Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 octobre 2020, 18-23.749, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 21 oct. 2020, n° 18-23.749
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-23.749
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 17 septembre 2018, N° 17/08963
Textes appliqués :
Article L. 661-3 du code de commerce et 583 du code de procédure civile.
Dispositif : Cassation sans renvoi
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042486594
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:CO00548
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

MY2

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Cassation sans renvoi

M. RÉMERY, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 548 F-D

Pourvoi n° M 18-23.749

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 21 OCTOBRE 2020

1°/ la société Sequana, société anonyme, dont le siège est […] ,

2°/ la société FHB, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est […] , prise en la personne de Mme G… E…, en qualité d’administrateur judiciaire de la société Sequana,

3°/ la société […] , société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est […] , prise en la personne de M. R… W…, en qualité de mandataire judiciaire de la société Sequana,

ont formé le pourvoi n° M 18-23.749 contre l’arrêt rendu le 18 septembre 2018 par la cour d’appel de Versailles (13e chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à la société BAT Industries PLC, dont le siège est […] (Royaume-Uni), société de droit anglais,

2°/ à la société BTI 2014 LLC, dont le siège est […] (États-Unis), société de droit de l’Etat de Delaware,

3°/ au procureur général près la cour d’appel de Versailles, domicilié en son parquet général, […],

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Sequana, des sociétés FHB et […] , ès qualités, de la SCP Richard, avocat des sociétés BAT Industries PLC et BTI 2014 LLC, et l’avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l’audience publique du 15 juillet 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 18 septembre 2018), un litige oppose la société Sequana aux sociétés BAT Industries, de droit anglais, et BTI 2014, de droit de l’Etat du Delaware, au sujet de l’obligation contractée par une ancienne filiale de la société Sequana de prendre en charge le remboursement à ces sociétés des coûts de dépollution de deux rivières aux Etats-Unis dont elles étaient garantes. La société Sequana a été attraite devant la High Court of justice de Londres, la licéité des distributions de dividendes dont elle avait bénéficié en 2008 et 2009 de la part de son ancienne filiale étant remise en cause et les sociétés BAT Industries et BTI 2014 demandant sa condamnation au paiement de la somme totale de 578 000 000 euros. Par une décision du 11 juillet 2016, cette juridiction a notamment estimé que la distribution de dividendes réalisée en mai 2009 pour 135 000 000 euros contrevenait aux dispositions de la loi britannique sur l’insolvabilité, puis, par une décision du 10 février 2017, elle a condamné la société Sequana à payer aux sociétés BAT Industries et BTI 2014 les sommes de 138 400 000 USD en réparation du préjudice actuel, de 43 008 000 euros en réparation du préjudice futur et de 9 600 000 livres sterling à titre de provision pour frais de justice. La société Sequana a fait appel des deux décisions.

2. Le 15 février 2017, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Sequana et désigné la société FHB, prise en la personne de Mme E…, en qualité d’administrateur, et la société […] , prise en la personne de M. W…, en qualité de mandataire judiciaire. Les sociétés BAT Industries et BTI 2014 ont déclaré leurs créances à concurrence de 781 984 968,43 euros qui ont été contestées.

3. Les créanciers ont été consultés par M. W…, ès qualités, sur un projet de plan de sauvegarde de la société Sequana que les sociétés BAT Industries et BTI 2014 ont refusé. Par un jugement du 12 juin 2017, le tribunal a arrêté le plan de sauvegarde de la société Sequana. Les sociétés BAT Industries et BTI 2014 ont formé tierce opposition à ce jugement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Sequana, la société FHB, ès qualités, et la société […] , ès qualités, font grief à l’arrêt de déclarer recevable la tierce opposition, de rétracter le jugement du 12 juin 2017, de rejeter le plan de sauvegarde présenté par la société Sequana et d’ouvrir une nouvelle période d’observation de trois mois alors « que la tierce opposition n’est ouverte au créancier contre le jugement ayant arrêté le plan de sauvegarde que lorsque ledit créancier dispose d’un moyen qui lui est propre ; qu’un moyen propre est un moyen que n’aurait pas pu faire valoir le représentant du créancier ; que le moyen par lequel un créancier conteste la manière dont le plan a pris en considération sa créance contestée ne constitue pas un moyen propre ; qu’au cas présent, les sociétés BAT et BTI se bornaient à soutenir que le plan ne prenaient pas suffisamment en considération les créances contestées dès lors qu’il était uniquement prévu une modification du plan en cas d’infirmation de la décision rendue par la High court de Londres ; qu’un tel moyen, qui se borne à contester les modalités de prise en compte d’une créance contestée, n’est pas un moyen propre aux sociétés BAT et BTI ; qu’en déclarant néanmoins leur tierce opposition recevable, la cour d’appel a violé les articles L. 661-3 du code de commerce et 583 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les article L. 661-3 du code de commerce et 583 du code de procédure civile :

5. Il résulte de ces textes que le créancier n’est recevable à former tierce opposition contre le jugement arrêtant le plan de sauvegarde de son débiteur que s’il invoque un moyen qui lui est propre.

6. Pour déclarer recevable la tierce opposition, l’arrêt relève, d’abord, que les sociétés BAT Industries et BTI 2014 invoquent le préjudice propre qu’elles estiment subir du fait du sort particulier donné à leurs créances dans le plan dont le traitement est renvoyé à une modification ultérieure de celui-ci et dont il est manifeste qu’un paiement sur dix ans est illusoire tandis que la quasi totalité du passif retenu, d’un montant de 65 000 000 euros, est payé en numéraire par remise d’actions d’une société filiale de la société Sequana ou compensation à court et moyen termes. Il relève encore que le jugement arrêtant le plan dit que les autres créanciers, y compris ceux ayant refusé le plan ou ayant apporté une réponse conditionnée, seront remboursés de leur créance définitivement admise en dix annuités selon un certain échéancier, que les créances faisant l’objet d’une instance en cours relèvent de cette catégorie, et que dans le cas d’instance en cours, les règlements n’interviendront qu’à compter de l’admission définitive de la créance.

7. L’arrêt retient, enfin, que le tribunal n’a pas défini expressément le montant du passif pris en compte dans le plan qu’il a arrêté et n’a pas déterminé le montant de la créance des sociétés BAT Industries et BTI 2014 dont le règlement est prévu dans le plan, qu’il a prévu que les créanciers ayant refusé le plan, comme l’ont fait les sociétés BAT Industries et BTI 2014, ne seraient remboursés que de leur créance définitivement admise et non de leur créance déclarée, et qu’il n’a pas prévu le règlement de la totalité de la créance déclarée de ces sociétés, et en déduit que les sociétés BAT Industries et BTI 2014 disposent d’un moyen propre rendant recevable leur tierce opposition.

8. En statuant ainsi, alors que si le plan de sauvegarde doit prévoir le règlement de toutes les créances déclarées, même si elles sont contestées, le moyen tiré de la méconnaissance de cet impératif à l’égard d’un créancier ne constitue pas un moyen propre de celui-ci rendant recevable sa tierce opposition, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 18 septembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 8 décembre 2017 ;

Condamne les sociétés BAT Industries et BTI 2014 aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés BAT Industries et BTI 2014 et les condamne in solidum à payer à la société Sequana, à la société FHB, en qualité d’administrateur de cette société, et la société […] , en qualité de mandataire judiciaire de cette société, la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la sociétés Sequana et les sociétés FHB et […] , ès qualités.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir infirmé en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 8 décembre 2017 et, statuant à nouveau, d’avoir déclaré recevables les sociétés BAT Industries et BTI 2014 en leur tierce opposition au jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 12 juin 2017, d’avoir rétracté le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 12 juin 2017, d’avoir rejeté le plan de sauvegarde présenté par la société Sequana et d’avoir ouvert une nouvelle période d’observation d’une durée de trois mois ;

Aux motifs que « Sur la recevabilité de la tierce opposition : il résulte des articles 583, alinéa 2, du code de procédure civile et L. 661-3 du code de commerce que le créancier n’est recevable à former tierce opposition contre le jugement arrêtant le plan de sauvegarde de son débiteur que s’il invoque un moyen qui lui est propre ou démontre que le jugement a été rendu en fraude de ses droits ; que si, en application de l’article L. 626-21 du code de commerce, l’inscription d’une créance au plan ne préjuge pas de son admission définitive au passif et si les sommes à répartir correspondant aux créances litigieuses ne sont versées qu’à compter de leur admission définitive au passif, le plan de sauvegarde doit néanmoins prévoir le règlement de toutes les créances déclarées, même si elles sont contestées, peu important leur caractère exigible ou non ; que le créancier qui soutient que le plan de sauvegarde ne prévoit pas le règlement de la totalité de sa créance déclarée dispose d’un moyen propre rendant recevable sa tierce opposition au jugement arrêtant un tel plan ; qu’en l’espèce, les sociétés BAT et BTI ont déclaré une créance d’un montant total de 781.984.968,43 € au titre des frais de justice accordés par la High court of justice (10,2 M€), de la procédure pendante devant la cour d’appel anglaise au titre des dividendes versés par la société Sequana en mai 2009 (197,9 M€) et en décembre 2008 (564,1 M€), et des coûts de la procédure pendante devant la cour d’appel anglaise (9,6 M€) ; que cette créance est traitée comme faisant l’objet d’une instance en cours au jour du jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde ; qu’il ressort des termes du jugement que : – la proposition de plan présentée par la société Sequana reposait sur la prise en compte d’un passif de 65 M€ le reste du passif déclaré étant écarté car constitutif de créances fiscales provisionnelles « a priori sans fondement » (33 M€), de garanties données par le débiteur au profit de ses filiales « qui n’ont pas, sauf défaillance de ces filiales, vocation à être mises en oeuvre » (267 M€) et de créances contestées ou faisant l’objet d’une instance en cours (810 M€), la créance des sociétés BAT et BTI étant classée dans cette dernière catégorie pour le montant déclaré (782 M€) ; toutefois la proposition de plan prévoyait le paiement en numéraire de la créance provisionnelle pour frais de justice à titre provisionnel en dix annuités sans que le montant de cette créance ne soit précisé, – à l’audience la société Sequana a précisé que la valeur des titres Arjowiggins et des titres Antalis permettrait de « faire face, le cas échéant, à une confirmation en appel du jugement en première instance intervenu dans le litige BAT » ; la cour observe que la créance résultant de cette confirmation s’élève aux sommes de 138,4 M$, de 43 M€ et de 9,6 M£ à titre de provision pour frais de justice, – le juge-commissaire a proposé, en conséquence de la levée du sursis à exécution de la condamnation prononcée par la High court of justice, et du refus des sociétés BAT et BTI des propositions du plan, de « fusionner la créance provisionnelle au titre des frais de justice et le reste de la créance déclarée en une seule créance assujettie au plan proposé pour les »autres créances«   », – dans ses motifs, le tribunal entend fixer pour les créanciers qui ont refusé la proposition de plan un calendrier d’apurement intégral identique à celui retenu pour « les autres créances », précise que, dans le cas des instances en cours, les règlements n’interviendront qu’à compter de l’admission définitive de la créance et que, la décision de la cour d’appel de Londres pouvant avoir une incidence déterminante sur l’issue du plan de sauvegarde et en bouleverser l’économie, « dans les six mois du rendu d’une décision définitive dans ce litige, la société Sequana, et à défaut l’un ou l’autre des co-commissaires à l’exécution du plan, devra saisir le tribunal d’une requête en vue de solliciter la modification du plan de sauvegarde aux fins de l’adapter aux conséquences de la décision rendue » ; le tribunal indique également que les états prévisionnels et les éléments fournis à l’audience montrent que la société Sequana devrait être en mesure de faire face aux échéances et à une éventuelle confirmation en appel de la condamnation intervenue en première instance dans le litige BAT/BTI (souligné par la cour), – dans le plan arrêté, le tribunal dit que « les autres créanciers, y compris ceux ayant refusé le plan ou ayant apporté une réponse conditionnée, seront remboursés de leur créance définitivement admise en 10 annuités selon l’échéancier suivant », que « les créances faisant l’objet d’une instance en cours relèvent de cette catégorie », que « dans le cas d’instance en cours les règlements n’interviendront qu’à compter de l’admission définitive de la créance » ; qu’il résulte de ces différentes mentions que le tribunal n’a pas défini expressément le montant du passif pris en compte dans le plan qu’il a ainsi arrêté ; qu’il n’a pas non plus déterminé le montant de la créance des sociétés BAT et BTI dont le règlement est prévu dans ce plan ; qu’en effet, si le juge-commissaire a proposé de prendre en compte non seulement la créance dite provisionnelle de frais justice mais aussi « le reste de la créance déclarée », le tribunal n’a pas entendu suivre cette proposition dès lors qu’aux termes du plan arrêté les créanciers ayant refusé le plan, comme l’ont fait les sociétés BAT et BTI, ne sont remboursés que de leur créance définitivement admise et non de leur créance déclarée ;

qu’au demeurant, les organes de la procédure soutiennent que le plan arrêté par le tribunal tient compte de l’intégralité des créances déclarées en faisant valoir que « cet échéancier permettra le remboursement de la créance des appelantes aux frais de justice et à la condamnation prononcée en première instance si celle-ci venait à être confirmée en appel » ; que cette lecture du jugement confirme que le tribunal n’a pas prévu le règlement de la totalité de la créance déclarée par les sociétés appelantes ; que les sociétés BAT et BTI disposent dès lors d’un moyen propre rendant recevable leur tierce opposition au jugement arrêtant le plan ; que le jugement frappé d’appel doit donc être infirmé en toutes ses dispositions sans qu’il soit nécessaire de répondre au moyen soutenu par les appelantes relativement à la fraude à leurs droits ; que, sur le bien fondé de la tierce opposition : le plan de sauvegarde doit prévoir le règlement de toutes les créances déclarées, même si elles sont contestées, peu important leur caractère exigible ou non et les chances de succès de la contestation élevée par le débiteur ; qu’or, le plan arrêté par le tribunal prévoit le règlement en dix ans de la créance des sociétés BAT et BTI définitivement admise et non de leur créance déclarée ; qu’il résulte en outre des explications des intimées et de la clause du plan prévoyant une saisine du tribunal aux fins de sa modification qu’est seule prise en considération par le plan tout au plus la créance telle que définie par la condamnation de la société Sequana en première instance et non la créance déclarée en sa totalité ; qu’en tout état de cause, la seule prise en considération de la créance des sociétés BAT et BTI par le plan sans modalité de leur règlement complet ne répond pas aux exigences légales qui imposent qu’un plan de sauvegarde prévoit le règlement de toutes les créances déclarées ; que telle est également le cas du plan présenté par la société Sequana qui prévoit le règlement de seulement M€ du passif déclaré ; que pour ce seul motif le jugement arrêtant le plan doit être infirmé et le plan proposé par la société Sequana rejeté ; que les sociétés appelantes font également grief au plan de traiter différemment les créanciers chirographaires en ce que le plan prévoit le règlement des créances fiscales et sociales en cinq annuités et celui des créances liées aux contrats de location et de crédit-bail, à la fourniture de biens ou de services – y compris intragroupe – et aux mandats sociaux dans les trois mois de son arrêté ; qu’aux termes de l’article L. 626-18 du code de commerce le tribunal donne acte des délais et remises acceptés par les créanciers mais peut réduire ces délais et remises, d’une part, et le tribunal impose des délais uniformes de paiement aux seuls créanciers qui ont refusé la proposition de plan, d’autre part ; qu’il en résulte que l’égalité de traitement des créanciers s’impose au tribunal s’agissant des seuls créanciers ayant refusé la proposition de plan ; qu’or les créanciers sociaux et fiscaux ont en l’espèce accepté un paiement échelonné de leurs créances sur dix ans et le tribunal a réduit ces délais à cinq ans à la suite des réquisitions du ministère public en ce sens, et ce conformément aux dispositions de l’article L. 626-18 sus rappelées ; que, de même, si la situation financière de la société Sequana rendait peu opportun un paiement dans les trois mois de l’arrêté du plan plutôt qu’un rééchelonnement des créances liées aux contrats de location et de crédit-bail, à la fourniture de biens ou de services et aux mandats sociaux ou aux contrats de travail, ce traitement différencié par rapport aux autres créances chirographaires est justifié par l’acceptation de la proposition du plan par ces créanciers, leur caractère non contesté et leur lien direct avec l’exploitation de la société Sequana, fût-elle une holding ; qu’aucune violation du principe d’égalité de traitement des créanciers n’est ainsi caractérisée ; qu’enfin, en ne rappelant pas les dispositions de l’article L. 626-21 du code de commerce selon lesquelles la juridiction saisie du litige peut décider que le créancier participera à titre provisionnel, en tout ou en partie, aux répartitions faites avant l’admission définitive", le tribunal, qui n’a pas l’obligation de rappeler dans son jugement les dispositions légales, n’a pas violé l’article L. 626-21 ; que la tierce opposition étant jugée bien fondée en ce que ni le plan arrêté par le tribunal ni le plan proposé par la société Sequana ne prévoit le règlement de la totalité des créances déclarées, il n’y a pas lieu d’apprécier le second moyen tiré de la fraude soutenu par les sociétés appelantes » (p. 7-10) ;

1°) Alors que la tierce opposition n’est ouverte au créancier contre le jugement ayant arrêté le plan de sauvegarde que lorsque ledit créancier dispose d’un moyen qui lui est propre ; qu’un moyen propre est un moyen que n’aurait pas pu faire valoir le représentant du créancier ; que le moyen par lequel un créancier conteste la manière dont le plan a pris en considération sa créance contestée ne constitue pas un moyen propre ; qu’au cas présent, les sociétés BAT et BTI se bornaient à soutenir que le plan ne prenaient pas suffisamment en considération les créances contestées dès lors qu’il était uniquement prévu une modification du plan en cas d’infirmation de la décision rendue par la High court de Londres ; qu’un tel moyen, qui se borne à contester les modalités de prise en compte d’une créance contestée, n’est pas un moyen propre aux sociétés BAT et BTI ; qu’en déclarant néanmoins leur tierce opposition recevable, la cour d’appel a violé les articles L. 661-3 du code de commerce et 583 du code de procédure civile ;

2°) Alors que les sociétés BAT et BTI ont, depuis l’arrêt attaqué, renoncé au solde de la créance initialement demandée devant les juges anglais et dont la prétendue absence de prise en compte a conduit la cour d’appel à rejeter le plan de sauvegarde ; que, du fait de cette renonciation, la décision attaquée sera annulée pour perte de son fondement juridique ;

3°) Alors que la Cour of Appeals a, dans sa décision du 6 février 2019, non frappée de recours, rejeté l’appel formé contre le jugement de la High Court et rejetant donc définitivement le solde de la créance des sociétés BAT et BTI et dont la prétendue absence de prise en compte a conduit la cour d’appel à rejeter le plan de sauvegarde ; que, du fait de cette décision, la décision attaquée sera annulée pour perte de son fondement juridique ;

4°) Alors en tout état de cause que si le plan de sauvegarde doit prendre en considération toute créance, même contestée, et prévoir les modalités de son règlement, le juge arrêtant le plan peut se permettre, s’agissant des créances contestées et dont les possibilités d’admission apparaissent réduites, de prévoir que leur paiement n’interviendra qu’en cas d’infirmation de la décision de fond l’ayant rejetée, après modification du plan suivant saisine dans les six mois de ladite décision ; qu’au cas présent, en jugeant que le plan n’aurait pas prévu le règlement de la partie contestée de la créance des sociétés BAT et BTI au motif qu’était seule prévue, en cas d’infirmation de la société de la High Court de Londres, la modification du plan suivant saisine dans les six mois, la cour d’appel a violé l’article L. 626-21 du code de commerce.

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