Cour de cassation, Chambre sociale, 9 janvier 2019, 17-15.836, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

SOC.

CM

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 9 janvier 2019

Rejet

Mme X…, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 31 F-D

Pourvoi n° Q 17-15.836

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par Mme Evelyne Y…, domiciliée […] ,

contre l’arrêt rendu le 31 janvier 2017 par la cour d’appel de Riom (4e chambre civile (sociale)), dans le litige l’opposant à la société Cosmetique active production, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 28 novembre 2018, où étaient présents : Mme X…, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z…, conseiller rapporteur, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Z…, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme Y…, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Cosmetique active production, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Riom, 31 janvier 2017), que Mme Y… a été engagée le 22 décembre 1971 par la société Laboratoire d’application dermatologique de Vichy devenue la SAS Cosmétique active production, en qualité d’opératrice de conditionnement ; qu’elle a été admise à la retraite le 31 mai 2012 ; qu’estimant avoir subi une inégalité de traitement en matière salariale, elle a saisi la juridiction prud’homale ;

Attendu que la salariée reproche à l’arrêt de la débouter de sa demande de condamnation de la société à lui payer des sommes à titre de rappel de salaires et de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; que l’employeur est cependant toujours en mesure d’apporter ses propres éléments afin de démontrer que ceux produits par le salarié ne sont pas susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; que, dans ce cas, le juge doit en tenir compte pour apprécier l’existence d’une telle inégalité ; qu’après avoir relevé, en l’espèce, que la salariée produisait aux débats un tableau manuscrit établi par ses soins, dans lequel figurent les salaires perçus par elle de 1990 à 2009 et les salaires de base moyen des collègues, la cour d’appel a retenu qu’aucune précision ne figurait dans ce tableau sur l’identification des collègues dont le salaire moyen est mentionné et qu’aucune pièce ne venait non plus étayer les mentions du tableau ; qu’elle en a déduit, par motifs propres et adoptés, que cette seule pièce, qui ne permettait aucunement de déterminer si les salariés concernés se trouvaient dans une situation identique à Mme Y…, était insuffisante à laisser supposer l’existence d’une inégalité de traitement ; qu’en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, il ressortait du tableau de comparaison fourni par la société CAP qu’existaient des différences de rémunération, la cour d’appel, qui a exclusivement pris en compte les éléments de fait apportés par le salarié sans égard pour ceux produits par l’employeur afin de démontrer que les premiers n’étaient pas susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, a violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l’article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

2°/ qu’en application du principe « à travail égal, salaire égal », l’employeur est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés d’une même entreprise pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique ; que, s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que le tableau fourni par le salarié à l’appui de sa demande était insuffisant à laisser supposer l’existence d’une inégalité de traitement ; qu’en statuant comme elle a fait, alors qu’elle constatait, par ailleurs, que l’employeur avait produit une étude d’un panel de quatorze salariés occupant le même emploi et classés au même coefficient 160 et qu’il en ressortait des différences de rémunération, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l’article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ que s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; que, pour débouter la salariée de sa demande, la cour d’appel a estimé, par motifs propres et adoptés, que la société justifiait par une étude d’un panel de quatorze salariés, occupant le même emploi et classés au même coefficient 160, que Mme Y… a bénéficié d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et ayant accédé au coefficient à la même période et que les différences minimes constatées se trouvent ainsi justifiées par des éléments objectifs ; qu’en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser de tels éléments objectifs, la cour d’appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l’article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

4°/ que le juge a l’obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, pour débouter la salariée de sa demande, la cour d’appel a constaté que la société justifiait par une étude d’un panel de quatorze salariés, occupant le même emploi et classés au même coefficient 160, que la salariée a bénéficié d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et ayant accédé au coefficient à la même période (arrêt, p. 4) ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il ressort expressément du tableau établi par la société CAP que la salariée ne bénéficiait pas d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et n’avait pas accédé au coefficient 160 à la même période, la cour d’appel a dénaturé ce document, en violation du principe susvisé ;

Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu’à remettre en cause le pouvoir souverain des juges du fond qui, ayant relevé que la salariée produit aux débats un tableau manuscrit établi par ses soins dans lequel figurent, d’une part, les salaires perçus par elle de 1990 à 2009 et d’autre part, les salaires de base moyens de collègues sans précision sur l’identification de ces collègues, aucune autre pièce ne venant étayer les mentions du tableau, ont estimé que ce seul document était insuffisant à laisser supposer une inégalité de traitement ; que le moyen, dont les troisième et quatrième branches critiquent un motif surabondant, n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme Y…

Le moyen fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR débouté Mme Y… de sa demande de condamnation de la société CAP à lui payer des sommes à titre de rappel de salaire et des congés payés y afférents, de dommages-intérêts et d’une somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « Attendu que l’article 6 du Code de Procédure Civile précise « A l’appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d’alléguer les faits propres à les fonder » et que l’article 9 précise qu'« Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention », Madame Evelyne Y… n’apporte aucun élément « de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte » en application de l’article L. 1134-1 du code du travail ;

Attendu que Madame Evelyne Y… ne démontre pas de discrimination au sens de l’article L. 1132-1 du Code du travail ;

Attendu qu’aucun élément de fait ne permet d’établir que Madame Evelyne Y… aurait été victime d’une rupture d’égalité de traitement au cours de son évolution de carrière et qu’au contraire la Société COSMÉTIQUE ACTIVE PRODUCTION, dans son panel de 14 salariés placés dans une situation contractuelle comparable montre une situation analogue.

L’employeur rapporte la preuve d’éléments objectifs justifiant les différences en s’appuyant sur les dates de nomination au coefficient 160 ;

Attendu que, dès lors, il n’y a pas lieu d’examiner les demandes des parites sur les périodes prescrites au sens de l’article L. 3245-1 du Code du travail ; » ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l’arrêt attaqué,

« Le principe « à travail égal, salaire égal » implique pour l’employeur d’assurer une égalité de traitement entre tous les salariés pour autant que ceux-ci soient placés dans une situation identique. Il appartient à l’employeur de justifier par des raisons objectives et matériellement vérifiables, la différence de rémunération entre des salariés effectuant un même travail de valeur égale.

En l’occurrence Mme Y…, à qui incombe la preuve de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, produit aux débats un tableau manuscrit établi par ses soins, dans lequel figurent d’une part, les salaires perçus par elle de 1990 à 2009 et d’autre part, les salaires de base moyen des collègues.

Aucune précision ne figure dans ce tableau sur l’identification des collègues dont le salaire moyen est mentionné et aucune autre pièce ne vient non plus étayer les mentions du tableau.

Cette seule pièce, qui ne permet aucunement de déterminer si les salariés concernés se trouvaient dans une situation identique à Mme Y…, est insuffisante à laisser supposer l’existence de traitement.

De plus et à l’inverse, la société justifie quant à elle par une étude d’un panel de 14 salariés, occupant le même emploi et classés au même coefficient 160, que Mme Y… a bénéficié d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et ayant accédé au coefficient à la même période. Les différences minimes constatées se trouvent ainsi justifiées par des éléments objectifs.

Le jugement ne peut donc qu’être confirmé en ce qu’il a débouté Mme Y… de ses demandes.

Succombant en son appel, Mme Y… ne saurait prétendre à application de l’article 700 du code de procédure civile. » ;

ALORS en premier lieu QUE, s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; que l’employeur est cependant toujours en mesure d’apporter ses propres éléments afin de démontrer que ceux produits par le salarié ne sont pas susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; que, dans ce cas, le juge doit en tenir compte pour apprécier l’existence d’une telle inégalité ; qu’après avoir relevé, en l’espèce, que la salariée produisait aux débats un tableau manuscrit établi par ses soins, dans lequel figurent les salaires perçus par elle de 1990 à 2009 et les salaires de base moyen des collègues, la cour d’appel a retenu qu’aucune précision ne figurait dans ce tableau sur l’identification des collègues dont le salaire moyen est mentionné et qu’aucune pièce ne venait non plus étayer les mentions du tableau ; qu’elle en a déduit, par motifs propres et adoptés, que cette seule pièce, qui ne permettait aucunement de déterminer si les salariés concernés se trouvaient dans une situation identique à Mme Y…, était insuffisante à laisser supposer l’existence d’une inégalité de traitement ; qu’en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, il ressortait du tableau de comparaison fourni par la société CAP qu’existaient des différences de rémunération, la cour d’appel, qui a exclusivement pris en compte les éléments de fait apportés par le salarié sans égard pour ceux produits par l’employeur afin de démontrer que les premiers n’étaient pas susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, a violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l’article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

ALORS en deuxième lieu QU’en application du principe « à travail égal, salaire égal », l’employeur est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés d’une même entreprise pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique ; que, s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que le tableau fourni par le salarié à l’appui de sa demande était insuffisant à laisser supposer l’existence d’une inégalité de traitement ; qu’en statuant comme elle a fait, alors qu’elle constatait, par ailleurs, que l’employeur avait produit une étude d’un panel de quatorze salariés occupant le même emploi et classés au même coefficient 160 et qu’il en ressortait des différences de rémunération, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l’article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

ALORS en troisième lieu QUE, s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; que, pour débouter la salariée de sa demande, la cour d’appel a estimé, par motifs propres et adoptés, que la société justifiait par une étude d’un panel de quatorze salariés, occupant le même emploi et classés au même coefficient 160, que Mme Y… a bénéficié d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et ayant accédé au coefficient à la même période et que les différences minimes constatées se trouvent ainsi justifiées par des éléments objectifs ; qu’en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser de tels éléments objectifs, la cour d’appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal », ensemble l’article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

ALORS en quatrième lieu QUE le juge a l’obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, pour débouter la salariée de sa demande, la cour d’appel a constaté que la société justifiait par une étude d’un panel de quatorze salariés, occupant le même emploi et classés au même coefficient 160, que la salariée a bénéficié d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et ayant accédé au coefficient à la même période (arrêt, p. 4) ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il ressort expressément du tableau établi par la société CAP que la salariée ne bénéficiait pas d’une rémunération équivalente aux salariés de même ancienneté et n’avait pas accédé au coefficient 160 à la même période, la cour d’appel a dénaturé ce document, en violation du principe susvisé ;

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