Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 9 août 2006, 286107, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu, 1°) sous le n° 286107, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 et 27 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, dont le siège est 52, rue d’Anjou à Paris (75008) ; la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 0503373-3 du 26 septembre 2005 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, a annulé tous les actes de procédure effectués postérieurement au 9 mai 2005 par le Syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc en vue de l’affermage du service public de l’assainissement dans l’aire de sa compétence ;

2°) de mettre à la charge de la société aquitaine gestion urbaine et rurale (AGUR) la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 286108, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 et 27 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, dont le siège est 52, rue d’Anjou à Paris (75008) ; la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 0503374-3 du 26 septembre 2005 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, a annulé tous les actes de procédure effectués postérieurement au 9 mai 2005 par le syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc en vue de l’affermage du service public de la distribution d’eau potable dans l’aire de sa compétence ;

2°) de mettre à la charge de la société AGUR la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu les notes en délibéré présentées le 5 juillet 2006 pour la société AGUR et le 6 juillet 2006 pour la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Marianne Brun, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

— les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Aquitaine gestion urbaine et rurale (AGUR),

— les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables ou connexes ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics, des marchés mentionnés au 2° de l’article 24 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, des contrats de partenariat, des contrats visés au premier alinéa de l’article L. 6148-5 du code de la santé publique et des conventions de délégation de service public./Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement …/ Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès qu’il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu’au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours… ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bordeaux que le syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc a lancé un appel public à la concurrence le 17 septembre 2004, en vue de l’affermage du service public de l’assainissement et de la distribution d’eau potable dans l’aire de sa compétence ; que le comité du syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc a rejeté à deux reprises, le 26 mai 2005, puis le 1er juillet 2005, la proposition du président du syndicat de retenir l’offre de la société AGUR et s’est prononcé en faveur de l’offre de la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX ; que, saisi sur le fondement des dispositions précitées de l’article L. 551-1 du code de justice administrative par la société AGUR, le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bordeaux a, par deux ordonnances du 26 septembre 2005, annulé tous les actes de procédure effectués par le syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc en vue de l’affermage du service public de l’assainissement et de la distribution d’eau potable postérieurement à la transmission du rapport du président du syndicat en date du 9 mai 2005 proposant de prendre la société AGUR comme délégataire et enjoint au syndicat de reprendre la procédure à ce stade dans des conditions propres à assurer l’égalité de traitement des candidats ; que la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX se pourvoit en cassation contre ces deux ordonnances ;

Considérant qu’à l’issue des négociations engagées par le président du syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc avec les quatre entreprises candidates sur le fondement des dispositions de l’article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales, la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX a présenté des offres dont le montant était très inférieur au montant de ses offres initiales ; qu’en jugeant que de telles offres devaient être regardées comme des offres nouvelles et non comme des aménagements des offres initiales et traduisaient de ce fait un manquement par le syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, sans rechercher si la possibilité donnée par le syndicat au cours de la négociation de présenter de nouvelles offres avait méconnu le principe d’égalité entre les candidats, le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bordeaux a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de ses requêtes, la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX est fondée à demander, pour ce motif, l’annulation des ordonnances attaquées ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au titre des procédures de référé engagées par la société AGUR devant le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bordeaux ;

Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX ait bénéficié d’informations privilégiées pour formuler deux nouvelles offres dont le montant était très inférieur au montant de ses offres initiales ; que contrairement à ce que soutient la société AGUR, la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX a justifié la réduction du montant de ses offres ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la baisse du montant des offres de la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX serait révélatrice d’une rupture d’égalité entre les candidats doit être écarté ;

Considérant qu’aux termes du dernier alinéa de l’article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales : (…) l’autorité habilitée à signer la convention engage librement toute discussion utile avec une ou des entreprises ayant présenté une offre. Elle saisit l’assemblée délibérante du choix de l’entreprise auquel elle a procédé. Elle lui transmet le rapport de la commission présentant notamment la liste des entreprises admises à présenter une offre et l’analyse des propositions de celles-ci, ainsi que les motifs du choix de la candidate et l’économie générale du contrat ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l’assemblée délibérante, saisie de la proposition de l’autorité exécutive, invite celle-ci à poursuivre les discussions qu’elle avait engagées avec les entreprises de son choix ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la réouverture des négociations avec les quatre entreprises candidates à laquelle a procédé le président du syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc à la demande du comité syndical ait revêtu un caractère discriminatoire comme le soutient la société AGUR ;

Considérant qu’il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le comité du syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable et d’assainissement de Castelnau-de-Médoc ait jugé les offres de la société AGUR moins intéressantes que celles de la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, délégataire sortant, uniquement sur des critères étrangers au contenu de ses offres ; que par suite le moyen tiré de ce que ce comité souhaitait conclure les nouveaux contrats uniquement avec la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, indépendamment des résultats de la consultation engagée, doit être écarté ;

Considérant qu’il n’appartient pas au juge statuant sur le fondement des dispositions de l’articles L. 551-1 du code de justice administrative d’examiner les moyens autres que ceux relatifs à des manquements à des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des conventions de délégation de service public ; qu’ainsi la société AGUR ne peut utilement soulever le moyen tiré de l’incompétence du comité syndical pour choisir, au terme de la négociation, le futur cocontractant de ce syndicat ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les demandes de la société AGUR présentées devant le tribunal administratif de Bordeaux doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, qui n’est pas, dans les présentes instances, la partie perdante, la somme que la société AGUR demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens; qu’il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de la société AGUR, au titre des mêmes frais, une somme de 3 000 euros ;

D E C I D E :

--------------


Article 1er : Les ordonnances du juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bordeaux en date du 26 septembre 2005 sont annulées.


Article 2 : Les demandes présentées par la société AGUR devant le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Bordeaux sont rejetées.


Article 3 : La société AGUR versera à la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX une somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 4 : Les autres conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, à la société AGUR et au syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable de Castelnau-de-Médoc.

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