Cour de discipline budgétaire et financière, Lycée de Jeunes Filles de Grenoble, 22 février 1961

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Sur la décision

Référence :
CDBF, 22 févr. 1961, n° 27
Numéro(s) : 27
Publication : Journal officiel, 11/06/1961, p. 5298 (bref résumé de l'arrêt, anonymisé) Recueil Lebon, 1961, p. 898 (extraits anonymisés).Cahiers de comptabilité publique, n°2. - Centre de publications de l'université de Caen, 1990, p. 34
Date d’introduction : 22 février 1961
Date(s) de séances : 22 février 1961
Textes appliqués :
Loi 48-1484 1948-09-25. Loi 55-1069 1955-08-06. Loi 56-1193 1956-11-26. Décret 1862-05-31 article 5. Décret 1898-08-01. Décret 1945-03-10. Décision 1958-10-23 Cour des comptes. Arrêté 1956-06-20 Ministre des Finances. Arrêté 1956-07-20 Ministre des Finances. Instruction 1950-12-15 Education Nationale. Instruction 1954-05-24 Education Nationale. Réquisitoire 1958-11-24 Procureur Général de la cour des comptes. Avis 1959-09-15 Ministre de l’Education Nationale. Avis 160-07-05 Ministre de l’Education Nationale. Avis 1959-10-27 Ministre des Finances et des Affaires économiques. Avis 1960-08-09 Ministre des Finances et des Affaires économiques. Lettre 1960-10-19 Ministre de l’Education Nationale. Conclusions 1960-02-05 Procureur Général de la République. Conclusions 1960-11-03 Procureur Général de la République.
Identifiant Cour des comptes : JF00077530

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR,

Vu la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948, complétée par les lois n° 55-1069 du 6 août 1955 et n° 56-1193 du 26 novembre 1956, tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l’égard de l’Etat et de diverses collectivités et portant création d’une Cour de discipline budgétaire ;

Vu la décision en date du 23 octobre 1958 par laquelle la Cour des comptes a saisi la Cour de discipline budgétaire d’irrégularités relevées à l’occasion de l’examen des comptes du lycée de jeunes filles de Grenoble ;

Vu le réquisitoire de M le procureur général en date du 24 novembre 1958 transmettant le dossier de la Cour de discipline budgétaire ;

Vu la décision du président de la Cour de discipline budgétaire du 17 décembre 1958 désignant comme rapporteur M THERRE, conseiller référendaire à la Cour des comptes ;

Vu les accusés de réception des lettres recommandées adressées le 18 décembre 1958 aux dames BELLIER et CARACCIO et le 9 février 1960 à M le recteur PARISELLE, les informant de l’ouverture d’une instruction et les avisant qu’ils étaient autorisés à se faire assister, soit par un mandataire, soit par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ;

Vu les avis émis le 15 septembre 1959 et le 5 juillet 1960 par le ministre de l’éducation nationale ;

Vu les avis émis le 27 octobre 1959 et le 9 août 1960 par le ministre des finances et des affaires économiques.

Vu les avis émis par les commissions administratives paritaires compétentes dans leurs séances du 5 janvier 1960, sur communication du dossier faite aux dites commissions en applications de l’article 19 précité ;

Vu la lettre du 19 octobre 1960 par laquelle le ministre de l’éducation nationale fait connaître qu’aucun organisme n’assume à l’égard des recteurs, fonctionnaires nommés en conseil des ministres, les attributions dévolues aux commissions administratives paritaires ;

Vu les conclusions du Procureur général de la République en date du 5 février et du 3 novembre 1960 renvoyant Mmes CARACCIO et BELLIER et M le recteur PARISELLE devant la Cour de discipline budgétaire ;

Vu les accusés de réception des lettres recommandées adressées le 7 novembre 1960 à Mmes CARACCIO et BELLIER et à M le recteur PARISELLE, les avisant qu’ils pouvaient dans un délai de 15 jours prendre connaissance du dossier de l’affaire, soit par eux-mêmes, soit par un mandataire, soit par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ;

Vu les mémoires présentés le 12 décembre 1960 par M le recteur PARISELLE et le 23 décembre 1960 par Me DEFRESNOIS au nom de Mme BELLIER ;

Vu les accusés de réception des lettres recommandées adressées le 3 février 1961 à Mmes CARACCIO et BELLIER et à M le recteur PARISELLE et les invitant à comparaître ;

Vu les autres pièces du dossier et, notamment, les procès-verbaux d’interrogatoire ;

Ouï M THERRE, conseiller référendaire à la Cour des comptes en son rapport ;

Ouï le Procureur général de la République en ses conclusions ;

Ouï les prévenus en leurs explications ;

Ouï, en leur qualité de témoins, M BRUNOLD, ancien directeur général de l’enseignement du second degré, chef de l’inspection générale au ministère de l’Education nationale, M Jean DECLERCQ, administrateur civil à l’Education nationale, M Pierre RENARD, inspecteur général des services administratifs au ministère de l’Education nationale, M Romain PLANDE, inspecteur général de l’instruction publique ;

Ouï M le Procureur général de la République en ses réquisitions ;

Ouï les observations de Mme CARACCIO, de M PARISELLE, de Mme BELLIER et de Me DEFRESNOIS son conseil, qui ont eu la parole les derniers ;

Considérant qu’en application de l’article 5 du décret du 31 mai 1862 sur la comptabilité publique et des dispositions des décrets des 1er août 1898 et 10 mars 1945, l’administration financière des lycées de jeunes filles est confiée à la directrice de l’établissement ; que cette administration, particulièrement en ce qui concerne l’engagement et l’ordonnancement des dépenses, doit se conformer aux règles générales de la comptabilité publique et à l’instruction générale sur l’administration financière et la comptabilité des lycées en date du 15 décembre 1950 complétée par l’instruction du 24 mai 1954 ;

Considérant qu’il résulte des dispositions des articles 42 et 44 de l’instruction générale du 15 décembre 1950 que les dépenses exceptionnelles nécessitées par des installations nouvelles peuvent être réalisées sur des crédits extraordinaires mis à la disposition de l’administration du lycée par décision du ministre de l’éducation nationale après un examen de la demande qui lui en est faite avec toutes justifications à l’appui par l’administration du lycée et par l’autorité académique ; qu’aucune dépense ne peut être engagée à ce titre sans l’ouverture préalable de ces crédits ;

Considérant que la dame CARACCIO, directrice du lycée de jeunes filles de Grenoble, pour assurer l’équipement du nouvel internat dépendant de cet établissement, a passé par entente directe treize marchés d’un montant global de 59 940 265 francs et cinq commandes de matériel représentant une dépense totale de 2 114 105 francs en mars, avril et mai 1956, alors qu’à ces dates aucun crédit n’avait été ouvert par l’administration centrale ; qu’en admettant que l’inspecteur d’Académie ait eu compétence pour accorder une autorisation spéciale d’engagement dans le cas de l’espèce, il est constant que cette autorisation n’a pas été demandée ; que si par les arrêtés ministériels des 20 juin et 20 juillet 1956 les crédits nécessaires au règlement des marchés susvisés ont été mis à la disposition de l’administration du lycée, cette régularisation tardive, que les circonstances d’ailleurs imposaient, et qui entérinait des acquisitions dont l’opportunité n’a pu être utilement discutée, n’a point pour autant fait disparaître les irrégularités commises ; qu’ainsi la dame CARACCIO a personnellement commis une série d’infractions aux règles d’exécution d’un établissement public de l’Etat et tombe de ce fait sous le coup des dispositions de l’article 5 de la loi du 25 septembre 1948 portant création d’une Cour de discipline budgétaire ;

Considérant qu’en dehors et indépendamment de ses fonctions de comptable public, l’intendante d’un lycée doit, selon les dispositions des articles 17 et 119 de l’instruction générale du 15 décembre 1950 modifiée le 24 mai 1954, contrôler l’engagement des dépenses pour s’assurer qu’elles n’excèdent pas les crédits ouverts ; que toutes les commandes doivent être faites par elle-même ou par son intermédiaire au moyen de bons de commande revêtus de sa signature ; que si elle n’agit dans ces actes d’administration que sous l’autorité du chef d’établissement ainsi que le précise l’article 47 de l’instruction générale, il n’en demeure pas moins que l’intendante dispose d’un pouvoir propre pour suspendre le visa d’un bon de commande qui aurait pour effet d’engager une dépense en excédent des crédits ouverts, jusqu’à la délivrance par le chef d’établissement d’un ordre de réquisition ;

Considérant que l’instruction a établi à la charge de la dame BELLIER, intendante, la passation de commandes de divers matériels à des dates antérieures à l’ouverture des crédits correspondant à ces engagements ; que la dame BELLIER n’a usé à aucun moment des pouvoirs dont elle disposait pour tenter de suspendre l’exécution d’opérations, entreprises à l’initiative de sa directrice, mais dont elle ne pouvait méconnaître l’irrégularité ; qu’ainsi la dame BELLIER a personnellement commis une série d’infractions aux règles d’exécution des dépenses d’un établissement public de l’Etat au sens de l’article 5 de la loi du 25 septembre 1948 ;

Considérant qu’aux termes de l’article 186 de l’instruction générale précitée, les marchés de fournitures dont le montant était inférieur à cinq millions de francs devaient être approuvés par le recteur et ne devenaient exécutoires qu’après cette approbation ; que pour les marchés supérieurs à ce chiffre le recteur ne donnait qu’un avis et devait les transmettre au ministre de l’éducation nationale ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’en mars, avril et mai 1956, c’est-à-dire à des dates antérieures à l’ouverture des crédits extraordinaires par l’administration centrale, le sieur PARISELLE, recteur de l’académie de Grenoble, a donné son approbation sans réserve à treize marchés représentant un montant global de 59 940 265 francs ; qu’au surplus quatre de ces marchés, d’un montant supérieur à cinq millions, échappaient à sa compétence ;

Considérant qu’en acceptant de donner son approbation à des marchés dont il ne pouvait ignorer qu’ils n’avaient été précédés d’aucune ouverture de crédit, et en approuvant seul quatre marchés pour lesquels il n’était habilité à donner qu’un avis, le recteur PARISELLE a personnellement commis des infractions aux règles d’exécution des dépenses d’un établissement public de l’Etat au sens de l’article 5 de la loi du 25 septembre 1948 ;

Considérant toutefois qu’il résulte de l’instruction que l’administration centrale de l’Education nationale, et plus spécialement le directeur général de l’enseignement du second degré, avaient, à la fin de l’année 1955, donné les instructions les plus pressantes à la directrice du lycée de Grenoble et à l’autorité académique pour qu’elles assurent l’ouverture de l’internat dès la rentrée de l’année scolaire 1956-1957 ; que celles-ci pouvaient considérer ces consignes comme d’autant plus formelles qu’elles correspondaient à d’évidentes nécessités de service ; que compte tenu de la brièveté des délais qui leur étaient impartis elles étaient en droit de tenir pour assuré que toutes dispositions seraient prises par l’administration centrale pour leur permettre de mener à bien leur tâche en temps utile ; qu’elles ont avec la plus grande diligence établi et adressé à l’administration centrale les programmes d’équipement dont devait être assortie leur demande de crédits extraordinaires ; qu’un premier programme demeurant sans réponse, la directrice du lycée s’est rendue, au début de mars 1956, auprès du chef du bureau compétent, pour en discuter avec lui ; que le programme rectifié qu’elle a fait parvenir à l’administration centrale à la date du 30 mars 1956 tenait compte des observations qui lui avaient été faites à cette occasion et n’excédait pas le montant des crédits dont elle a pu comprendre qu’ils seraient alloués ; qu’au reçu dudit programme l’administration centrale ne lui a notifié aucun désaccord ; que la passation des marchés revêtait un caractère d’urgence, plusieurs mois étant nécessaires pour leur exécution ; que si cette passation avait été subordonnée à l’octroi, intervenu en juin 1956 seulement, des crédits demandés par l’administration du lycée et l’autorité académique, le nouvel internat, selon toutes vraisemblances, n’aurait pu être ouvert à la date qui leur avait été fixée et qui a été respectée ;

Considérant que cet ensemble de circonstances, s’il ne retire pas tout caractère punissable aux infractions relevées à l’encontre des dames CARACCIO et BELLIER et du recteur PARISELLE, constituent pour eux de larges excuses ; que de surcroît, en ce qui concerne la dame BELLIER, il y a lieu de tenir compte de ce que, n’ayant pris sa charge qu’en janvier 1956 il lui était particulièrement difficile de mettre obstacle à l’exécution d’un programme étudié avant son arrivée, et de ce que, n’ayant point participé aux conversations engagées au ministère de l’Education nationale par la dame CARACCIO, elle n’était pas en état de mettre en doute le caractère formel des assurances qui, selon celle- ci, lui avaient été données ; qu’en ce qui concerne le recteur PARISELLE, il y a lieu de tenir compte du fait que, lors de la transmission à sa signature de ceux des marchés qui dépassaient sa compétence, ni la dame CARACCIO, ni les services de l’inspection académique, ni ceux du rectorat n’avaient averti le recteur que l’approbation qui lui était demandée était de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il sera fait une juste appréciation de l’ensemble des circonstances de l’affaire en infligeant à la dame CARACCIO une amende de trois cents nouveaux francs, à la dame BELLIER une amende de dix nouveaux francs et au sieur PARISELLE une amende de deux cents nouveaux francs.

ARRETE :

La dame CARACCIO est condamnée à une amende de 300 NF (trois cents nouveaux francs) ;

La dame BELLIER est condamnée à une amende de 10 NF (dix nouveaux francs) ;

Le sieur PARISELLE est condamné à une amende de 200 NF (deux cents nouveaux francs).

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Cour de discipline budgétaire et financière, Lycée de Jeunes Filles de Grenoble, 22 février 1961