Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 février 2018, 16-27.263, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La note de renseignements d’urbanisme ne dispense pas le notaire de son obligation de s’informer sur l’existence d’un arrêté préfectoral publié, relatif à un plan de prévention des risques d’inondation

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

CIV. 1

LG

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 14 février 2018

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 180 FS-P+B

Pourvoi n° Q 16-27.263

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Patrick Y…, domicilié […],

contre l’arrêt rendu le 5 octobre 2016 par la cour d’appel de Bastia (chambre civile A), dans le litige l’opposant à la société Sophie Z… et G… Z…, société civile professionnelle, dont le siège est […],

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 16 janvier 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Betoulle, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, M. Girardet, Mmes Verdun, Ladant, Duval-Arnould, M. Truchot, Mme Teiller, M. Avel, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mmes Barel, Le Gall, Kloda, conseillers référendaires, M. Drouet, avocat général, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Betoulle, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. Y…, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Sophie Z… et G… Z…, l’avis de M. Drouet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l’article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, suivant acte reçu le 29 septembre 2005 par M. C…, notaire salarié de la société civile professionnelle Étienne Z…, Sophie Z…, G… Z…-C… désormais dénommée Sophie Z… et G… Z… (le notaire), les consorts E… ont vendu à M. Y… un immeuble à usage d’habitation ; qu’alléguant avoir découvert, en juillet 2011, que l’immeuble était situé en zone inondable, M. Y… a assigné le notaire en responsabilité pour manquement à son devoir de conseil et d’information, et en indemnisation ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, l’arrêt retient que le notaire, qui a rempli son obligation de demander une note de renseignements d’urbanisme sur laquelle n’apparaît aucune mention pouvant faire suspecter le caractère inondable de la zone ou l’existence d’un plan de prévention des risques d’inondation, n’est pas tenu de vérifier l’existence d’un arrêté préfectoral en ce sens, que celui-ci, régulièrement publié, peut être recherché et consulté par l’acquéreur, aussi bien que signalé par les vendeurs, et que le classement en zone urbaine peu dense ne doit pas de facto inciter le notaire à faire cette vérification sans y être expressément invité par l’acheteur ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la note de renseignements d’urbanisme ne dispensait pas le notaire de son obligation de s’informer sur l’existence d’un arrêté préfectoral publié, relatif à un plan de prévention des risques d’inondation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les deux autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 octobre 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Bastia ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;

Condamne la société civile professionnelle Sophie Z… et G… Z… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Y… la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. Y…

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir rejeté la demande de M. Y… tendant à la condamnation de la SCP Z… à lui payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice résidant dans la perte de chance suite à la faute du notaire qui a manqué à son devoir de conseil dans le cadre de la vente qui a fait l’objet de l’acte authentique du 29 septembre 2005 ;

AUX MOTIFS QUE l’article L. 125-5 du code de l’environnement prévoit « I- Les acquéreurs de biens immobiliers situés dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé, sont informés par le vendeur de l’existence des risques visés par ce plan ou ce décret. A cet effet un état des risques naturels et technologiques est établi à partir des informations mises à disposition par le préfet (…). III- Le préfet arrête la liste des communes dans lesquelles les dispositions du I et du II sont applicables ainsi que, pour chaque commune concernée, la liste des risques et des documents à prendre en compte (

). VI- Un décret en Conseil d’Etat fixe les conditions d’application du présent article » ; que l’article R. 125-27 du code de l’environnement, issu du décret du 15 février 2005, prévoit que l’obligation d’annexer l’état des risques naturels et technologiques est applicable à compter du premier jour du quatrième mois suivant la publication des arrêtés prévus au III de l’article L. 125-5 ; qu’or, l’arrêté du préfet de […] fixant la liste des communes soumises à l’obligation d’information des acquéreurs et locataires de biens immobiliers, visant l’article L. 125-5 du code de l’environnement et le décret du 15 février 2005, a été pris le 7 avril 2006, soit postérieurement à l’acte de vente litigieux ; que l’appelante en déduit qu’aucun manquement à une obligation d’information n’a été commis par le notaire, en l’état des textes applicables au jour de l’acte ; que l’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation prévoit que doit être annexé à l’acte de vente d’un immeuble un dossier de diagnostic technique comprenant notamment dans les zones mentionnées au I de l’article L. 125-5 du code de l’environnement l’état des risques naturels et technologiques prévu au deuxième alinéa du I du même article ; qu’il est constant que le plan de prévention du risque inondation sur la commune de […] a fait l’objet d’un arrêté préfectoral du 7 avril 2006 ; que, comme indiqué plus haut, en l’absence d’arrêté préfectoral déterminant la liste des communes dans lesquelles les dispositions dudit article sont applicables, l’obligation d’annexion du dossier de diagnostic technique ne s’imposait pas au notaire au jour de la passation de l’acte ; que M. Y… reproche ensuite au notaire de ne pas l’avoir informé de l’existence d’un plan de prévention du risque inondation sur la commune de […], qui avait fait l’objet d’un arrêté préfectoral du 15 juin 2004 ; que le notaire qui avait rempli son obligation de demander une note de renseignements d’urbanisme, sur laquelle n’apparaît aucune mention pouvant faire suspecter le caractère inondable de la zone, ni l’existence d’un plan de prévention des risques d’inondation, n’était pas tenu de vérifier l’existence d’un arrêté préfectoral en ce sens, ce d’autant que celui-ci, régulièrement publié, pouvait être recherché et consulté par l’acquéreur, aussi bien que signalé par les vendeurs ; que le classement en zone UD ne devait pas de facto inciter le notaire à faire cette vérification sans y être expressément invité par l’acheteur ; qu’au demeurant les inondations sont survenues en novembre 2008 suite à la réalisation de travaux de réhabilitation du réseau d’assainissement par la commune en 2006 et devant la juridiction administrative M. Y… a fait plaider que c’est l’inadéquation et l’inachèvement de ces ouvrages qui sont la cause des inondations, thèse retenue par la cour administrative d’appel (existence et déficience de l’ouvrage public) dans son arrêt du 13 mars 2014 ; qu’en conséquence, aucune faute ne pouvant être reprochée au notaire, le jugement sera infirmé et les demandes de M. Y… seront rejetées ;

1°) ALORS QU’ une simple note de renseignements d’urbanisme, dont le formulaire CERFA ne contient aucune rubrique relative à l’existence d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles, ne permet pas au notaire de s’informer suffisamment sur l’existence de ces risques et des servitudes administratives afférentes ; qu’en retenant néanmoins que le notaire n’était pas tenu de vérifier l’existence d’un arrêté préfectoral relatif à un plan de prévention des risques d’inondation, à raison de ce qu’il avait sollicité une note de renseignements d’urbanisme, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

2°) ALORS QUE, subsidiairement, à supposer même que le notaire puisse se borner à solliciter, au regard des risques naturels, une note de renseignements, c’est à la condition qu’il n’ait quelque raison de soupçonner le caractère incomplet ou erroné de ce document ; que M. Y… soutenait que le notaire ne pouvait ignorer l’existence d’un plan de prévention de risques d’inondation sur le territoire de la commune de […], compte tenu de ce que son office se situait à proximité de l’immeuble en cause et de ce que ce plan avait donné lieu à plusieurs publications dans les journaux locaux (conclusions, p. 6 et 7) ; qu’en se bornant à relever que le notaire avait rempli son obligation de demander une note de renseignements d’urbanisme, sur laquelle n’apparaît aucune mention pouvant faire suspecter le caractère inondable de la zone, sans rechercher si l’officier ministériel pouvait avoir, par ailleurs, des raisons de soupçonner le caractère incomplet ou erroné de ce document, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

3°) ALORS QUE M. Y… sollicitait la confirmation du jugement ayant condamné le notaire à l’indemniser de la perte de chances sérieuses de ne pas acquérir la propriété en cause, de l’acquérir à moindre coût, ou de ne pas faire réaliser les aménagements effectués, voire en entreprendre d’autres ; qu’en rejetant sa demande à raison de ce que les inondations étaient survenues en novembre 2008 suite à la réalisation de travaux de réhabilitation du réseau d’assainissement par la commune en 2006 et que c’est l’inadéquation et l’inachèvement de ces ouvrages qui sont la cause de ces inondations, la cour d’appel, qui s’est prononcée par des motifs impropres à écarter la responsabilité du notaire à réparer la perte de chances invoquée, a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil.

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