Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 septembre 2019, 18-21.403 18-23.166, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 26 septembre 2019

Cassation partielle sans renvoi

Mme BATUT, président

Arrêt n° 762 F-D

Pourvois n° M 18-21.403

C 18-23.166 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

I – Statuant sur le pourvoi n° M 18-21.403 formé par la société P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, M… C…, L… S… et I… N…, société civile professionnelle, dont le siège est […] , anciennement dénommée SCP D… O…, W… F…, P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, L… S…, M… C… et I… N…,

contre un arrêt n° RG : 16/05905 rendu le 15 juin 2018 par la cour d’appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Cincinnatus assurance, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

2°/ à M. Z… A…, domicilié […] ,

défendeurs à la cassation ;

II – Statuant sur le pourvoi n° C 18-23.166 formé par la société Cincinnatus assurance, société à responsabilité limitée,

contre le même arrêt rendu dans le litige l’opposant :

1°/ à M. Z… A…,

2°/ à la société P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, L… S…, M… C…, I… N…, société civile professionnelle,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse au pourvoi n° M 18-21.403 invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi n° C 18-23.166 invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 2 juillet 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Kamara doyen, conseiller, M. Y…, avocat général, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations et les plaidoiries de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, M… C…, L… S… et I… N…, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Cincinnatus assurance, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de M. A…, l’avis de M. Y…, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s’ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° M 18-21.403 et C 18-23.166 ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. A… (l’acquéreur), désireux de réaliser un investissement immobilier dans un but de défiscalisation, est entré en relation avec la société Cincinnatus assurance (la société Cincinnatus), conseiller en gestion de patrimoine, qui, au terme d’une étude personnalisée, lui a conseillé d’investir dans un programme immobilier […], développé sous l’égide de la société Financière Barbatre (le promoteur-constructeur), et présenté comme éligible au dispositif de défiscalisation institué par la loi n° 62-903 du 4 août 1962 sur les monuments historiques ; que, suivant acte du 18 décembre 2002, l’acquéreur a donné procuration à « tout clerc » de la société civile professionnelle D… O…, W… F…, P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, L… S… et M… C…, devenue la SCP P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, L… S…, M… C… et I… N… (la SCP notariale), aux fins d’acquérir et emprunter pour son compte une somme auprès d’une banque, en vue de financer l’achat d’un lot dans l’ensemble immobilier ainsi que les travaux de réhabilitation ; que, le 26 décembre 2002, la SCP notariale a reçu l’acte authentique d’acquisition ; que le promoteur-vendeur et ses filiales chargées de la réalisation des travaux et de l’exploitation de la future résidence hôtelière ont été placés en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire avant la réalisation des travaux de réhabilitation ; qu’alléguant avoir payé en pure perte une certaine somme à titre d’avances sur travaux, l’acquéreur a assigné la société Cincinnatus et la SCP notariale en responsabilité et indemnisation ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° C 18-23.166 :

Attendu que la société Cincinnatus fait grief à l’arrêt de la condamner, in solidum avec la SCP notariale, à payer à l’acquéreur la somme de 130 895 euros, alors, selon le moyen :

1°/ que l’obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s’étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours normal de l’investissement qu’il a proposé à son client, lorsque ces aléas ne présentent aucune spécificité et sont de la connaissance de tous ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que la société Cincinnatus avait manqué à ses obligations de conseil en gestion de patrimoine en ne procédant, dans l’étude réalisée par M. Q…, « à aucune analyse de l’investissement proposé, en n’informant M. A… que des avantages de l’opération, en ne l’avisant ni des conditions auxquelles le succès de l’opération était subordonné ni des risques susceptibles de découler du défaut de réalisation de ces conditions et en faisant état d’une sécurité totale de l’investissement » ; qu’en se prononçant ainsi, tandis que la société Cincinnatus n’était pas tenue de mettre en garde l’acquéreur sur le fait que toute opération d’investissement immobilier aux fins de défiscalisation est susceptible d’échouer en cas de défaillance ultérieure de l’un des participants au projet de construction, risque inhérent à toute opération immobilière et de la connaissance de tous, et qui ne présentait aucune spécificité au regard du placement proposé, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231 du même code ;

2°/ que l’obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s’étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l’investissement qu’il a proposé à son client, dès lors qu’à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d’aucun élément de nature à l’alerter sur le risque d’un échec prévisible de l’opération d’investissement ; qu’en l’espèce, la société Cincinnatus faisait valoir que, lorsque le placement litigieux avait été proposé à l’acquéreur en 2001 et 2002, elle avait préalablement procédé à des investigations sur la santé financière des sociétés du groupe Barbatre et sur l’état d’avancement du projet, sans disposer de la moindre information permettant de douter du succès de l’opération projetée, qui répondait notamment à l’ensemble des critères permettant de bénéficier des dispositions défiscalisantes de la loi Malraux ; que la cour d’appel a néanmoins retenu qu’il « appartenait au conseil en gestion de patrimoine, tenu à une obligation de conseil, d’informer M. A… des risques encourus du fait des aléas susceptibles d’être rencontrés dans l’exécution des travaux » et que « le pourcentage de commercialisation du programme ne suffisait pas en soi à garantir le succès de l’opération qui était tributaire de la bonne fin des travaux », « d’autant plus que, compte tenu de la nécessité pour les investisseurs de constituer une ASL chargée de solliciter le permis de construire et de l’importance des travaux nécessaires, le délai pour réaliser ceux-ci avant le 1er juillet 2004 était bref » ; qu’en se prononçant ainsi par des motifs impropres à caractériser en quoi la société Cincinnatus, qui n’est pas un professionnel de la construction immobilière, avait pu identifier le moindre élément révélant un risque d’échec de l’opération à la date de la décision d’investir de l’acquéreur la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231 du même code ;

3°/ que l’obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s’étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l’investissement qu’il a proposé à son client, dès lors qu’à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d’aucun élément de nature à l’alerter sur le risque d’un échec prévisible de l’opération d’investissement ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté, par motifs réputés adoptés, que la société Cincinnatus n’avait « pas de raison de douter de la fiabilité des entreprises du groupe Barbatre en 2002 » et qu’il n’était « produit aucun élément de nature à établir que la faisabilité de l’opération a été mise en péril avant le mois de février 2004, date à laquelle la société Cincinnatus a été déchargée de toute obligation vis-à-vis de M. A… » ; qu’en décidant néanmoins que la société Cincinnatus avait manqué à son devoir de conseil envers l’acquéreur pour ne pas l’avoir alerté sur les risques d’échec de l’investissement immobilier proposé, après avoir constaté que de tels risques n’étaient pas caractérisés à la date à laquelle l’acquéreur avait décidé d’investir ni même à la date à laquelle il avait déchargé la société Cincinnatus de son mandat, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231 du même code ;

Mais attendu qu’après avoir constaté que la présentation de l’opération conseillée se conclut ainsi : « vous allez disposer d’une sécurité totale sur votre investissement » et que la société Cincinnatus n’a émis aucune réserve sur l’existence d’un éventuel aléa, l’arrêt retient, d’abord, que la présentation de l’opération ne comprend aucune précision sur les conditions auxquelles le succès de l’opération était conditionné ou sur les risques susceptibles de découler du défaut de réalisation de ces conditions, alors que celle-ci supposait la réhabilitation complète de l’immeuble, ce qui constituait un aléa essentiel de cet investissement immobilier de défiscalisation ; qu’il relève, ensuite, que l’acquéreur n’a reçu aucune information sur ses obligations et les risques encourus en cas de retard dans le démarrage des travaux ou de l’inexécution de ceux-ci, que ces risques, liés à une opération complexe, n’étaient pas de la « connaissance de tous » et que cette information lui était due, même s’il pouvait être admis que la société Cincinnatus n’avait pas de raison de douter de la fiabilité des entreprises du promoteur-constructeur en 2002 ; que la cour d’appel a ainsi caractérisé les manquements de la société Cincinnatus à son obligation de conseil et d’information à l’égard de l’acquéreur sur l’aléa essentiel de l’opération de défiscalisation ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi n° M 18-21.403 :

Vu l’article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu que, pour condamner la SCP notariale, in solidum avec la société Cincinnatus, à payer à l’acquéreur la somme de 130 895 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices, l’arrêt retient que la SCP notariale aurait dû attirer l’attention de l’acquéreur sur l’aléa essentiel de cette opération que représentait l’absence de garantie de bonne fin des travaux, dont le succès était économiquement subordonné à la réhabilitation complète de l’immeuble ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le notaire, qui n’est pas soumis à une obligation de conseil et de mise en garde concernant la solvabilité des parties ou l’opportunité économique d’une opération en l’absence d’éléments d’appréciation qu’il n’a pas à rechercher, n’était pas tenu d’informer l’acquéreur du risque d’échec du programme immobilier, qu’il ne pouvait suspecter au jour de la signature de la vente, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu’en application des articles L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure de statuer au fond, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la SCP P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, M… C…, L… S… et I… N…, in solidum avec la société Cincinnatus, à payer à M. A… la somme de 130 895 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, l’arrêt n° RG : 16/05905 rendu le 15 juin, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Rejette les demandes formées par M. A… contre la SCP P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, M… C…, L… S… et I… N… ;

Condamne la société Cincinnatus assurance aux dépens comprenant ceux exposés devant les juge du fond ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi n° M 18-21.403 par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société P… G…, J… B…, V… X…, U… T…, M… C…, L… S… et I… N….

Il est fait grief à l’arrêt d’AVOIR la SCP G…, B…, X…-T…, S… C… et N…, in solidum avec la société Cincinnatus, à payer à M. Z… A… la somme de 130 895 euros à titre de dommages et intérêt, en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE M. A… justifie, en tant que de besoin, avoir déclaré sa créance au passif de la société Sogecif ; qu’il est constant que la procédure a été clôturée pour insuffisance d’actif ; qu’au titre du devoir de conseil dont il est débiteur, le notaire doit « éclairer les parties et s’assurer de la validité et de l’efficacité des actes rédigés par lui » ; qu’il ne peut s’exonérer de cette obligation au motif que son bénéficiaire aurait été assisté par un conseiller en gestion de patrimoine ; qu’il est donc tenu d’informer et d’éclairer les parties sur la portée et les effets ainsi que sur les risques de l’acte auquel il prête son concours et le cas échéant de le leur déconseiller ; que cette obligation doit prendre en considération les mobiles des parties, extérieurs à l’acte, lorsque le notaire en a eu précisément connaissance ; que la promesse de vente stipule que « le bénéficiaire accepte la présente promesse de vente en tant que promesse, se réservant la faculté d’en demander la réalisation selon qu’il avisera » ; que M. A… n’était nullement contraint d’acquérir le bien étant précisé, en outre, qu’aucune indemnité d’immobilisation n’avait été fixée ; ,que la SCP notariale ne peut dès lors utilement prétendre qu’il était tenu par cet acte d’acquérir ou que la convention était parfaite et qu’il « n’y avait plus de place pour l’exercice du devoir de conseil » ; que Maître B…, membre de la SCP notariale intimée, a établi l’acte de vente par la Sarl Saint Victor de l’ensemble immobilier à la Sarl Financière Barbatre le 26 d6cembre 2002, a établi, le même jour, le règlement de copropriété, et a reçu, le 27 décembre 2002, l’acte de vente du lot de M. A… ; que Maître C…, autre membre de la SCP, a adressé à M. A…, le 16 décembre 2002, un modèle de procuration pour « acquérir et emprunter » ; que M. A… a instauré pour mandataire tout clerc de l’étude ; que l’acte de prêt a été régularisé par la SCP ; qu’ainsi, la SCP notariale a procédé à tous les actes permettant la réalisation par la société Financière Barbatre de l’opération et à ceux permettant à M. A… d’acquérir le lot y compris d’emprunter les fonds nécessaires à l’opération ; qu’elle a donc eu à connaître de tous les aspects de l’opération immobilière dite du […] et de l’acquisition par M. A… de son lot ; qu’il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir conseillé à M. A… d’acquérir les biens sous le régime de la vente en l’état futur d’achèvement ou de la vente d’immeubles à rénover qui ne lui aurait pas permis de bénéficier des avantages fiscaux ; que si le notaire n’est pas tenu de procéder à des recherches particulières sur l’opportunité économique de l’opération envisagée et sur la solvabilité des parties, en l’absence d’éléments d’appréciation qu’il n’a pas à rechercher, il doit, à tout le moins, informer les parties des risques dont il a connaissance ; qu’ayant connaissance de tous les aspects de l’opération immobilière, la SCP savait qu’il s’agissait d’une opération particulière imposant, notamment, aux acquéreurs de réaliser les travaux de réhabilitation pour pouvoir profiter de la défiscalisation ; qu’elle savait également que l’opération formait un ensemble ; qu’elle ne peut donc utilement prétendre que M. A… était dans la même situation que celle de n’importe quel propriétaire désireux d’entreprendre des travaux dans le bien qu’il acquérait ; que, concernant M. A…, elle savait que la somme empruntée était destinée à hauteur d’environ 75 % au financement des travaux ; qu’elle n’ignorait pas qu’il n’existait aucune garantie de la bonne exécution des travaux de réhabilitation ; qu’elle ne justifie pas avoir informé M. A… que l’acquisition conseillée ne lui garantissait pas la bonne fin de l’opération dont le succès était économiquement subordonné à la réhabilitation complète de l’immeuble, ce qui constituait un aléa essentiel de cet investissement ; qu’elle a, ainsi, manqué à son devoir de conseil ;

AUX MOTIFS ADOPTÉS QU’au titre du devoir de conseil dont le notaire est débiteur, il doit « éclairer les parties et s’assurer de la validité et de l’efficacité des actes rédigés par lui » ; que M. A… soutient qu’il appartenait au notaire qui était en charge de la totalité de l’opération des vente des lots du […], de prévoir, compte tenu de la spécificité de cette opération, à but de défiscalisation, que les acomptes sur travaux ne pourraient être payés qu’après vérification du bon accomplissement de chaque étape du processus de réhabilitation de l’ensemble immobilier de l’ensemble immobilier ou, à tout le moins, d’informer du risque qu’ils prenaient en l’absence de garantie de la bonne utilisation des fonds ; qu’en l’espèce, il est établi que le notaire à eu à connaitre de tous les aspects de l’opération immobilière dite du […] puisque Me B… a établi les actes de vente de l’ensemble immobilier (de la SARL SAINT VICTOR à la SARL FINANCIERE BARBATRE) du 26 décembre 2002 et du lot n°29 de la copropriété (de la SARL BARBATRE à M. A…) du 27 décembre 2002 après avoir établi le règlement de copropriété ainsi que le prêt consenti à M. A… par le CREDIT MUTUEL, toutes les parties auxdits actes ayant donné procuration à des clercs de l’étude notariale située à Nice ; que les termes de la procuration notariée donnée par M. A… à « tout clerc de la SCP pour acquérir et emprunter » confirment que le notaire avait une connaissance parfaite et complète de l’opération ; que si, compte tenu de l’ intervention du notaire, ni dans l’acte de vente du lot de copropriété à M. A… ni dans l’acte de prêt une clause relative à l’ exécution des travaux ne pouvait trouver place, il lui appartenait, s’agissant d’une opération particulière imposant aux acquéreurs de réaliser les travaux de réhabilitation pour pouvoir profiter de la défiscalisation, d’ alerter ceux-ci, comme M. A…, de l’absence de garantie quant à la bonne exécution des travaux de réhabilitation en temps utile, la fin de chantier étant fixée au 30 juin 2004, l’initiative des travaux appartenant aux copropriétaires réunis en Association syndicale libre ; qu’en revanche, le demandeur ne peut, comme il le fait pour les autres parties à l’instance, faire grief au notaire, rédacteur des actes, de ne pas avoir vérifié la solidité des entreprises du Groupe BARBATRE et de ne pas avoir assuré le suivi du chantier, étant précisé que le règlement des travaux a été réalisée en dehors de la comptabilité du notaire, la promesse de vente étant accompagnée d’un document, non daté, aux termes duquel M. A… donnait son accord à la SOGECIF pour la réalisation des travaux de restauration " selon descriptif des travaux du lot n°208 pour un prix ferme et définitif de 101 360 € TTC, incluant sa quote-part de restauration des parties communes » ; qu’en omettant d’informer M. A… que l’acquisition conseillée ne lui garantissait pas la bonne fin de 1' opération dont le succès était économiquement subordonné à la commercialisation et à la réhabilitation complète de l’immeuble, ce qui constituait un aléa essentiel de cet investissement de défiscalisation, le notaire a manqué à son devoir de conseil ;

1°) ALORS QU’un notaire n’a pas à attirer l’attention de ses clients sur les risques inhérents à l’application d’un dispositif légal, dès lors que les conditions en sont réunies ; qu’en relevant pour imputer une faute à la SCP G…-B…, que la « somme empruntée était destinée à hauteur d’environ 75% au financement des travaux » et que, devant « informer les parties des risques dont [elle] a[vait] connaissance », la SCP G…-B… aurait dû attirer l’attention de M. A… sur « l’aléa essentiel de cet investissement » que représentait l’absence de garantie de bonne fin de l’opération (arrêt page 28, al. 12 et page 29, al. 1er et 3) quand le dispositif de la loi Malraux prévoyait précisément une déduction fiscale, souhaitée par M. A… à la mesure des travaux envisagés sans que le législateur ait prévu de garantie de bonne fin de sorte qu’en l’absence de risque avéré d’impécuniosité du constructeur, le notaire n’avait pas à délivrer de conseil particulier sur ce point, la cour d’appel a violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

2°) ALORS QUE l’obligation de conseil et de mise en garde incombant au notaire ne porte pas sur la solvabilité des parties ou l’opportunité économique d’une opération en l’absence d’éléments, qu’il n’a pas à rechercher, lui faisant apparaître un déséquilibre ou un danger manifeste ; qu’en reprochant à la SCP G…-B… d’avoir omis d’informer l’acquéreur des risques dont il avait connaissance (arrêt page 28, al. 12) dès lors que le succès de l’opération était « économiquement subordonné à la réhabilitation complète de l’immeuble » (arrêt page 29, al.3), sans relever d’éléments révélateurs d’un risque économique manifeste au jour de la vente quand l’officier ministériel n’avait pas à délivrer un conseil particulier sur l’opportunité économique de l’opération, en l’absence de tels éléments, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382, devenu 1240 du code civil ;

3°) ALORS QU’en toute hypothèse, le devoir de conseil du notaire ne s’exerce que dans les limites du mandat qui lui est confié pour la réalisation de l’opération à laquelle il prête son concours ; qu’en imputant à faute à la SCP G…-B…, qui savait que 75% des sommes empruntées par l’acquéreur devait servir à la réalisation des travaux, de ne pas l’avoir alerté sur l’absence de « garantie de la bonne exécution des travaux » (arrêt page 28, al. 12 et page 29, al. 2), quand, ayant instrumenté la seule vente du terrain, elle n’avait pas à conseiller les parties sur les stipulations du marché de travaux qu’elle n’était pas chargée d’établir, la cour d’appel a derechef violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil. Moyen produit au pourvoi n° C 18-23.166 par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Cincinnatus assurance.

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir dit que la société Cincinnatus avait commis un manquement à son obligation d’information et de conseil à l’égard de M. A…, et d’avoir condamné la société Cincinnatus, in solidum avec la SCP de notaires G… – B… – X… – T… – C… – S… – N… à payer à M. A… la somme de 130.895 € ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE le conseil en gestion de patrimoine n’est pas tenu de garantir à son client la rentabilité à long terme du placement choisi ou de le prémunir de tout aléa financier ; que toutefois, tenu de son obligation de conseil et d’information à l’égard de son client, le conseil en gestion de patrimoine doit informer ce dernier des conditions auxquelles le succès de l’opération financière projetée est subordonné et des risques qui découlent du défaut de réalisation de ses conditions ; que, dans le bilan remis à M. A…, la société Cincinnatus lui a conseillé d’investir dans l’opération du […] ; que la présentation de l’opération conseillée se conclut ainsi : « Vous allez disposer d’une sécurité totale sur votre investissement … votre montage sera totalement sécurisé … » ; qu’ayant l’ambition de proposer à son client un montage « totalement sécurisé », la société Cincinnatus devait s’imposer une rigueur et une vigilance particulière sur les tenants et aboutissants de l’opération ; que, de même, en soulignant que M. A… allait disposer d’une « sécurité totale », la société Cincinnatus n’a émis aucune réserve sur l’existence d’un éventuel aléa ; que, comme l’a relevé le tribunal, le bilan effectué par la société de conseil en gestion de patrimoine comporte un volet complet quant aux avantages fiscaux et à l’engagement financier de l’offre faite à M. A…, présentant avec clarté la ventilation entre le coût du bien acquis en l’état et le coût des travaux, dont il ressort avec évidence qu’ils constituent l’essentiel du prix, et détaillant le budget prévisionnel des travaux ; que toutefois, comme il l’a également relevé, qu’il présente de manière tout à fait générale l’investissement immobilier, sans renseignements particuliers sur les sociétés intervenantes ; que cette présentation ne comporte aucune explication sur l’opération de restauration immobilière elle-même, notamment les conditions nécessaires à l 'exécution des travaux, comme la formation d’une ASL regroupant les copropriétaires, seule habilitée à solliciter l’obtention du permis de construire; que la seule mention, au titre des obligations de l’investisseur selon laquelle « L’opération de restauration doit être à l’initiative des copropriétaires »n’est pas de nature à informer suffisamment I 'investisseur, auquel est présenté un investissement « clé en main » sécurisé ; que la société Cincinnatus n’a procédé, dans ce bilan, à aucune étude de l’opération conseillée ; que cette présentation ne comprend aucune précision sur les conditions auxquelles le succès de l’opération était subordonné ou sur les risques susceptibles de découler du défaut de réalisation de ces conditions alors que celle-ci supposait la réhabilitation complète de l’immeuble ; que, notamment, M. A… n’a reçu aucune information sur ses obligations et les risques encourus en cas de retard dans le démarrage des travaux ou de l’inexécution de ceux-ci, alors que la date de fin de chantier est expressément indiquée dans la proposition faite par la société Cincinnatus et qu’il est en particulier précisé que le bail débutera « obligatoirement » le 1er juillet 2004 ; qu’alors que l’économie du projet supposait donc l’achèvement des travaux et la réhabilitation complète de l’immeuble au plus tard le 1er juillet 2004, il appartenait au conseil en gestion de patrimoine, tenu à une obligation de conseil, d’informer M. A… des risques encourus du fait des aléas susceptibles d’être rencontrés dans l’exécution de ces travaux ; que le pourcentage de commercialisation du programme ne suffisait pas en soi à garantir le succès de l’opération qui était tributaire de la bonne fin des travaux ; qu’il le devait d’autant plus que, compte tenu de la nécessité, pour les investisseurs, de constituer une ASL chargée de solliciter le permis de construire et de l’importance des travaux nécessaires, le délai pour réaliser ceux-ci avant le 1er juillet 2004 était bref ; qu’il devait alors exposer de quelle manière la société « Les Ducs de Chevreuse », future locataire, pourrait payer les loyers en cas de retard, l’indication que le bail était « contre garanti » par la société réalisant les travaux étant, compte tenu notamment des liens entre les diverses sociétés et de la destination des fonds dont disposait la société Sogecif – la réalisation des travaux -, insuffisante ; que ces risques, liés à une opération complexe, n’étaient pas de la « connaissance de tous » ce qui l’aurait dispensé de son obligation de conseil ; qu’en ne procédant, dans cette étude, à aucune analyse de l’investissement proposé, en n’informant M. A… que des avantages de l’opération, en ne l’avisant ni des conditions auxquelles le succès de l’opération était subordonné ni des risques susceptibles de découler du défaut de réalisation de ces conditions et en faisant état d’une « sécurité totale » de l’investissement, la société Cincinnatus a manqué à ses obligations de conseil en gestion de patrimoine ; que la remise de la brochure de présentation du projet élaborée par l’auteur de celui-ci et des statuts de l’ASL ne peut pallier cette carence et l’analyse de celui-ci et valoir fourniture d’un conseil adapté ; que l’analyse du projet aurait permis à la société Cincinnatus de s’interroger sur les conséquences d’un retard des travaux sur le paiement des loyers par un locataire ne pouvant lui-même procéder à leur exploitation et sur la garantie, par la société chargée de la réalisation des travaux, du paiement de ces loyers ; que l’étude réalisée à la demande de l’assureur de la société Cincinnatus par la société Europe Expertise Assurance, courant 2013, conclut que l’analyse des comptes des exercices clos les 31 août 2002 et 31 août 2003 ne permettait pas à un investisseur de déceler des indices annonçant des difficultés financières pouvant conduire au dépôt de bilan ; mais que, d’une part, les conséquences d’un retard dans l’exécution des travaux ne pouvaient apparaître, compte tenu des délais de ceux-ci, dès le 31 août 2003 ; que, d’autre part, que la société Sogecif avait déjà, selon le rapport, dû abandonner une créance dont elle disposait sur la future société locataire qui devait, depuis 2002, payer 10 % du loyer prévu alors qu’elle ne pouvait exploiter les locaux ; qu’enfin, la société Financière Barbatre n’a dégagé, en 2003, un bénéfice d’exploitation que grâce à la vente d’un navire, acquis dans le cadre de son activité antérieure ; que cette étude, postérieure, n’atteste donc nullement du caractère « totalement sécurisé » du montage conseillé ; que l’article de la revue Investissements Conseils publié en novembre 2002 qui conclut à l’existence d’un projet « ultra séduisant » ne peut dispenser la société Cincinnatus, professionnelle en gestion de patrimoine et dotée, selon le bilan patrimonial de M. A…, « d’une équipe d’une quinzaine de conseillers en gestion de patrimoine assistée de spécialistes juridiques et fiscaux » de procéder à sa propre analyse ; que ces pièces et la brochure présentant l’opération ne permettent donc pas à la société Cincinnatus de justifier que, malgré les carences précitées du bilan patrimonial, elle a rempli son obligation de conseil ; qu’elle a donc commis une faute de ce chef ; qu’en ce qui concerne son attitude postérieure à la signature des actes, que la société Cincinnatus verse aux débats des comptes-rendus de chantier ainsi qu’un courrier établissant qu’elle ne s’est nullement désintéressée de l’avancement des travaux de réhabilitation du […] dans le courant de l’année 2003 ; qu’en outre, que M. A… ne justifie pas que les appels de fonds de la société Sogecif lui ont été transmis par la société Cincinnatus ; que ses griefs postérieurs à la signature des actes ne sont donc pas justifiés (arrêt, p. 25 à 27)

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE tenu d’une obligation de conseil et d’information à l’égard de son client, le conseil en gestion de patrimoine doit informer ce dernier des conditions auxquelles le succès de l’opération financière projetée est subordonné et des risques qui découlent du défaut de réalisation de ces conditions ; que si le bilan effectué par la société de conseil en gestion de patrimoine comporte un volet complet quant aux avantages fiscaux et à l’engagement financier de l’offre faite à M. A…, présentant avec clarté la ventilation entre le coût du bien acquis en l’état et le coût des travaux, dont il ressort avec évidence qu’ils constituent l’essentiel du prix, et détaillant le budget prévisionnel des travaux, il présente de manière générale l’investissement immobilier commercialisé par la société Vastalis, sans plus de renseignements sur les sociétés intervenantes que leur dénomination sur la brochure de présentation du programme et se conclut par la mention: « Vous allez disposer d’une sécurité totale sur votre investissement… votre montage sera totalement sécurisé. » ; que force est de constater que la présentation de l’investissement proposé à M. A…, qui occupe les pages 33 à 46 du bilan patrimonial établi par la société Cincinnatus, ne comporte aucune explication sur l’opération de restauration immobilière elle-même, notamment les conditions nécessaires à l’exécution des travaux, comme la formation d’une ASL regroupant les copropriétaires, seule habilitée à solliciter l’obtention du permis de construire, alors que l’exécution des travaux est la condition de la déduction fiscale. La seule mention, au titre des obligations de l’investisseur : « L’opération de restauration doit être à l’initiative des copropriétaires » n’est pas de nature à informer suffisamment l’investisseur, auquel est présenté un investissement « clé en main » sécurisé, sur ses obligations et les risques encourus en cas de retard dans le démarrage des travaux ou de l’inexécution de ceux-ci, alors qu’une date de fin de chantier est expressément indiquée dans la proposition faite par la société Cincinnatus et que la perception des loyers apparaît comme garantie aux dates et pour les montants suivants: 14 6 HT/an/m2 de décembre 2002 à août 2004 et 140 6HT/an/m2 à compter du 01/09/2004 ; qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que, s’il peut être admis que la société Cincinnatus, conseil en gestion de patrimoine, n’avait pas de raison de douter de la fiabilité des entreprises du groupe Barbatre, en 2002, elle a manqué à son obligation d’information et à son devoir de conseil préalablement à l’investissement effectué par M. A… ; qu’en ce qui concerne les griefs faits à la société Cincinnatus quant à son attitude postérieurement à la signature des actes, celle-ci verse aux débats des compte-rendus de chantier ainsi qu’un courrier établissant qu’elle ne s’est nullement désintéressée de l’avancement des travaux de réhabilitation du […] dans le courant de l’année 2003 et il n’est produit aucun élément de nature à établir que la faisabilité de l’opération a été mise en péril avant le mois de février 2004, date à laquelle la société Cincinnatus a été déchargée de toute obligation vis-à-vis de M. A…, celui-ci ayant confié ses intérêts à M. Q… au sein de la société Orbéator ; qu’il convient de rappeler que ce n’est qu’en octobre 2007 que les sociétés du groupe Barbatre ont été placées en redressement judiciaire ; que le demandeur ne peut, en conséquence, reprocher à la société Cincinnatus de ne l’avoir pas informé des difficultés rencontrées par le promoteur immobilier et de ne pas lui avoir conseillé de cesser de donner son accord à sa banque pour le paiement des acomptes sur travaux, étant relevé que les versements de M. A… à ce titre sont intervenus en décembre 2002 puis en juillet et décembre 2003 et qu’il ne résulte pas des pièces produites que les appels de fonds qui lui ont été adressés par la société Sogecif ont transité par la société Cincinnatus (jugement, p. 8 et 9) ;

1°) ALORS QUE l’obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s’étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours normal de l’investissement qu’il a proposé à son client, lorsque ces aléas ne présentent aucune spécificité et sont de la connaissance de tous ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que la société Cincinnatus avait manqué à ses obligations de conseil en gestion de patrimoine en ne procédant, dans l’étude réalisée par M. Q…, « à aucune analyse de l’investissement proposé, en n’informant M. A… que des avantages de l’opération, en ne l’avisant ni des conditions auxquelles le succès de l’opération était subordonné ni des risques susceptibles de découler du défaut de réalisation de ces conditions et en faisant état d’une sécurité totale de l’investissement » (arrêt, p. 26 dernier §) ; qu’en se prononçant ainsi, tandis que la société Cincinnatus n’était pas tenue de mettre en garde M. A… sur le fait que toute opération d’investissement immobilier aux fins de défiscalisation est susceptible d’échouer en cas de défaillance ultérieure de l’un des participants au projet de construction, risque inhérent à toute opération immobilière et de la connaissance de tous, et qui ne présentait aucune spécificité au regard du placement proposé, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231 du même code ;

2°) ALORS QUE l’obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s’étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l’investissement qu’il a proposé à son client, dès lors qu’à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d’aucun élément de nature à l’alerter sur le risque d’un échec prévisible de l’opération d’investissement ; qu’en l’espèce, la société Cincinnatus faisait valoir que, lorsque le placement litigieux avait été proposé à M. A… en 2001 et 2002, elle avait préalablement procédé à des investigations sur la santé financière des sociétés du groupe Barbatre et sur l’état d’avancement du projet, sans disposer de la moindre information permettant de douter du succès de l’opération projetée, qui répondait notamment à l’ensemble des critères permettant de bénéficier des dispositions défiscalisantes de la loi Malraux (concl., p. 17 à 19) ; que la cour d’appel a néanmoins retenu qu’il « appartenait au conseil en gestion de patrimoine, tenu à une obligation de conseil, d’informer M. A… des risques encourus du fait des aléas susceptibles d’être rencontrés dans l’exécution des travaux » et que « le pourcentage de commercialisation du programme ne suffisait pas en soi à garantir le succès de l’opération qui était tributaire de la bonne fin des travaux », « d’autant plus que, compte tenu de la nécessité pour les investisseurs de constituer une ASL chargée de solliciter le permis de construire et de l’importance des travaux nécessaires, le délai pour réaliser ceux-ci avant le 1er juillet 2004 était bref » (arrêt, p. 26 § 7 et 8) ; qu’en se prononçant ainsi par des motifs impropres à caractériser en quoi la société Cincinnatus, qui n’est pas un professionnel de la construction immobilière, avait pu identifier le moindre élément révélant un risque d’échec de l’opération à la date de la décision d’investir de M. A…, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231 du même code ;

3°) ALORS QUE l’obligation de renseignement, de conseil et de mise en garde incombant au conseil en gestion de patrimoine ne s’étend pas aux aléas juridiques ou financiers susceptibles de survenir pendant le cours de l’investissement qu’il a proposé à son client, dès lors qu’à la date à laquelle il a conseillé ce placement, il ne disposait d’aucun élément de nature à l’alerter sur le risque d’un échec prévisible de l’opération d’investissement ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté, par motifs réputés adoptés, que la société Cincinnatus n’avait « pas de raison de douter de la fiabilité des entreprises du groupe Barbatre en 2002 » et qu’il n’était « produit aucun élément de nature à établir que la faisabilité de l’opération a été mise en péril avant le mois de février 2004, date à laquelle la société Cincinnatus a été déchargée de toute obligation vis-à-vis de M. A… » (jugement, p. 9 § 3 et 4) ; qu’en décidant néanmoins que la société Cincinnatus avait manqué à son devoir de conseil envers M. A… pour ne pas l’avoir alerté sur les risques d’échec de l’investissement immobilier proposé, après avoir constaté que de tels risques n’étaient pas caractérisés à la date à laquelle M. A… avait décidé d’investir ni même à la date à laquelle il avait déchargé la société Cincinnatus de son mandat, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231 du même code.

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Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 septembre 2019, 18-21.403 18-23.166, Inédit