Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 septembre 2020, 19-14.535, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 3e civ., 10 sept. 2020, n° 19-14.535
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-14.535
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 17 janvier 2019, N° 17/04497
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042348857
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:C300509
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 3

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 10 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 509 F-D

Pourvoi n° S 19-14.535

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 SEPTEMBRE 2020

1°/ M. A… X…,

2°/ Mme R… F… ,

domiciliés tous deux […],

ont formé le pourvoi n° S 19-14.535 contre l’arrêt rendu le 18 janvier 2019 par la cour d’appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige les opposant :

1°/ à la société d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) d’Ile-de-France, dont le siège est […] ,

2°/ à M. L… J…,

3°/ à Mme C… D…, épouse J…,

domiciliés tous deux […],

4°/ à Mme K… E…, domiciliée […] ,

5°/ à la société […], société civile professionnelle, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation.

Mme E… et la SCP […] ont formé un pourvoi incident dirigé contre le même arrêt.

Les demandeurs aux pourvois principal et incident invoquent, à l’appui de leurs recours, les deux moyens de cassation identiques annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dagneaux, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. X… et de Mme F… , de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme E…, de la SCP […], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société d’aménagement foncier et d’établissement rural d’Ile-de-France, après débats en l’audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dagneaux, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 18 janvier 2019), M. et Mme J… ont vendu à M. X… et Mme F… une parcelle de terre et de taillis.

2. La société d’aménagement foncier et d’établissement rural de l’Ile de France (la SAFER), reprochant au notaire, aux vendeurs et aux acquéreurs de ne pas l’avoir informée de la vente, les a assignés en inopposabilité de la vente, substitution aux acquéreurs et, subsidiairement, annulation de cette vente.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal et du pourvoi incident, réunis

Enoncé du moyen

3. M. X…, Mme F… , Mme E… et la SCP […] font grief à l’arrêt de prononcer la nullité de la vente, d’annuler le bail et d’ordonner l’expulsion des deux premiers, alors :

« 1°/ que aux termes de l’article L. 143-4 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable, les acquisitions de surfaces boisées sont exclues du droit de préemption conféré à la SAFER ; qu’en l’espèce, l’arrêt constate que la parcelle est en nature de terre et de bois et qu’elle comporte un taillis sous futaie pour 5 a 42 ca ; qu’en s’abstenant de rechercher si, eu égard à cette circonstance le droit de préemption de la SAFER n’était pas exclu, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l’article L. 143-4 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction applicable ;

2°/ que, si, selon l’arrêt, la parcelle figure au cadastre en nature de terre pour 19 a et de taillis sous futaie pour 5 a 42 ca, il n’est pas constaté que le surplus de la parcelle est en nature agricole ou a une vocation agricole ; que faute de se prononcer sur ce point, l’arrêt est dépourvu de base légale au regard de l’article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime. »

Réponse de la Cour

4. La cour d’appel a, d’une part, relevé que la SAFER avait été autorisée par décret du 20 février 2014 à exercer son droit de préemption, notamment sur les terrains entrant dans le champ d’application de l’article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, et que ce droit s’appliquait sans qu’une superficie minimale soit fixée aux biens classés par un plan local d’urbanisme en zone agricole ou en zone naturelle et forestière.

5. Elle a, d’autre part, constaté que le texte précité, dans sa rédaction applicable en l’espèce, instituait au profit des SAFER un droit de préemption « en cas d’aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à utilisation agricole […] ou de terrains à vocation agricole » et que le terrain vendu était situé en zone N du plan local d’urbanisme et était à usage agricole.

6. Elle a pu en déduire, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la parcelle vendue était soumise au droit de préemption de la SAFER, sans qu’aucun seuil de superficie soit requis.

7. Le moyen n’est donc pas fondé.

Sur les seconds moyens du pourvoi principal et du pourvoi incident, ci-après annexés

8. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. X… et Mme F… aux dépens des pourvois ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande M. X…, de Mme F… , de Mme E… et de la SCP […] et condamne M. X… et Mme F… in solidum à payer à la SAFER de l’île-de-France la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par

M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens identiques produits au pourvoi principal par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. X… et Mme F… , et au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme E… et la SCP […].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L’arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU’il a prononcé la nullité de la vente reçue le 1er septembre 2014, annulé le bail du 1er septembre 2014, ordonné l’expulsion de M. X… et de Mme F… et tous occupants de leur chef ;

AUX MOTIFS QUE « la conformité du droit de préemption de la Safer avec les dispositions de valeur constitutionnelle a été reconnue ; que l’article 1 du décret du 20 février 2014, applicable au litige, autorisait la Safer He de France à-exercer son droit de préemption, notamment, sur les terrains entrant dans le champ d’application de l’article L143-1 du code rural et de la pêche maritime ; que l’article 2 énonçait que la superficie minimale à laquelle ce droit de préemption était susceptible de s’appliquer était de 25'ares, supérieure au terrain vendu, sauf dans certains cas ; que ce droit s’applique, notamment, sans qu’une superficie minimale ne soit fixée aux biens « classés par un plan local d’urbanisme en zone agricole ou en zone naturelle et forestière » ; que l’article 143-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable, instituait au profit des Safer un droit de préemption «en cas d’aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à utilisation agricole… ou de terrains à vocation agricole » ; que l’article R143-2 du même code considère, pour l’application de cet article, « comme fonds agricoles ou terrains à vocation agricole… les immeubles non bâtis… compris dans un espace naturel et rural à l’exception de ceux qui … sont le support d’un équipement permanent en usage ou d’une activité sans rapport avec une destination agricole…» ; que la parcelle litigieuse n’était pas le support d’un tel équipement qui doit, au surplus, être permanent ou d’une telle activité ; que seule importe la nature du bien vendu et non la destination invoquée par les acquéreurs qui n’ ont pas obtenu – ni sollicité – une autorisation de modifier la destination du bien ; que le terrain vendu est situé en zone N du plan local d’urbanisme ainsi qu’il résulte des énonciations de l’acte qui relate les dispositions de l’article R 213-8 du code de l’urbanisme applicable à de telles zones ; qu’il est à usage agricole ; que, compte tenu de sa nature et des dispositions précitées, le bien vendu était ainsi soumis au droit de préemption de la Safer sans qu’aucun seuil de superficie ne soit requis ; que, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le moyen tiré de l’article L. 143-4 du code rural concernant les parcelles boisées, la Safer bénéficiait donc d’un droit de préemption ; que l’article R. 143-4 du code rural et de la pêche maritime dispose que lors d’une vente d’un bien soumis à ce droit de préemption, le notaire chargé d’instrumenter doit, deux mois avant la date envisagée, faire connaître à la Safer les caractéristiques du bien vendu et les conditions de la vente projetée ; que le notaire n’a adressé aucun document à la Safer ; que ces dispositions n’ont donc pas été respectées ; que la Safer ne peut, toutefois, exciper des sanctions pré vues par F article L141-1-1 du code rural et de la pêche maritime issu de la loi n°2014-117Q du 13 octobre 2014, entrée en application postérieurement à la publication de la vente ; qu’elle ne peut donc être substituée aux acquéreurs ; que sont applicables les articles R143-4, R143-20 et L 412-12 du code rural et de la pêche maritime dans leur version en vigueur ; que ces dispositions permettent, en cas d’inexécution de l’obligation d’information, à la Safer « d’intenter une action en nullité de( la vente et en dommages et intérêts dans un délai de six mois à compter du jour où » elle a connu la date de la vente : qu’il est constant que la Safer a agi dans le délai prescrit ; que l’absence de déclaration préalable de la vente à la Safer a empêché celle-ci d’accomplir ses missions définies à l’article L -141-1 du code rural et de la pêche maritime dans sa version applicable ; que ce manquement justifie l’annulation de la vente sans qu’il soit nécessaire à la Safer d’invoquer d’autres motifs ; que la vente sera donc annulée ; que le bail commercial en date du 1er septembre 2014 sera, compte tenu de cette annulation et de son caractère rétroactif, annulé ; qu’il sera fait droit à la demande d’expulsion présentée par la Safer » ;

ALORS QUE, premièrement, aux termes de l’article L.143-4 du Code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable, les acquisitions de surfaces boisées sont exclues du droit de préemption conféré à la SAFER ; qu’en l’espèce, l’arrêt constate que la parcelle est en nature de terre et de bois et qu’elle comporte un taillis sous futaie pour 5 a 42 ca (p.5, antépénultième et avant dernier alinéas) ; qu’en s’abstenant de rechercher si, eu égard à cette circonstance le droit de préemption de la SAFER n’était pas exclu, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l’article L.143-4 du Code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction applicable ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, si, selon l’arrêt, la parcelle figure au cadastre en nature de terre pour 19 a et de taillis sous futaie pour 5 a 42 ca, et il n’est pas constaté que la surplus de la parcelle est en nature agricole ou à une vocation agricole ; que faute de se prononcer sur ce point, l’arrêt est dépourvu de base légale au regard de l’article L.143-1 du Code rural et de la pêche maritime.

SECOND MOYEN DE CASSATION

L’arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU’il a prononcé la nullité de la vente reçue le 1er septembre 2014, annulé le bail du 1er septembre 2014, ordonné l’expulsion de M. X… et de Mme F… et tous occupants de leur chef ;

AUX MOTIFS QUE « la conformité du droit de préemption de la Safer avec les dispositions de valeur constitutionnelle a été reconnue ; que l’article 1 du décret du 20 février 2014, applicable au litige, autorisait la Safer He de France à-exercer son droit de préemption, notamment, sur les terrains entrant dans le champ d’application de l’article L143-1 du code rural et de la pêche maritime ; que l’article 2 énonçait que la superficie minimale à laquelle ce droit de préemption était susceptible de s’appliquer était de 25'ares, supérieure au terrain vendu, sauf dans certains cas ; que ce droit s’applique, notamment, sans qu’une superficie minimale ne soit fixée aux biens « classés par un plan local d’urbanisme en zone agricole ou en zone naturelle et forestière » ; que l’article 143-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable, instituait au profit des Safer un droit de préemption «en cas d’aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à utilisation agricole… ou de terrains à vocation agricole » ; que l’article R143-2 du même code considère, pour l’application de cet article, « comme fonds agricoles ou terrains à vocation agricole… les immeubles non bâtis… compris dans un espace naturel et rural à l’exception de ceux qui … sont le support d’un équipement permanent en usage ou d’une activité sans rapport avec une destination agricole…» ; que la parcelle litigieuse n’était pas le support d’un tel équipement qui doit, au surplus, être permanent ou d’une telle activité ; que seule importe la nature du bien vendu et non la destination invoquée par les acquéreurs qui n’ ont pas obtenu – ni sollicité – une autorisation de modifier la destination du bien ; que le terrain vendu est situé en zone N du plan local d’urbanisme ainsi qu’il résulte des énonciations de l’acte qui relate les dispositions de l’article R 213-8 du code de l’urbanisme applicable à de telles zones ; qu’il est à usage agricole ; que, compte tenu de sa nature et des dispositions précitées, le bien vendu était ainsi soumis au droit de préemption de la Safer sans qu’aucun seuil de superficie ne soit requis ; que, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le moyen tiré de l’article L. 143-4 du code rural concernant les parcelles boisées, la Safer bénéficiait donc d’un droit de préemption ; que l’article R 143-4 du code rural et de la pêche maritime dispose que lors d’une vente d’un bien soumis à ce droit de préemption, le notaire chargé d’instrumenter doit, deux mois avant la date envisagée, faire connaître à la Safer les caractéristiques du bien vendu et les conditions de la vente projetée ; que le notaire n’a adressé aucun document à la Safer ; que ces dispositions n’ont donc pas été respectées ; que la Safer ne peut, toutefois, exciper des sanctions pré vues par F article L141-1-1 du code rural et de la pêche maritime issu de la loi n°2014-117Q du 13 octobre 2014, entrée en application postérieurement à la publication de la vente ; qu’elle ne peut donc être substituée aux acquéreurs ; que sont applicables les articles R143-4, R143-20 et L 412-12 du code rural et de la pêche maritime dans leur version en vigueur ; que ces dispositions permettent, en cas d’inexécution de l’obligation d’information, à la Safer « d’intenter une action en nullité de( la vente et en dommages et intérêts dans un délai de six mois à compter du jour où » elle a connu la date de la vente : qu’il est constant que la Safer a agi dans le délai prescrit ; que l’absence de déclaration préalable de la vente à la Safer a empêché celle-ci d’accomplir ses missions définies à l’article L -141-1 du code rural et de la pêche maritime dans sa version applicable ; que ce manquement justifie l’annulation de la vente sans qu’il soit nécessaire à la Safer d’invoquer d’autres motifs ; que la vente sera donc annulée ; que le bail commercial en date du 1er septembre 2014 sera, compte tenu de cette annulation et de son caractère rétroactif, annulé ; qu’il sera fait droit à la demande d’expulsion présentée par la Safer » ;

ALORS QUE, premièrement, le juge est tenu par les conclusions des parties telles que figurant au dispositif ; que dans l’hypothèse où une partie a formulé une demande principale puis une demande subsidiaire, il ne peut accueillir la demande subsidiaire sans examiner au préalable de demande principale ; qu’en l’espèce, dans ses conclusions du 26 janvier 2018, la SAFER sollicitait à titre principal et s’agissant de la vente, que celle-ci soit déclarée inopposable cependant qu’elle ne sollicitait la nullité de la vente qu’à titre subsidiaire (p.18) ; qu’en annulant la vente du 1er septembre 2014 sans s’expliquer au préalable sur la demande principale de la SAFER, qui ne tendait qu’à une inopposabilité, les juges du fond ont violé le principe dispositif et l’article 4 du Code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, en déclarant fondée la demande subsidiaire de la SAFER, sans examiner sa demande principale et sans solliciter les observations des parties, avant de procéder de la sorte, les juges du fond ont à tout le moins violé le principe du contradictoire et l’article 16 du Code de procédure civile.

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