Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 octobre 2021, 20-18.331, Inédit

  • Sociétés·
  • Dégradations·
  • Locataire·
  • Cabinet·
  • Bailleur·
  • Preneur·
  • Gestion·
  • Dépôt·
  • État·
  • Garantie

Chronologie de l’affaire

Commentaires sur cette affaire

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. En savoir plus

Sur la décision

Texte intégral

CIV. 3

SG

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 13 octobre 2021

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 718 F-D

Pourvoi n° P 20-18.331

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 OCTOBRE 2021

La société Blomet-Lecourbe, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 20-18.331 contre les arrêts rendus les 15 mai 2019 et 4 mars 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 3), dans le litige l’opposant à la société Cabinet d’études et de gestion, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Aldigé, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Blomet-Lecourbe, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Cabinet d’études et de gestion, après débats en l’audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 15 mai 2019, rectifié le 4 mars 2020), la société Cabinet d’études et de gestion, locataire de locaux commerciaux donnés à bail par la société civile immobilière Blomet-Lecourbe (la SCI), l’a assignée, notamment, en restitution du dépôt de garantie.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, ci-après annexé

2. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

3. La SCI fait grief à l’arrêt de la condamner à restituer à la société Cabinet d’études et de gestion une certaine somme au titre du dépôt de garantie, alors « que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu’aux termes du bail du 6 novembre 2006, il était stipulé que le contrat était conclu sous les conditions pour la société société Cabinet d’études « 5° – De prendre les lieux dans l’état où ils se trouvent à la signature des présentes et de les rendre en fin de bail en bon état de toutes réparations » et « de maintenir en bon état d’entretien l’ensemble des lieux loués et notamment les devantures et fermetures, de faire procéder à la peinture de celles-ci aussi souvent qu’il sera nécessaire et au moins une fois tous les trois ans. De maintenir en bon état d’entretien l’ensemble des éléments d’équipement mis à sa disposition, et même de les remplacer si nécessaire » ; que la cour d’appel a expressément relevé que « l’état des lieux de sortie montre des dégradations » ; qu’à cet égard, la SCI faisait valoir, dans ses conclusions d’appel, que ce procès-verbal établi le 3 août 2017, le jour de la remise des clés, établissait l’existence de dégradations sur la devanture, dans la pièce principale, dans l’espace surélevé en enfilade de la pièce principale, et dans la pièce au fond du local ; qu’en déboutant la SCI de sa demande tendant à voir débouter la société société Cabinet d’études de sa demande de restitution du dépôt de garantie, la cour d’appel a violé l’article 1134 (devenu 1103) du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, et 1732 du code civil :

4. Selon le premier texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

5. Selon le second, le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute.

6. Pour condamner la SCI à restituer le dépôt de garantie, l’arrêt retient que, si l’état des lieux de sortie montre des dégradations, la bailleresse n’établit pas pour autant que ces dégradations seraient imputables à la locataire.

7. En statuant ainsi, alors que la société Cabinet d’études et de gestion s’obligeait selon le bail à maintenir en bon état d’entretien l’ensemble des lieux loués et à les rendre en fin de bail en bon état de toutes réparations, et que le locataire répond des dégradations constatées dans l’état des lieux de sortie à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la SCI Blomet-Lecourbe à restituer à la société Cabinet d’études et de gestion la somme de 4 526,91 euros au titre du dépôt de garantie, l’arrêt rendu le 15 mai 2019 rectifié le 4 mars 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Cabinet d’études et de gestion aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille vingt et un.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Blomet-Lecourbe.

La Sci Blomet-Lecourbe fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit qu’elle avait manqué à son obligation de délivrance des locaux et qu’elle ne s’exonérait pas de l’obligation pesant sur elle, en conséquence, de l’AVOIR condamnée à restituer à la société C.E.G les sommes de 9.071,68 euros HT au titre de la réfaction de 50 % du montant des loyers pour les mois d’août 2014 inclus à juillet 2015 inclus, de 3.023,89 euros au titre des loyers pour les mois d’août 2015 et septembre 2015, et de 4.526,91 euros au titre du dépôt de garantie, et d’AVOIR dit que ces manquements à son obligation de délivrance étaient à l’origine de la perte d’exploitation subie par la société locataire pour le local litigieux pendant les mois d’août 2014 à septembre 2015 inclus ;

1°/ ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu’en l’espèce, le bail du 6 novembre 2006 stipulait que la société C.E.G ne pourrait « 13° … rendre le bailleur responsable des infiltrations provenant des conduits d’eau, du sol, du sous-sol, de l’humidité ou de toute autre cause », qu’elle s’engageait à « 17° … déclarer immédiatement à sa compagnie, et (à) en informer conjointement le bailleur, tout sinistre ou dégradation s’étant produit dans les lieux loués », ainsi qu’à « 18° … renoncer à tous recours en responsabilité contre le bailleur : f) en cas de dégâts causés aux lieux loués et aux marchandises ou objets s’y trouvant par suite de fuites sur canalisation, d’infiltrations au travers des toitures ou vitrages, d’humidité provenant du sol, du sous-sol, ou des murs, de la condensation, du gel ou de la fonte des neige ou places, le preneur devant s’assurer contre ces risques » (cf. p. 8-9) ; qu’il résultait des pièces produites aux débats qu’à la suite d’un sinistre intervenu en novembre 2010, la Sci Blomet-Lecourbe avait sollicité pendant près de quatre années les déclarations de sinistres effectuées par la société C.E.G, de sorte que l’absence de réaction de cette dernière et de déclarations à sa compagnie d’assurance étaient à l’origine des désordres ; qu’en retenant un manquement de la Sci Blomet-Lecourbe à son obligation de délivrance, la cour d’appel a violé l’article 1134 (devenu 1103) du code civil, ensemble l’article 1719 du même code ;

2°/ ALORS QUE le bailleur n’est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d’ailleurs aucun droit sur la chose louée ; sauf au preneur à les poursuivre en son nom personnel ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que « par courrier du 2 décembre 2010, la société locataire a informé son bailleur de l’existence d’une fuite persistante provenant de l’étage supérieur », que « le 5 août 2014, un constat amiable est intervenu entre Mme [S], occupante de l’appartement du 1er étage et la société locataire pour un dégât des eaux survenu « environ le 20 juillet 2014 », qu’un rapport amiable établi à la demande du syndic de copropriété par M. [Y], architecte, avait constaté que « le solivage et et la poutraison côté gauche (partie centrale et fond de pièce) ont été provoqués par des infiltrations humides récurrentes provenant de l’appartement du 1er étage où est installé la salle de bain. Ces infiltrations ont provoqué le pourrissement fongique des bois et son attendrissement propice à l’installation d’insectes lignivores », et qu’il résultait « des pièces versées aux débats que les désordres affectant le plancher haut de la boutique, la responsabilité du syndicat des copropriétaires pourrait être engagée s’agissant d’une partie commune » (cf. arrêt, p. 8, 9 et 11) ; qu’il résultait de ces constatations que l’origine du trouble de jouissance subi par la société C.E.G émanait d’un tiers à la Sci Blomet-Lecourbe, laquelle ne pouvait donc en être déclarée responsable ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article 1725 du code civil ;

3°/ ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu’aux termes du bail du 6 novembre 2006, il était stipulé que le contrat était conclu sous les conditions pour la société C.E.G « 5° – De prendre les lieux dans l’état où ils se trouvent à la signature des présentes et de les rendre en fin de bail en bon état de toutes réparations » et « de maintenir en bon état d’entretien l’ensemble des lieux loués et notamment les devantures et fermetures, de faire procéder à la peinture de celles-ci aussi souvent qu’il sera nécessaire et au moins une fois tous les trois ans. De maintenir en bon état d’entretien l’ensemble des éléments d’équipement mis à sa disposition, et même de les remplacer si nécessaire» (cf. p. 5) ; que la cour d’appel a expressément relevé que « l’état des lieux de sortie montre des dégradations » (cf. arrêt, p. 12) ; qu’ à cet égard, la société Blomet-Lecourbe faisait valoir, dans ses conclusions d’appel, que ce procès-verbal établi le 3 août 2017, le jour de la remise des clés, établissait l’existence de dégradations sur la devanture, dans la pièce principale, dans l’espace surélevé en enfilade de la pièce principale, et dans la pièce au fond du local (cf. p. 22) ; qu’en déboutant la Sci Blomet-Lecourbe de sa demande tendant à voir débouter la société C.E.G de sa demande de restitution du dépôt de garantie, la Cour d’appel a violé l’article 1134 (devenu 1103) du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ;

4°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni profit ; que le cocontractant victime d’un dommage ne peut obtenir deux indemnisations distinctes en réparation du même préjudice ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu que « pour la période écoulée entre le mois d’août 2014 inclus et le mois de juillet 2015 inclus », « la présence de deux étais dans la boutique ont troublé la jouissance paisible du local pris à bail », de sorte qu’il convenait d’accorder au preneur une réfaction de 50 % du montant des loyers dont elle s’est acquittée pendant cette période », et qu’à compter de la fin juillet 2015 « et jusqu’au terme du bail, au 30 septembre 2015, la société locataire ne pouvait plus exploiter les lieux pris à bail », de sorte qu’elle était « bien fondée à opposer au bailleur l’exception d’inexécution pour les paiement des loyers d’août et septembre 2015 » (cf. p. arrêt, p. 11-12) ; qu’elle a ensuite retenu que « pendant la période écoulée d’août 2014 inclus à juillet 2015 inclus, la société locataire a été gênée dans l’exploitation de son commerce ; qu’elle n’a pu exploiter celui-ci pendant les mois d’août 2015 et septembre 2015 », de sorte qu’elle était fondée « à demander la réparation d’un préjudice commercial correspondant à la perte d’exploitation qu’elle a subie pour ce local » (cf. arrêt, p. 12-13) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a indemnisé deux fois le même préjudice, a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 octobre 2021, 20-18.331, Inédit