Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 mai 2018, 16-25.052, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 24 mai 2018, n° 16-25.052
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 16-25.052
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Toulouse, 24 janvier 2016
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000036980409
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:C200727
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 24 mai 2018

Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 727 F-D

Pourvoi n° M 16-25.052

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par Mme Nawel X…, domiciliée […] ,

contre l’arrêt rendu le 25 janvier 2016 par la cour d’appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Marbrerie Lavos Escourbais Aujoulet, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

2°/ à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Haute-Garonne, dont le siège est […] ,

défenderesses à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 11 avril 2018, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Touati conseiller référendaire rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Touati , conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme X…, de la SCP Odent et Poulet, avocat de la société Marbrerie Lavos Escourbais Aujoulet, l’avis de M. Grignon Dumoulin , avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 25 janvier 2016), que le 11 janvier 2008, alors qu’elle se rendait sur la sépulture de son beau-frère inhumé quelques jours plus tôt dans le cimetière de […] à Toulouse, Mme X… a fait une chute dans la fosse voisine, creusée la veille par la société Marbrerie Lavos Escourbais Aujoulet (la société Marbrerie Lavos) et seulement recouverte d’une tôle ; que saisie d’une demande d’indemnisation formée contre la commune de Toulouse, une juridiction administrative a opéré un partage de responsabilité, après avoir constaté que la victime avait commis des fautes d’imprudence ; que Mme X… a alors assigné la société Marbrerie Lavos en responsabilité et indemnisation de ses préjudices, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt de limiter son indemnisation à un quart des dommages, alors, selon le moyen :

1°/ que l’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux décisions rendues sur le même objet, entre les mêmes parties, lorsque la demande est fondée sur la même cause ; que, en l’absence de représentation mutuelle entre eux, l’un des coresponsables d’un dommage ne peut se prévaloir du partage de responsabilité obtenu par un autre coresponsable ; que, pour exonérer le marbrier de sa responsabilité à hauteur des trois quarts, l’arrêt s’est fondé sur la décision du tribunal administratif ayant uniquement statué sur l’action de la victime à l’encontre de la commune et ayant limité la part de responsabilité de cette dernière à un quart des conséquences dommageables de l’accident ; que la cour d’appel s’est appuyée sur la circonstance que cette décision était « définitive » et que les fautes commises par la commune et par la victime avaient été caractérisées par le tribunal administratif ; qu’en fondant la solution retenue sur une décision rendue par une autre juridiction lors d’une instance qui n’opposait pas les mêmes parties, la cour d’appel a méconnu l’étendue de l’autorité de la chose jugée en violation de l’article 1351 du code civil ;

2°/ que la motivation par voie de référence équivaut à un défaut de motifs ; qu’une juridiction ne peut renvoyer à une décision rendue dans une autre instance et en reprendre les motifs qu’à la condition de préciser en quoi consiste l’analogie des situations justifiant l’application à l’espèce de la solution tranchée dans le cadre d’une autre instance ; qu’en se bornant à énoncer que les fautes commises par la victime et par la commune avaient été caractérisées par le tribunal administratif et qu’il y avait lieu de reprendre sa décision y compris dans sa motivation, de sorte qu’il convenait de considérer que les fautes de la victime exonéraient partiellement le marbrier de son obligation de réparer à hauteur des trois quarts, motivant ainsi sa décision par voie de référence à une décision rendue dans une autre instance n’opposant pas les mêmes parties, sans expliquer en quoi la faute commise par la commune et celle perpétrée par le marbrier auraient été analogues, la cour d’appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel ne s’est pas fondée sur l’autorité de chose jugée attachée à la décision du tribunal administratif pour limiter la responsabilité de la société Marbrerie Lavos ;

Et attendu, ensuite, que c’est sans encourir le grief visé par la seconde branche du moyen, que la cour d’appel, qui ne s’est pas bornée à une simple référence à une décision antérieure, a repris à son compte, en les rappelant expressément, les motifs du jugement du tribunal administratif retenant que Mme X… avait commis une faute en pénétrant dans le cimetière en dehors des heures d’ouverture au public et en prenant le risque de traverser, à une heure où le jour n’était pas encore levé, le terrain d’une concession voisine à celle de son beau-frère, alors qu’il n’était pas établi qu’elle n’aurait pas eu la possibilité d’y accéder normalement par les allées destinées à la circulation des usagers, puis souverainement estimé que cette faute justifiait d’exonérer partiellement la société Marbrerie Lavos de sa responsabilité à concurrence des trois quarts ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :

Attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme X….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir limité l’indemnisation du préjudice subi par la victime d’un accident (Mme X…, l’exposante), imputable à un tiers (la société Marbrerie Lavos), à un quart des dommages ;

AUX MOTIFS QUE le tribunal administratif avait estimé que la commune avait insuffisamment contrôlé la conformité au règlement municipal des travaux exécutés sur la concession privée à l’origine du dommage ; qu’il en avait déduit que cette faute était de nature à engager la responsabilité de la commune mais qu’il convenait de tenir compte de celle de la victime qui avait pénétré dans le cimetière en dehors des heures d’ouverture au public et qui avait pris le risque de traverser, à une heure où le jour n’était pas encore levé, le terrain d’une concession voisine de celle de son beau-frère quand il n’était pas établi qu’elle n’aurait pas eu la possibilité d’y accéder normalement par les allées destinées à la circulation des étrangers ; que le tribunal administratif avait en conséquence limité la part de responsabilité de la commune à un quart des conséquences dommageables de l’accident ; que cette décision en date du 20 juillet 2012 était définitive, aucune partie n’en ayant relevé appel ; que la société Marbrerie Lavos ne contestait pas avoir commis une faute mais estimait que celles commises par la victime et relevées par le tribunal administratif devaient l’exonérer de sa responsabilité à hauteur des trois quarts ; qu’il était établi que la couverture en tôle qui avait cédé sous le poids de Mme X… ne constituait pas un dispositif de protection suffisant au regard des dispositions de l’article 33 du règlement municipal des cimetières de la ville de Toulouse qui prévoyait que les travaux étaient exécutés de manière à ne pas compromettre la sécurité et la salubrité publique et que les fouilles laissées en attente devaient être entourées d’une barrière ou être couvertes par des planchers solides afin d’éviter les accidents ; que, dès lors, la faute de la société Marbrerie Lavos était établie sur le fondement de l’article 1382 du code civil ; que, cependant, eu égard aux fautes commises par la victime et par la commune caractérisées par le tribunal administratif dans sa décision et qu’il y avait lieu de reprendre, y compris au niveau de sa motivation sur ce point, il convenait de considérer que celles-ci exonéraient partiellement la société Marbrerie Lavos de son obligation de réparer à hauteur des trois quarts ;

ALORS QUE l’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux décisions rendues sur le même objet, entre les mêmes parties, lorsque la demande est fondée sur la même cause ; que, en l’absence de représentation mutuelle entre eux, l’un des coresponsables d’un dommage ne peut se prévaloir du partage de responsabilité obtenu par un autre coresponsable ; que, pour exonérer le marbrier de sa responsabilité à hauteur des trois quarts, l’arrêt infirmatif attaqué s’est fondé sur la décision du tribunal administratif ayant uniquement statué sur l’action de la victime à l’encontre de la commune et ayant limité la part de responsabilité de cette dernière à un quart des conséquences dommageables de l’accident ; que la cour d’appel s’est appuyée sur la circonstance que cette décision était « définitive » et que les fautes commises par la commune et par la victime avaient été caractérisées par le tribunal administratif ; qu’en fondant la solution retenue sur une décision rendue par une autre juridiction lors d’une instance qui n’opposait pas les mêmes parties, la cour d’appel a méconnu l’étendue de l’autorité de la chose jugée en violation de l’article 1351 du code civil ;

ALORS QUE, subsidiairement, la motivation par voie de référence équivaut à un défaut de motifs ; qu’une juridiction ne peut renvoyer à une décision rendue dans une autre instance et en reprendre les motifs qu’à la condition de préciser en quoi consiste l’analogie des situations justifiant l’application à l’espèce de la solution tranchée dans le cadre d’une autre instance ; qu’en se bornant à énoncer que les fautes commises par la victime et par la commune avaient été caractérisées par le tribunal administratif et qu’il y avait lieu de reprendre sa décision y compris dans sa motivation, de sorte qu’il convenait de considérer que les fautes de la victime exonéraient partiellement le marbrier de son obligation de réparer à hauteur des trois quarts, motivant ainsi sa décision par voie de référence à une décision rendue dans une autre instance n’opposant pas les mêmes parties, sans expliquer en quoi la faute commise par la commune et celle perpétrée par le marbrier auraient été analogues, la cour d’appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir limité à 5 463,70 € le montant de l’indemnité due à une victime (Mme X…, l’exposante) par le tiers responsable (la société Marbrerie Lavos) ;

AUX MOTIFS QUE, au total, le préjudice corporel subi par Mme X… s’élevait à 25 015, 83 € ; que, compte tenu de la faute de la victime, la condamnation mise à la charge de la société Lavos s’élevait à un quart de ces sommes ; que la société Marbrerie Lavos devait verser à la victime la somme de 5 463,70 € ;

ALORS QUE, en application de l’article 624 du code de procédure civile, la censure à intervenir sur le premier moyen relatif à la répartition des responsabilités entre la victime et le marbrier emportera l’annulation par voie de conséquence de l’arrêt infirmatif attaqué en ce qu’il a limité à la somme de 5 463,70 € l’indemnité due par le tiers responsable à la victime.

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Textes cités dans la décision

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