Cour de cassation, Chambre commerciale, 4 décembre 2019, 18-19.969, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Olivier Négrin · L'ESSENTIEL Droit de l'immobilier et urbanisme · 1er février 2020
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 4 déc. 2019, n° 18-19.969
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-19.969
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 2 avril 2018
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000039621859
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CO00896
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

JL

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 4 décembre 2019

Rejet

M. GUÉRIN, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 896 F-D

Pourvoi n° C 18-19.969

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ Mme W… G…, épouse C…, domiciliée […] , prise en son nom personnel et en qualité de conjoint survivant de L… C…

2°/ Mme U… C…, domiciliée […] , prise en qualité d’héritière de L… C…,

3°/ M. P… C…, domicilié […] , pris en qualité d’héritier de L… C…,

contre l’arrêt rendu le 3 avril 2018 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige les opposant au directeur général des finances publiques, domicilié […] ,

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 15 octobre 2019, où étaient présents : M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de Mme C…, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques, l’avis de Mme Pénichon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à Mme U… C… et à M. P… C… du désistement de leur pourvoi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 3 avril 2018), que L… C… et son épouse, Mme C…, seuls associés de la société civile agricole du domaine de […] (la SCA), propriétaire d’un château du XVème siècle inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques et de terres agricoles à […] (Nièvre), ont, par actes des 30 décembre 1981, 18 décembre 1991 et 21 décembre 2001, apporté à cette société l’usufruit temporaire d’un immeuble de rapport sis à […], pour des durées successives de dix années ; que le 21 décembre 2010, l’administration fiscale leur a notifié une proposition de rectification au titre de leur impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les années 2004 à 2010, considérant que l’apport d’usufruit effectué constituait une opération à visée exclusivement fiscale et qu’il y avait lieu de réintégrer la valeur en pleine propriété de cet immeuble dans l’assiette de cet impôt ; qu’après saisine de la commission de l’abus de droit et des commissions départementales de conciliation, puis rejet de leur réclamation et mise en recouvrement des impositions contestées, assorties de pénalités, M. et Mme C… ont saisi le tribunal de grande instance aux fins de décharge ; que L… C… est décédé en cours d’instance, laissant sa veuve pour héritière ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme C… fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes de décharge des droits rappelés alors, selon le moyen :

1°/ que le juge doit en toute circonstance observer le principe de la contradiction ; que l’administration a contesté l’opération d’apport d’usufruit temporaire, considérant qu’elle constituait un abus de droit dès lors qu’elle relevait d’une construction juridique élaborée dans le seul but d’éluder l’impôt, puis, que M. et Mme C… ont agi dans un but exclusivement fiscal ; que pour retenir l’abus de droit, la cour a jugé que le caractère fictif de l’opération se dégage ainsi à la lumière des éléments suivants : – l’usufruit temporaire porte sur un bien immobilier, les nus-propriétaires se sont réservés la jouissance de deux appartements à titre de résidence principale et d’un troisième pour leur fille sans que cette situation ne soit prévue dans l’acte d’apport temporaire d’usufruit ; – La perception de loyers pour le reste de l’immeuble se fait au bénéfice d’une société civile relevant de l’article 8 du code général des impôts, dont la totalité des parts est détenue par les apporteurs ; – Les associés appréhendant la quasi-totalité des revenus produits puisque cette société ne procède à aucun investissement pour son propre compte ; qu’en fondant l’abus de droit litigieux sur le caractère fictif de l’opération d’apport d’usufruit temporaire qui permettait d’éluder les charges fiscales tirées des articles 885 E et 885 G du code général des impôts, quand l’administration justifiait l’existence d’un abus de droit par le critère alternatif et non cumulatif du but exclusivement fiscal de cette opération et de la recherche du bénéfice de l’application littérale d’un texte à l’encontre des objectifs poursuivis par son auteur, seul critère discuté par les parties à l’appui de leurs écritures d’appel, la cour d’appel a soulevé d’office un moyen, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, de sorte qu’elle a violé les dispositions de l’article 16 du code de procédure civile ;

2°/ qu’un acte est constitutif d’un abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales soit parce qu’il est fictif soit parce qu’il n’est pas fictif mais a un but exclusivement fiscal en recherchant le bénéfice de l’application littérale d’un texte ou d’une décision à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ; que ces deux critères sont alternatifs et non cumulatifs ; que la cour d’appel juge que le caractère fictif de l’opération se dégage d’un certain nombre de faits qu’elle liste pour en déduire que l’opération ne présentait qu’une préoccupation fiscale ; qu’en fondant l’abus de droit litigieux tant sur le caractère fictif de l’opération d’apport d’usufruit temporaire que sur la préoccupation purement fiscale de M. et Mme C…, la cour d’appel a mélangé les deux branches alternatives de l’abus de droit, privant ainsi sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

3°/ que pour être fictif un acte doit dissimuler une autre réalité ; qu’un acte d’apport d’usufruit temporaire d’un immeuble locatif à une société n’est pas fictif dès lors que la réalité de cet apport et celle de cette société qui en a bénéficié, ne sont pas contestées, cette société fonctionnant réellement et percevant effectivement les loyers de cet immeuble et en assurant les charges d’entretien ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que les époux C… ont apporté l’usufruit de l’immeuble du […] en 1981 pour dix ans et qu’ils ont renouvelé ensuite cet apport à deux reprises, en 1991 et en 2001, que la SCA du Domaine de […] a effectivement perçu les loyers de cet immeuble et a réalisé, grâce à ces loyers, des travaux sur le château dont elle est propriétaire à […] dans la Nièvre; qu’en considérant néanmoins que l’opération d’apport d’usufruit litigieuse présentait un caractère fictif dès lors que les nus-propriétaires s’étaient réservés la jouissance de trois appartements pour eux-mêmes et leur fille, à titre de résidence principale, sans que cette situation n’ait été prévue dans la convention d’apport, que la perception des loyers se faisait au profit d’une société qui relevait du régime fiscal de l’article 8 du code général des impôts, dont les nus-propriétaires détenaient la totalité des parts et appréhendaient la quasi-totalité des loyers, la cour d’appel, statuant par des motifs inopérants, n’a donc pas caractérisé l’existence d’un abus de droit en fonction du caractère fictif d’un acte, que ce

soit la fictivité de l’acte d’apport d’usufruit temporaire ou celle de la société SCA du Domaine de […], de sorte qu’elle a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

4°/ que les sociétés civiles ont une personnalité juridique distincte de leurs associés, qu’elles soient ou non soumises au régime fiscal des sociétés de personnes défini à l’article 8 du Code général des impôts, qui permet seulement d’imposer les bénéfices qu’elles réalisent au nom de leurs associés sans pour autant leur attribuer la disposition desdits bénéfices ; que les bénéfices des sociétés régies par l’article 8 précité ne peuvent donc pas être regardés comme étant appréhendés par leurs associés, à défaut de fictivité desdites sociétés ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que la réalité de la SCA du Domaine de […] n’était pas contestée ; qu’en estimant que le caractère fictif de l’opération résultait du fait que les époux C… étaient les destinataires finaux des recettes locatives et qu’ils avaient appréhendé la quasi-totalité des loyers procurés par l’usufruit temporaire de l’immeuble du […] , bien que les bénéfices de la SCA du Domaine de […] ne puissent être automatiquement appréhendés par ses associés en application de l’article 8 précité et qu’il ne fût ni allégué ni démontré que cette société fût fictive, la cour d’appel a violé les articles 8 du code général des impôts et L. 64 du livre des procédures fiscales ;

5°/ que, pour juger que l’opération d’apport d’usufruit temporaire litigieuse était constitutive d’un abus de droit, la cour d’appel a jugé, d’une part, que « les associés appréhendant la quasi-totalité des revenus produits puisque cette société ne procède à aucun investissement pour son propre compte », d’autre part que « la perception des loyers de l’immeuble parisien vont bien au-delà des besoins de financement pour le château et que les recettes cumulées de l’immeuble démembré sont supérieures aux travaux entrepris. Ce que confirme le comité de l’abus de droit fiscal, qui indique, que les recettes nettes (

) étaient plus de trois fois supérieures au montant des travaux payés dans le château » ; qu’en considérant à la fois que la SCA du Domaine de […] ne procédait à aucun investissement pour son propre compte et qu’elle réalisait des travaux sur le château pour un montant inférieur aux loyers provenant de l’immeuble démembré ce dont il résultait que la SCA avait effectivement investi une partie des loyers pour son propre compte dans la réalisation de travaux dans le château dont elle est propriétaire, la cour d’appel a entaché sa décision de contradiction de motifs et violé les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que caractérise un abus de droit l’acte non fictif à but exclusivement fiscal pour lequel le contribuable ne peut pas justifier d’un intérêt civil, économique ou financier ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que l’étude des déclarations de 2003 à 2009, sous forme de tableau déclinant les revenus et les travaux dans le château, montre que les loyers de l’immeuble parisien vont bien au-delà des besoins de financement pour le château et qu’ils sont supérieurs aux travaux entrepris, ce que confirme le comité de l’abus de droit fiscal qui indique que les recettes nettes étaient plus de trois fois supérieures au montant des travaux payés dans le château ; qu’il ressort de ces constatations qu’une partie des loyers avaient effectivement permis de réaliser des travaux dans le château et que l’apport d’usufruit temporaire litigieux avait donc un but économique et financier, de sorte qu’en considérant que l’opération de transfert de l’immeuble parisien renouvelée depuis 1981 et notamment sur la période de 2001-2010 ne présentait qu’une préoccupation purement fiscale, à savoir la diminution de la base imposable en matière d’ISF, la cour d’appel n’a pas tiré toutes les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article L.64 du livre des procédures fiscales ;

7°/ que relève de l’abus de droit par fraude à la loi, l’acte non fictif à but exclusivement fiscal pour lequel le contribuable ne peut pas justifier d’un intérêt civil, économique ou financier ; que constitue un intérêt économique et financier l’apport par deux époux de l’usufruit temporaire d’un immeuble locatif à une société civile dont ils sont associés, dès lors que cet apport procure à cette société les ressources nécessaires à la réalisation de travaux et l’entretien du château dont elle est propriétaire et lui offre la capacité financière d’emprunter, peu important que les revenus locatifs excèdent ou non les besoins financiers de cette société ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que la SCA du Domaine de […], bénéficiaire de l’apport en usufruit temporaire litigieux a perçu les loyers provenant de cet usufruit et les a employés pour partie à la restauration de son château ; qu’en estimant que l’acte d’apport de l’usufruit temporaire de l’immeuble parisien du […] , en date du 21 décembre 2001, avait un but exclusivement fiscal sous prétexte que les loyers procurés par cet immeuble, seraient trois fois supérieurs au montant des travaux payés dans ledit château et iraient bien au-delà des besoins de financement des travaux réalisés par la SCA du Domaine de […] sur ledit château, et que les nus-propriétaires s’étaient réservés la jouissance de deux appartements à titre de résidence principale et leur fille un troisième, la cour a statué par des motifs inopérants, insusceptibles de caractériser le but exclusivement fiscal de l’acte litigieux et donc l’absence d’un intérêt civil, économique ou financier de l’apport d’usufruit litigieux, de sorte qu’elle a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

8°/ que relève de l’abus de droit par fraude à la loi, l’acte non fictif à but exclusivement fiscal pour lequel le contribuable ne peut pas justifier d’un intérêt civil ou économique ; que l’apport à une société de l’usufruit temporaire d’un immeuble peut être réalisé par des conventions successives et qu’aucune loi n’impose au contribuable de modifier ses choix juridiques de manière à augmenter le montant de son impôt ; qu’en estimant, pour caractériser le but exclusivement fiscal de l’opération, qu’il était indéniable que les travaux du château de […] pouvaient être financés sans avoir recours à l’apport d’usufruit et que le choix de l’usufruit temporaire sur une durée de 10 ans, renouvelable n’était pas neutre dans la mesure où il était plus avantageux d’opter pour ce montage que pour celui d’une période de 20 ou 30 ans car c’est 40 % et 60 % de la valeur de l’immeuble qui est alors prise en compte, bien que le contribuable ait le libre choix des modalités de financement d’une société que ce soit par apports en numéraire ou en usufruit, ou encore par des emprunts ou des avances en compte courant, et qu’il ne soit jamais tenu de retenir la solution juridique la moins avantageuse fiscalement, la cour d’appel a retenu des considérations impropres à caractériser le but exclusivement fiscal de l’opération litigieuse et a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

9°/ que relève de l’abus de droit par fraude à la loi, l’acte non fictif qui à la fois a un but exclusivement fiscal et recherche le bénéfice de l’application littérale de textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ; qu’en l’espèce, à l’appui de ses conclusions d’appel, Mme C… faisait valoir que la condition tenant à la recherche du bénéfice de l’application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par le législateur n’avait pas été caractérisée par l’administration ; qu’en retenant néanmoins que M. et Mme C… avaient poursuivi, par l’apport d’usufruit temporaire litigieux, un but purement fiscal, à savoir la diminution de la base imposable en matière d’ISF sans caractériser cette seconde condition cumulative de l’abus de droit par fraude à la loi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L.64 du livre des procédures fiscales ;

10°/ que l’abus de droit par fraude à la loi suppose la recherche du bénéfice de l’application littérale d’un texte à l’encontre des objectifs poursuivis par son auteur, ce qui exclut qu’une opération née d’événements antérieurs à l’entrée en vigueur dudit texte, puisse être qualifiée d’abus de droit par fraude à la loi ; que l’article 885 G du code général des impôts qui prévoit que l’usufruitier est en principe seul redevable de l’impôt sur la fortune en cas de démembrement de propriété et l’article 885 A du même code qui prévoit que seules les personnes physiques sont soumises à cet impôt, sont issus de la loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981 ; qu’un apport d’usufruit temporaire d’un immeuble de rapport à une société, réalisé antérieurement à l’entrée en vigueur de ce texte, pour permettre à cette société de disposer de ressources pérennes en vue d’emprunter les fonds nécessaires à la réalisation de son objet, puis, renouvelé par des conventions successives de sorte que l’usufruit apporté n’est jamais sorti du patrimoine de la société depuis la signature de la première convention d’apport, antérieur à l’entrée en vigueur de la loi précitée, ne saurait donc être regardé comme ayant eu pour but exclusif d’éluder le paiement de l’impôt sur la fortune en recherchant le bénéfice d’une application littérale d’un texte à l’encontre des objectifs poursuivis par ses auteurs ; qu’en considérant que la circonstance que l’organisation de l’usufruit temporaire litigieux ait été choisie en 1981, avant la création de l’impôt sur la fortune, était sans objet dès lors que le litige portait sur l’apport réalisé en 2001 et qu’en tout état de cause, les redevables ont reconduit cette opération en 1991 et en 2001, postérieurement à l’application de l’ISF, bien qu’aucun transfert effectif d’usufruit ne fût réalisé en 2001 entre le patrimoine de M. et Mme C… et celui de la SCA du Domaine de […], celle-ci disposant de cet usufruit de manière continue depuis 1981 du fait du renouvellement dudit apport avant son échéance, de sorte que l’antériorité de la sortie de l’usufruit litigieux du patrimoine de M. et Mme C… et de son entrée dans celui de la SCA du Domaine de […] par rapport à la création de l’impôt sur la fortune permettait d’écarter la qualification d’abus de droit par la recherche du bénéfice de l’application d’un texte contraire à l’objectif poursuivi par le législateur lors de l’adoption des articles 885 A et 885 G du code général des impôts en 1981, la cour d’appel a violé ces textes et l’article L.64 du livre des procédures fiscales ;

Mais attendu, en premier lieu, que pour écarter l’acte d’apport d’usufruit réalisé par M. et Mme C… au profit de la SCA, l’arrêt retient que les premiers ont recherché le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs afin d’éluder ou atténuer leurs charges fiscales, en faisant échapper leur immeuble de rapport au principe de taxation de l’article 885 E du code général des impôts, pour le placer dans le champ d’application de l’article 885 G ; qu’il en résulte que, pour restituer à l’acte d’apport d’usufruit son véritable caractère, la cour d’appel ne s’est fondée ni sur son caractère fictif, ni sur le caractère fictif de la SCA, de sorte que c’est sans méconnaître le principe de la contradiction, ni confondre les deux branches alternatives de l’abus de droit, qu’elle a retenu l’existence de celui-ci ;

Attendu, en deuxième lieu, que la cour d’appel n’ayant pas retenu que l’acte d’apport d’usufruit et que la SCA avaient un caractère fictif mais que l’opération de transfert de l’usufruit renouvelée depuis 1981 s’inscrivait dans la seule perspective de la diminution de l’assiette de l’ISF, le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, est inopérant ;

Attendu, en troisième lieu, que l’arrêt relève que l’acte d’apport temporaire d’usufruit mentionnait que cette opération devait permettre à la SCA de disposer de ressources suffisantes par la perception des loyers de l’immeuble apporté ainsi que d’une ouverture de crédit de 500 000 francs, soit 77 224 euros, pour financer les travaux de réhabilitation du château lui appartenant ; qu’il constate, à l’examen des déclarations faites par M. et Mme C… de 2003 à 2009, que le montant des loyers encaissés va bien au-delà des besoins de financement générés par l’entretien et la restauration du château puisque ces loyers se sont élevés à plus de trois fois le coût des travaux réalisés ; qu’il retient ensuite qu’au regard des revenus des redevables et du montant des travaux, ceux-ci pouvaient être financés sans qu’il soit nécessaire de procéder à l’apport d’usufruit ; qu’il retient encore que le choix de l’usufruit temporaire d’une durée de dix années, renouvelable, était plus avantageux que celui portant sur une période de vingt ou trente ans ; qu’il ajoute que ces derniers se sont réservés la jouissance de deux appartements dans cet immeuble pour leur résidence principale, ainsi que d’un troisième appartement pour leur fille, et que la SCA, qui percevait l’ensemble des loyers du surplus de l’immeuble, était soumise aux dispositions de l’article 8 du code général des impôts ; que de ces constatations et appréciations, exemptes de contradiction, la cour d’appel a pu déduire qu’en renouvelant en 2001 l’apport de l’usufruit de leur immeuble parisien à la SCA, M. et Mme C… avaient recherché le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs afin d’atténuer de manière très sensible leurs charges fiscales ;

Et attendu, en dernier lieu, qu’ayant retenu que l’acte d’apport d’usufruit conclu en 1981, antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 81-1160 du 30 décembre 1981 instituant l’impôt sur les grandes fortunes, n’était pas en cause, dès lors que le litige portait sur les conséquences de l’acte d’apport d’usufruit passé en 2001, puis relevé que cet acte d’apport était postérieur à l’entrée en vigueur de la loi instaurant l’ISF, la cour d’appel a pu décider que cet apport d’usufruit, inspiré par la recherche d’un objectif purement fiscal, caractérisait un abus de droit ;

D’où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n’est pas fondé pour le surplus ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que Mme C… fait le même grief à l’arrêt alors, selon le moyen, que la prescription abrégée de trois ans, prévue par l’article L.180 du livre des procédures fiscales, s’applique dès lors que l’administration a eu connaissance de l’exigibilité des droits par l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration, sans avoir besoin de recourir à des recherches ultérieures ; que l’enregistrement d’une convention de renouvellement de l’apport, par un particulier à une personne morale, de l’usufruit temporaire d’un immeuble permet à l’administration de constater que l’immeuble en cause sera exclu, à compter de l’apport, de l’assiette de l’impôt sur la fortune dudit particulier par application de l’article 885 G du code général des impôts et donc d’atténuer sa charge fiscale, sans avoir à procéder à une quelconque recherche ultérieure ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que l’apport d’usufruit temporaire de l’immeuble du […] à la SCA du Domaine de […] par M. et Mme C…, datait initialement de 1981 et avait été renouvelé en 1991 avant de l’être par la convention du 21 décembre 2001 ; que, pour écarter la prescription abrégée du délai de reprise de l’administration, la cour retient que les recherches de l’administration lui ont montré que le démembrement temporaire de la propriété de l’immeuble réalisé en 2001 pour une durée de 10 ans permettait d’atténuer leur charge fiscale à compter de 2002 ; qu’en statuant ainsi quand l’acte du 21 décembre 2001 révélait à lui seul l’exclusion de l’immeuble litigieux de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune dû par M. et Mme C…, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L.180 du livre des procédures fiscales et 885 G du code général des impôts ;

Mais attendu qu’après avoir relevé que l’acte d’apport d’usufruit enregistré en 2001 ne permettait pas d’établir, par son seul examen, que le démembrement temporaire de propriété qu’il contenait n’avait été fait que dans le but de diminuer la charge fiscale supportée par M. et Mme C…, l’arrêt retient que, pour déterminer quelle avait été la motivation fiscale de ce choix d’organisation de la propriété, l’administration avait dû procéder au contrôle du fonctionnement de la SCA ; que la cour d’appel en a exactement déduit qu’était applicable le délai de reprise de six ans ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que Mme C… fait le même grief à l’arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque l’administration remet en cause, en application de l’article L. 17 du livre des procédures fiscales, la valeur vénale d’un immeuble et qu’elle a recours, pour établir sa propre évaluation, à des termes de comparaison, ces derniers doivent être intrinsèquement similaires en fait et en droit au bien à évaluer ; que cette similitude s’apprécie en particulier au regard de la localisation des termes de comparaison dans des quartiers comparables à celui du bien à évaluer ; qu’à l’appui de ses conclusions d’appel, Mme C… faisait valoir que les termes de comparaison retenus par l’administration pour évaluer l’immeuble […] étaient situés respectivement dans les beaux quartiers des 7ème, 15 ème, 16ème et 17ème arrondissements (Ecole Militaire, Javel, Necker, Grenelle, Chaillot, Trocadéro, Ternes, Plaine-Monceau), alors que l’immeuble à évaluer était situé près de la Porte de […] et du boulevard extérieur, dénommé […], soit à l’extrémité du sud du 16 ème arrondissement et à proximité de […] ; qu’elle précisait que l’immeuble en cause était à cent mètres du […], dont le club résident était le […], ainsi que du Stade […], que ces deux complexes sportifs pouvaient accueillir respectivement jusqu’à 45 000 et 20 000 spectateurs et que le […] organisait annuellement environ 30 matchs de football ainsi que des concerts tandis que 16 matchs de rugby se tenaient annuellement au stade […] ; que ces matchs et concerts se tenaient tant en semaine que le week-end, en journée comme en soirée ; que Mme C… relevait, dans ces conditions, que les occupants de l’immeuble subissaient de multiples nuisances (circulation très difficile, installation de périmètres de sécurité, interdiction de stationnement, passages très fréquents des supporters et autres spectateurs tout au long de l’année, agressions physiques, nuisances sonores et dégradations diverses) ; qu’elle soulignait encore que ce quartier apparaissait, contrairement au 16ème Nord et même au quartier de la Porte d’Auteuil très inanimé, à l’exception de l’animation apportée par les supporters, et dépourvu de commerces de proximité, et que la valorisation de ce quartier était considérablement plus faible que celle des autres quartiers du 16ème arrondissement, y compris ceux de la Porte d’Auteuil et de la rue d’Auteuil ; qu’en se bornant, pour affirmer la similarité de localisation de l’immeuble à évaluer avec les termes de comparaison retenus, à relever, d’une manière générale, que les critiques de Mme C… sont mal fondées dès lors que l’administration a choisi des immeubles entiers, de superficies cohérentes, si possible, situés dans l’ouest parisien, pour certains dans le 16è arrondissement, sans rechercher comme ils y étaient invités par Mme C…, si les termes de comparaison n’étaient pas situés dans des quartiers très différents de celui du bien à évaluer situé Porte de […], à proximité de deux stades sportifs générant des nuisances et sans commerces proches, ce qui les rendaient impropres à une évaluation par comparaison du bien en cause, comme l’avait relevé la commission départementale de conciliation elle-même lors de sa séance du 17 septembre 2013, les juges d’appel ont privé leur décision de base légale au regard des exigences des articles 885 D, 885 S, 761 du code général des impôts et L.17 du livre des procédures fiscales ;

2°/ qu’à l’appui de ses conclusions devant la cour d’appel, Mme C… contestait la méthode de valorisation de l’immeuble sis […] , faisant valoir que pour déterminer la valeur vénale par comparaison de l’immeuble sis […] , il convenait d’examiner la valeur de marché d’immeubles, d’une surface aussi importante, et situés dans le même quartier, avec les mêmes caractéristiques sur les années 2004 à 2010, ce qui ne ressort pas de la proposition de rectification envoyée à M. et Mme C…, qui n’est pas motivée au sens de l’article L.57 du livre des procédures fiscales, du fait de l’absence de termes de comparaison pertinents, ce qui justifie la nullité de la procédure d’imposition ; qu’à défaut d’avoir répondu à ce moyen, la cour d’appel n’a pas motivé sa décision et a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l’arrêt constate que l’immeuble, décrit par l’administration dans sa proposition de rectification, a été édifié en 1929, qu’il est situé dans le seizième arrondissement de Paris, dans le quartier recherché d’Auteuil, et qu’il est composé d’un corps de bâtiment en façade sur rue comprenant un rez de chaussée élevé de six étages, outre deux étages en combles ; qu’il ajoute que l’immeuble comprend cinquante-deux locaux, dont quarante-trois sont loués, et que sa superficie développée est de 3 868 mètres carrés ; qu’il relève ensuite que son évaluation a été faite selon la méthode de la comparaison et que l’administration a proposé comme éléments de rapprochement des transactions portant sur des immeubles entiers, de superficies cohérentes, si possible situés dans l’ouest parisien, pour certains dans le seizième arrondissement, construits dans des années approchantes du début du vingtième siècle et que le principe d’antériorité des cessions pour chaque année d’évaluation a été respecté ; qu’il relève encore que ces termes de comparaison ont été sélectionnés en se rapprochant, autant que possible, des caractéristiques intrinsèques de l’immeuble de la rue de […] ; qu’en l’état de ses constatations et appréciations, la cour d’appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées en retenant que la proposition de rectification avait été régulièrement motivée, a souverainement retenu , sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que les termes de comparaison présentés par l’administration étaient intrinsèquement similaires et ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que Mme C… fait le même grief à l’arrêt alors, selon le moyen, que la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 1729-b) du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l’article 35-VI de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, qui interviendra à la suite de la question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme C… par mémoire distinct, privera de base légale l’arrêt attaqué et entraînera son annulation en tant qu’il rétablit à la charge de Mme C… la pénalité pour abus de droit dont ont été assortis les droits complémentaires litigieux au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune des années 2004 à 2008 ;

Mais attendu que la Cour de cassation ayant, par un arrêt n° 300 F-D du 20 février 2019, dit n’y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article 1729-b) du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l’article 35-VI de la loi n°2008-1443 du 30 décembre 2008, le moyen est sans portée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme C… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour Mme C…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 février 2016 qui leur avait accordé la décharge des impositions en litige, et, statuant à nouveau, d’avoir dit que la procédure est régulière et d’avoir ordonné le rétablissement des impositions déchargées, sauf prise en compte des propositions de l’administration concernant les valeurs vénales à savoir la valorisation retenue par la commission de conciliation de la Nièvre pour le Château sis à […] ;

AUX MOTIFS que l’existence de l’abus de droit est subordonnée à la démonstration par l’administration du caractère fictif de l’acte, ce qui permet d’éluder les charges fiscales tirées des articles 885 E et 885 G du Code général des impôts, précités ; qu’il est constant qu’à l’époque des faits, M. et Mme C… étaient propriétaires d’un immeuble situé […] , composé de 52 appartements, pour partie donnés en location, à l’exception de trois appartements que les époux C… et leur fille occupaient à titre de résidence principale ; que le foyer fiscal est détenteur depuis 1967 de la totalité des parts de la société SCA, société civile agricole du domaine de […], propriétaire d’un château et de terres dans la Nièvre, le château constituant leur résidence secondaire ; que, par acte du 21 décembre 2001, ils ont apporté l’usufruit temporaire de l’immeuble parisien à la SCA du domaine de […] pour une durée de 10 ans ; que l’actif de la SCA se compose de l’usufruit de l’immeuble locatif parisien et de la propriété nivernaise ; que, par l’opération de démembrement temporaire commencée en 1981, renouvelée depuis, dont celle de 2001 en litige, l’usufruitier, étant une personne morale non assujettie à l’ISF, la valeur de l’immeuble parisien détenu par les époux C… et indirectement au travers de la SCA se trouve imposée uniquement sur la valeur de l’usufruit temporaire ; qu’il résulte de ces éléments, que l’opération a permis une importante économie d’impôt dès lors que 80 % de la valeur de l’immeuble parisien n’est pas prise en compte dans l’actif net imposable à l’ISF du foyer fiscal ; qu’en effet, par le démembrement de propriété, les contribuables ont substitué à leur obligation de déclarer la valeur en pleine propriété, la seule valeur de l’usufruit de cet immeuble via la valorisation des parts de la SCA du domaine de […] qu’ils possèdent en totalité tout en continuant à percevoir les loyers à travers la SCA ; que les objectifs économiques allégués par les époux C… et que le tribunal a retenus à savoir disposer de ressources propres pour financer par le recours à l’emprunt les travaux dans le château, sont démentis par l’analyse effectuée par l’administration fiscale figurant dans sa proposition de rectification ; qu’il ressort en effet des mentions de l’acte d’apport d’usufruit temporaire que l’opération devait permettre de bénéficier de ressources suffisantes procurées par la perception des loyers de l’immeuble parisien et d’une ouverture de crédit de 500 000 F soit 77 224 euros pour financer les travaux de réhabilitation ; que l’étude des déclarations de 2003 à 2009, sous forme de tableau déclinant les revenus et les travaux, montre que la perception des loyers de l’immeuble parisien vont bien au-delà des besoins de financement pour le château ; que les recettes cumulées de l’immeuble démembré sont supérieures aux travaux entrepris, ce que confirme le comité de l’abus de droit fiscal, qui indique, dans son avis que les recettes brutes (

) étaient plus de trois fois supérieures au montant des travaux payés dans le château ; qu’au vu du montant des travaux et des ressources des redevables, il est indéniable que les travaux du château de […] pouvaient être financés sans avoir recours à l’apport d’usufruit ; que Mme C… maintient en appel que l’opération d’apport d’usufruit à la SCA répondait à une logique de protection de patrimoine familial sur le long terme ; que cet argument n’est pas davantage opérant dès lors que comme l’a souligné avec justesse le comité de l’abus de droit fiscal, d’une part, l’usufruit temporaire sur une durée de dix ans ne constitue pas un moyen efficace de protection du conjoint survivant, d’autre part, la constitution de la SCA protégeait le conjoint survivant en lui attribuant toutes les parts en cas de décès ; qu’elle oppose le fait que l’organisation a été choisie en 1981 avant la création de l’impôt sur le fortune, mais cette assertion est sans objet dès lors que le litige porte sur l’apport réalisé en 2001 et qu’en tout état de cause les redevables ont reconduit cette opération en 1991 et en 2001, postérieurement à l’application de l’ISF ; qu’enfin, le choix de l’usufruit temporaire sur une durée de 10 ans, renouvelable n’était pas neutre dans la mesure où il était plus avantageux d’opter pour ce montage que pour celui d’une période de 20 ou 30 ans car c’est 40 et 60 % de la valeur de l’immeuble qui aurait été alors prise en compte ; que, sur l’abus de droit, le caractère fictif de l’opération se dégage ainsi à la lumière des éléments suivants :

— l’usufruit temporaire porte sur un bien immobilier, les nus-propriétaires se sont réservés la jouissance de deux appartements à titre de résidence principale et d’un troisième pour leur fille sans que cette situation ne soit prévue dans l’acte d’apport temporaire d’usufruit ;

— La perception de loyers pour le reste de l’immeuble se fait au bénéfice d’une société civile relevant de l’article 8 du code général des impôts, dont la totalité des parts est détenue par les apporteurs ;

— Les associés appréhendant la quasi-totalité des revenus produits puisque cette société ne procède à aucun investissement pour son propre compte ;

que l’ensemble de ces faits ont permis à l’administration de conclure que l’opération de transfert de l’immeuble parisien renouvelée depuis 1981 et notamment sur la période de 2001 ne présentait qu’une préoccupation purement fiscale, à savoir la diminution de la base imposable en matière d’ISF ; que la procédure est fondée sur la recherche de la motivation fiscale de ce choix d’organisation de la propriété par le contournement de l’article 885 E et de l’article 885 G du code général des impôts ; que le comité d’abus de droit a confirmé l’analyse de l’administration en relevant qu’en faisant échapper l’immeuble de rapport au principe de taxation de l’article 885 E pour le placer artificiellement dans le champ d’exception de l’article 885 G en conférant l’usufruit à une personne non visée par l’article 885 A, les époux C… ont poursuivi un but purement fiscal ;

1°) ALORS QUE le juge doit en toute circonstance observer le principe de la contradiction ; que l’administration a contesté l’opération d’apport d’usufruit temporaire, considérant qu’elle constituait un abus de droit dès lors qu’elle relevait d’une construction juridique élaborée dans le seul but d’éluder l’impôt, puis, que Monsieur et Madame C… ont agi dans un but exclusivement fiscal ; que pour retenir l’abus de droit, la cour a jugé que le caractère fictif de l’opération se dégage ainsi à la lumière des éléments suivants : – l’usufruit temporaire porte sur un bien immobilier, les nus-propriétaires se sont réservés la jouissance de deux appartements à titre de résidence principale et d’un troisième pour leur fille sans que cette situation ne soit prévue dans l’acte d’apport temporaire d’usufruit ; – La perception de loyers pour le reste de l’immeuble se fait au bénéfice d’une société civile relevant de l’article 8 du code général des impôts, dont la totalité des parts est détenue par les apporteurs ; – Les associés appréhendant la quasi-totalité des revenus produits puisque cette société ne procède à aucun investissement pour son propre compte ; qu’en fondant l’abus de droit litigieux sur le caractère fictif de l’opération d’apport d’usufruit temporaire qui permettait d’éluder les charges fiscales tirées des articles 885 E et 885 G du CGI, quand l’administration justifiait l’existence d’un abus de droit par le critère alternatif et non cumulatif du but exclusivement fiscal de cette opération et de la recherche du bénéfice de l’application littérale d’un texte à l’encontre des objectifs poursuivis par son auteur, seul critère discuté par les parties à l’appui de leurs écritures d’appel, la cour d’appel a soulevé d’office un moyen, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, de sorte qu’elle a violé les dispositions de l’article 16 du code de procédure civile

2°) ALORS QUE, en tout état de cause, un acte est constitutif d’un abus de droit au sens de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales soit parce qu’il est fictif soit parce qu’il n’est pas fictif mais a un but exclusivement fiscal en recherchant le bénéfice de l’application littérale d’un texte ou d’une décision à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs; que ces deux critères sont alternatifs et non cumulatifs ; que la cour d’appel juge que le caractère fictif de l’opération se dégage d’un certain nombre de faits qu’elle liste pour en déduire que l’opération ne présentait qu’une préoccupation fiscale ; qu’en fondant l’abus de droit litigieux tant sur le caractère fictif de l’opération d’apport d’usufruit temporaire que sur la préoccupation purement fiscale des époux C…, la cour d’appel a mélangé les deux branches alternatives de l’abus de droit, privant ainsi sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales ;

3°) ALORS QUE pour être fictif un acte doit dissimuler une autre réalité ; qu’un acte d’apport d’usufruit temporaire d’un immeuble locatif à une société n’est pas fictif dès lors que la réalité de cet apport et celle de cette société qui en a bénéficié, ne sont pas contestées, cette société fonctionnant réellement et percevant effectivement les loyers de cet immeuble et en assurant les charges d’entretien ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que les époux C… ont apporté l’usufruit de l’immeuble du […] en 1981 pour dix ans et qu’ils ont renouvelé ensuite cet apport à deux reprises, en 1991 et en 2001, que la SCA du Domaine de […] a effectivement perçu les loyers de cet immeuble et a réalisé, grâce à ces loyers, des travaux sur le château dont elle est propriétaire à […] dans la Nièvre ; qu’en considérant néanmoins que l’opération d’apport d’usufruit litigieuse présentait un caractère fictif dès lors que les nuspropriétaires s’étaient réservés la jouissance de trois appartements pour eux-mêmes et leur fille, à titre de résidence principale, sans que cette situation n’ait été prévue dans la convention d’apport, que la perception des loyers se faisait au profit d’une société qui relevait du régime fiscal de l’article 8 du CGI, dont les nus-propriétaires détenaient la totalité des parts et appréhendaient la quasi-totalité des loyers, la cour d’appel, statuant ainsi par des motifs inopérants, n’a donc pas caractérisé l’existence d’un abus de droit en fonction du caractère fictif d’un acte, que ce soit la fictivité de l’acte d’apport d’usufruit temporaire ou celle de la société SCA du Domaine de […], de sorte qu’elle a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales.

4°) ALORS QUE les sociétés civiles ont une personnalité juridique distincte de leurs associés, qu’elles soient ou non soumises au régime fiscal des sociétés de personnes défini à l’article 8 du Code général des impôts, qui permet seulement d’imposer les bénéfices qu’elles réalisent au nom de leurs associés sans pour autant leur attribuer la disposition desdits bénéfices ; que les bénéfices des sociétés régies par l’article 8 précité ne peuvent donc pas être regardés comme étant appréhendés par leurs associés, à défaut de fictivité desdites sociétés ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que la réalité de la SCA du Domaine de […] n’était pas contestée ; qu’en estimant que le caractère fictif de l’opération résultait du fait que les époux C… étaient les destinataires finaux des recettes locatives et qu’ils avaient appréhendé la quasi-totalité des loyers procurés par l’usufruit temporaire de l’immeuble du […] , bien que les bénéfices de la SCA du Domaine de […] ne puissent être automatiquement appréhendés par ses associés en application de l’article 8 précité et qu’il ne fût ni allégué ni démontré que cette société fût fictive, la cour d’appel a violé les articles 8 du Code général des impôts et L.64 du Livre des procédures fiscales ;

5°) ALORS QUE, pour juger que l’opération d’apport d’usufruit temporaire litigieuse était constitutive d’un abus de droit, la cour d’appel a jugé, d’une part, que « les associés appréhendant la quasi-totalité des revenus produits puisque cette société ne procède à aucun investissement pour son propre compte », d’autre part que « la perception des loyers de l’immeuble parisien vont bien au-delà des besoins de financement pour le château et que les recettes cumulées de l’immeuble démembré sont supérieures aux travaux entrepris. Ce que confirme le comité de l’abus de droit fiscal, qui indique, que les recettes nettes (

) étaient plus de trois fois supérieures au montant des travaux payés dans le château » ; qu’en considérant à la fois que la SCA du Domaine de […] ne procédait à aucun investissement pour son propre compte et qu’elle réalisait des travaux sur le château pour un montant inférieur aux loyers provenant de l’immeuble démembré ce dont il résultait que la SCA avait effectivement investi une partie des loyers pour son propre compte dans la réalisation de travaux dans le château dont elle est propriétaire, la cour d’appel a entaché sa décision de contradiction de motifs et violé les dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.

6°) ALORS QUE caractérise un abus de droit l’acte non fictif à but exclusivement fiscal pour lequel le contribuable ne peut pas justifier d’un intérêt civil, économique ou financier ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que l’étude des déclarations de 2003 à 2009, sous forme de tableau déclinant les revenus et les travaux dans le château, montre que les loyers de l’immeuble parisien vont bien au-delà des besoins de financement pour le château et qu’ils sont supérieurs aux travaux entrepris, ce que confirme le comité de l’abus de droit fiscal qui indique, que les recettes nettes étaient plus de trois fois supérieures au montant des travaux payés dans le château ; qu’il ressort de ces constatations qu’une partie des loyers avaient effectivement permis de réaliser des travaux dans le château et que l’apport d’usufruit temporaire litigieux avait donc un but économique et financier, de sorte qu’en considérant que l’opération de transfert de l’immeuble parisien renouvelée depuis 1981 et notamment sur la période de 2001-2010 ne présentait qu’une préoccupation purement fiscale, à savoir la diminution de la base imposable en matière d’ISF, la cour d’appel n’a pas tiré toutes les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article L.64 du Livre des procédures fiscales ;

7°) ALORS QUE relève de l’abus de droit par fraude à la loi, l’acte non fictif à but exclusivement fiscal pour lequel le contribuable ne peut pas justifier d’un intérêt civil, économique ou financier ; que constitue un intérêt économique et financier l’apport par deux époux de l’usufruit temporaire d’un immeuble locatif à une société civile dont ils sont associés, dès lors que cet apport procure à cette société les ressources nécessaires à la réalisation de travaux et l’entretien du château dont elle est propriétaire et lui offre la capacité financière d’emprunter, peu important que les revenus locatifs excèdent ou non les besoins financiers de cette société ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que la SCA du Domaine de […], bénéficiaire de l’apport en usufruit temporaire litigieux a perçu les loyers provenant de cet usufruit et les a employés pour partie à la restauration de son château ; qu’en estimant que l’acte d’apport de l’usufruit temporaire de l’immeuble parisien du […] , en date du 21 décembre 2001, avait un but exclusivement fiscal sous prétexte que les loyers procurés par cet immeuble, seraient trois fois supérieurs au montant des travaux payés dans ledit château et iraient bien au-delà des besoins de financement des travaux réalisés par la SCA du Domaine de […] sur ledit château, et que les nus-propriétaires s’étaient réservés la jouissance de deux appartements à titre de résidence principale et leur fille un troisième, la cour a statué par des motifs inopérants, insusceptibles de caractériser le but exclusivement fiscal de l’acte litigieux et donc l’absence d’un intérêt civil, économique ou financier de l’apport d’usufruit temporaire litigieux, de sorte qu’elle a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales.

8°) ALORS QUE relève de l’abus de droit par fraude à la loi, l’acte non fictif à but exclusivement fiscal pour lequel le contribuable ne peut pas justifier d’un intérêt civil ou économique ; que l’apport à une société de l’usufruit temporaire d’un immeuble peut être réalisé par des conventions successives et qu’aucune loi n’impose au contribuable de modifier ses choix juridiques de manière à augmenter le montant de son impôt ; qu’en estimant, pour caractériser le but exclusivement fiscal de l’opération, qu’il était indéniable que les travaux du château de […] pouvaient être financés sans avoir recours à l’apport d’usufruit et que le choix de l’usufruit temporaire sur une durée de 10 ans, renouvelable n’était pas neutre dans la mesure où il était plus avantageux d’opter pour ce montage que pour celui d’une période de 20 ou 30 ans car c’est 40 % et 60 % de la valeur de l’immeuble qui est alors prise en compte, bien que le contribuable ait le libre choix des modalités de financement d’une société que ce soit par apports en numéraire ou en usufruit, ou encore par des emprunts ou des avances en compte courant, et qu’il ne soit jamais tenu de retenir la solution juridique la moins avantageuse fiscalement, la cour d’appel a retenu des considérations impropres à caractériser le but exclusivement fiscal de l’opération litigieuse et a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales ;

9°) ALORS QUE relève de l’abus de droit par fraude à la loi, l’acte non fictif qui à la fois a un but exclusivement fiscal et recherche le bénéfice de l’application littérale de textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ; qu’en l’espèce, à l’appui de ses conclusions d’appel, Mme C… faisait valoir que la condition tenant à la recherche du bénéfice de l’application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par le législateur n’avait pas été caractérisée par l’administration ; qu’en retenant néanmoins que les époux C… avait poursuivi, par l’apport d’usufruit temporaire litigieux, un but purement fiscal, à savoir la diminution de la base imposable en matière d’ISF sans caractériser cette seconde condition cumulative de l’abus de droit par fraude à la loi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales ;

10°) ALORS QUE l’abus de droit par fraude à la loi suppose la recherche du bénéfice de l’application littérale d’un texte à l’encontre des objectifs poursuivis par son auteur, ce qui exclut qu’une opération née d’événements antérieurs à l’entrée en vigueur dudit texte, puisse être qualifiée d’abus de droit par fraude à la loi ; que l’article 885 G du CGI qui prévoit que l’usufruitier est en principe seul redevable de l’impôt sur la fortune en cas de démembrement de propriété et l’article 885 A du même Code qui prévoit que seules les personnes physiques sont soumises à cet impôt, sont issus de la loi n°81-1160 du 30 décembre 1981 ; qu’un apport d’usufruit temporaire d’un immeuble de rapport à une société, réalisé antérieurement à l’entrée en vigueur de ce texte, pour permettre à cette société de disposer de ressources pérennes en vue d’emprunter les fonds nécessaires à la réalisation de son objet, puis, renouvelé par des conventions successives de sorte que l’usufruit apporté n’est jamais sorti du patrimoine de la société depuis la signature de la première convention d’apport, antérieur à l’entrée en vigueur de la loi précitée, ne saurait donc être regardé comme ayant eu pour but exclusif d’éluder le paiement de l’impôt sur la fortune en recherchant le bénéfice d’une application littérale d’un texte à l’encontre des objectifs poursuivis par ses auteurs ; qu’en considérant que la circonstance que l’organisation de l’usufruit temporaire litigieux ait été choisie en 1981, avant la création de l’impôt sur la fortune, était sans objet dès lors que le litige portait sur l’apport réalisé en 2001 et qu’en tout état de cause, les redevables ont reconduit cette opération en 1991 et en 2001, postérieurement à l’application de l’ISF, bien qu’aucun transfert effectif d’usufruit ne fût réalisé en 2001 entre le patrimoine des époux C… et celui de la SCA du Domaine de […], celle-ci disposant de cet usufruit de manière continue depuis 1981 du fait du renouvellement dudit apport avant son échéance, de sorte que l’antériorité de la sortie de l’usufruit litigieux du patrimoine des époux C… et de son entrée dans celui de la SCA du Domaine de […] par rapport à la création de l’impôt sur la fortune permettait d’écarter la qualification d’abus de droit par la recherche du bénéfice de l’application d’un texte contraire à l’objectif poursuivi par le législateur lors de l’adoption des articles 885 A et 885 G du CGI en 1981, la cour d’appel a violé ces textes et l’article L.64 du Livre des procédures fiscales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 février 2016 qui leur avait accordé la décharge des impositions en litige, et, statuant à nouveau, d’avoir dit que la procédure est régulière et d’avoir ordonné le rétablissement des impositions déchargées, sauf prise en compte des propositions de l’administration concernant les valeurs vénales à savoir la valorisation retenue par la commission de conciliation de la Nièvre pour le Château sis à […] ;

AUX MOTIFS que, concernant la date du fait générateur de l’abus de droit, Mme C… soutient que la procédure engagée par la proposition de rectification du 21 décembre 2010 est nulle car elle repose sur un fait prescrit, l’apport en usufruit en date du 21 décembre 2001 relevant de la prescription abrégée ; que la prescription de contrôle est celle qui se décompte à partir du fait générateur de l’impôt ; que la prescription abrégée s’applique si l’acte révélateur établit l’exigibilité certaine des droits omis et si l’administration peut constater immédiatement au seul vu du document enregistré, l’existence du fait juridique imposable ; que si un doute subsiste quant à l’exigibilité des droits omis et s’il est nécessaire, pour en apporter la preuve, de procéder à des recherches quelconques, notamment par rapprochement de divers actes ou déclarations et examen de circonstances extrinsèques, le court délai de prescription ne s’applique pas ; qu’en l’espèce, l’acte d’apport réalisé en 2001 est le point de départ des opérations de recherches entreprises par l’administration ; que la procédure d’abus de droit est fondée sur la recherche de motivation fiscale du choix d’organisation de la propriété de l’immeuble parisien et le contournement de l’article 885 E précité ; que l’administration a engagé son contrôle sur le fonctionnement de la SCA en 2010 ; que ses recherches lui ont montré que le démembrement temporaire de la propriété de l’immeuble réalisé en 2001 pour une durée de 10 ans permettait d’atténuer leur charge fiscale à compter de 2002 ; que compte tenu du délai de reprise limitée à 6 ans, en vertu de l’article L 186 du livre des procédures fiscales, l’administration a limité les rappels d’ISF de 2004 à 2010 ; que les renseignements ont été exploités en 2010 dans les limites de la prescription applicable en matière de droits d’enregistrement ; que la procédure est régulière ;

ALORS QUE la prescription abrégée de trois ans, prévue par l’article L.180 du Livre des procédures fiscales, s’applique dès lors que l’administration a eu connaissance de l’exigibilité des droits par l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration, sans avoir besoin de recourir à des recherches ultérieures ; que l’enregistrement d’une convention de renouvellement de l’apport, par un particulier à une personne morale, de l’usufruit temporaire d’un immeuble permet à l’administration de constater que l’immeuble en cause sera exclu, à compter de l’apport, de l’assiette de l’impôt sur la fortune dudit particulier par application de l’article 885 G du Code général des impôts et donc d’atténuer sa charge fiscale, sans avoir à procéder à une quelconque recherche ultérieure ; qu’en l’espèce, il résulte de l’arrêt attaqué que l’apport d’usufruit temporaire de l’immeuble du […] à la SCA du Domaine de […] par les époux C…, datait initialement de 1981 et avait été renouvelé en 1991 avant de l’être par la convention du 21 décembre 2001 ; que, pour écarter la prescription abrégée du délai de reprise de l’administration, la cour retient que les recherches de l’administration lui ont montré que le démembrement temporaire de la propriété de l’immeuble réalisé en 2001 pour une durée de 10 ans permettait d’atténuer leur charge fiscale à compter de 2002 ; qu’en statuant ainsi quand l’acte du 21 décembre 2001 révélait à lui seul l’exclusion de l’immeuble litigieux de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune dû par les époux C…, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L.180 du Livre des procédures fiscales et 885 G du Code général des impôts.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 février 2016 qui leur avait accordé la décharge des impositions en litige, et, statuant à nouveau, d’avoir dit que la procédure est régulière et d’avoir ordonné le rétablissement des impositions déchargées, sauf prise en compte des propositions de l’administration concernant les valeurs vénales à savoir la valorisation retenue par la commission de conciliation de la Nièvre pour le Château sis à […] ;

AUX MOTIFS QUE l’administration a réintégré la valeur en pleine propriété de l’immeuble situé […] dans le patrimoine imposable des époux C…, tout en revoyant à la baisse la valeur des parts sociales de la SCA du Domaine de […] déterminée sur le seul actif constitué par le château de […], soit : Actif net imposable déclaré + valeur de pleine propriété de l’immeuble de la rue de […] + valeur des parts de la SCA du domaine de […] au titre de la seule propriété du château de […] – valeur des parts de la SCA déclarées initialement = Actif net ISF imposable rectifié ; qu’elle a utilisé la méthode comparative pour faire une évaluation de l’immeuble parisien et du château nivernais ; que la loi n’impose aucune méthode, mais la valeur par comparaison est privilégiée ; que la valeur à prendre en considération en matière de droits d’enregistrement est la valeur vénale réelle des biens qui est constituée par le prix qui pourrait être obtenu du bien par le jeu de l’offre et de la demande dans un marché réel, compte tenu de l’état de l’immeuble ; que l’immeuble est décrit dans la proposition de rectification : il est situé au […], quartier recherché d’Auteuil, construit en 1929, composé d’un corps de bâtiment en façade sur rue, d’un rez-de-chaussée, de six étages courants et de deux étages sous combles, d’aspect extérieur soigné et équipé d’un ascenseur ; que l’immeuble comprend 52 locaux dont sont loués ; que la valorisation de cet immeuble entier a été réalisé sur la base d’une surface SDPHO calculée de 3868 m²détaillée dans l’annexe I de la proposition de rectification ; que les intimés évaluent la superficie à 3741 m² ; qu’ils estiment que les caves doivent être pondérées en utilisant un coefficient de 0,2 à 0,3 au lieu de 0,5 retenu par l’administration ; que, toutefois, ils ne justifient pas que l’état des caves légitimerait un si faible coefficient de pondération ; que l’étude comparative à partir de comparaisons similaires est motivée ; que les valeurs issues de la méthode comparative retenue par l’administration dans la proposition de rectification sont les suivantes :

Année Valeurs issues de l’étude comparative

2004 : 10 327 000 euros

2005 : 9 963 600 euros

2006 : 10 822 000 euros

2007 : 10 973 000 euros

2008 : 12087 000 euros

2009 : 11 619 000 euros

2010 : 12 037 000 euros ;

que les valeurs retenues par l’administration, de 2 670 euros/m² en 2004 à 3 112 euros/m² ne sont pas excessives ; que Mme C… critique les estimations qu’elle estime inappropriées ; qu’elle soutient que la proximité du […] constitue une moins-value ; que les critiques sont mal fondées dès lors que l’administration a choisi des immeubles entiers, de superficies cohérentes, si possible, situés dans l’ouest parisien, pour certains dans le 16è arrondissement, construits dans des années approchantes du début du siècle ; que l’antériorité des cessions prise en comparaison par rapport au fait générateur de l’impôt a été respectée ; que les termes de comparaison retenus pour dégager une dominante du marché pour ce type de bien aux dates du fait générateur de l’impôt, ont été sélectionnés pour se rapprocher autant que possible de la qualité intrinsèque de l’immeuble ; que la commission de conciliation de Paris en séance du septembre 2013 a, selon la méthode par capitalisation des loyers, proposée par les requérants, appliqué un taux de capitalisation de 5,5 % aux revenus dégagés par la location de l’immeuble ; que l’administration n’a pas suivi cet avis et a maintenu la méthode comparative ; qu’il est admis que pour les immeubles de rapport, la méthode par le revenu pour déterminer une valeur de marché est trop dépendante des conditions particulières de location, tels que loyers de convenance, immeuble loué partiellement ; qu’en l’espèce, les époux C… et leur fille occupaient à titre d’habitation principale certains lots de l’immeuble ; qu’il y a lieu de confirmer la valeur de l’immeuble parisien retenue par l’administration dans le cadre de la procédure de contrôle ;

1°) ALORS QUE lorsque l’administration remet en cause, en application de l’article L.17 du livre des procédures fiscales, la valeur vénale d’un immeuble et qu’elle a recours, pour établir sa propre évaluation, à des termes de comparaison, ces derniers doivent être intrinsèquement similaires en fait et en droit au bien à évaluer ; que cette similitude s’apprécie en particulier au regard de la localisation des termes de comparaison dans des quartiers comparables à celui du bien à évaluer ; qu’à l’appui de ses conclusions d’appel (pages 20 à 28), Mme C… faisait valoir que les termes de comparaison retenus par l’administration pour évaluer l’immeuble […] étaient situés respectivement dans les beaux quartiers des 7ème, 15 ème, 16ème et 17ème arrondissements (Ecole Militaire, Javel, Necker, Grenelle, Chaillot, Trocadéro, Ternes, Plaine-Monceau), alors que l’immeuble à évaluer était situé près de la Porte de […] et du boulevard extérieur, dénommé […], soit à l’extrémité du sud du 16 ème arrondissement et à proximité de […] ; qu’elle précisait que l’immeuble en cause était à cent mètres du […], dont le club résident était le […], ainsi que du Stade […], que ces deux complexes sportifs pouvaient accueillir respectivement jusqu’à 45000 et 20000 spectateurs et que le […] organisait annuellement environ 30 matchs de football ainsi que des concerts tandis que 16 matchs de rugby se tenaient annuellement au stade […] ; que ces matchs et concerts se tenaient tant en semaine que le week-end, en journée comme en soirée ; que l’exposante relevait, dans ces conditions, que les occupants de l’immeuble subissaient de multiples nuisances (circulation très difficile, installation de périmètres de sécurité, interdiction de stationnement, passages très fréquents des supporters et autres spectateurs tout au long de l’année, agressions physiques, nuisances sonores et dégradations diverses) ; qu’elle soulignait encore que ce quartier apparaissait, contrairement au 16ème Nord et même au quartier de la Porte d’Auteuil très inanimé, à l’exception de l’animation apportée par les supporters, et dépourvu de commerces de proximité, et que la valorisation de ce quartier était considérablement plus faible que celle des autres quartiers du 16ème arrondissement, y compris ceux de la Porte d’Auteuil et de la rue d’Auteuil ; qu’en se bornant, pour affirmer la similarité de localisation de l’immeuble à évaluer avec les termes de comparaison retenus, à relever, d’une manière générale, que les critiques de l’exposante sont mal fondées dès lors que l’administration a choisi des immeubles entiers, de superficies cohérentes, si possible, situés dans l’ouest parisien, pour certains dans le 16è arrondissement, sans rechercher comme ils y étaient invités par l’exposante, si les termes de comparaison n’étaient pas situés dans des quartiers très différents de celui du bien à évaluer situé Porte de […], à proximité de deux stades sportifs générant des nuisances et sans commerces proches, ce qui les rendaient impropres à une évaluation par comparaison du bien en cause, comme l’avait relevé la commission départementale de conciliation elle-même lors de sa séance du 17 septembre 2013, les juges d’appel ont privé leur décision de base légale au regard des exigences des articles 885 D, 885 S, 761 du Code général des impôts et L.17 du Livre des procédures fiscales.

2°) ALORS QUE, en toute hypothèse, à l’appui de ses conclusions devant la cour d’appel (notamment pages 26 et 27), Mme C… contestait la méthode de valorisation de l’immeuble sis […] , faisant valoir que pour déterminer la valeur vénale par comparaison de l’immeuble sis […] , il convenait d’examiner la valeur de marché d’immeubles, d’une surface aussi importante, et situés dans le même quartier, avec les mêmes caractéristiques sur les années 2004 à 2010, ce qui ne ressort pas de la proposition de rectification envoyée à M. et Mme C…, qui n’est pas motivée au sens de l’article L.57 du Livre des procédures fiscales, du fait de l’absence de termes de comparaison pertinents, ce qui justifie la nullité de la procédure d’imposition ; qu’à défaut d’avoir répondu à ce moyen, la cour d’appel n’a pas motivé sa décision et a violé l’article 455 du Code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 février 2016 qui avait accordé la décharge totale des impositions complémentaires auxquelles les époux C… ont été assujettis, en droits, intérêts de retard et pénalités pour abus de droit au taux de 80 %, au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune des années 2004 à 2010 et, statuant à nouveau, d’avoir ordonné le rétablissement des impositions déchargées, sauf prise en compte des propositions de l’administration concernant les valeurs vénales à savoir la valorisation retenue par la commission de conciliation de la Nièvre pour le Château sis à […],

ALORS QUE, la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 1729-b) du Code général des impôts, dans sa rédaction issue de l’article 35-VI de la loi n°2008-1443 du 30 décembre 2008, qui interviendra à la suite de la question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme C… par mémoire distinct, privera de base légale l’arrêt attaqué et entraînera son annulation en tant qu’il rétablit à la charge de Mme C…, la pénalité pour abus de droit dont ont été assortis les droits complémentaires litigieux au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune des années 2004 à 2008.

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Cour de cassation, Chambre commerciale, 4 décembre 2019, 18-19.969, Inédit