cas échéant, estimés. Lorsque la périodicité des versements est irrégulière, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements. Le plus petit intervalle de calcul ne peut cependant être inférieur à un mois. Pour les opérations mentionnées au 3º de l’article L. 311-3 et à l’article L. 312-2, lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre que annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire. Le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d’au moins une décimale » ; que précision faite que les prêts professionnels entrent dans la catégorie des prêts mentionnés au 3º de l’article L. 311-3, il résulte des dispositions susvisées que le taux effectif global applicable à la cause est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires et lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu’annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire ; que le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d’au moins une décimale ; que les parties peuvent s’accorder sur le calcul de l’intérêt conventionnel (taux nominal) sur la base d’une année bancaire de 360 jours comme elles l’ont fait en l’espèce ainsi qu’en atteste l’article 2 des conditions générales du contrat litigieux (pièce 4 de l’intimée) qui stipule : « Conditions financières : le prêt donnera lieu au profit de la banque à des intérêts calculés sur le montant utilise, au taux indiqué dans les conditions particulières du présent acte sur la base d’une année bancaire de 360 jours, d’un semestre de 180 jours, d’un trimestre de 90 jours et d’un mois de 30 jours » ; que cependant aux termes des dispositions légales et réglementaires plus haut rappelées la banque devait calculer le taux effectif global sur la base d’une année civile de 365 jours ; qu’il ressort de l’acte de prêt, non contesté sur ce point, que le taux de période s’élevait à 0,472 % ; que le prêt était remboursé par mensualités ; que le taux effectif global s’élevait donc, conformément à l’article R. 313-1 du code de la consommation, à : 0,472 x (365/30) : 5,743 % ce qui fait apparaître une différence de 0,071 % avec le taux annoncé de 5,672 % ; qu’il sera observé que si on calcule le TEG sur la base d’une année bancaire de 360 jours on ne parvient pas au résultat annoncé par la BPO ; qu’en toute hypothèse, il reste qu’aux termes de l’article R. 313-1 du code de la consommation, l’organisme bancaire bénéficie d’un seuil de tolérance d’une décimale ; que la société Jesylac fait valoir que le seuil de tolérance visé dans l’article R. 313-1 ne porte que sur le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire et non sur le résultat du taux effectif global ; que cependant, le rapport entre la durée de l’année et celle de la période unitaire constitue un coefficient multiplicateur appliqué au taux de période de sorte que l’admission d’un seuil de tolérance d’une décimale pour le rapport emporte, corrélativement, par un pur effet mathématique, à taux de période identique, admission du même seuil de tolérance pour le produit de la multiplication du taux de période par le rapport visé par la loi ; que l’erreur de 0.071 plus haut établie est inférieure au seuil de tolérance de 0,1 prévu par l’article R. 313-1 du code de la consommation ; que l’intimée ne saurait non plus reprocher à la banque de ne pas lui avoir communiquer le taux de période et la durée de période unitaire dès lors que le taux période est mentionné dans l’acte de prêt tout comme est indiquée la périodicité mensuelle (pièce 4 de la société Jesylac précisant « périodicité : M », pour mensuelle et rappelant en son article 2 que le mois est de 30 jours) ; que la société Jesylac ne pourra donc prospérer en sa demande de substitution des intérêts au taux légal ;

ALORS QUE l’article R. 313-1 du code de la consommation qui, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-928 du 10 juin 2002, applicable en la cause, dispose que le rapport, entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire, utilisé pour le calcul du taux effectif global, est calculé, le cas échéant, avec une précision d’au moins une décimale, a pour objet, non pas d’édicter une marge d’erreur admissible, mais de déterminer le degré de précision dans l’expression dudit taux et les modalités d’application d’un chiffre arrondi ; que la cour d’appel en énonçant, pour débouter la société Jesylac de sa demande en substitution du taux de l’intérêt légal au taux d’intérêt conventionnel, que l’organisme bancaire bénéficiait, aux termes de cet article, d’un seuil de tolérance d’une décimale et que l’erreur de taux était inférieure à celui-ci et en opposant ainsi à l’exposante l’absence d’effet de l’erreur, a violé le texte précité.

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