Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 janvier 2021, 19-10.493, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Jérôme Lasserre Capdeville · L'ESSENTIEL Droit bancaire · 1er mars 2021
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 20 janv. 2021, n° 19-10.493
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-10.493
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 14 novembre 2018, N° 17/03803
Textes appliqués :
Article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043087486
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2021:CO00054
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Cassation

M. RÉMERY, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 54 F-D

Pourvoi n° Y 19-10.493

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 JANVIER 2021

La société SAS, société par actions simplifiée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° Y 19-10.493 contre l’arrêt rendu le 15 novembre 2018 par la cour d’appel de Versailles (16e chambre civile), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société […], société anonyme, dont le siège est […] ,

2°/ à la société BNP Paribas Factor, société anonyme, dont le siège est […] ,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de la société SAS, de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas Factor, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société […], après débats en l’audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 15 novembre 2018), la société BNP Paribas Factor (l’affactureur) a conclu avec la société Armat France (la société Armat) un contrat d’affacturage en exécution duquel cette dernière lui a transmis des créances sur la société […] (la société […]), dont elle est le sous-traitant. L’affactureur a notifié les cessions opérées par courriers recommandés des 6 et 22 octobre 2015.

2. La société SAS ayant fait pratiquer des saisies-attributions le 15 octobre 2015, puis le 24 novembre 2015 entre les mains de la société […] sur les sommes que celle-ci doit à la société Armat et ces mesures d’exécution ayant été infructueuses, elle a assigné le tiers saisi ainsi que l’affactureur.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société SAS fait grief à l’arrêt de rejeter toutes ses demandes, alors

« que, dans le cas de l’affacturage, la subrogation opère le transfert de la créance entre les parties, laquelle ne se produit que dans la mesure exacte du paiement de la créance par la banque ; que, dans le cas de la cession Dailly, la seule remise du bordereau entraîne de plein droit le transfert de la propriété des créances du cédant ; qu’en affirmant, au seul constat du libellé des actes de notification par la société BNP Paribas Factor à la société […] des cessions de créances de la société Armat, que ces cessions étaient de type Dailly, sans examiner les stipulations du contrat d’affacturage du 14 avril 2010 conclu entre la société Armat et la société BNP Paribas Factor, dans le cadre duquel s’étaient effectuées ces cessions de créances, lesquelles relevaient aux termes de ce contrat de la technique classique de l’affacturage, et non de la cession Dailly, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103 et 1346-1 du code civil (anciennement 1134 et 1250 du même code) et de l’article L. 313-23 du code monétaire et financier. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 :

4. Aux termes de ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

5. Pour retenir que les créances objets de la saisie avaient été « cédées » à l’affactureur avant cette mesure, l’arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que les notifications de cessions adressées par l’affactureur au débiteur visent les articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier et qu’elles comportent les seules mentions relatives aux cessions « Dailly », à l’exclusion de celles prévues par l’article R. 313-16 en cas de cession de créances en vertu d’un contrat d’affacturage. Il en déduit que cette référence implique que l’affactureur a notifié des cessions de créances Dailly, de sorte que l’acte de cession suffit par lui-même à établir le transfert de créances, qu’il y ait eu ou non-paiement de la créance par le cessionnaire au profit du cédant.

6. En se déterminant ainsi, sans examiner la convention d’affacturage, spécialement sans rechercher quelles en étaient les stipulations relatives aux modalités du transfert des créances à l’affactureur et si celui-ci n’acquérait pas les créances par voie de subrogation, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 15 novembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état dans où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société […] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et celle de la société BNP Paribas Factor, condamne la société […] à payer à la société SAS la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour la société SAS.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société SAS de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE s’agissant des saisies attributions signifiées à […] les 15 octobre et 24 novembre 2015 : Le 15 octobre 2015, la société SAS a fait procéder à la saisie attribution entre les mains de la société […] de toutes les sommes détenues ou dues par cette dernière à Armat France, puis la SAS a délivré une nouvelle saisie attribution entre les mains de […] le 24 novembre 2015. La créance à exécution successive déjà née au moment de la saisie est une créance certaine, donc saisissable ; seuls les paiements sont reportés à plus tard. Les créances successives, au contraire, sont des créances seulement éventuelles, qui naîtront peut-être si les relations entre le débiteur et le tiers se poursuivent. En l’espèce, […] et Armat France étaient liées par 4 contrats de construction : dont le prix est fixé à l’avance : 209.937 € pour le chantier […] , 461.091 € pour le chantier […] , 521.000 € pour le chantier […] , 333.313 € pour le chantier […]. L’exécution de chaque contrat était échelonnée dans le temps et chaque mois, Armat France établissait une situation/facture des prestations réalisées dans le mois, aux conditions tarifaires convenues dans chaque contrat. Situation qui était ensuite reprise par […] qui émettait les factures correspondantes au titre de l’autofacturation. Les sommes facturées chaque mois par Armat France ne sont donc pas des « créances distinctes nées d’accords indépendants les uns des autres », mais des créances résultant d’un seul et même contrat à exécution successive générant des créances à exécution successive de sorte que la saisie attribution portant sur ce marché, contrat unique à exécution successive au fur et à mesure de l’exécution des travaux jusqu’à éventuelle fin du chantier ou résiliation du contrat, était elle même à exécution successive, conformément à l’article 1111-1 du Code civil qui dispose: « Le contrat à exécution instantanée est celui dont les obligations peuvent s’exécuter en une prestation unique. Le contrat à exécution successive est celui dont les obligations d’au moins une partie s’exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps ». La société […] se prévaut de l’existence d’un contrat cadre qui est un accord par lequel les parties conviennent des caractéristiques générales de leurs relations contractuelles futures, des contrats d’application en précisant les modalités d’exécution. En réalité les marchés […] sont très précisément détaillés avec conditions générales, conditions particulières et conditions spécifiques, puis annexes. Ces contrats précis contiennent : un objet : fourniture et pose d’armatures pour la construction d’un immeuble de bureaux à Clichy, immeuble de bureaux à Paris ou des logements sociaux à Suresnes, un planning d’exécution, un prix détaillé et convenu, ferme et définitif, voire forfaitaire. Ils ne nécessitent pas de contrats d’application. Les situations suivies d’autofacturation mensuelles ne sont pas des contrats mais correspondent aux paiements mensuels calculés conformément au contrat unique de marché de travaux, au prix fixé au contrat, au planning d’exécution et aux plans du chantier. En tout état de cause, la distinction contrat-cadre ou contrat à exécution successive présente en l’occurrence peu d’intérêt dans la mesure où les saisies attributions portent sur les prestations effectuées par Armat au 15 octobre 2015 puis au 24 novembre 2015, même si elles ne sont pas encore liquidées. Si la lecture des procès-verbaux démontre que la société SAS n’a pas signifié à la société […] des saisies attributions expressément mentionnées comme à exécution successive, la mention du type de saisie ne figure pas dans les mentions prévues à peine de nullité par l’article R.211-3 du code des procédures civiles d’exécution et le législateur n’a pas opéré de distinction dans la procédure de saisie attribution et sa dénonciation. La première saisie concerne donc toutes les sommes dues au 15 octobre 2015 et toutes les sommes dues après le 15 octobre 2015 qui sont intégralement saisies (la seconde qui concerne toutes les sommes dues entre le 15 octobre et le 24 novembre est de fait sans intérêt), quand bien même les situations de travaux ont toutes été émises par Armat postérieurement à la saisie attribution du 15 octobre 2015. Sur les cessions de créance : […] a reçu notification de quatre cessions de créance et la SAS demande paiement des sommes suivantes qu’elle estime saisies : En excluant le chantier du […] cédé en Dailly à BTP BANQUE : – 59.941,83 € : validation de la situation 2015-10-010 d’Armat, – 41.498,19 € : validation de la situation 2015-11-009 d’Arma, – 57.458 € : validation de la situation 2015-10-015 d’Armat, – 98.830 € : validation de la situation 2015-11-011 d’Armat, – 84.984,55 € : validation de la situation 2015-10-004 d’Armat, – 81.662 € : validation de la situation 2015-11-010 d’Armat, – 8.209 € : validation de la situation 2015-12-003 d’Armat. TOTAL : 432.583,57 € dus à Armat T France et saisis selon SAS BTP Banque – Chantier […] : notification de cession Dailly du 22 juin 2015 de BTP BANQUE à hauteur de la somme de 229.937 €. Le principe n’est pas contesté par l’appelante. C’est à juste titre que le premier juge a relevé qu’en application des règles régissant les cessions de type « Dailly » et singulièrement l’article L 313-27 du code monétaire et financier, les créances concernant les opérations de ce chantier étaient sorties du patrimoine d’Armat dès avant la première saisie attribution et qu’en conséquence, elles ne pouvaient pas être saisies entre les mains de […], puisqu’indisponibles. Toutefois, seules les sommes dues à Armat France ont été cédées en Dailly, mais pas les sommes dues au fournisseur Sabea. au titre des factures suivantes : – 2015-10-009 de 42.068,12 € dont « 27.990,24 € pour Sabea ». 2015-11-004 de 44.433,60 € dont « 39.621,38 € pour Sabea ». Bnp Paribas Factor – Chantier […] : notification de cession du 22 octobre 2015 de Bnp Paribas Factor – Chantier […]: notification de cession du 6 octobre 2015 de Bnp Paribas Factor – Chantier […] : notification du 2 octobre 2015 de l’acquisition d’une facture nº 2015 09 015 de 89.331,53 € : « nous avons acquis la propriété des créances énumérées ci-dessous en application du contrat d’affacturage conclu avec votre fournisseur le 22.04.2010 » et notification de cession du 6 octobre 2015 de Bnp Paribas Factor, soit en 4 jours, notification d’une cession de créance et la notification d’un affacturage. L’appelante soutient les cessions de ces créances professionnelles alléguées et justifiées par […] ne seraient pas des cessions DAILLY mais de simples subrogations conventionnelles intervenues dans le cadre de contrats d’affacturage. Or les cessions DAILLY instituées par la loi nº 81-1 du 2 janvier 1981 sont désormais régies par les articles L 313-23 et suivants du code monétaire et financier mais également par l’article R313-15 du même code qui précise les mentions qui doivent obligatoirement figurer sur le courrier de notification au débiteur de la cession Dailly. Parmi celles-ci figurent deux mentions caractéristiques que l’on retrouve sur les notifications faites à […], tant par Bnp Paribas Factor que par BTP Banque, à savoir : « Nous a cédé la créance » et, « Conformément aux dispositions de l’article L313-28, nous vous demandons de cesser, à compter de la présente notification, tout paiement au titre de cette créance ». La notification auprès de […] par Bnp Paribas Factor est conforme aux dispositions de l’article R 313-16 du Code Monétaire et Financier, lesquelles disposent : « Lorsque la créance est cédée en vertu d’un contrat d’affacturage, la société d’affacturage doit, dans le cadre de la notification au débiteur cédé de cette cession de créance, en application des articles L 313-23 à L 313-35, faire figurer sur la facture afférente à la créance qui lui a été cédée, les mentions obligatoires suivantes : 1º Le nom de la société d’affacturage, comme suit : La créance relative à la présente facture a été cédée à ' dans le cadre des articles L 313-23 à L313-35 du Code Monétaire et Financier. » ; Ces dernières dispositions sont afférentes aux cessions DAILLY et Bnp Paribas Factor s’est donc conformée aux termes de la loi rappelée ci-dessus. Il ressort de l’article R 313-6 que les mentions obligatoires pour les cessions de créance en vertu d’un contrat d’affacturage sont différentes et n’apparaissent pas sur les notifications qui ont été faites à […]. Notamment ces notifications ne comportent pas les mentions caractéristiques du contrat d’affacturage, à savoir : « La créance relative à la présente facture a été cédée à (

) » et « Le paiement doit être effectué par chèque, traite, billets, etc établi à l’ordre de (

) et adressé à ou par virement au compte nº chez (

) » Dans ces conditions, c’est à bon droit que le premier juge qui a procédé à une analyse comparative des courriers de notification en a conclu que « la référence aux textes régissant les cessions et nantissements « DAILLY » doivent conduire à considérer que ce sont bien des cessions « DAILLY » qui ont été notifiées à […]. » L’acte de cession DAILLY se suffit par lui-même à établir le transfert de créance, qu’il y ait oui ou non-paiement de la créance par le cessionnaire au profit du cédant, et dans tous les cas, le transfert de créance réalisé a pour effet de sortir la créance du patrimoine du cédant au bénéfice du factor qui en devient « propriétaire » : – à la date du paiement subrogatoire, pour le factor subrogé, – à la date du bordereau de cession, pour le factor cessionnaire. Dans les deux cas, le transfert est, à ces dates, opposable à l’égard de tous et notamment à l’égard du débiteur dés lors qu’il en a été informé dans les formes prévues par l’article R 313-15 en cas de cession DAILLY et dans les formes prévues à l’article R 312-16 en cas de contrat d’affacturage. La créance d’Armat France sur l’opération […] ayant été cédée dès le 19 juin 2015 à la Banque du bâtiment et des Travaux publics à hauteur de la somme de 229.937 €, celle sur l’opération Suresnes ayant été cédée dès le 26 août 2015 à Bnp Paribas Factor à hauteur du montant total du marché, et celle sur l’opération […] ayant été cédée dès le 23 septembre 2015 à Bnp Paribas Factor à hauteur du montant total du marché, soit 333.316,16 € HT, étaient sorties du patrimoine d’Armat Franc la saisie attribution du 15 octobre 2015, qui n’a pu les appréhender, […] ne restant plus rien devoir à Armat France au titre de ces factures. La créance d’Armat France sur l’opération […] a été cédée avant le 22 octobre 2015, date de sa notification à […], à Bnp Paribas Factor à hauteur du montant de 420.709,20 € TTC. L’acte de saisie attribution emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie ; il en résulte que la saisie attribution d’une créance à exécution successive pratiquée à l’encontre de son titulaire avant la survenance d’une cession poursuit des effets sur les sommes échues en vertu de cette créance après ledit acte même inopposable au saisissant. Il appartient donc à […] de prouver que la cession est antérieure à la saisie du 15 octobre 2015. Mais en tout état de cause, le montant de la cession des trois autres créances dépasse le montant des factures dont la SAS revendique la saisie, y compris le montant de 67.611,92 € représentant les factures du 9 octobre 2015 de 42.068,12 € dont 27.990,24 € pour Sabea » et du 4 novembre 2015 de 44.433,60 € dont 39.621,38 € pour Sabea dont la SAS affirme qu’elles étaient exclues de la cession du chantier Malakoff. C’est donc à juste titre que le premier juge a estimé que les sommes revendiquées étaient indisponibles à la date de la saisie comme n’étant plus dans le patrimoine du débiteur saisi. Au visa des articles L 211-2 et L 211-3 du code des procédures civiles d’exécution visés par SAS au soutien de ses demandes, la condamnation de […] à payer la moindre somme au titre des saisies attributions des 15 octobre et 24 novembre 20150 ne peut intervenir que dans le cadre de l’article R 211-5 du même code qui implique, – soit qu’elle n’ait pas fourni à l’huissier les renseignements prévus à l’article L 211-3 du code de procédure civile et doive payer les causes de la saisie, – soit qu’elle ait commis des négligences fautives ou qu’elle soit à l’origine de déclarations inexactes ou mensongères et doive payer des dommages et intérêts. Or, le premier juge de l’exécution a exactement relevé que […] a fourni une réponse à l’huissier saisissant et ne peut être en conséquence condamnée aux causes de la saisie et qu’en outre elle n’était effectivement débitrice d’aucune somme à l’égard de la société Armat France, et en conséquence, les réponses qu’elle a fournies à la société SAS ne peuvent être considérées comme incomplètes, inexactes ou mensongères, la question du protocole signé le 26 octobre 2015 entre […], Armat et Sabea aux termes duquel […] devait payer Sabea pour le compte d’Armat étant in fine sans incidence, même si la saisie attribution prévaut sur les protocoles de paiement pour compte. La demande de dommages et intérêts pour manquement du tiers saisi à son obligation de concours doit donc être rejetée. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la SAS de toutes ses demandes en paiement (arrêt p.6 à 11) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT QUE la lecture des courriers intitulés « notification marché » adressés par BNP Paribas Factor à la société […] indiquent expressément que les cessions ont été faites « dans les conditions prévues aux articles L. 313-23 à L.313-34 du code monétaire et financier », lesquels régissent les cessions et nantissements dits « Dailly » et rappellent (sauf pour la notification relative au marché « […] » qui est incomplète mais qui est manifestement constituée sur le même modèle que les précédentes), que conformément aux dispositions de l’article L.313-28 du code monétaire et financier, tout paiement au titre de cette créance à Armat France doit être cessé à compter de la réception de la notification. La référence aux textes régissant les cessions et nantissements « Dailly » doivent conduire à considérer que ce sont bien des cessions « Dailly » qui ont été notifiées à […]. Le fait que BNP Paribas ne revendique pas d’antériorité sur les créances en cause ne constitue pas une preuve de ce que les cessions intervenues ne seraient pas des cessions « Dailly ». En conséquence, en application des règles de type « Dailly », et singulièrement de l’article L.313-27 du code monétaire et financier, il faut considérer que les créances concernant les opérations « […] » et « […] » étaient sorties du patrimoine de la société Armat France dès avant la première saisie-attribution, et qu’en conséquence, elles ne pouvaient pas être saisies entre les mains de la société […], puisqu’indisponibles. En ce qui concerne les créances relatives au marché « […] », la date de leur cession à BNP Paribas Factor n’est pas connue, mais il est certain que cette cession était déjà intervenue lorsqu’elle a été notifiée à la société […] le 22 octobre 2015 (jugement p. 12) ;

ALORS, d’une part, QUE dans le cas de l’affacturage, la subrogation opère le transfert de la créance entre les parties, laquelle ne se produit que dans la mesure exacte du paiement de la créance par la banque ; que dans le cas de la cession Dailly, la seule remise du bordereau entraîne de plein droit le transfert de la propriété des créances du cédant ; qu’en affirmant, au seul constat du libellé des actes de notification par la société BNP Paribas Factor à la société […] des cessions de créances de la société Armat France, que ces cessions étaient de type Dailly, sans examiner les stipulations du contrat d’affacturage du 14 avril 2010 conclu entre la société Armat France et la société BNP Paribas Factor, dans le cadre duquel s’étaient effectuées ces cessions de créances, lesquelles relevaient aux termes de ce contrat de la technique classique de l’affacturage, et non de la cession Dailly, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103 et 1346-1 du code civil (anciennement 1134 et 1250 du même code) et de l’article L.313-23 du code monétaire et financier ;

ALORS, d’autre part, QUE le juge ne peut dénaturer le sens de la convention conclue par les parties ; qu’en affirmant que les cessions de créances de la société Armat France sur la société […] au profit de la société BNP Paribas Factor étaient de type Dailly quand le contrat d’affacturage du 14 avril 2010 conclu entre les sociétés Armat France et BNP Paribas Factor précisait expressément, dans son article V, que le transfert des créances s’opérait à la suite d’un paiement subrogatoire, « conformément aux dispositions de l’article 1250, alinéa 1, du code civil », ce qui établissait que les cessions de créances avaient la nature d’opérations d’affacturage et non d’opérations Dailly, la cour d’appel a dénaturé le sens de la convention du 14 avril 2010 et a violé l’article 1192 du code civil ;

ALORS, enfin, QUE dans ses conclusions d’appel (signifiées le 17 septembre 2018, p. 24 al. 9), la société SAS faisait valoir qu’il ne pouvait être retenu que la société BNP Paribas Factor avait la qualité de cessionnaire Dailly, alors que celle-ci ne revendiquait pas cette qualité ; qu’en considérant que la société BNP Paribas Factor avait la qualité de cessionnaire Dailly, sans répondre à ces écritures qui éclairaient la volonté des parties sur le sens du contrat d’affacturage, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

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