Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 mai 2021, 19-18.500, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

COMM.

CM

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus ancien

faisant fonction de président

Arrêt n° 413 F-D

Pourvoi n° B 19-18.500

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 MAI 2021

1°/ M. [L] [Y], domicilié [Adresse 1], agissant tant en son nom personnel qu’en qualité d’ayant droit de [F] [Y],

2°/ M. [R] [Y], agissant en qualité d’ayant droit de [F] [Y], domicilié [Adresse 2],

3°/ la société Calypso, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],

4°/ Mme [B] [Y], domiciliée [Adresse 2],

5°/ M. [C] [Y], domicilié [Adresse 2],

6°/ M. [Q] [Y], domicilié [Adresse 2],

tous trois agissant en qualité d’ayants droit de [F] [Y],

ont formé le pourvoi n° B 19-18.500 contre l’arrêt rendu le 17 janvier 2019 par la cour d’appel d’Amiens (chambre économique), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [N] [P], domicilié [Adresse 4], pris en sa qualité de président et associé de la société Myrdhin,

2°/ à la société Crédit du Nord, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5],

3°/ à la société [Personne physico-morale 1], société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Myrdhin,

4°/ à Mme [S] [J]Herbette, épouse [S], domiciliée [Adresse 7],

5°/ à M. [W] [X], domicilié [Adresse 8],

6°/ à la société HSBC France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 9],

défendeurs à la cassation.

M. [P] et la société [Personne physico-morale 1] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l’appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l’appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de MM. [L], [R], [C] et [Q] [Y] et de Mme [B] [Y] et de la société Calypso, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M. [P] et de la société [Personne physico-morale 1], de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Crédit du Nord, et après débats en l’audience publique du 16 mars 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Amiens, 17 janvier 2019), selon un protocole du 27 décembre 2007, M. [L] [Y] et la société Calypso ont cédé à la société Myrdhin, dirigée par M. [P], les actions qu’ils détenaient dans le capital des sociétés Herbette, [Personne physico-morale 2]Herbette couverture, [Personne physico-morale 3], Herbette plomberie, Blondin Roussel SN, Adelec 60, Menuiserie du Thère, [Personne physico-morale 4] et Entreprise nouvelle Poirier.

2. Les enfants de M. [L] [Y], Mme [V] et MM. [R], [C] et [Q] [Y], son épouse [F] [Y], ainsi que Mme [S] et M. [X], ont également cédé les actions qu’ils détenaient dans le capital de ces sociétés, sans avoir pour autant été parties au protocole.

3. Pour financer cette acquisition, la société Myrdhin a contracté deux emprunts auprès des banques Crédit du Nord et HSBC.

4. A la suite de la découverte d’anomalies comptables au sein des sociétés du « groupe Herbette » par le commissaire aux comptes au début de l’année 2008 et de la mise en oeuvre, par M. [P], de la garantie de passif assortissant la cession, M. [L] [Y], la société Calypso et la société Myrdhin sont convenus, selon un protocole d’accord du 4 juillet 2008, d’une réduction du prix de cession.

5. Par un jugement du 25 juillet 2008 et par des jugements prononcés entre les mois de septembre et décembre 2008, la société Myrdhin et les sociétés du « groupe Herbette » dont elle avait acquis les actions ont été mises en redressement puis en liquidation judiciaires.

6. La société [Personne physico-morale 1], liquidateur judiciaire de la société Myrdhin, et M. [P] ont assigné la société Calypso, M. [L] [Y], son épouse et ses enfants, ainsi que Mme [S] et M. [X], notamment en annulation de la cession des actions pour dol.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

7. M. [L] [Y], agissant tant en son nom personnel qu’en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], la société Calypso, Mme [V] et MM. [R], [C] et [Q] [Y], agissant en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], font grief à l’arrêt d’annuler les cessions conclues le 27 décembre 2007, selon tableau des cessions, d’ordonner la restitution des titres aux cédants, de condamner la société Calypso, Mme [S], M. [X], Mme [V] et MM. [W], [C], [R] et [L] [Y], en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], Mme [V] et MM. [W], [C], [R] et [L] [Y], chacun à titre personnel, à payer certaines sommes à la société Myrdhin et à M. [P], avec intérêts et capitalisation, de condamner in solidum M. [L] [Y], la société Calypso, Mme [S] et M. [X], ces derniers dans la limite de 5 000 euros chacun, à payer à M. [P] la somme de 50 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral et de rejeter leurs demandes, alors :

« 1°/ que le dol implique l’intention de tromper ; que le dol ne résulte pas du seul constat d’irrégularités comptables et fiscales commises par le cédant, antérieurement à la cession si ces anomalies n’ont pas été délibérées et faites intentionnellement pour tromper le cessionnaire ; qu’en se bornant à relever, pour annuler les cessions litigieuses, que les cédants avaient commis un certain nombre d’irrégularités comptables et fiscales, des malversations et une fraude caractérisée aux règles fiscales, ce qui avait eu pour effet de donner des sociétés cédées une image fausse, sans rechercher si ces irrégularités étaient intentionnelles de la part des cédants et destinées à tromper les cessionnaires, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1116 du code civil, devenu 1137 du même code ;

2°/ que le dol n’est une cause de nullité de la convention que si les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ; qu’en se bornant à relever, pour annuler les cessions litigieuses, que M. [Y] avait commis un certain nombre d’irrégularités comptables et fiscales, des malversations et une fraude caractérisée aux règles fiscales, ce qui avait eu pour effet de donner des sociétés une image fausse, sans rechercher si les cessionnaires n’auraient pas acquis les actions s’ils avaient connu la réalité de la situation des sociétés acquises, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1116 du code civil, devenu 1137 du même code ;

3°/ que le dol n’est une cause de nullité de la convention que si les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ; que la cour d’appel a constaté que les cessionnaires avaient été alertés par leur propre conseil sur la situation des sociétés, l’insuffisance des documents transmis, le mode de gestion et l’existence même des actifs, mais qu’ils avaient néanmoins poursuivi leur projet ; qu’en annulant cependant les cessions pour dol, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article 1116 du code civil, devenu 1137 du même code. »

Réponse de la Cour

8. Après avoir énoncé qu’en application de l’article 1116 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans elles, l’autre partie n’aurait pas contracté et relevé qu’aux termes du protocole du 27 décembre 2007, M. [L] [Y] avait déclaré qu’aucune des sociétés n’était en état de cessation des paiements et que les comptes annuels, réguliers et sincères, donnaient une image fidèle de la situation financière et des résultats de chaque société à la date de clôture, l’arrêt retient qu’il ressort des éléments de la vérification fiscale opérée sur les trois exercices antérieurs à la date de référence des cessions, du rapport du commissaire aux comptes du mois de février 2008, de celui du liquidateur judiciaire de la société Blondin Roussel du 24 septembre 2008 et des éléments de comptabilité reconstitués par le mandataire ad hoc, que le chiffre d’affaires de la société Herbette avait été systématiquement et artificiellement gonflé par la passation en « ventes » d’acomptes reçus au titre de chantiers non commencés, que la comptabilité de cette société présentait des factures fictives, des doubles factures, des surfacturations ou des doubles règlements pour une même facture et que des paiements avaient été effectués en faveur de personnes physiques tierces à la relation contractuelle visée par la facture correspondante. Il retient également que les produits d’exploitation de la société Blondin Roussel avaient été artificiellement majorés par de fausses facturations ou, inversement, minorés par la facturation de nombreux chantiers exécutés au profit personnel de M. [Y] sur des bases inférieures au prix de revient et que ses charges comprenaient des sommes versées à une société dirigée par M. [Y] en dehors de toute convention, cependant que ces paiements étaient intervenus dans des conditions manifestement anormales. Il retient ensuite que la société Entreprise nouvelle Poirier avait acquitté des sommes conséquentes au profit de sociétés contrôlées par M. [Y], sans contreparties avérées, et que, pour retenir la responsabilité de M. [Y] dans l’insuffisance d’actif de la société Nouvelle Duclos, le tribunal de commerce avait relevé que la comptabilité de cette société présentait des doubles facturations. Relevant que la matérialité de ces malversations n’est pas contestée par M. [Y], l’arrêt retient que l’importance des fraudes opérées à la fois pour présenter une image fausse de la situation des entreprises et pour dissimuler des détournements au profit de particuliers est suffisamment illustrée par la rectification de l’administration fiscale qui a mis à la charge de la société Herbette des pénalités pour fraude délibérée. Il relève encore que la baisse importante de la marge de la société Herbette au cours du dernier trimestre 2007, la fonte de sa trésorerie et l’aggravation du solde débiteur des sociétés Blondin Roussel et Nouvelle Duclos, qui, en dehors de la société Herbette, représentaient l’essentiel de l’activité et du résultat du groupe, n’ont pas suscité la moindre information ou explication lors de la conclusion des contrats de cession. Il relève en outre que les dates de cessation des paiements des sociétés Blondin Roussel et Nouvelle Duclos ont été fixées judiciairement au 31 mars 2007 pour la première et au 30 juin 2007 pour la seconde et retient que toutes les sociétés étaient de fait en état de cessation des paiements avant les cessions. Il retient enfin que si M. [P] avait poursuivi son projet d’acquisition, cependant qu’il était informé, par le cabinet EAG, que le mode de gestion de l’entreprise ne permettait pas d’analyser la pertinence des comptes présentés, il ne pouvait pas imaginer que les factures passées en comptabilité étaient pour certaines fausses, pour d’autres doublées, ou pour d’autres acquittées en faveur d’un tiers à la relation contractuelle apparente, les comptes de résultat et les bilans communiqués ne permettant pas de déceler les falsifications qui, opérées de manière habituelle, ne nuisaient pas à leur cohérence apparente. Il en déduit que les diligences du cabinet EAG n’étaient pas de nature à informer le cessionnaire sur le système frauduleux entachant l’ensemble de la gestion des sociétés dont il projetait d’acquérir les actions.

9. En l’état de ces motifs, faisant ressortir l’intention dolosive des cédants et le caractère déterminant de l’erreur provoquée par leurs agissements, la cour d’appel, qui a procédé aux recherches invoquées par les première et deuxième branches, a pu, sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations, déduire que le dol était caractérisé.

10. Le moyen n’est donc pas fondé.

Mais sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

11. M. [P] et la société [Personne physico-morale 1], ès qualités, font grief à l’arrêt de condamner la société Calypso, Mme [S], M. [X], Mme [V] et MM. [W], [C], [R] et [L] [Y], en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], Mme [V] et MM. [W], [C], [R] et [L] [Y], chacun à titre personnel, à payer certaines sommes à la société Myrdhin et à M. [P], avec intérêts et capitalisation, alors :

« 1°/ qu’en vertu de l’effet rétroactif attaché à l’annulation d’un contrat, les parties doivent être remises dans l’état qui était le leur antérieurement à l’annulation ; qu’il résulte des constatations de la cour d’appel jointes aux articles III et IV du protocole d’accord du 27 décembre 2007 que le montant total des cessions de M. [L] [Y] à la SAS Myrdhin s’élevait à la somme de 468 323 euros ; que le montant total des cessions de la Sarl Calypso à la SAS Myrdhin s’élevait à la somme de 2 199 325 euros ; que le montant total des cessions de Mme [B] [Y] et MM. [Q], [C] et [R] [Y] s’élevait, pour chacun, à la somme de 149 952 euros et que le montant total des cessions d'[F] [Y] s’élevait à la somme totale de 86 762 euros ; qu’en prononçant des restitutions comme elle le fait, même en tenant compte de la réduction du prix dans le protocole transactionnel conclu le 4 juillet 2008 à hauteur de 896 000 euros, la cour d’appel ne pouvait, sans dénaturer les articles III et IV du protocole ci-dessus visé, en violation de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, condamner M. [L] [Y] à restituer une somme supérieure à celle qu’il avait reçue et condamner les autres défendeurs, notamment la société Calypso, à restituer des sommes manifestement inférieures à celles reçues ;

2°/ qu’en condamnant Mme [S] à payer à la société Myrdhin la somme de 3 700 euros à titre de restitution, après avoir constaté que celle-ci n’étant pas partie au protocole transactionnel devait restituer le prix perçu ab initio et qu’il résulte des constatations de la cour qu’elle avait cédé 370 actions de la SAS [Personne physico-morale 3] quand l’article III du protocole d’accord du 27 décembre 2007 fixait le prix de cession à 19 euros l’action, ce qui entraînait la restitution d’une somme de 7 030 euros, telle que déterminée dans l’article IV dudit protocole relatif au paiement du prix de cession, la cour d’appel a dénaturé ledit protocole en violation de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ qu’en condamnant Mme [B] [Y] et MM. [W], [C] [R] et [L] [Y], en qualité d’ayant-droits d'[F] [Y], à payer à la société Myrdhin la somme de 34 600 euros à titre de restitution, après avoir constaté qu'[F] [Y] n’étant pas partie au protocole transactionnel devait restituer le prix perçu ab initio et qu’il résulte des constatations de la cour qu’elle avait cédé 346 actions de la SAS Menuiserie du Thère, quand l’article III du protocole d’accord du 27 décembre 2007 fixait le prix de cession à 250,75 euros l’action, ce qui entraînait la restitution d’une somme de 86 762,00 euros, telle que déterminée dans l’article IV dudit protocole relatif au paiement du prix de cession, la cour d’appel a dénaturé ledit protocole en violation de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis :

12. Pour condamner M. [L] [Y] à payer à la société Myrdhin la somme de 1 919 592 euros et à M. [P] la somme de 100 euros, la société Calypso à payer à la société Myrdhin la somme de 394 470 euros, Mme [S] et M. [X] à payer chacun la somme de 3 700 euros, Mme [V] et MM. [W], [C], [R] et [L] [Y], ayants droit d'[F] [Y], à payer la somme de 34 600 euros, et Mme [V] et MM. [W], [C] et [R] [Y] à payer, chacun, la somme de 28 400 euros, l’arrêt, après avoir énoncé que l’annulation d’une cession emporte obligation pour le cédant de restituer le prix de cession puis relevé que c’est la somme de 2 469 862 euros qui doit être restituée à la société Myrdhin à concurrence de 2 469 772 euros et à M. [P] à concurrence de 100 euros, retient que cette restitution est à la charge de chaque cédant pour le prix qu’il a perçu, étant observé que Mme [S], M. [X] et [F] [Y], en la personne de ses ayants droit, n’étant pas parties au protocole transactionnel, devront restituer le prix qu’ils ont effectivement perçu initialement.

13. En statuant ainsi, alors que les valeurs nominales des actions prises en compte par la cour d’appel ne sont pas celles mentionnées à l’article 3 du protocole du 27 décembre 2007 et que les montants des condamnations prononcées ne correspondent pas aux prix des cessions mentionnés à l’article 4 de ce protocole, la cour d’appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

Mise hors de cause

14. En application de l’article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause, sur sa demande, la société Crédit du Nord, dont la présence n’est pas nécessaire devant la cour d’appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne M. [L] [Y] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 1 919 592 euros et à M. [P] la somme de 100 euros, en ce qu’il condamne la société Calypso à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 394 470 euros, en ce qu’il condamne Mme [S] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 3 700 euros, en ce qu’il condamne M. [X] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 3 700 euros, en ce qu’il condamne Mme [V] et MM. [W], [C], [R] et [L] [Y], en leur qualité d’ayants droit d'[F] [Y], à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 34 600 euros, en ce qu’il condamne Mme [B] [Y] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 28 400 euros, en ce qu’il condamne M. [Q] [Y] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 28 400 euros, en ce qu’il condamne M. [C] [Y] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 28 400 euros, en ce qu’il condamne M. [R] [Y] à payer à la société Myrdhin, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la somme de 28 400 euros et en ce qu’il statue sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 17 janvier 2019, entre les parties, par la cour d’appel d’Amiens ;

Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Douai ;

Met hors de cause la société Crédit du nord ;

Condamne M. [L] [Y], en son nom personnel et en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], la société Calypso, Mme [V] et MM. [R], [C] et [Q] [Y], en leur nom personnel et en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [L] [Y], en son nom personnel et en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], la société Calypso, Mme [V] et MM. [R], [C] et [Q] [Y], en qualité d’ayant droit d'[F] [Y], et les condamne, en leur nom personnel et en leur qualité d’ayant droit d'[F] [Y], à payer à M. [P] et à la société [Personne physico-morale 1], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Myrdhin, la somme globale de 3 000 euros et à la société Crédit du Nord la somme globale de 1 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un, et signé par lui et Mme Champalaune, conseiller qui en a délibéré, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour MM. [L], [R], [C] et [Q] [Y] et Mme [B] [Y] et la société Calypso

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR annulé les cessions conclues le 27 décembre 2007, selon tableau des cessions, d’AVOIR ordonné la restitution des titres aux cédants, d’AVOIR condamné M. [L] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur la somme de 1 919 592 ?, et à M. [P], celle de 100 ?, la société Calypso à payer à la société Myrdhin la somme de 394 470 ?, Mme [S] à payer à la société Myrdhin la somme de 3700 ?, M. [X] à payer la somme de 3700 ?, Mme et Mrs [V], [W], [C], [R], et [L] [Y], ayants droits d'[F] [Y] la somme de 34.600 ?, Mme et Mrs [V], [W], [C], [R], et [L] [Y], ayants droits d'[F] [Y] à payer, chacun, à la société Myrdhin la somme de 28400 ?, d’AVOIR dit que ces condamnations portaient intérêts au taux légal à compter du 2 février 2010, avec capitalisation, d’AVOIR condamné in solidum M. [L] [Y], la société Calypso, Mme [S] et M. [X], ces derniers à hauteur de 5000 ? chacun à payer à M. [P] la somme 50 000 ?, à titre de réparation de son préjudice moral et d’AVOIR débouté M. [Y], les consorts [Y] et la société Calypso de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QU’aux termes du document intitulé « protocole d’accord annexe à une cession d’actions de sociétés anonyme et de sociétés par actions simplifiées » signé le 27 décembre 2007 et qui constitue le seul instrumentum accompagnant les cessions dont ni la réalité ni l’objet, ni le prix ne sont contestés, le cédant, à savoir M. [Y] agissant personnellement et au nom de la société Calypso a déclaré notamment que : – l’ensemble des registres légaux obligatoires de chaque société sont conformes et reflètent une image fidèle, juste et complète de chaque société ; les conventions ou accords passés entre les sociétés et leurs dirigeants et associés détenant 10 % des droits de vote au moins, directement ou indirectement, ont été conclus à des conditions normales, – aucune des sociétés n’est en état de cessation des paiements, – les comptes annuels ont été établis conformément aux principes comptables appliqués de façon cohérente ; ils sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle de la situation financière et des résultats de chaque société à la date de clôture, – les seuls emprunts à long ou moyen terme que chaque société a contractés sont ceux figurant le cas échéant au dernier bilan arrêté par elle, – toutes les déclarations obligatoires fiscales, douanières et en matière de sécurité sociale ont été faites en temps requis par chaque société qui s’est acquittée des impôts, taxes, droits et charges exigibles ; qu’il ressort des éléments de la vérification fiscale opérée sur les trois exercices antérieurs à la date de référence des cessions (30 septembre 2007), du rapport du commissaire aux comptes du mois de février 2008, de celui de maître [A], liquidateur judiciaire de la société Blondin Roussel du 24 septembre 2008 et des éléments de comptabilité reconstitués par maître [L] mandataire ad hoc, que : – la comptabilité de l’ensemble des sociétés concernées par la cession était irrégulière, fausse et qu’elle ne donnait pas une image fidèle de leur situation, le principe de séparation des exercices comptables n’étant pas respecté ; que le chiffre d’affaires de la SA Herbette était systématiquement et artificiellement gonflé par la passation en « ventes » des acomptes reçus sur des chantiers non commencés alors que les sommes correspondantes s’analysaient en dettes pour l’entreprise concernée ; que les écritures comptables correspondantes ne tenaient aucun compte des frais afférents à l’obtention de ces marchés et acomptes ; que la comptabilité incluait des factures totalement fictives, des doubles factures, des sur-facturations ou des doubles paiements pour une même facture, des paiements étant opérés en faveur de personnes physiques tierces à la relation contractuelle visée par la facture correspondante ; qu’ainsi, la société Herbette avait versé à la Sci Matou un loyer de 40 500 ? HT pour un bâtiment dans lequel elle n’avait entreposé qu’un chariot ; qu’elle avait acquitté la somme de 9 800 euros pour rémunérer le chauffeur personnel de M. [Y] avec lequel elle n’avait aucun lien de droit ; – qu’à la suite d’un contrôle opéré au mois d’octobre 2007 chez un de ses sous-traitants, la société Herbette avait fait l’objet le 16 novembre 2007 d’un redressement de l’URSSAF pour travail dissimulé ; que si un courrier en date du 22 février 2008 d’un avocat de M. [Y] mentionne que M. [P] avait été informé de ce contrôle et du placement en garde-à-vue de M. [Y] à cette occasion, il n’apparaît pas que l’intéressé ou la société Myrdhin ait été informée du redressement qui s’en est suivi ; que les produits d’exploitation de la société Blondin Roussel société nouvelle (société de construction de maisons individuelles) étaient de même artificiellement majorés par des facturations fausses ou bien inversement minorés par la facturation de nombreux chantiers exécutés au profit direct ou indirect de monsieur [Y] sur des bases inférieures au prix de revient ; que les charges de cette société comprenaient des sommes versées à la Sci Malou notamment au titre d’un droit de chasse pour 40 000 ?, d’un loyer concernant un local à Conteville que la société n’occupait pas mais qui était occupé par la société Duclos ; que ces divers paiements qui profitaient à tout le moins indirectement à M. [Y] associé et dirigeant de la Sci Malou ne faisaient pas l’objet d’une convention approuvée alors même qu’ils intervenaient dans des conditions manifestement anormales ; que la société Poirier avait acquitté les sommes de 47 000 ? et 94 000 ? au profit des sociétés Pasquier et fils et Peronnet contrôlées par M [Y], sans contreparties avérées ; – que le tribunal de commerce de Dieppe dans un jugement de 2013 désormais définitif relevait que la comptabilité de la société Duclos présentait des doubles facturations pour retenir la responsabilité de M. [Y] dans l’insuffisance d’actif de cette entreprise ; que la matérialité des malversations citées, relatives à la période antérieure au 30 septembre 2007 sur laquelle la cessionnaire n’avait à l’évidence aucune maîtrise, n’est pas contestée par M. [Y] ni même d’ailleurs expliquée ; que l’importance des fraudes opérées à la fois pour présenter une image fausse de la situation des entreprises et pour dissimuler des détournements au profit de particuliers, est suffisamment illustrée par la rectification fiscale qui met par ailleurs à la charge de la société Herbette des pénalités pour fraude délibérée ; que de plus, le rapport du commissaire aux comptes en date du 25 février 2008 a révélé qu’au cours du dernier trimestre 2007, la société Herbette avait enregistré une baisse importante de sa marge et que sa trésorerie disponible avait anormalement fondu de 750 000 ? environ malgré l’escompte exceptionnel de deux effets de commerce des sociétés Immobat et Malou contrôlées et dirigées par M. [Y] ; que les relevés de comptes bancaires versés aux débats montrent que pendant la même période se sont fortement aggravés le solde débiteur du compte de la société Blondin-Roussel et celui de la société Duclos, ces deux sociétés représentant – en dehors de la SA Herbette elle-même – l’essentiel de l’activité et du résultat du groupe ; qu’il n’est pas contesté que ces éléments nouveaux qui résultent directement de choix délibérés des cédants n’ont pas suscité la moindre information ou explication lors de la conclusion des contrats ; qu’en outre, il est jugé que les sociétés Blondin Roussel et Duclos étaient en état de cessation des paiements plusieurs mois avant les cessions litigieuses ; qu’enfin par des jugements désormais définitifs rendus le 16 octobre 2012 par le tribunal de commerce de Beauvais et le 13 septembre 2013 par le tribunal de commerce de Dieppe à la lecture desquels il est renvoyé, M. [Y] a été condamné au titre de sa responsabilité dans l’insuffisance d’actif des sociétés Herbette, [Personne physico-morale 2]Herbette couverture, [Personne physico-morale 3], Herbette plomberie, Adelec 60, Entreprise nouvelle Poirier, Menuiserie du Thème, Société nouvelle Duclos et société Blondin Roussel à payer la somme totale de 5 621 015,42 ? ; qu’il est ainsi établi que les actes de gestion commis avant les cessions litigieuses sont à l’origine d’une insuffisance d’actif sans commune mesure avec la trésorerie dont disposaient les sociétés concernées à la date des cessions, de sorte qu’ainsi que l’a souligné le mandataire ad hoc, toutes les sociétés du groupe Herbette étaient de fait en état de cessation des paiement avant les cessions ; que contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, les condamnations prononcées à l’encontre de M. [Y] au titre de l’insuffisance d’actif des sociétés cédées sont par nature indifférentes à l’appréciation de la validité des cessions consenties à la société Myrdhin ; que les consorts [Y] et Mme [S] font valoir que les cessionnaires avaient eu accès à l’ensemble de la comptabilité des sociétés et avaient bénéficié d’un audit complet ; que cette assertion est manifestement contraire aux faits étayés ; que s’il est avéré que M. [P] a sollicité le concours du cabinet EAG pour analyser la situation comptable, fiscale et sociale au 30 septembre 2007 des sociétés convoitées le seul pré-rapport fourni quelques semaines avant la cession souligne que la mission ne consiste pas en un audit comptable et financier ; que ce rapport relève que l’absence totale de comptabilité analytique et d’outil de suivi par chantier exclut toute opinion pertinente, que l’importance des relations intra-groupes ne permet pas d’apprécier la performance du groupe sur un exercice en raison de l’absence de comptes consolidés, de conventions écrites, de contrôle budgétaire, de date de clôture distincte pour chaque société, que l’évaluation des actifs n’est pas possible davantage ; qu’en revanche, à partir d’une vérification de la réciprocité des comptes clients et fournisseurs, le cabinet EAG a souligné que la trésorerie réelle était nettement inférieure à celle présentée par les bilans (environ – 315 I<E) et que la prise en compte d’effets escomptés non échus et d’autres décalages de trésorerie tel que le retard de versement de la TVA collectée devait conduire à minorer de 600 000 euros environ la trésorerie nette ; qu’il identifiait une anomalie pour un chantier pour lequel une facture avait été omise et soulignait l’absence de procédure de contrôle interne ; qu’il indiquait aussi que si M. [X] avait élaboré un tableur destiné à établir une facturation en fonction de l’avancement des travaux, les justificatifs n’étaient pas disponibles ; que le volet social ne donnait pas lieu à des avis significatifs ; que le volet fiscal donnait lieu à des remarques mineures ; que le cabinet EAG recommandait à son client de contrôler l’existence des principaux actifs avant d’acquérir et de procéder immédiatement après l’acquisition à une vérification des travaux en cours que les éléments communiqués et plus généralement le mode de gestion des entreprises ne permettaient pas d’apprécier ; qu’il ressort du dossier que les anomalies relevées par le cabinet EAG ont donné lieu à un échange entre M. [P] et M. [X] qui a fourni un certain nombre d’explications ; que Mme [S] fait justement valoir que le rapport du cabinet EAG versé aux débats n’a pas date certaine ; que pour autant, un échange de messages électroniques convainc que le cessionnaire a reçu ces éléments d’analyse quelques semaines avant la conclusion des cessions, le cabinet EAG étant saisi postérieurement au 30 septembre 2007 ; que s’il est manifeste que M. [P] a poursuivi son projet d’acquisition alors qu’il était informé que le mode de gestion de l’entreprise ne permettait pas d’analyser la pertinence des comptes présentés, il ne pouvait assurément pas imaginer que les factures passées en comptabilité étaient pour certaines totalement fausses, pour d’autres doublées, ou pour d’autres encore acquittées en faveur d’un tiers à la relation contractuelle apparente ; que les comptes de résultats et bilans qui lui ont effectivement été communiqués ne permettaient assurément pas de déceler les falsifications qui, opérées de manière habituelle, ne nuisaient pas à leur cohérence apparente ; qu’en outre il est avéré notamment par le rapport du commissaire aux comptes du 25 février 2008 que la situation de trésorerie de l’entreprise s’est très fortement dégradée entre le 30 septembre 2007, date des documents consultés par le cabinet EAG et la date des cessions, sans que les candidats à l’acquisition en aient été informés ; que dans ces circonstances, il est manifeste que les diligences du cabinet EAG n’étaient pas de nature à informer le cessionnaire sur le système frauduleux entachant l’ensemble de la gestion des sociétés visées ; que les consorts [Y] et Mme [S] soutiennent aussi que ce sont à la fois l’inexpérience de M. [P] et ses actes de gestion inadaptés qui sont à l’origine de la déconfiture des sociétés ; que bien que le comportement des parties postérieurement aux cessions litigieuses ne puisse être déterminant de la validité du consentement appréciée à la date de ces cessions, il convient de relever que le mandataire ad hoc a salué le retour à l’orthodoxie comptable et de gestion auquel M. [P] s’est attelé dès le début de l’année 2008 et il ne saurait être reproché à ce dernier d’avoir engagé un nouveau comptable et d’avoir mis fin aux errements en termes de facturation et d’enregistrement comptable dont Mme [S], directrice financière a sans doute eu du mal à se défaire ainsi qu’il ressort de la note qu’elle a adressée à M. [P] le 13 mars 2008 ; que par un courrier du 20 mars 2008, M. [Y] qui était alors informé que monsieur [P] entendait donner suite au rapport du commissaire aux comptes révélant une situation réelle des entreprises non conforme aux informations fournies à l’occasion des cessions, a mis en cause les modalités de gestion mises en place par M. [P] dans des termes et sur un ton qui expriment la difficulté pour le cédant d’admettre que la comptabilité et la gestion des sociétés cédées soient reprises en main par un autre ; qu’il y est fait reproche au cessionnaire d’avoir fourni les documents comptables au commissaire aux comptes ; qu’il y est dénoncé un défaut de réactivité sur l’étude de nouveaux chantiers, alors que le personnel du service concerné n’avait pas changé ainsi qu’en convient le rédacteur lui-même ; que ce courrier manifeste sans doute aussi une certaine prise de conscience sur les conséquences possibles d’intérêts désormais non automatiquement convergents entre les sociétés cédées et celles dont M. [Y] avait conservé le contrôle ; que dans ce contexte, les locaux de la SA Herbette ont fait l’objet le 29 mars d’un cambriolage dont l’objet manifestement ciblé a été le vol de la comptabilité des trois exercices antérieurs, des serveurs de gestion et des dossiers des principaux fournisseurs ou clients concernés par les malversations découvertes depuis lors ; qu’alors que les éléments de fait que les consorts [Y] avancent pour suggérer une connivence de M. [P] dans la survenance de ce cambriolage sont particulièrement dérisoires (défaut de fonctionnement d’une alarme la veille, délai d’une heure et demie avant l’appel des services de gendarmerie), heurte le simple bon sens l’allégation des consorts [Y] selon laquelle le cessionnaire – qui avait un intérêt évident à sauvegarder la comptabilité et qui s’est empressé de la faire reconstituer – serait à l’origine de ce fait délictueux ; que contrairement à ce que soutiennent encore les consorts [Y], la teneur de la rectification fiscale qui consacre les diverses fraudes mentionnées ci-dessus n’est aucunement imputable au cessionnaire ou au nouveau dirigeant des sociétés du groupe Herbette, M. [P] ; qu’en effet, elle s’appuie sur des travaux de reconstitution réalisés par un mandataire judiciaire indépendant des parties ; qu’en outre, les éléments comptables ainsi reconstitués et corrigés ont donné lieu à des déclarations rectificatives faites par le nouveau dirigeant aux services fiscaux qui ont reconnu leur pertinence mais ont refusé de remettre les pénalités au regard du comportement frauduleux délibéré de l’ancien dirigeant ; que Mme [S] fait valoir que les cessionnaires ne rapportent pas la preuve de manoeuvres dolosives qui lui seraient personnellement imputables ; qu’employée en qualité de directrice administrative et financière de la SA Herbette, Mme [S] supervisait le service comptable dans lequel travaillait M. [X] qui a déclaré que la première s’occupait de la facturation ; que le courrier qu’elle a adressé au mois de février 2008 à M. [P] pour s’inquiéter de retards de facturation et des difficultés prévisibles confirme la teneur effective de sa fonction ; qu’il ressort d’une audition de M. [X] aux services de gendarmerie que M. [Y] – par ailleurs doté, ainsi que la cour le relève, d’une longue expérience en matière de travaux de bâtiment et d’une aisance manifeste dans la relation commerciale – ne pratiquait pas l’outil informatique et n’intervenait pas dans le contrôle de gestion ; que l’adhésion de Mme [S] et de M. [X] aux méthodes de gestion de M. [Y] s’avérait donc un élément indispensable au fonctionnement du système mis en place ; que Mme [S] travaillait par ailleurs pour la société Immobat, principal pourvoyeur d’affaires de la société Herbette ; qu’elle supervisait la comptabilité des autres sociétés Herbette ; qu’elle était associée de la société [Personne physico-morale 3] ; que membre de la famille du créateur historique de la société Herbette dont M. [Y] avait pris les commandes, Mme [S] avait des intérêts personnels étroitement liés à ceux de M. [Y] ainsi qu’il ressort notamment du fait qu’elle a constitué avec M. [Y] et M. [X] la Sci de la Commanderie dont elle a été nommée gérante et qui a acquis au mois de janvier 2008 un immeuble en l’état futur d’achèvement de la société lmmobat contrôlée par M. [Y] ; qu’à cette occasion, Mme [S] s’est engagée, ainsi que M. [X], comme caution personnelle de la Sci à hauteur de la somme de 932 880 euros ; qu’il a été démontré par la vérification fiscale que Mme [S] était l’une des bénéficiaires de chèques (34 000 euros, 5 000 euros) émis par la société Herbette et se rapportant à des sur-facturations opérées par les sociétés MGR Kilic et FOUI ; qu’elle ne pouvait ignorer que des factures des sociétés MGR Kilic et FDM avaient été passées en comptabilité pour des montants supérieurs (de près de 600 000 euros selon la vérification fiscale pour le seul exercice clos en septembre 2006) aux sommes effectivement versées à celles-ci, la différence donnant lieu en partie à des paiements de la SA Herbette à la société [Personne physico-morale 5] (148 000 ? en 2005, 30 000 en 2006) ; qu’elle ne pouvait davantage ignorer que certains chantiers – tel l’installation d’une cuisine au domicile personnel d’un directeur de la société HLM de l’Oise – qui entraînaient nécessairement des coûts pour la SA Herbette, ne donnaient lieu à aucune facturation ; que Mme [S] et M. [X] ont donc activement participé aux fraudes qui ont dissimulé la teneur véritable des cessions litigieuses ; qu’il est ainsi avéré que lors de la signature des cessions, le consentement des cessionnaires a été vicié par un dol imputable aux consorts [Y], à Mme [S] et à M [X] ;

1/ ALORS QUE le dol implique l’intention de tromper ; que le dol ne résulte pas du seul constat d’irrégularités comptables et fiscales commises par le cédant, antérieurement à la cession si ces anomalies n’ont pas été délibérées et faites intentionnellement pour tromper le cessionnaire ; qu’en se bornant à relever, pour annuler les cessions litigieuses, que les cédants avaient commis un certain nombre d’irrégularités comptables et fiscales, des malversations et une fraude caractérisée aux règles fiscales, ce qui avait eu pour effet de donner des sociétés cédées une image fausse, sans rechercher si ces irrégularités étaient intentionnelles de la part des cédants et destinées à tromper les cessionnaires, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1116 du code civil, devenu 1137 du même code ;

2/ ALORS QUE le dol n’est une cause de nullité de la convention que si les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ; qu’en se bornant à relever, pour annuler les cessions litigieuses, que M. [Y] avait commis un certain nombre d’irrégularités comptables et fiscales, des malversations et une fraude caractérisée aux règles fiscales, ce qui avait eu pour effet de donner des sociétés une image fausse, sans rechercher si les cessionnaires n’auraient pas acquis les actions s’ils avaient connu la réalité de la situation des sociétés acquises, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1116 du code civil, devenu 1137 du même code ;

3/ ALORS QUE le dol n’est une cause de nullité de la convention que si les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ; que la cour d’appel a constaté que les cessionnaires avaient été alertés par leur propre conseil sur la situation des sociétés, l’insuffisance des documents transmis, le mode de gestion et l’existence même des actifs, mais qu’ils avaient néanmoins poursuivi leur projet ; qu’en annulant cependant les cessions pour dol, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article 1116 du code civil, devenu 1137 du même code.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour M. [P] et de la société [Personne physico-morale 1]

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné :

— Monsieur [L] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 1.919.592 euros et à Monsieur [P] la somme de 100 euros,

— La société Calypso à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 394.470 euros,

— Mme [S] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 3.700 euros,

— M. [X] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 3.700 euros,

— Madame [B] [Y] et Messieurs [Q], [C], [R] et [L] [Y] ayants droit de [F] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 34.600 euros,

— Mme [B] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros,

— M. [Q] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros, M. [C] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros,

— M. [R] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros ;

AUX MOTIFS QUE l’annulation d’une cession emporte obligation pour le cédant de restituer le prix de cession et pour le cessionnaire de restituer le bien acquis ; que le prix à restituer doit tenir compte de la réduction de prix convenu dans le cadre du protocole transactionnel conclu le 4 juillet 2008 ; qu’à cet égard, seule la somme de 896.000 euros doit être retenue au titre de la réduction du prix nvenu, les autres dispositions du protocole trnsactionnel se rapportant à des accords d’une autre nature que le seul prix de cession ; que dès lors, c’est la somme de 2.469.862 euros (3.365.862 ? 896.000) qui doit être restituée à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire à hauteur de 2.469.762 euros et à Monsieur [P] à hauteur de 100 euros (cette somme étant à la charge de M. [Y] au titre de la cession d’une action de la SA Herbette) ; que cette restitution est à la charge de chaque cédant pour le prix qu’il a perçu, étant observé que Madame [S], Monsieur [X], [F] [Y] en la personne de ses ayant-droits, Madame [B] [Y], Messieurs [W], [C] et [R] [Y], n’étant pas parties au protocole trnsactionnel devront restituer le prix qu’ils ont effectivement perçu ab initio ; que dès lors que le protocole transactionnel ne précise pas la répartition de la réduction du prix opérée entre Monsieur [L] [Y] et la société Calypso, il convient de retenir que le premier ayant été le principal acteur de l’opération de cession et de la transaction, la réduction du prix doit être imputée aux cessions auxquelles il a procédé personnellement ; qu’en conséquence condamnation est prononcée à l’encontre de :

— Monsieur [L] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 1.919.592 euros et à Monsieur [P] la somme de 100 euros,

— La société Calypso à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 394.470 euros,

— Mme [S] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 3.700 euros,

— M. [X] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 3.700 euros,

— Madame [B] [Y] et Messieurs [Q], [C], [R] et [L] [Y] ayants droit de [F] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 34.600 euros,

— Mme [B] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros,

— M. [Q] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros,

— M. [C] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros,

— M. [R] [Y] à payer à la société Myrdhin prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 28.400 euros ;

ALORS DE PREMIERE PART QU’en vertu de l’effet rétroactif attaché à l’annulation d’un contrat, les parties doivent être remises dans l’état qui était le leur antérieurement à l’annulation ; qu’il résulte des constatations de la cour d’appel (p. 39) jointes aux articles III et IV du protocole d’accord du 27 décembre 2007 que le montant total des cessions [annulées] de M. [L] [Y] à la SAS Myrdhin s’élevait à la somme de 468.323 ? ; que le montant total des cessions [annulées] de la Sarl Calypso à la SAS Myrdhin s’élevait à la somme de 2.199.325,00 ? ; que le montant total des cessions [annulées] de Mlle [B] [Y] et MM. [W], [C] et [R] [Y] s’élevait, pour chacun, à la somme de 149.952 ? et que le montant total des cessions [annulées] de [F] [Y] s’élevait à la somme totale de 86.762,00 ? ; qu’en prononçant des restitutions comme elle le fait, même en tenant compte de la réduction du prix dans le protocole transactionnel conclu le 4 juillet 2008 à hauteur de 896.000 ?, la cour d’appel ne pouvait, sans dénaturer les articles III et IV du protocole ci-dessus visé, en violation de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, condamner M. [L] [Y] à restituer une somme supérieure à celle qu’il avait reçue et condamner les autres défendeurs, notamment la société Calypso, à restituer des sommes manifestement inférieures à celles reçues ;

ALORS DE DEUXIÈME PART QU’en condamnant Madame [S] à payer à la société Myrdhin la somme de 3.700 euros à titre de restitution, après avoir constaté que celle-ci n’étant pas partie au protocole transactionnel devait restituer le prix perçu ab initio et qu’il résulte des constatations de la cour qu’elle avait cédé 370 actions de la SAS [Personne physico-morale 3] quand l’article III du protocole d’accord du 27 décembre 2007 fixait le prix de cession à 19 euros l’action, ce qui entraînait la restitution d’une somme de 7.030 ?, telle que déterminée dans l’article IV dudit protocole relatif au paiement du prix de cession, la cour d’appel a dénaturé ledit protocole en violation de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS DE TROISIEME ET DERNIÈRE PART QU’en condamnant Mme [B] [Y] et MM. [Q], [C] [R] et [L] [Y], en qualité d’ayant-droits d'[F] [Y], à payer à la société Myrdhin la somme de 34.600 euros à titre de restitution, après avoir constaté qu'[F] [Y] n’étant pas partie au protocole transactionnel devait restituer le prix perçu ab initio et qu’il résulte des constatations de la cour qu’elle avait cédé 346 actions de la SAS Menuiserie du There, quand l’article III du protocole d’accord du 27 décembre 2007 fixait le prix de cession à 250,75 euros l’action, ce qui entraînait la restitution d’une somme de 86.762,00 ?, telle que déterminée dans l’article IV dudit protocole relatif au paiement du prix de cession, la cour d’appel a dénaturé ledit protocole en violation de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 mai 2021, 19-18.500, Inédit