Conseil d'État, 3ème / 8ème SSR, 20 octobre 2014, 371493

  • Notion de conclusions accessoires·
  • Conclusion à fin d'injonction·
  • Tenue des audiences·
  • Jugements·
  • Procédure·
  • Justice administrative·
  • Commune·
  • Tribunaux administratifs·
  • Protection fonctionnelle·
  • Conclusion

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

En application de l’article R. 711-3 du code de justice administrative, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l’audience, l’ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d’adopter, à l’exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire. Les conclusions présentées à fin d’injonction ne présentent pas un caractère accessoire au regard de l’exigence de communication préalable du sens des conclusions du rapporteur public.

Chercher les extraits similaires

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure

Mme B… A… a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d’une part, d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 5 mai 2010 par laquelle le maire de la commune de Rueil-Malmaison lui a refusé le bénéfice de la protection fonctionnelle et, d’autre part, d’enjoindre à cette commune de lui accorder cette protection sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1005290 du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du maire du 5 mai 2010 et enjoint à la commune d’accorder à Mme A… le bénéfice de la protection fonctionnelle.


Procédure devant le Conseil d’Etat

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 août et 21 novembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune de Rueil-Malmaison demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le jugement n° 1005290 du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la demande de Mme A…;

3°) de mettre à la charge de Mme A… la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Christian Fournier, maître des requêtes,

— les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la commune de Rueil-Malmaison ;

1. Considérant, en premier lieu, qu’il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement ; qu’il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile ;

2. Considérant qu’en l’espèce le tribunal administratif de Cergy Pontoise s’est borné à relever les éléments de fait apportés par Mme A… à l’appui de sa demande, tirés notamment des conclusions provisoires d’une enquête administrative, sur lesquels il s’est fondé pour juger établi le harcèlement moral dont cette dernière se disait victime, sans exposer les motifs pour lesquels il a ainsi écarté l’argumentation présentée en défense par la commune de Rueil-Malmaison ainsi que les conclusions définitives de cette enquête excluant toute qualification de harcèlement moral ; qu’en statuant ainsi, le tribunal administratif a insuffisamment motivé son jugement et commis une erreur de droit ;

3. Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l’affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l’audience, le sens de ces conclusions sur l’affaire qui les

concerne » ; que la communication aux parties du sens des conclusions, prévue par ces dispositions, a pour objet de mettre les parties en mesure d’apprécier l’opportunité d’assister à l’audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu’elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l’appui de leur argumentation écrite et d’envisager, si elles l’estiment utile, la production, après la séance publique, d’une note en délibéré ; qu’en conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l’audience, l’ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d’adopter, à l’exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que cette exigence s’impose à peine d’irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public ;

4. Considérant que les conclusions à fin d’injonction, présentées sur le fondement de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, ne revêtent pas un caractère accessoire pour l’application des dispositions de l’article R. 711-3 du même code ;

5. Considérant qu’il ressort du relevé de l’application « Sagace » que le rapporteur public a porté à la connaissance des parties, le 4 juin 2013, le sens des conclusions qu’il envisageait de prononcer dans les termes suivants : « Annulation pour erreur d’appréciation des faits et 1 000 euros au titre des frais irrépétibles à la charge de la commune » ; que, lors de l’audience publique du 6 juin 2013, le rapporteur public a conclu à ce qu’il soit en outre enjoint, sur le fondement de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, à la commune de Rueil-Malmaison d’accorder à Mme A… le bénéfice de la protection fonctionnelle, sans en avoir informé préalablement la commune de Rueil-Malmaison ; qu’ainsi, cette commune ne peut, dans les circonstance de l’espèce, être regardée comme ayant été mise en mesure de connaître l’ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public comptait proposer au tribunal administratif d’adopter ; que, par suite, en tant qu’il a statué sur les conclusions à fins d’injonction présentées par Mme A…, le jugement attaqué a été rendu au terme d’une procédure irrégulière, alors même que le conseil de la commune de Rueil-Malmaison a été présent à l’audience ;

6. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que la commune de Rueil-Malmaison est fondée à demander l’annulation du jugement attaqué ;

7. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Rueil-Malmaison au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 20 juin 2013 est annulé.

Article 2 : L’affaire est renvoyée au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Rueil-Malmaison au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Rueil-Malmaison et à Mme B… A….

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine

Textes cités dans la décision

  1. Code de justice administrative
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Conseil d'État, 3ème / 8ème SSR, 20 octobre 2014, 371493