Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 17 juin 2014, 356409, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

VU LA PROCEDURE SUIVANTE :


Procédure devant le Conseil d’État

Par une décision n° 356409 du 20 février 2013, le Conseil d’État statuant au contentieux a admis les conclusions du pourvoi de M. A… B… dirigées contre l’arrêt n° 1 RG 09/00001 du 5 janvier 2012 de la cour régionale des pensions de Bourges en tant que cet arrêt a fixé au 13 avril 2007 le point de départ de la capitalisation des intérêts moratoires dus sur la majoration de sa pension militaire d’invalidité.

Vu :

 – les autres pièces du dossier ;

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code civil ;

— le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Jean-Marie Deligne, maître des requêtes en service extraordinaire,

— les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

CONSIDERANT CE QUI SUIT :

1. M. B… s’est pourvu en cassation contre l’arrêt du 5 janvier 2012 rendu, sur renvoi du Conseil d’État, par la cour régionale des pensions de Bourges. Par sa décision du 20 février 2013, le Conseil d’État a admis les conclusions de ce pourvoi en tant seulement que la cour ne lui a accordé qu’à compter du 13 avril 2007 la capitalisation des intérêts dus sur la majoration de sa pension militaire d’invalidité.

2. M. B… soutient, en premier lieu, que la présence d’un commissaire du gouvernement désigné par le ministre de la défense à l’audience de la cour régionale des pensions de Bourges au cours de laquelle a été examinée l’affaire jugée par l’arrêt qu’il attaque a porté atteinte à son droit à un procès équitable garanti par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

3. Le fonctionnaire qui exerce les fonctions de commissaire du gouvernement devant les juridictions des pensions est une partie représentant l’administration et non un membre de la juridiction. Dès lors, ni sa désignation par le ministre de la défense, ni sa présence à l’audience ne sont de nature, par elles-mêmes, à affecter l’impartialité de la formation de jugement. Le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure suivie devant la cour pour ce motif ne peut donc qu’être écarté.

4. Le requérant soutient, en second lieu, qu’en retenant la date du 13 avril 2007 comme celle de l’enregistrement de sa première demande de capitalisation des intérêts moratoires dus sur la majoration de sa pension, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

5. Aux termes de l’article 1154 du code civil : « Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ». Pour l’application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu’à cette date il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s’accomplit à nouveau à l’expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu’il soit besoin de formuler une nouvelle demande.

6. Il ressort des pièces du dossier soumis à la cour que le premier mémoire par lequel M. B… demandait la capitalisation des intérêts dus sur la majoration de sa pension a été enregistré le 11 août 2003 au greffe du tribunal des pensions du Loiret, qui instruisait alors sa demande. La cour a donc entaché sur ce point son arrêt de dénaturation et le requérant est, par suite, fondé à en obtenir, dans cette mesure, l’annulation.

7. Les autres conclusions présentées par M. B… tendant à l’annulation de l’arrêt du 5 janvier 2012 de la cour régionale des pensions de Bourges méconnaissent l’autorité de la chose jugée par le Conseil d’Etat statuant au contentieux dans sa décision du 20 février 2013, par laquelle il les a rejetées, au motif qu’aucun des moyens soulevés n’était de nature à permettre leur admission. Elles ne peuvent qu’être rejetées.

8. L’article R. 712-1 du code de justice administrative dispose que : « Si le jugement de l’affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l’audience, le sens de ces conclusions sur l’affaire qui les concerne. ». M. B…, qui n’a pas demandé à connaître avant la tenue de l’audience le sens des conclusions du rapporteur public, a demandé que ses conclusions écrites lui soient transmises, pour qu’il puisse, le cas échéant, adresser une note en délibéré, au motif que son état de santé ne lui permettait pas de venir entendre ces conclusions à l’audience. Il ne résulte ni des dispositions précitées de l’article R. 712-1 du code de justice administrative ni du principe du caractère contradictoire de la procédure, rappelé par l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, que les parties devraient avoir communication des conclusions du rapporteur public avant l’audience. Par suite, les conclusions de M. B… tendant à la communication des conclusions du rapporteur public avant l’audience doivent être rejetées.

9. Aux termes du second alinéa de l’article L. 821-2 du code de justice administrative : « Lorsque l’affaire fait l’objet d’un second pourvoi en cassation, le Conseil d’État statue définitivement sur cette affaire ». Il y a lieu, par suite, de régler l’affaire au fond dans la mesure de l’annulation prononcée au point 6 ci-dessus.

10. Il résulte de l’instruction que M. B… a demandé, par un mémoire enregistré le 11 août 2003, la capitalisation des intérêts dus sur sa majoration de pension acquise à titre définitif à compter du 11 avril 2001. À la date du 11 août 2003, les intérêts étaient donc dus pour plus d’une année entière. Par suite, il y a lieu, conformément à ce qui a été dit aux points 4 à 6, de faire droit à cette demande, à la date du 11 août 2003 et à chaque échéance annuelle pour les intérêts échus postérieurement.

D E C I D E :

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Article 1er : L’arrêt du 5 janvier 2012 de la cour régionale des pensions de Bourges est annulé en tant qu’il a fixé au 13 avril 2007 le point de départ de la capitalisation des intérêts moratoires dus sur la majoration de la pension militaire d’invalidité de M. B….

Article 2 : Les intérêts échus à la date du 11 août 2003, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A… B… et au ministre de la défense.

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Textes cités dans la décision

  1. Code civil
  2. Code de justice administrative
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