Conseil d'État, 8 novembre 1994, n° 356.190
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Sur la décision
Référence : | CE, 8 nov. 1994, n° 356.190 |
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Juridiction : | Conseil d'État |
Numéro : | 356.190 |
Texte intégral
/? F CONSEIL D’ETAT
[…]
SEANCE DU 8 NOVEMBRE 1994
AVIS
Le Conseil d’Etat (section des finances) interrogé par le ministre des entreprises et du développement économique, chargé des petites et moyennes entreprises et du commerce et de l’artisanat sur
l’application, dans les cas énoncés ci-après, de celles des dispositions de la loi du 27 décembre 1973
d’orientation du commerce et de l’artisanat qui subordonnent à une autorisation administrative préalable les
créations et extensions de magasins de commerce de détail dépassant certains seuils de superficie :
d
1° – L’autorisation prévue par la disposition du 1° de l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973
est-elle requise pour un projet qui consiste, après démolition d’un magasin de commerce de détail atteignant
les seuils de superficie fixés par cette disposition, en la construction au même emplacement, par l’ancien
exploitant, ou par un nouvel exploitant, d’un magasin de même superficie affecté à un commerce de détail de
même nature ou à un commerce de détail de nature différente ?
. 2° – L’autorisation prévue à l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973 est-elle exigée pour un
projet qui tend à réunir sous un même toit, des commerces de détail exploités dans des bâtiments distincts
faisant partie d’un ensemble commercial au sens de l’article 29-1 de la loi du 27 décembre 1973 ?
-2
?: 3° – Pour l’application de l’article 39 du décret du 9 mars 1993 d’après lequel une nouvelle
autorisation est nécessaire pour la réouverture d’un magasin de commerce de détail qui a cessé d’être exploité
-pendant deux ans, ce délai de deux ans doit-il, dans le cas d’un ensemble commercial au sens de l’article 29-1
de la loi du 27 décembre 1973, courir séparément pour la fermeture de chaque magasin ou seulement à compter
de la fermeture du dernier magasin ?
4° – Lorsque l’exploitant d’un magasin de commerce de détail est autorisé à créer en un autre
? un nouveau magasin de commerce de détail après avoir pris l’engagement de désaffecter de toute
utilisation commerciale les anciens locaux, son engagement a-t-il une valeur juridique et, le cas échéant, de
quels moyens dispose l’administration pour le faire respecter, alors que l’autorisation accordée pour la nouvelle
'
création est devenue définitive ?
.
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d’orientation du commerce et de l’artisanat modifiée
el par la loi n° 90-1260 du 31 décembre 1990, la loi n° 93-1 du 4 janvier 1993 et la loi n° 93-122 du
janvier 1993 ;
Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 relatif à l’autorisation d’implantation de certains
magasins de commerce de détail, aux observatoires et aux commissions d’équipement commercial ;
?,
3-
EST D’AVIS :
de répondre aux questions posées dans le sens des observations suivantes :
? ….- -_ ? – ………
I – Sur le premier point de la demande d’avis :
.
Aux termes de l’article 29 de la loi susvisée du 27 décembre 1973 : "Préalablement à l’octroi du
p jis de construire, s’il y a lieu, et avant réalisation, si le permis de construire n’est pas exigé, sont soumis
pour autorisation à la commission départementale d’équipement commercial les projets : "
1°) De constructions nouvelles entraînant création de magasins de commerce de détail d’une
surface de plancher hors oeuvre supérieure à 3 000 mètres carrés, ou d’une surface de vente supérieure à 1 500
mètres carrés, les surfaces précitées étant ramenées respectivement à 2 000 et 1 000 mètres carrés dans les
communes dont la population est inférieure à 40 000 habitants ; '' ;
'
2°) D’extension de magasins ou d’augmentation des surfaces de vente des établissements
commerciaux ayant déjà atteint les surfaces prévues au 1° ci-dessus ou devant les atteindre ou les dépasser par
.. la réalisation du projet, si celui-ci porte sur une surface de vente supérieure à 200 mètres carrés ;
3°) De transformation d’immeubles existants en établissements de commerce de détail dont la
surface de plancher hors oeuvre ou la surface de vente est égale ou supérieure aux surfaces définies au 1° ci-
dessus…« . Par ailleurs, l’article 39 du décret susvisé du 9 mars 1993 prévoit que »la réouverture au public, sur
le même emplacement, d’un magasin de commerce de détail dépassant les seuils de surfaces fixés à l’article 29
…/…
-4-
--J'-'?de la loi susvisée, dont les locaux ont cessé d’être exploités pendant deux ans, est soumise à l’autorisation
.?prévue à l’article 29 susvisé". '
??
Il convient de relever en premier lieu qu’il résulte des termes mêmes des dispositions ci-dessus
rappelées que, s’agissant d’un projet qui a pour objet la reconstruction, à l’emplacement d’installations exploitées
comme magasin de commerce de détail qui ont été démolies, de nouvelles installations toujours exploitées en
commerce de détail et atteignant les seuils de superficie fixés par l’article 29 de la loi, il n’y a pas lieu d’établir
unp distinction entre le cas du projet qui va être réalisé par l’exploitant de l’ancien magasin et le cas du projet
qui va être réalisé par un nouvel exploitant.
En second lieu, il résulte des disposition combinées de l’article 29 1° de la loi précitée du 27
décembre 1973 et de l’article 39 du décret. du 9 mars 1993 que lorsque le projet ne comporte, par rapport à
l’ancien magasin, ni augmentation des surfaces de ventes, ni modification dans la nature du commerce, il ne
peut être regardé comme un projet qui entraîne création d’un magasin de commerce de détail, dès lors que
l’ouverture des nouvelles installations intervient moins de deux ans après la fermeture des installations qui
étaient exploitées dans le bâtiment démoli.
Il résulte en revanche de ce qui précède que lorsque le projet, tout en maintenant des surfaces de vente
identiques à celles de l’ancien magasin est destiné à un commerce d’une nature différente, il doit, pour
l’application du 1° de l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973 être regardé, comme un projet de construction
? nouvelle qui entraîne création, d’un magasin de commerce de détail, et se trouve, de ce fait soumis à
autorisation.
…/…
? ??,
-5
II – Sur le deuxième point de la demande d’avis :
_ D’après l’article 29-1 qui a été ajouté à la loi susvisée du 27 décembre 1973, par celle du
..
31 décembre 1990 :
: "Pour la détermination des seuils de superficie prévus au 1° de l’article 29 ci-dessus, il est tenu
compte de tous les magasins de commerce de détail qui font partie ou sont destinés à faire partie d’un même
'
ensemble commercial.
_
Sont regardés comme faisant partie d’un même ensemble commercial, qu’ils soient ou non situés
dans des bâtiments distincts et qu’une même personne en soit ou non le propriétaire ou l’exploitant, les
magasins qui sont réunis sur un même site et qui :
soit ont été conçus dans le cadre d’une même opération d’aménagement foncier, que celle-ci
' soit réalisée en une ou en plusieurs tranches :
soit bénéficient d’aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l’accès des
divers établissements ; '
soit font l’objet d’une gestion commune de certains éléments de leur exploitation, notamment
?
.
par la création de services collectifs ou l’utilisation habituelle de pratiques et de publicités
commerciales communes ; ' "
-6-
soit sont réunis par une structure juridique commune, contrôlée directement ou indirectement
par au moins un associé, exerçant sur elle une inflûence au sens de l’article. 357-1 de la loi
n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ou ayant un dirigeant de droit ou
de fait commun." ' '
Il résulte des dispositions précitées que lorsqu’un projet tend à réunir sous un même toit des
commerces de détail exploités dans des bâtiments distincts faisant partie d’un ensemble commercial au sens de
l’article 29-1 ci-dessus rappelé de la loi du 27 décembre 1973 ce projet ne peut, pour l’application du 1° de
l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973, être regardé, de ce seul fait, comme un projet de construction
nouvelle entraînant création de magasins de commerce de détail. Par suite, et sauf dans le cas où elle est
requise en application des dispositions du 2° ou du 3° de l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973,
l’autorisation prévue par ledit article 29 ne peut être exigée.
d
.
- Sur le troisième point de la demande d’avis :
,
Dans le cas d’un ensemble commercial tel qu’il est défini par l’article 29-1 de la loi du
27 décembre 1973, la disposition ci-dessus rappelée de l’article 39 du décret du 9 mars 1993 doit s’appliquer séparément pour chacun des magasins de commerce de détail qui font partie de l’ensemble commercial. Par
suite lorsque l’un de ces magasins est resté inexploite pendant au moins deux ans, sa réouverture au public
nécessite une autorisation dès lors que l’ensemble commercial atteint les seuils de superficie prévue par le 1°
de l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973.
IV = Sur le quatrième point de la demande d’avis : :-
Les commissions départementales d’équipement commercial compétentes pour délivrer les
"autorisations prévues à l’article 29 de la loi du 27 décembre 1973 doivent, en vertu de l’article 28 de la même
loi, "statuer dans le cadre des principes définis aux articles 1er, 3 et 4 en prenant notamment en considération
l’offre et la demande globales pour chaque secteur d’activité dans la zone de chalandise concernée, la densité
d’équipement. en moyennes et grandes surfaces dans cette zone, l’effet potentiel du projet sur l’appareil commercial et artisanal de cette zone et sur l’équilibre souhaitable entre les différentes formes de commerces…".
Il apparaît que l’engagement pris par un demandeur d’autorisation de transférer une activité en
cours dans l’établissement à créer ne peut garantir que la désaffectation des anciens locaux de leur utilisation
à des fins de commerce de détail sera toujours suivie d’effet, notamment lorsque ces anciens locaux sont cédés
à des tiers. Dans ces conditions, un tel engagement ne saurait servir utilement de fondement à une autorisation
conditionnelle, et constitue un simple élément d’information dont il appartient à la commission compétente
d’apprécier la valeur en fonction des circonstances de chaque affaire, pour établir si la création demandée peut
?
e autorisée sans nuire aux intérêts protégés par la loi. _
Dans le cas où la commission compétente aurait considéré un tel engagement comme un élément
d’appréciation déterminant, et si cet engagement n’était pas respecté, l’autorisation accordée pourrait être
regardée comme reposant sur un fait matériellement inexact et se trouverait, pour ce motif, entachée d’illégalité.
Un retrait de cette autorisation serait alors possible si les autres conditions requises pour prononcer le retrait
des décisions administratives individuelles créatrices de droits se trouvaient réunies.
signé : Y. GALMOT, Président
S. LEULMI, Rapporteur et R. VILLEQUENAULT, Secrétaire
POUR EXTRAIT CONFORME,
LE SECRETAIRE DE LA SECTION :