Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 5 juin 2009, 295837

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

L’article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales, applicable aux syndicats de communes lors la passation de délégations de service public, dispose que La convention stipule les tarifs à la charge des usagers et précise l’incidence sur ces tarifs des paramètres ou indices qui déterminent leur évolution . Cet article interdisant les conventions qui accorderaient une entière liberté tarifaire au cocontractant, une convention doit en conséquence indiquer les paramètres et indices dont l’évolution détermine les tarifs.

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Sur la décision

Référence :
CE, 7e et 2e ss-sect. réunies, 5 juin 2009, n° 295837, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 295837
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Nancy, 10 mai 2006
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Cf. 5 novembre 2003, Association des consommateurs de la Fontaulière, n° 226671, inédit au Recueil.
Identifiant Légifrance : CETATEXT000020869171
Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2009:295837.20090605

Sur les parties

Texte intégral

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 25 juillet et le 27 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMMUNE DE RICHARDMENIL, représentée par son maire en exercice, ayant son siège 68 rue de Nancy à Richardménil (54630) ; la COMMUNE DE RICHARDMENIL demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt en date du 11 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy l’a condamnée à verser à la Compagnie des Eaux et de l’Ozone, titulaire d’un contrat d’affermage pour la distribution des eaux sur son territoire, une somme de 290 000 euros avec intérêts en réparation du préjudice que celle-ci aurait subi du fait de l’action fautive de la commune ayant conduit à la pollution des eaux distribuées ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter les conclusions de la Compagnie des Eaux et de l’Ozone ;

3°) de mettre à la charge de la Compagnie des Eaux et de l’Ozone la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, Auditeur,

— les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la COMMUNE DE RICHARDMENIL,

— les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la COMMUNE DE RICHARDMENIL ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la COMMUNE DE RICHARDMENIL a conclu, le 15 mai 1997, avec la Compagnie des Eaux et de l’Ozone, un contrat d’affermage pour la gestion du service public de distribution d’eau potable sur son territoire ; que des prélèvements de contrôle de la qualité de l’eau effectués en mai 1999 ayant révélé une teneur excessive en manganèse dans l’eau, le service de distribution a été interrompu et des modes alternatifs d’approvisionnement ont été mis en place par la société jusqu’au 3 décembre 1999 ; que des usagers du service de distribution d’eau ont obtenu devant le tribunal d’instance de Nancy que la Compagnie des Eaux et de l’Ozone soit condamnée à leur verser diverses sommes en réparation des préjudices subis ; que la Compagnie des Eaux et de l’Ozone a alors demandé au tribunal administratif de Nancy que la COMMUNE DE RICHARDMENIL soit condamnée à l’indemniser des divers préjudices qu’elle estimait avoir subis ; que, par un jugement en date du 30 mars 2004, le tribunal a rejeté cette requête ; que la Compagnie des Eaux et de l’Ozone a fait appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Nancy ; que celle-ci a, par un arrêt en date du 11 mai 2006, condamné la COMMUNE DE RICHARDMENIL à verser à la Compagnie des Eaux et de l’Ozone une somme globale de 290 000 euros ; que la COMMUNE DE RICHARDMENIL se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales : La convention stipule les tarifs à la charge des usagers et précise l’incidence sur ces tarifs des paramètres ou indices qui déterminent leur évolution.  ; qu’il ressort des stipulations du contrat d’affermage que la formule de révision des tarifs est prévue à son article 33 et que son article 40 prévoit la révision de cette formule au bout de cinq ans et en cas de survenance de certains événements ; que par suite le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en ne relevant pas d’office la nullité du contrat, au motif qu’il ne prévoirait pas, contrairement aux prescriptions de l’article précité du code général des collectivités territoriales, l’évolution des tarifs dans le temps, ne peut qu’être écarté ;

Considérant que la cour n’a pas dénaturé les stipulations du contrat ou commis d’erreur de droit en admettant que les stipulations de l’article 63 prévoyant que le fermier pouvait exercer les recours de droit commun contre les auteurs de la pollution ne faisaient pas obstacle à ce que la société fermière recherche la responsabilité de la commune à raison des conséquences dommageables de la pollution des eaux, ces stipulations ne concernant que les pollutions causées par l’action de tiers ;

Considérant qu’après avoir relevé que la mauvaise qualité des eaux extraites d’un des puits forés sur le territoire de la commune était connue tant de la commune elle-même que de la société fermière, la cour a pu, sans entacher son arrêt, suffisamment motivé sur ce point, d’une contradiction de motifs, et sans commettre d’erreur de droit, juger que cette circonstance ne suffisait pas à faire regarder la société comme ayant accepté les risques découlant de l’état de ce puits et à lui interdire par suite de rechercher la responsabilité de la commune dans la survenance de la pollution des eaux distribuées, dès lors qu’il résultait des stipulations combinées des articles 26 et 63 du contrat que les travaux de renforcement et d’extension du réseau nécessaires pour assurer la qualité des eaux incombaient entièrement à la commune ; qu’elle n’a pas davantage dénaturé les pièces du dossier ni commis d’erreur de droit en estimant, d’une part, que le fermier n’avait pas manqué à l’obligation d’alerte de la commune sur la détérioration de la qualité des eaux, qui pesait sur lui en vertu de l’article 63 du contrat, d’autre part, que le fermier, qui disposait en vertu des stipulations du même article de la possibilité de se substituer à la commune défaillante pour la réalisation en urgence des travaux nécessaires, n’avait pu, en l’espèce, user de cette faculté, dès lors que les travaux dont le principe avait été arrêté par la commune consistaient à raccorder son réseau à celui d’une autre commune et devaient donc se dérouler en partie sur le territoire d’autres collectivités, et qu’une telle intervention du fermier en dehors du territoire de la commune lui était interdite sur la seule base du contrat dont il était titulaire ; que la cour n’a pas davantage dénaturé les pièces du dossier ou inexactement qualifié de fautive l’abstention de la commune à mettre en oeuvre à temps le raccordement, qu’elle avait décidé, de son réseau à celui d’une commune voisine, malgré la double circonstance qu’elle aurait engagé des études préalables à ce raccordement et que c’est finalement une proposition de raccordement alternative qui a été adoptée sur proposition de la société fermière ;

Considérant que la cour n’a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que la société justifiait des préjudices relatifs à la fourniture de citernes et de bouteilles d’eau aux usagers pendant la période où la distribution normale a dû être interrompue ;

Considérant cependant que l’étendue des réparations incombant à une personne publique liée par un contrat public à une personne privée du fait d’un dommage dont la responsabilité lui est imputée, ne dépend pas de l’évaluation faite par l’autorité judiciaire dans un litige dans lequel cette personne publique n’était pas partie mais doit être déterminée par le juge administratif compte tenu des règles afférentes à la responsabilité des personnes ayant passé un contrat de droit public ; qu’il suit de là qu’en jugeant que la Compagnie des eaux et de l’ozone était fondée à demander la réparation du préjudice résultant des condamnations prononcées à son encontre par le tribunal d’instance de Nancy en réparation des préjudices subis par les usagers du fait de l’interruption du service, la cour n’a pas exercé son pouvoir d’appréciation sur l’étendue de ce chef de préjudice ; que, dès lors, la COMMUNE DE RICHARDMENIL est fondée à demander dans cette mesure l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant qu’en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu pour le Conseil d’Etat, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond dans la limite de cette annulation ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que les préjudices certains et directs subis par les usagers du fait de l’interruption de la distribution d’eau pendant la période courant de mai à décembre 1999, peuvent être évalués à 212 581 euros, comme l’a d’ailleurs jugé le tribunal d’instance de Nancy ; que, par suite, la Compagnie des Eaux et de l’Ozone qui a, en exécution de cette décision de l’autorité judiciaire, versé cette somme aux usagers, est fondée à compter au nombre de ses préjudices l’intégralité de cette somme et à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande à ce titre ; qu’elle a droit aux intérêts de cette somme à compter du 23 mai 2002 ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Compagnie des Eaux et de l’Ozone, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la COMMUNE DE RICHARDMENIL au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy en date du 11 mai 2006 est annulé en tant qu’il a condamné la COMMUNE DE RICHARDMENIL à réparer le préjudice résultant pour la Compagnie des Eaux et de l’Ozone des condamnations prononcées à son encontre par le tribunal d’instance de Nancy en réparation des préjudices subis par les usagers du fait de l’interruption du service de distribution d’eau.


Article 2 : La COMMUNE DE RICHARDMENIL est condamnée à verser à la Compagnie des Eaux et de l’Ozone la somme de 212 581 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2002.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.


Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE RICHARDMENIL et à la Compagnie des Eaux et de l’Ozone.

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