Arrêt Époux Lemonnier, Conseil d'Etat, du 26 juillet 1918, 49595 55240, publié au recueil Lebon

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Résumé de la juridiction

La circonstance que l’accident éprouvé par une personne serait la conséquence d’une faute d’un agent administratif préposé à l’exécution d’un service public, laquelle aurait le caractère d’un fait personnel de nature à entraîner la condamnation de cet agent par les tribunaux judiciaires à des dommages-intérêts, et que même cette condamnation aurait été effectivement prononcée, ne saurait avoir pour conséquence de priver la victime de l’accident du droit de poursuivre directement, contre la personne publique qui a la gestion du service incriminé, la réparation du préjudice subi. Il appartient seulement au juge administratif, s’il estime qu’il y a une faute de service de nature à engager la responsabilité de la personne publique, de prendre, en déterminant la quotité et la forme de l’indemnité par lui allouée, les mesures nécessaires en vue d’empêcher que sa décision n’ait pour effet de procurer à la victime, par suite des indemnités qu’elle a pu ou qu’elle peut obtenir devant d’autres juridictions à raison du même accident, une réparation supérieure à la valeur totale du préjudice subi. Une personne ayant été atteinte, alors qu’elle suivait la rive gauche d’un cours d’eau, d’une balle provenant d’un tir installé sur la rive opposée avec buts flottants sur la rivière, décidé que l’autorité municipale, chargée de veiller à la sécurité des voies publiques, avait commis une faute grave en autorisant l’établissement de ce tir sans s’être assurée que les conditions de l’installation et l’emplacement offraient des garanties suffisantes pour cette sécurité. La commune doit donc être condamnée à payer la réparation intégrale du préjudice subi, sous réserve toutefois qu’elle sera subrogée, jusqu’à concurrence du montant de la condamnation prononcée par le Conseil d’Etat, aux droits qui résulteraient au profit de la victime de l’accident, des condamnations prononcées par les tribunaux judiciaires contre le maire, pris personnellement.

Alloués à dater de l’assignation de la commune devant le tribunal civil, cette assignation étant le premier acte équivalant à une sommation de payer.

Décidé que les délibérations du conseil municipal, contestant à la victime de l’accident, à l’occasion de l’instance introduite par elle devant le tribunal civil contre le maire personnellement et contre la commune, le droit de réclamer à cette dernière la réparation du préjudice subi, ne constituaient pas des décisions administratives de rejet de la demande d’indemnité, pouvant faire courir le délai du recours au Conseil d’Etat.

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Sur la décision

Référence :
CE, 26 juill. 1918, n° 49595 55240, Lebon
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 49595 55240
Importance : Publié au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Dispositif : indemnisation
Identifiant Légifrance : CETATEXT000007637295

Sur les parties

Texte intégral

Vu, 1° sous le n° 49.595, la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour la dame et le sieur Y…, demeurant ensemble à Castres, rue de Strasbourg, le sieur Y… agissant tant en son nom personnel que pour autoriser la dame Y…, son épouse, ladite requête et ledit mémoire enregistrés au Secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, le 27 juillet 1912, et tendant à ce qu’il plaise au Conseil annuler une délibération du 15 juin 1912, par laquelle le Conseil municipal de Roquecourbe a refusé d’accorder aux requérants l’indemnité qu’ils sollicitaient à raison de l’accident dont la dame Y… a été victime en suivant la promenade publique qui longe les rives de l’Agout, à Roquecourbe, le 9 octobre 1910 ;
Vu, 2° sous le n° 51.240, la requête présentée pour la dame et le sieur Y…, agissant comme ci-dessus, ladite requête enregistrée au Secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, le 12 novembre 1912, et tendant à ce qu’il plaise au Conseil, au cas où il estimerait que la délibération du Conseil municipal de Roquecourbe du 15 juin 1912, ne contient pas une décision susceptible de recours, annuler la décision implicite de rejet qui, dans ce cas, résulterait du silence gardé pendant plus de quatre mois par la commune sur la demande d’indemnité dont elle a été saisie ; Vu la loi du 5 avril 1884 ; Vu le décret du 22 juillet 1806 et la loi du 13 avril 1900 ;
Considérant que les époux Y… ont tout d’abord assigné devant le tribunal civil, tout à la fois la commune de Roquecourbe et son maire, le sieur X…, puis personnellement, pour s’entendre condamner à leur payer une indemnité à raison de l’accident dont la dame Y… a été victime ; que la cour de Toulouse, par arrêt du 30 janvier 1913, tout en reconnaissant l’incompétence de l’autorité judiciaire sur les conclusions dirigées contre le maire, a déclaré ce dernier responsable personnellement et l’a condamné à payer aux époux Y… une somme de 12.000 francs pour réparation du préjudice par eux souffert ; qu’il a été formé par le sieur X… contre cet arrêt un recours sur lequel il n’a pas encore été statué par la cour de cassation ;
Considérant que les époux Y… ont, d’autre part, introduit deux pourvois devant le Conseil d’Etat, tendant, tous deux, à la condamnation de la commune de Roquecourbe à leur payer une indemnité de 15.000 francs à raison du dommage résultant de l’accident précité et dirigés, le premier contre la décision du conseil municipal, en date du 15 juin 1912, rejetant leur demande d’indemnité, le deuxième, en tant que de besoin, contre la décision implicite de rejet résultant du silence du conseil municipal au cas où le Conseil d’Etat ne considérerait pas la délibération du 15 juin 1912 comme une décision susceptible de recours ;
Considérant que les deux requêtes susmentionnées n° 49.595 et 51.240, tendent l’une et l’autre aux mêmes fins ; qu’il y a donc lieu de les joindre et d’y statuer par une seule décision ;
Sur la fin de non-recevoir tirée de ce que les consorts Y… se seraient pourvus tardivement contre les décisions leur refusant tout droit à indemnité : Considérant que les délibérations du conseil municipal de la commune de Roquecourbe, en date des 12 mars et 4 juin 1911, contestant aux requérants, à l’occasion de l’instance introduite par eux devant le tribunal civil contre le maire personnellement et contre la commune, le droit de réclamer à cette dernière la réparation du préjudice par eux subi, contiennent seulement l’énoncé des prétentions que la commune entendait soutenir au cours du procès et ne constituaient pas des décisions administratives de rejet des demandes d’indemnité des époux Y…, pouvant faire courir le délai du recours au Conseil d’Etat ; que la première délibération du conseil municipal ayant ce caractère est celle du 15 juin 1912, antérieure de moins de deux mois à l’enregistrement de la requête, le 27 juillet 1912, au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat ; que, par suite, la commune n’est pas fondée à soutenir que cette requête ait été tardivement présentée ;
Sur la fin de non-recevoir tirée par la commune de ce que les époux Y…, ayant obtenu des tribunaux civils, par la condamnation prononcée contre le maire, le sieur X…, personnellement, la réparation intégrale du préjudice par eux subi, ne seraient pas recevables à poursuivre une seconde fois, par la voie d’une action devant le Conseil d’Etat contre la commune, la réparation du même préjudice : Considérant que la circonstance que l’accident éprouvé serait la conséquence d’une faute d’un agent administratif préposé à l’exécution d’un service public, laquelle aurait le caractère d’un fait personnel de nature à entraîner la condamnation de cet agent par les tribunaux de l’ordre judiciaire à des dommages-intérêts, et que même cette condamnation aurait été effectivement prononcée, ne saurait avoir pour conséquence de priver la victime de l’accident du droit de poursuivre directement, contre la personne publique qui a la gestion du service incriminé, la réparation du préjudice souffert. Qu’il appartient seulement au juge administratif, s’il estime qu’il y a une faute de service de nature à engager la responsabilité de la personne publique, de prendre, en déterminant la quotité et la forme de l’indemnité par lui allouée, les mesures nécessaires, en vue d’empêcher que sa décision n’ait pour effet de procurer à la victime, par suite des indemnités qu’elle a pu ou qu’elle peut obtenir devant d’autres juridictions à raison du même accident, une réparation supérieure à la valeur totale du préjudice subi ;
Au fond : Considérant qu’il résulte de l’instruction que la dame Y… a été atteinte le 9 octobre 1910, alors qu’elle suivait la promenade qui longe la rive gauche de l’Agout, d’une balle provenant d’un tir installé sur la rive opposée avec buts flottants sur la rivière ; que l’autorité municipale chargée de veiller à la sécurité des voies publiques avait commis une faute grave en autorisant l’établissement de ce tir sans s’être assurée que les conditions de l’installation et l’emplacement offraient des garanties suffisantes pour cette sécurité ; qu’à raison de cette faute, la commune doit être déclarée responsable de l’accident ; qu’il sera fait une juste appréciation du dommage subi par les époux Y… et dont la commune leur doit réparation intégrale, en condamnant cette dernière à leur payer la somme de 12.000 francs, sous réserve, toutefois, que le paiement en soit subordonné à la subrogation de la commune, par les époux Y…, jusqu’à concurrence de ladite somme, aux droits qui résulteraient par eux des condamnations qui auraient été ou qui seraient définitivement prononcées à leur profit, contre le maire, le sieur X…, personnellement, à raison du même accident, par l’autorité judiciaire ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts : Considérant que le point de départ des intérêts doit être fixé au 3 avril 1911, date de l’assignation de la commune devant le tribunal civil de Castres, assignation qui est le premier acte équivalent à une sommation de payer dont il soit justifié par les époux Y… ;
Considérant que les requérants ont demandé la capitalisation des intérêts, les 6 décembre 1913, 13 mars 1915 et 5 décembre 1916 ; qu’à chacune de ces dates, il était dû plus d’une année d’intérêts ; qu’il y a lieu, par suite, de faire droit auxdites demandes ;
DECIDE : Article 1 – La délibération du conseil municipal de Roquecourbe du 15 juin 1912 est annulée. Article 2 – La commune de Roquecourbe paiera aux époux Y… une indemnité de 12.000 francs, sous la réserve que le paiement en sera subordonné à la subrogation de la commune, par les époux Y…, jusqu’à concurrence de ladite somme, aux droits qui résulteraient pour eux des condamnations qui auraient été ou qui seraient définitivement prononcées à leur profit, contre le maire, le sieur X…, personnellement, à raison du même accident, par l’autorité judiciaire. Article 3 – L’indemnité allouée aux époux Y… portera intérêts au taux légal à compter du 3 avril 1911 ; les intérêts échus seront capitalisés les 6 décembre 1914, 13 mars 1915 et 5 décembre 1916, pour produire eux-mêmes, intérêts à partir desdites dates.
Article 4 – Le surplus des conclusions des requêtes des époux Y… est rejeté. Article 5 – Les dépens seront supportés par la commune de Roquecourbe. Article 6 – Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre de l’Intérieur.

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Textes cités dans la décision

  1. Loi du 13 avril 1900
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